Médecine nucléaire: TEP/IRM: l`imagerie hybride de l`avenir

publicité
H i g H l i g H t s 2 011 : M é d e c i n e n u c l é a i r e
TEP/IRM: l’imagerie hybride de l’avenir
Felix P. Kuhn
Klinik für Nuklearmedizin, UniversitätsSpital Zürich
Résumé
Compte du succès que connaît l’utilisation clinique des
appareils de TEP/TDM et des grands progrès réalisés
dans le développement de détecteurs TEP, des systèmes
TEP/IRM sont depuis peu évalués dans plusieurs grandes
cliniques universitaires. L’unité d’imagerie médicale de
l’Hôpital universitaire de Zurich utilise depuis l’automne 2010 un système de TEP/TDM-IRM, qui allie la
TEP/TDM et l’IRM grâce à une table de transfert spécialement développée. L’acquisition séquentielle des données TEP, TDM et IRM et la fusion informatique des
images qui s’en suit permettent de comparer directement les images TEP/IRM avec les images TEP/TDM correspondantes.
TEP/TDM: succès mondial
de l’imagerie hydride
Le succès de l’imagerie hybride, depuis la mise en service
du premier appareil de TEP/TDM mondial à l’Hôpital
universitaire de Zurich en 2001, réside dans l’intégration à la fois de l’anatomie et de la fonction. En permettant un bon repérage anatomique des zones d’hyperfixation du radiotraceur, la TEP/TDM est devenue
un outil précieux dans de nombreux domaines de la
médecine, particulièrement pour évaluer le stade pathologique et la réponse thérapeutique dans les maladies tumorales [1]. Sur le plan technique, la TDM permet une correction rapide et précise des données TEP,
car l’atténuation du rayonnement gamma utilisé par
l’absorption dans le patient peut être calculée à partir
des données TDM. Cette correction est absolument
nécessaire pour l’évaluation quantitative des zones
d’hyperfixation du radiotraceur [2].
TEP/IRM: l’imagerie hybride de l’avenir?
Felix P. Kuhn
L’auteur ne déclare
aucun soutien
financier ni d’autre
conflit d’intérêt en
relation avec cet
article.
Par rapport aux images TDM, les images IRM présentent
un bien meilleur contraste des tissus mous, ce qui est particulièrement utile lors de l’exploration du cerveau et du
foie. En plus de l’anatomie macroscopique, l’IRM offre
également la possibilité d’obtenir des informations sur
les processus au niveau moléculaire. Ainsi, il est par ex.
possible de mesurer la diffusion des molécules d’eau, ce
qui est utile pour détecter des infarctus cérébraux, des
abcès ou des tissus tumoraux. En utilisant des fréquences
de résonance légèrement différentes, l’IRM peut permettre de mesurer la concentration de différentes molé-
cules afin d’obtenir des informations plus précises sur la
composition des tissus (spectrométrie par résonance
magnétique). Dans le cas des tumeurs cérébrales, il
est par ex. possible d’acquérir des informations sur
l’ampleur de la prolifération cellulaire (choline), sur le
métabolisme énergétique (créatine), sur l’hypoxie et la
nécrose (lactate), ainsi que sur l’intégrité des cellules
nerveuses (N-acétylaspartate). Par ailleurs, l’IRM permet de visualiser les vaisseaux sanguins et d’étudier le
flux sanguin sans employer de produit de contraste.
La particularité dans la TEP est que des produits de
contraste en quelque sorte «intelligents» (radiotraceurs)
permettent de visualiser des processus métaboliques
spécifiques ou des récepteurs à la surface des cellules.
Ainsi, les tissus tumoraux peuvent être visualisés au
moyen de molécules d’acides aminés ou de glucose
marquées, le remodelage osseux peut être visualisé au
moyen de fluorure, les troubles moteurs comme en cas
de maladie de Parkinson peuvent être mis en évidence
par des neurotransmetteurs et la perfusion cardiaque
peut être objectivée au moyen d’ammonium. La TEP et
l’IRM sont complémentaires à bien des égards. D’une
part, les altérations structurelles à l’IRM peuvent être
mieux caractérisées par la TEP et d’autre part, les altérations à la TEP peuvent être détectées avant qu’elles
ne donnent lieu à des altérations morphologiques à
l’IRM. Ainsi, il est par ex. possible de détecter les dépôts
conduisant à la maladie d’Alzheimer au moyen d’un traceur TEP spécifique avant que la dégénérescence des
tissus cérébraux ne débute. Etant donné que les altérations au niveau moléculaire surviennent avant les altérations morphologiques, l’effet de médicaments ou d’agents
chimiothérapeutiques peut souvent déjà être évalué peu
après le début du traitement. De cette manière, il est possible d’arrêter rapidement les traitements inefficaces et
d’administrer un autre traitement au patient.
Néanmoins, le couplage de la TEP et de l’IRM est assorti
d’un certain nombre de défis techniques considérables.
La correction de l’atténuation des données TEP, qui a été
mentionnée ci-dessus, ne peut pas directement se faire à
partir des données IRM. Par conséquent, les images IRM
doivent être converties en images pseudo-TDM par le
biais de processus de transformation innovants. Les techniques d’acquisition IRM conventionnelles ne permettent
pas de visualiser les os et actuellement, la représentation
des tissus pulmonaires est elle aussi nettement plus mauAbréviations
IRM: imagerie par résonance magnétique
TDM: tomodensitométrie
TEP: tomographie par émission de positons
Forum Med Suisse 2012;12(1–2):11–12
11
H i g H l i g H t s 2 011 : M é d e c i n e n u c l é a i r e
A
B
Figure 1
En haut: Images TDM et IRM sans produit de contraste. En bas: fusion avec la TEP
au déoxyglucose marqué au 18F. A: Patient avec un cancer de la base de la langue et
des métastases ganglionnaires lymphatiques bilatérales, partiellement nécrotiques.
B: Patient présentant des métastases hépatiques d’un cancer pancréatique.
concepts ont été mis au point et ils sont à présent testés
et peaufinés. Les résultats cliniques obtenus sont actuellement évalués dans différentes études scientifiques.
Les avantages potentiels de la TEP/IRM par rapport à
la TEP/TDM concernent pour l’instant l’imagerie du
cerveau, de la région de la tête et du cou ainsi que du
foie. Souvent, les métastases cérébrales ne peuvent pas
être diagnostiquées par TEP/TDM alors qu’elles peuvent
être détectées avec une grande sensibilité avec l’IRM.
Dans la région de la tête et du cou, les artéfacts liés aux
implants dentaires empêchent souvent une transposition anatomique fiable des données TEP à la TDM, ce
qui peut largement être évité à l’IRM. Par ailleurs, il est
souvent nécessaire de recourir à un produit de contraste
dans la TDM, afin de détecter les ganglions lymphatiques tumoraux nécrotiques, ce qui ne semble pas
absolument indispensable dans l’IRM (fig. 1A x). Au
niveau du foie, il est possible de détecter des métastases
très petites, qui échappent à la fois à la TDM et à la TEP
(fig. 1B x). Le système TEP/TDM-IRM séquentiel permet en plus de réaliser des examens cérébraux en l’espace de 40 minutes grâce à un traceur TEP spécifique
des tissus tumoraux, alors que la durée totale de l’examen est d’au moins 70 minutes pour les acquisitions
IRM et TEP non couplées (fig. 2 x).
Perspectives
Figure 2
Gauche: IRM avec produit de contraste (gadolinium). Droite: Fusion avec la TEP
à l’éthyl-tyrosine marquée au 18F.
L’éthyl-tyrosine marquée au 18F est un radiotraceur spécifique pour les tissus tumoraux
au niveau cérébral.
vaise avec l’IRM qu’avec la TDM. Dans l’ensemble, l’IRM
est une méthode lente par rapport à la TDM et la qualité
des images dépend fortement de la capacité de coopération du patient. Une acquisition corps entier par TDM
dure moins d’une minute, ce qui en fait une méthode particulièrement performante et bien tolérée par pratiquement tous les patients.
Premiers résultats du système
de TEP/TDM-IRM de Zurich
Durant la première année d’utilisation, plus de 250 patients ont été examinés à Zurich. Les réglages de l’appareil ont continuellement été analysés et optimisés. Il a
ainsi été possible de réduire considérablement la durée
d’acquisition corps entier par IRM. Grâce à de nouvelles
méthodes de mesure, qui permettent une mesure très rapide du signal, les os ont pu être visualisés, mais toujours
dans une qualité nettement moindre qu’avec la TDM.
Pour la visualisation des tissus pulmonaires, différents
Les premières expériences cliniques avec la TEP/IRM
suggèrent que cette méthode d’imagerie très sophistiquée possède un grand potentiel pour améliorer le
diagnostic non invasif de différentes maladies. Toutefois, de nombreux problèmes méthodologiques restent
encore à résoudre avant que la TEP/IRM puisse être
utilisée dans la pratique clinique de routine. Il est tout
particulièrement essentiel de parvenir à augmenter la
vitesse d’acquisition IRM afin d’obtenir une bonne qualité d’images même chez les patients qui ne sont pas
totalement capables de coopérer. De nombreuses études
scientifiques seront encore nécessaires pour préciser la
valeur de la TEP/IRM par rapport à la TEP/TDM.
Les nouvelles connaissances dans la recherche fondamentale moléculaire et dans la radiopharmacie permettront de déterminer les possibilités d’application futures de cette méthode. L’objectif ultime de la TEP/IRM
est clairement de poser des diagnostics de manière non
invasive et fiable et d’évaluer précocement la réponse
thérapeutique.
Correspondance:
Dr Felix Pierre Kuhn
Bildgebende Verfahren
UniversitätsSpital Zürich
CH-8091 Zürich
felix.kuhn[at]usz.ch
Références
1 Von Schulthess GK, Hany TF. Imaging and PET-PET/CT imaging. J Radiol. 2008;89(3 Pt 2):438–47.
2 Burger C, Goerres G, Schoenes S, Buck A, Lonn AH, Von Schulthess GK.
PET attenuation coefficients from CT images: experimental evaluation
of the transformation of CT into PET 511-keVattenuation coefficients.
Eur J Nucl Med Mol Imaging. 2002;29(7):922–7. Epub 2002 Apr 19.
Forum Med Suisse 2012;12(1–2):11–12
12
Téléchargement