La mission que j’ai choisi de confier à Michel Pébereau s’appuie sur
ma conviction que n’importe quel défi ou difficulté peut être surmonté par une
organisation humaine dès lors que chacun de ses membres est convaincu que le
défi de la collectivité est aussi le sien.
De ce point de vue, le diagnostic que j’ai établi, en prenant mes
fonctions, sur les finances publiques de la France en général, et sur la dette
publique en particulier, m’a rapidement convaincu que la situation fragile
de nos comptes publics, pour être ancienne, n’était toujours pas perçue
comme un véritable problème de la France, c’est-à-dire concernant direc-
tement chacun de nous.
Les chiffres sont pourtant publics, largement connus et commen-
tés année après année. Ils parlent d’ailleurs d’eux-mêmes : avec environ
1 117 milliards d’euros fin 2005, près de 66 % du PIB, la seule dette finan-
cière de la France n’a cessé d’augmenter depuis vingt-cinq ans au contraire,
ce faisant, de la tendance récente de nombre de nos partenaires qui ont
réduit leur endettement, notamment pendant la période de croissance excep-
tionnelle qu’a connue la zone euro à la fin des années 1990.
Malgré cela, la dette publique restait un sujet largement ignoré
du grand public, et c’est pourquoi j’ai confié à Michel Pébereau le soin
d’éclairer les Françaises et les Français, de manière transparente, indépen-
dante et non partisane, sur notre endettement, son origine et ses consé-
quences. Je lui ai demandé de proposer au Gouvernement, comme à
l’opinion, toutes mesures à même de donner à notre pays les moyens de
continuer à honorer durablement ses engagements et, surtout, de retrouver
d’indispensables marges de manœuvre financières pour mener une poli-
tique encore plus active de croissance sociale.
Dès les premières semaines de ma prise de fonctions, je n’ai
pas caché que je considérais qu’il était désormais urgent de prendre plus
clairement conscience de ces enjeux, car notre dette publique a déjà
commencé à engendrer des conséquences politiques très concrètes. Notre
Préface 3
budget, notre croissance, et donc notre capacité à créer des emplois, sont
en effet déjà contraints par le niveau d’endettement auquel nous ont conduit
vingt-cinq ans de déficits cumulés depuis 1981. Le seul poids des intérêts
absorbe 45 milliards d’euros chaque année, soit pratiquement l’équivalent
du produit annuel de l’impôt sur le revenu.
La dette publique de la France est donc déjà une question d’ac-
tualité ; non pas seulement parce qu’elle excède le seuil de 60 % qui s’im-
pose à nous, car c’est une des règles d’or de notre monnaie commune,
l’euro ; mais parce qu’elle contraint nos choix collectifs d’aujourd’hui et
que, si rien n’était fait pour en arrêter la progression puis la réduire, elle
priverait nos compatriotes de demain d’une part encore plus significative
de leur liberté de décision.
Si j’ai choisi de mettre en avant ce sujet, c’est que je considère
en effet qu’avant d’être une question financière, la maîtrise de la dette
publique constitue un vrai sujet politique pour notre démocratie, car notre
dette publique est un crédit sur les générations futures. Parce que la France
a fait le choix de la solidarité entre générations, nos enfants financeront
nos retraites demain, mais, sans en avoir une claire conscience, nous leur
demandons aussi de financer une part croissante de notre train de vie d’au-
jourd’hui. Jusqu’à un certain point, c’est la règle normale de la vie en
société, mais jusqu’à un certain point seulement.
Après six mois de travail intense, Michel Pébereau et les
membres éminents qui ont accepté de prendre sur leur temps de travail
pour participer avec lui à cette réflexion ont produit un rapport d’une
qualité remarquable. Qu’ils en soient remerciés à la hauteur du service
qu’ils auront rendu à l’économie de notre pays comme à la défense de nos
valeurs démocratiques.
Chacun de nous peut mieux comprendre maintenant pourquoi il
est temps de nous donner les moyens de financer dès aujourd’hui les choix
que nous faisons pour notre bien-être. Chacun pourra aussi mieux
comprendre, toute idéologie mise à part, la nécessité d’un certain nombre
d’ajustements ou d’adaptations économiques nécessaires pour que la
France retrouve le chemin d’une croissance forte et solide, seule à même
de permettre de financer dans le présent nos choix collectifs solidaires et
généreux.
Pour ma part, au sein du Gouvernement de Dominique de
Villepin, je m’appuierai sans réserve sur ce rapport pour poursuivre avec
encore plus de détermination l’action entreprise depuis 2002 en faveur de
finances publiques assainies, solides et ainsi pleinement au service de la
croissance et de l’avenir de la France.
Thierry BRETON
4Rompre avec la facilité de la dette publique
Sommaire
Lettre de mission 7
Composition de la Commission 9
Résumé 11
Liste des préconisations 21
Introduction 23
Première partie
Le choix de la facilité depuis vingt-cinq ans
est la principale explication du niveau
très préoccupant de notre dette publique 25
I. Le caractère très préoccupant de notre situation
financière résulte de l’accumulation
de vingt-cinq ans de déficits 29
A. L’explosion de la dette financière place nos finances
publiques dans une situation très préoccupante 29
B. L’explosion de la dette financière résulte de la succession
ininterrompue de déficits publics depuis vingt-cinq ans 45
II. L’augmentation de la dette ne résulte
pas d’un effort spécifique pour la croissance
mais, pour l’essentiel, d’une gestion
peu rigoureuse 59
A. L’augmentation de la dette n’est pas le résultat d’un effort
structuré pour la croissance et la préparation de l’avenir 60
B. L’augmentation de l’endettement a été une facilité
qui a permis de ne pas assez se préoccuper du niveau
des dépenses publiques et de l’efficacité de leur gestion 70
Sommaire 5
III. Au-delà des dysfonctionnements
de notre appareil administratif, ce sont
nos pratiques politiques et collectives
qui expliquent le choix de la facilité
fait par la France en matière
de finances publiques 91
A. En première analyse, les déficits publics sont le résultat
de la lourdeur et des incohérences de notre appareil
administratif 92
B. Ce sont nos pratiques politiques et collectives
qui expliquent la persistance des dysfonctionnements
de notre appareil administratif 103
Deuxième partie
De notre volonté de restaurer une véritable
capacité d’action publique dépendront nos
perspectives de croissance et de solidarité 113
I. Les pouvoirs publics ne se sont pas donné
les marges d’action nécessaires
pour faire face aux défis futurs 117
A. Nos ambitions de croissance et de solidarité vont
être mises à l’épreuve dans les années à venir 117
B. Si rien n’était fait rapidement, les pouvoirs publics
aborderaient ce nouveau contexte économique
et social avec des marges d’action très réduites 128
II. En engageant rapidement les réformes
nécessaires, les pouvoirs publics peuvent
se donner une large capacité d’action 153
A. La remise en ordre des finances publiques doit être
l’objectif des cinq prochaines années 153
B. Une modification en profondeur de la gestion
des administrations publiques permettra d’équilibrer
rapidement nos finances publiques et de mieux orienter
les dépenses 169
C. Cette nouvelle conception de l’action publique
renforcerait nos perspectives de croissance
et d’emploi et notre capacité de solidarité 177
Conclusion 183
6Rompre avec la facilité de la dette publique
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