Piaget Justice Immanente note de synthèse

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13/01/09
Option sociale 1 année 2008/2009
La justice immanente (pp. 200-209) extrait du livre de Jean Piaget « Le jugement moral chez
l’enfant » (1932, Puf).
Note de synthèse Manuel Tostain
1) Introduction
La question de la sanction (justice rétributive par opp. à justice distributive)
Sanction expiatoire : punir pour faire souffrir (par opp. à sanction par réciprocité).
Ce type de sanction s’inscrit dans ce que Piaget (P) appelle le réalisme moral ou de la
contrainte adulte (par opp. à la justice de la coopération (pour plus de détails voir Tostain
(1999)).
Justice immanente (JI) : idée de sanctions automatiques émanant des choses elles-mêmes.
Les trois histoires :
Hist I : pomme-pont
Hist II : crayon-couteau
Hist III : ciseaux-pont (le lendemain)
Statistiques : la JI décroît avec l’âge
2) description des réponses enfantines en rapport avec la JI
3 phases (de développement) :
Phase 1 : JI : réponses du type « c’est juste, c’est bien ». « C’est parce qu’il a volé qu’il est
tombé ».
Phase 2 : JI atténuée : réponses du type « C’est une punition ». « Il est tombé parce qu’il a
désobéi MAIS il serait tombé quand même » l’enfant s’efforce de concilier les deux thèses
contradictoires (la JI et le hasard mécanique).
Phase 2 : disparition de la JI : réponses du type : « C’est le hasard ». « Il serait tombé quand
même s’il n’avait pas volé ».
3) représentation par l’enfant du ou des mécanismes de la JI
Soit liaison immédiate, naturelle entre la faute commise et la sanction physique, soit présence
d’intermédiaires entre ces deux « actions » : ces intermédiaires : Dieu, esprit de la nature.
Cette JI est associée à l’idée que la nature obéit à des lois physiques MAIS aussi morales.
Facteurs associés : égocentrisme de l’enfant (projection sur la nature de ses propres
caractéristiques et pensées personnelles), finalisme (la nature répond à un ordre moral),
anthropomorphisme (la nature est à l’image de l’homme), animisme (la nature, les choses
inertes sont vivantes et elles possèdent les attributs du vivant notamment des humains : la
sensation, le savoir, la pensée, la volonté) (pour plus de détails voir le livre de Piaget « La
représentation du monde chez l’enfant »).
Mana : esprit de la nature (liée aux hommes)
Pour autant les enfants n’ont pas de théories de la JI, c’est-à-dire d’explications explicites du
mécanisme de la JI. Les enfants ne s’intéressent pas au comment mais au pourquoi de la JI
(punir les méchants et ne pas punir les gentils voire récompenser ces derniers).
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4) explication de la présence puis de la disparition de la croyance en la JI chez l’enfant
Piaget réfute deux explications (surtout la 1ère) : 1) que c’est inné ; 2) que c’est transmis
directement, explicitement par les parents.
Selon lui, c’est transmis indirectement par les parents : cette transmission se fait par le climat
moral développé par les adultes qui tendent (via la contrainte adulte) à imposer à l’enfant une
vision expiatoire de la morale (punitions, obligations, interdits, culpabilisation de l’enfant en
cas de « faute »). Par égocentrisme, cette vision morale adulte est projetée sur le monde de la
nature.
Pourquoi cela disparaît ? Il y a certes un facteur cognitif (cf. âge mental), l’enfant acquérant la
notion de hasard (contigüité temporelle ne veut pas dire contigüité causale : la faute commise
et la conséquence matérielle constitue deux séries indépendantes de faits) mais pour Piaget
cela est lié surtout à l’évolution du jugement moral enfantin. L’enfant en grandissant
s’émancipe de la contrainte adulte, développe une morale de la coopération (du vivreensemble) qui n’est plus basée sur la sanction mais sur une égalité faite de réciprocité entre
pairs. De plus il s’aperçoit que la morale adulte soit n’est pas toujours juste, soit n’est pas
infaillible. Dés lors que la source de la JI disparaît (ou diminue), en l’occurrence la morale de
la contrainte adulte, la JI disparaît en conséquence.
Pour Piaget ce n’est pas le développement d’une expérience directe (faite de l’analyse
rationnelle des facteurs causaux des actions) qui est déterminante, c’est le développement
d’une expérience morale plus riche avec l’âge.
Par la suite, dans les travaux ultérieurs, on montrera que Piaget a pu surestimer la présence et
la persistance de la JI chez l’enfant (cf. Karniol, 1980) MAIS dans le même temps que la JI
n’est pas l’apanage des enfants ou des sociétés « inférieures » ou « premières » (dixit Piaget)
et qu’elle est présente aussi chez les adultes occidentaux « très civilisés » (cf. les américains,
cf. José, 1990).
Si la psychologie du développement a étudié la JI, on a en quelque sorte son équivalent ou son
prolongement en psychologie sociale (et pour les adultes) avec les travaux de Lerner sur la
croyance en un monde juste (en anglais Just Word Belief ou JWB).
Références
Sur la justice immanente :
José , P.E. (1990). Just world reasoning in children’s immanent justice judgments. Child Development, 61, 10241033.
Karniol, R. (1980). A conceptual analysis of immanent justice responses in children. Child Development, 51,
118-130.
Piaget, J. (1932). Pages 200 à 209. In Le jugement moral chez l’enfant. Paris : Presses Universitaires de France.
Tostain, M. (1999). Pages 68-71, 78-80, 264-269. In Psychologie, morale et culture. L’évolution de la morale de
l’enfance à l’âge adulte. Grenoble : Presses Universitaires de Grenoble.
Sur la croyance en un monde juste :
Deconchy, J.P. (1984). Systèmes de croyances et représentations idéologiques. B. Analyse d’un comportement et
mise en évidence d’une croyance, dans S. Moscovici (Ed.), Psychologie Sociale, Paris, Presses
Universitaires de France, 348-355.
Lerner, M.J. (1986). Le thème de la justice ou le besoin de justifier, Bulletin de Psychologie, 39, 374, 205-211.
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