Introduction A l'heure actuelle, les synthèses de nouveaux hydrures ternaires sont focalisées sur la combinaison de métaux alcalins et/ou alcalino-terreux et de métaux de transition ; ceci en vue de leur éventuelle application comme stockage de l'hydrogène dans les piles à combustibles. Cependant, les recherches sur ces composés se trouvent limitées compte tenu de leur très fort comportement hygroscopique ainsi que de leur grande stabilité thermique. Les fluorures ternaires sont, dans un large domaine, de bons voire d'excellents conducteurs ioniques et d'une meilleure stabilité à l'air ambiant que les hydrures. Récemment, des études menées sur des composés ternaires à structure perovskite montrent de nombreuses analogies structurales entre les hydrures et les fluorures comme cela est souvent le cas pour des composés plus simples. Depuis, une base de données a été créée afin de prévoir de nouveaux hydrures et d'étudier leurs ressemblances structurales avec les fluorures. La cristallochimie des anions hydrures et fluorures étant donc très proche, des composés hydrurofluorés, dérivés des hydrures par substitution du fluor à l'hydrogène ont ainsi été préparés. L'objet de cette étude est une investigation essentiellement fondamentale de nouveaux hydrurofluorures afin de déterminer les éventuelles analogies existantes entre les hydrures, les hydrurofluorures et les fluorures. Une nouvelle méthode de synthèse sous atmosphère contrôlée de composés hydrurofluorés à base de potassium et de calcium est adoptée et diverses caractérisations ont alors été entreprises afin de pouvoir comparer leurs diverses propriétés à celles existantes pour d'autres systèmes. Etude sur les hydrurofluorures Les ions fluorures et hydrures sont bien connus pour avoir une cristallochimie très proche (voir par exemple [1]). Les valeurs des rayons ioniques des ions fluorures F– et hydrures H– sont voisins dans le cas d'un environnement octaédrique du cation (r F– = 1,33 Å [2], 1,27 < r H– < 1,54 Å [3]) et ce, malgré une différence de polarisabilité importante. Remarque sur la polarisabilité : Le champ électrique qui environne les ions dans la molécule leur fait subir des déformations plus ou moins importantes. Celles-ci se manifestent par des déplacements des électrons par rapport au noyau. Il apparaît ainsi dans chaque ion un dipôle électrique induit, caractérisé par un moment. La polarisabilité est le facteur de proportionnalité entre ce moment et l'intensité du champ électrique environnant. Divers travaux ponctuels ont été publiés depuis les années 1960 sur des composés ou des phases à base de fluorures et d'hydrures. L'hydrurofluorure de lithium -solution solide totale entre LiH et LiF- a été mis en évidence par Messer et Melor [4], et l'hydrurofluorure ionique de formule CaF2-xHx a été étudié par Brice et al. [5] en 1978. Le mélange CaF2 CaH2 est porté à 700°C, la réaction est totale en quelques heures. La solution solide CaF2-xHx avec 0 < x ≤ 1,24 est alors mise en évidence. Elle cristallise dans la symétrie cubique type fluorine. Les auteurs remarquent que la substitution s'effectue de manière statistique sur les sites anioniques de la structure fluorine. Une étude de la conductivité de ces hydrurofluorures a aussi été menée et sera discutée dans notre partie "Propriétés électriques". L'existence du fluorure CsCaF3 de structure cubique type perovskite et de composés CaF2-xHx a conduit Park du Laboratoire de Chimie du Solide à Bordeaux [6] à étudier le système Cs - Ca - H - F afin de mieux connaître l'influence de la substitution de l'hydrogène au fluor dans ce type de composé. Les études menées par diffraction X et par RMN sur la solution solide CsCaHxF3-x avec 0 ≤ x ≤ 1,70 montrent que l'hydrogène et le fluor se distribuent statistiquement dans les sites anioniques mais que seul l'ion hydrure est mobile. De plus, une étude par RMN 19 F révèle une distorsion structurale des octaèdres [Ca(F,H)6]. L'auteur a, de plus, synthétisé quelques hydrurofluorures à base d'europium EuF2-xHx où le domaine d'homogénéité correspond à 0 ≤ x ≤ 0,80, ainsi qu'étudié le système hydrurofluoré correspondant aux phases CsNiF3-xHx et pour lequel les distances Ni – Ni sont plus courtes dans l'hydrurofluorure que dans le fluorure. Bouamrane [7] à l'INSA de Lyon a obtenu des hydrurofluorures mixtes à base de potassium et de magnésium en faisant agir de l'hydrogène sur un mélange fluorure - métal. Ainsi, l'hydrurofluorure à structure perovskite KMgH2F a été préparé par réaction entre KF et Mg métallique sous 1 bar d'hydrogène et à une température de 460°C. Deux hydrures KMgH3 et K 2MgH4 ainsi que l'hydrurofluorure KMgH2F ont été obtenus par cette méthode originale. Un ensemble de grandeurs thermodynamiques ont été déterminées ; celles-ci nous serviront à comparer nos résultats. Mourksi [8] a ensuite réussi à synthétiser un hydrurofluorure d'ytterbium Yb(H,F)2,13-2,15 dans le système ternaire (Yb - H - F) par réaction en phase solide entre YbH1,8 et YbF2,33 à 800°C sous argon. Dernièrement, Bouamrane et al. [9] obtenaient un hydrurofluorure mixte à base de sodium et de magnésium NaMgH2F en utilisant un protocole de synthèse voisin de celui de KMgH2F [10]. Ce composé NaMgH2F a été obtenu par réaction d'un mélange intime de magnésium métallique et de fluorure de sodium (dans les proportions molaires 1:1) à 500°C et sous 10 bars d'hydrogène pendant 24 heures. Il cristallise dans le système orthorhombique tout comme son homologue fluoré NaMgF3. Il dérive de la structure perovskite par une distorsion de type Pm3m ? Pnma [11]. Les deux anions sont distribuéségalement dans les deux sites anioniques. Son enthalpie standard de formation a été déterminée et servira comme précédemment à notre discussion sur les grandeurs thermodynamiques. Dans le même temps, Rönnebro et al., une équipe suédoise, synthétise les composés NaMgH3-xFx avec x = 1 [12]. Le mélange est porté à 800 °C pendant 24 heures puis jusqu'à 1000 °C pendant 24 heures également. Leurs composés cristallisent dans le système orthorhombique avec des paramètres cristallins très proches de ceux déterminés par A. Bouamrane et al. [11]. Grâce aux études sur les familles d'hydrurofluorures mixtes d'éléments légers ABH3-xFx avec A = K ou Na et B = Mg à structure perovskite plus ou moins déformée menées au Laboratoire, nous avons étendu ces réactions lors de ces travaux en remplaçant l'alcalino-terreux, soit le magnésium, par le calcium afin d'obtenir une nouvelle famille d'hydrurofluorures. La combinaison avec le calcium est favorisée en raison de la taille de l'ion hydrure H – dans CaH2 (1,36 Å) qui est très proche de celle de l'ion fluorure F – dans la fluorine CaF2 (1,37 Å). Le présent mémoire, articulé autour de quatre chapitres, traite de l'élaboration et de la caractérisation d'hydrurofluorures de potassium – calcium à structure perovskite avec, en particulier, une étude des propriétés électriques de ces produits. Le premier chapitre revêt un aspect Chimie préparative avec la description des voies de synthèses des composés étudiés ainsi que celle de leur dosage. Il reporte également les hypothèses concernant le mécanisme de la réaction de formation de ces produits. Le deuxième chapitre est consacré à la caractérisation structurale des composés synthétisés basée sur la méthode de Rietveld. La détermination des enthalpies standard de formation ? fH° de ces nouveaux hydrurofluorures ainsi que l'évaluation de certaines grandeurs thermodynamiques sont entreprises dans le troisième chapitre. Ce dernier traite également du comportement thermique et thermogravimétrique de ces composés hydrurofluorés. Enfin, le quatrième chapitre présente une étude des propriétés électriques avec la détermination des énergies d'activation des différents composés étudiés.