Biomolécules d’origine végétale d’intérêts industriels: Les polyphénols … Cours ULBI 456 Licence L2 Second semestre 2011 Christian Jay-Allemand Université Montpellier 2 France (Tél: 04 67143612, E-mail: [email protected]) Métabolites secondaires ? Plan général du cours -Diversité des structures chimiques Partie I- Introduction -Propriétés physico-chimiques -Biodiversité végétale, adaptation et plantes comme source de biomolécules -Principales techniques d’analyse -Sensibilisation aux «!métabolites secondaires!» produits par les plantes -Alcaloïdes -Saponines et sapogénines -Acides phénoliques et flavonoïdes - Extraction, hydrolyses, … - Séparat°, détect°, quantificat° - Histolocalisation Partie III- Activités cellulaires!et rôles des composés phénoliques / Utilisations - Fonctions cellulaires ? -Métabolisme et voies métaboliques - Couleur du bois -Importance des composés phénoliques utilisés par l’homme / Historique - Couleur des fleurs et des fruits Partie II- Biochimie des phénols et techniques d’analyses - Qualités organoleptiques -Qu’est-ce qu’un phénol ? -Réseaux métaboliques - Brunissement des tissus - Propriétés pharmacologiques Partie IV- Conclusion et perspectives PARTIE I INTRODUCTION I-1 Qu’est-ce qu’une plante ? I-2 Les plantes, sources de biomolécules d’intérêts industriels I-3 Importance économique des métabolites utilisés dans le monde I-4 Historique et notion de métabolites secondaires I-1 Qu’est-ce qu’une plante ? Comparaison entre Animal et Végétal ? Plante = Vaste surface fixe aérienne et souterraine pour un volume modeste. Animal = Une symétrie bilatérale avec une double polarité. Plante = Une symétrie radiale avec une seule polarité verticale pour les plantes. Toute forme dépend de la gravité, de l’espace et de la taille des organismes. Adaptation à la fixité chez les végétaux => Diversité des biomolécules Graines Fertilité et pollinisation Forte intensité lumineuse et UV Flavonoïdes Basses températures Anthocyanines Ptérocarpanes Esters sinapiques Flavonoïdes Isoflavonoïdes Psoralènes Blessures Coumestrol Psoralènes Coumarines Acide chlorogénique Esters féruliques Lignines et subérine Taxifoline glucosylée Signalisation à distance Acide salicylique ? Attaques par les pathogènes Ptérocarpanes Isoflavonoïdes prénylés Stilbènes Coumarines Flavanols Aurones Acétosyringone Interactions avec les microorganismes symbiotiques du sol Lutéoline, Lutéoline, Apigénine Daidzéine, Daidzéine, Rutine, Tannins Larve d’insecte Régulation des flux d’auxine et du développement Naringénine chalcone Kaempférol Quercétine Carences en fer, nitrate et phosphate Acides phénoliques, Flavonoïdes Isoflavonoïdes, Isoflavonoïdes, Anthocyanines Graines d’arabette (Figures 3 et 4) Figure 3 : Comparaison des téguments de graines d’Arabidopsis thaliana sauvage (WT) et mutée (tt12) grâce à une étude histochimique réalisée à l’aide d’une coloration au bleu de toluidine (coloration en bleu-vert intense des composés de nature phénolique). Embryon (emb), couche à aleurone (al), tégument interne (e), tégument externe (cl). Barre = 40 !m. D’après Debeaujon et al., 2001. Plant Cell, 13, 853-871 Temps d’imbibition (heure) Figure 4 : Capacités germinatives de 4 lots de graines d’Arabidopsis thaliana de type sauvage (WT) ou mutée (tt12) déterminées en fonction de la durée d’imbibition appliquée à ces différents lots. Figure : Voie métabolique des principaux flavonoïdes connus chez les végétaux. Sont indiqués les enzymes (CHS, CHI, …) et les mutants (tt2, tt7, …). D’après Marinova et al., Plant Cell, 2007. I-2 Les plantes, une source de biomolécules d’intérêts industriels Glucides / Monosaccharides (oses) et polysaccharides Lipides / A. gras => Triglycérides, phospholipides, … Protides / Aminoacides => peptides et protéines Nucléotides / ARN, ADN, ATP, ADP, NAD, NADP, FAD, FMN Acides organiques / Cycles de Krebs et de Calvin, voie shikimique, … Polyamines aliphatiques et aromatiques Hormones / Auxines - cytokinines - gibbérellines - éthylène Brassinostéroïdes Composés poly-isopréniques, jasmonates, éthanol, vitamines, éléments minéraux Chlorophylles, caroténoïdes, stérols, terpènes, alcaloïdes, saponines, composés phénoliques, …=> Usine chimique Alcaloïdes et composés azotés particuliers Hétérosides Terpenoïdes Composés phénoliques Wink et al. (2003) Phytochemistry 64, 3–19 B I O D I V E R SI T É Relations entre métabolisme secondaire et métabolisme primaire CO2+ H2O Photosynthèse Saponosides Cardénolides Glucides Glycolyse Respiration Assimilation de l’azote Hétérosides cyanogènes et glucosinolates Voie du shikimate Auxines, Polyamines Acetyl CoA Terpenoïdes Cytokinines Brassinostéroïdes Acides aminés Composés phénoliques Malonyl CoA Acides gras Oxylipines Jasmonate Cires Alcaloïdes Flavonoïdes Acide salicylique Tannins condensés La pervenche de Madagascar Alcaloïde dimérique Structure de quelques alcaloïdes d’intérêts Morphine Cochicine Réserpine Codéine Quinine Cocaïne Atropine Ergotamine Intérêts thérapeutiques des alcaloïdes Atropine = Traitement des spasmes viscéraux Bromocriptine = Inhibiteur de la lactation Cocaïne = Anesthésiques locaux et stupéfiant Codéine (méthyl-morphine) = Analgésique et calmant de la toux Colchicine = Anti-inflamatoire spécifique / Goutte Dérivé dihydrogéné de l’ergotamine = Vasodilatateur / anti-migraine Ergotamine = Dépresseur du système nerveux sympathique Ésérine / Carbamates = insecticides puissants Morphine = Analgésique / calmant de la douleur Quinine = Antimalarique / forme grave du paludisme (Plasmodium f.) Réserpine et chlorpromazine = Neuroleptiques des psychoses aigües Vinblastine et vincristine = Leucémies, Maladie de Hodgkin, cancers Centella asiatica Saponines et sapogénines triterpénoïdiques Cicatrisants, anti-inflamatoires, régénération du derme / cosméto Pouvoir Hémolytique des saponines de Centella asiatica 110 100 90 80 % d'hémolyse 70 60 Acide Asiatique 50 Acide Madécassique Asiaticoside 40 Madécassoside 30 20 10 0 -10 0 0,0133 0,0266 0,0399 0,0532 0,0665 0,0798 0,0931 Concentration en mMol.L Figure: Pouvoir hémolytique des différentes saponines de Centella asiatica mesuré par spectrophotométrie -1 0,1064 0,1197 0,133 0,1463 Les saponines stéroïdiques et triterpénoïdiques La génine, précurseur des stéroïdes Couleur Écorce A B Aubier Lignines Zone de Transition Bois de coeur C Colorants M - CHS . M M - DFR - F3’5H + F3’5H - FLS Brunissement Diversité des structures de nature phénolique Dérivés d’acides hydroxycinnamiques Flavonoïdes I-3 Importance des métabolites utilisés dans le monde Poids économique des «!drogues!» d’origine végétale dans le monde (estimation pour 2002) Alcaloïdes (nicotine, cocaïne, morphine, …) => 4 milliards $ Terpènes et stéroïdes (diogénine, taxol, …) => 12 milliards $ Glycosides et phénols (lignanes, digoxine, …) => 14 milliards $ Utilisation des composés phénoliques Paramètres de la qualité sensorielle des produits végétaux Brunissement et altération des produits alimentaires Importance des composés phénoliques dans l’alimentation, la santé et la cosmétologie Implications industrielles: Tannins, colorants, dégradation des lignines, qualité des bois, protection des plantes cultivées, … ROLES MAJEURS Pigments Parfums et arômes (Jasmin) Substances biologiquement actives I-4 Historique et notion de métabolites secondaires XIXème Avènement de la phytochimie Isolement et caractérisation de nombreux composés spécifiques aux végétaux Recherche de principes actifs chez les plantes médicinales Un composé phénolique : l’acide salicylique En 1825, un pharmacien italien, Francesco Fontana, isole le principe actif du saule blanc qu'il appelle la "salicine" En 1828 : Johann Büchner isolement à partir d’écorces de saule du salicylate Un composé phénolique : l’acide salicylique 1899 : Felix Hoffman (Bayer) Synthèse d’Aspirine = acétylsalicylate à partir de salicylate extrait de Spiraea ulmaria (Reine des prés) ! Découverte d’un alcaloïde : la morphine 1803 : isolement 1827 : commercialisation par Merck Guerre de 1870 développement de l’usage médical >30 alcaloïdes différents dont 10% de morphine Papaver somniferum album Découverte d’un alcaloïde : la morphine 1925 : caractérisation de la structure chimique Sir Robert Robinson Prix Nobel de Chimie Les premières hypothèses Julius von SACHS (XIXe siècle): Les tannins sont des déchets du métabolisme J. von Sachs (botaniste allemand) Historique des métabolites secondaires Frederich Czapek (1921) Taxons végétaux ! processus biochimiques qui pourraient ne pas être indispensables ! caractères secondaires Développement de l’idée que les métabolites secondaires n’ont aucun rôle : des déchets ou des excréments / incréments ? Un exutoire du métabolisme primaire en situation de flux excessif (produits de fin de chaîne métabolique) ? Années 70-80 : Deux écoles 1- Anglo-saxonne : « Chemical Ecology » Miriam Rothschild Jeffrey Harborne Le MS est d’une importance capitale dans les interactions écologiques 2- Allemande : Kurt Mothes Le MS n’a pas de signification physiologique ! Théorie neutraliste de l’évolution Aujourd’hui : Nombreuses fonctions reconnues pour les métabolites secondaires Fonctions écologiques & physiologiques Activités biologiques et autres propriétés physico-chimiques valorisées par l’homme WT tt4 At seedlings 13 days after germination Les flavonols (cas de la naringénine) et le NPA (acide naphtylphtalamidique, molécule de synthèse) inhibent le transport polarisé de l’auxine dans les racines d’Arabidopsis thaliana via l’inhibition des faciliteurs / transporteurs d’efflux d’auxine. WT, type sauvage; tt4, mutant chalcone synthase (CHS) déficient en flavonoïdes. Programme de recherche Transporteurs auxiniques (TA) 2 OH 3 O OH TA OH OH O Flavonols OH O OH 4 OH AIA OH OH O 1 Synthèse Transport glycosylation -Eau - Nitrates - Phosphates - Sulfates AIA Dans les cellules péricycliques AIA en µM AIA= Acide indole 3acétique Complexité des réseaux métaboliques / Métabolismes primaire et secondaire (métabolisme phénolique via la voie de l’acide shikimique) La formation des racines latérales est sous contrôle des flux d’auxines / transporteur!d’influx AUX1 WT aux1 D’après Swarup et al., 2001. Gene & Develmopment, 15, 2648-2653. Figure: Analyse de l’auxine (IAA) accumulée dans les pointes racinaires de l’arabette (At) sauvage (WT) ou mutante (aux1). B, image d’une racine colorée / activité Glucuronidase (gène pDR5::GUS) chez WT; C, image d’une racine colorée / activité Glucuronase (gène pDR5::GUS) chez le mutant aux1. ws tt4 Biotests / Roots + -