Joint périphérique en Prothèse Amovible Complète : Le concept actuel

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Joint périphérique en Prothèse Amovible
Complète :
Le concept actuel
Peripherical seal in complet adjoined prosthesis
The actual concept
Auteurs :
N.
MERZOUK :
Professeur
Agrégée en Prothèse Adjointe
F.
BENFDIL,
Professeur
Assistante en Prothèse Adjointe.
Faculté de médecine
dentaire de Rabat.
Université Mohamed V
Suissi
Résumé :
L’obtention de la rétention est un des enjeux majeurs du traitement de l’édentation
complète. Elle résulte de l’interaction complexe de différents facteurs : biologiques,
physiques, mécaniques et techniques. L’un des plus importants est la création d’une
jonction fonctionnelle étanche entre la prothèse et la surface d’appui. Cette jonction est
assurée par l’existance d’un joint périphérique permanent et continu au niveau des
bords prothétiques.
Mots clés :
Joint périphérique, rétention, prothèse amovible complète.
Introduction
La rétention est un élément important dans la réussite du traitement
prothétique. Elle représente une source fréquente de doléances après
insertion des prothèses.
Elle constitue un facteur de succès en Prothèse Amovible Complète
et contribue avec la sustentation et la stabilisation à assurer
l’équilibre prothétique.
Sa valeur est fonction de facteurs anatomiques et physiques. L’un
des plus importants est la création d’une jonction fonctionnelle
étanche entre la prothèse et la surface d’appui. Cette jonction est
assurée par l’existence d’un joint périphérique permanent et continu
au niveau des bords prothétiques.
Définition
Le mot « joint » est définit dans le dictionnaire comme « une
garniture assurant l’étanchéité d’un assemblage » ou encore comme
« la ligne de surface où se rejoignent les éléments d’un
assemblage » (11)
BATAREC (1), définit le joint périphérique comme un joint réalisé
concurremment par les bords prothétiques et la salive. Il doit
s’opposer à la pénétration de l’air entre la prothèse et les tissus
d’appui, empêchant ainsi la perte de la rétention.
Selon POMPIGNOLI (8), cette notion implique la définition de « la
limite d’action fonctionnelle périphérique ».
Principe
L’enregistrement du joint conduit logiquement à rechercher des
bords prothétiques les plus hauts et les plus larges possible
compatibles avec le libre jeu physiologique des organes para
prothétiques.
En effet, plus la musculature para-prothétique accentue son action
sur le bord de la prothèse, plus la zone du ménisque se forme loin
sur l’extrados et plus l’épaisseur du film salivaire, à ce niveau,
diminue, ce qui assure, ainsi, une augmentation des forces de
rétention (7) (fig 1).
Cet objectif, ne peut être atteint que si l’enregistrement se fait sur
une région dépressible recouvrant du tissu sous muqueux : les
vaisseaux sanguins, les vaisseaux lymphatiques et les tissus
graisseux forment un véritable coussin fonctionnel d’amortissement
des pressions provenant de la base prothétique (12).
Elaboration du joint périphérique
Au maxillaire
 Description
Le joint périphérique maxillaire se compose d’une partie
vestibulaire et d’une partie postérieure.

Partie vestibulaire
Allant d’une poche d’Eisenring à l’autre et se situe au niveau de
la ligne de réflexion muqueuse.

Partie postérieure
Tous les auteurs lui attribuent la plus grande importance ; en
effet une erreur à ce niveau aura plus de conséquences qu’au
niveau du joint périphérique vestibulaire. (5)
Le joint dans la partie postérieure a connu plusieurs
appellations : « postdam », endiguement, joint postérieur, joint
palatin postérieur et enfin joint vélo-palatin qui correspond à
une réalité plus anatomique et plus physiologique (2).
Le joint vélo-palatin va d’un ligament ptérygo-maxillaire à
l’autre, entre la zone de flexion antérieure du voile et la ligne du
A. Ce joint est le seul à être réalisé en compression. (7)
 Manipulation
L’enregistrement du joint périphérique peut être entamé après
détermination en bouche des limites fonctionnelles du porteempreinte individuel. Il se décompose en :

quatre secteurs latéraux alternant côté droit côté gauche
(pour éviter la rotation du porte-empreinte individuel),

un secteur antérieur ;

la zone du joint vélo-palatin (10).
La chronologie des secteurs à enregistrer et les tests effectués sont
les mêmes que ceux utilisés pour le réglage du porte-empreinte
individuel :

Secteurs 1 et 2 : zones para-tubérositaires d’Eisenring.
Les tests demandés sont l’ouverture forcée et les
latéralités droite et gauche

Secteur 3 et 4 : enregistrement de l’activité des
buccinateurs et la mobilité des freins latéraux. Les tests
demandés consistent à creuser les joues et porter les
lèvres en avant

Secteur
5:
de
canine
à
canine.
Les
tests
demandés consistent à pousser la lèvre vers le bas, et
simuler le baiser

Secteur 6 : celui du joint vélo-palatin. Le test
demandé consiste en la prononciation du « AH » grave
(fig 2).
L’efficacité du joint est appréciée :

au niveau antérieur, par étirement de la lèvre supérieure
et des joues,

au niveau postérieur, en appuyant d’un doigt sur la
partie antérieure du bourrelet occlusal pendant la
prononciation du « AH » grave (voile en position haute).
Le bourrelet correctement situé et orienté, la base ne doit
pas se décrocher (3).
A la mandibule
 Description
Il existe plusieurs conceptions concernant le joint périphérique
mandibulaire :

LE JOYEUX le décompose en deux parties ;
vestibulaire et linguale.

RIGNON BRET décrit un seul joint sublingual associé
à un profil judicieux de l’extrados de la prothèse, en
harmonie avec les fonctions linguales, réalisant un
véritable berceau pour la langue.

POMPIGNOLI décrit lui aussi une seule région
sublinguale avec une stabilisation au préalable du porteempreinte individuel dans la région des poches de Fish
(9).
 Manipulation
A la mandibule, la limite d’action de la musculature périphérique
est plus délicate à saisir et le réglage du porte-empreinte individuel,
prélude à l’enregistrement du joint périphérique, doit être conduit
avec une attention toute particulière.
Quand le bourrelet est orienté correctement en volume et en hauteur
et la stabilité du porte-empreinte à l’état statique en bouche demiouverte est éprouvée, le réglage du porte-empreinte individuel aux
limites fonctionnelles peut débuter (10) :

Au niveau vestibulaire, l’ouverture maximale et
l’étirement des lèvres et des joues sont les tests
suffisants et nécessaires pour libérer toute insertion
musculaire, freinale et ligamentaire pouvant déstabiliser
le porte-empreinte individuel.

Au niveau lingual, la recherche des limites du porteempreinte
individuel,
compatibles
avec
le
jeu
fonctionnel de la langue, du mylo-hyoidien et du
constricteur du pharynx, est très délicate et réclame une
bonne coordination motrice de la part du patient. Cinq
mouvements pour le réglage du porte-empreinte
individuel sont nécessaires et méritent d’être rappelés
(fig 3).
L’enregistrement du joint sublingual proprement dit consiste à
rechercher une légère pression sur la frange sublinguale assurant un
contact intime du futur bord prothétique à ce niveau. Ce contact ne
peut durer que si le jeu fonctionnel de la langue est respecté, six
tests sont recommandés (10) (fig4) :


test 1 : monter la langue au palais,
test 2 : lécher lentement la lèvre supérieure de la
commissure gauche à la commissure droite,

test 3 : lécher lentement la lèvre inférieure,

test 4 : toucher la joue droite puis gauche et prononcer
ME, MA, MI,

test 5 : déglutir,

test 6 : tirer complètement la langue en dehors et en
avant en appuyant sur le doigt du praticien qui maintient
le porte-empreinte individuel au niveau du bourrelet
antérieur.
Pour terminer, deux mouvements permettent de tester l’efficacité de
l’enregistrement du joint sublingual : une poussée ferme vers le
haut et vers l’arrière et une traction, au même endroit, mais vers
l’avant. Le test est jugé satisfaisant si après une certaine résistance,
un bruit de « succion » caractéristique est entendu à la perte des
contacts entre la prothèse et sa surface d’appui (3).
Matériaux et discussion
Les matériaux d’enregistrement du joint périphérique
doivent
répondre à certains critères :

être
suffisamment
plastiques
le
temps
de
l’enregistrement et rigides après,

être de consistance suffisamment épaisse pour offrir une
certaine résistance aux forces musculaires, mais assez
fluide pour ne pas les entraver ;

autoriser des corrections aisées par addition ou par
soustraction.
Il existe deux types de matériaux ; les matériaux inélastiques (pâte
de Kerr) (fig 5) et les matériaux élastiques de moyenne viscosité
(élastomères : polysulfures, silicones et polyéthers) (fig 6, 7).
L’enregistrement par pâte de Kerr se fait secteur par secteur, par
contre, les élastomères permettent des enregistrements secteur par
secteur ou en globalité.
Cependant, réaliser un joint périphérique en un seul temps peut
paraître séduisant, mais reste très difficile et demande un opérateur
expérimenté et habile de surcroît.
Mais, en vue de mieux répondre aux différentes exigences
cliniques, les deux familles de matériaux peuvent être utilisées.
L’étude réalisée par NASER et POSTER sur trois types de
matériaux d’enregistrement du joint périphérique : Néoplex
(polysulfures), Impregum (polyéther) et pâte de Kerr permet de
conclure que c’est l’Impregum qui permet d’obtenir les bords les
plus hauts et les plus épais, à l’inverse du Néoplex qui détermine les
bords dont le volume est le moins satisfaisant. La pâte de Kerr
donne des résultats intermédiaires (fig 8).
Ces éléments font des polyéthers d’excellents matériaux pour
l’enregistrement du joint vélo-palatin qui nécessite plus de
compression et pour les cas de résorption importante.
De plus, leur grande élasticité et leur bonne résistance au
déchirement, leur facilitent le passage des contres dépouilles, en
particulier en cas de prothèse immédiate.
Aussi, leur emploi chez l’enfant édenté, semble tout à fait indiqué
en raison du caractère moins «impressionnant » de la technique.
Malheureusement, leur temps de prise relativement long par rapport
aux silicones, les rend peu propices à un enregistrement fonctionnel
lorsque la rapidité d’exécution est un facteur prépondérant comme
chez les anxieux et chez ceux qui présentent des réflexes nauséeux.
Les
silicones
dits « hydrophiles »
ou « hydroactifs »
par
l’amélioration de leur caractère hydrophobe (adjonction de
surfactants) et de leur temps de prise (plus allongé) s’adaptent
mieux à ces situations.
En revanche, leur temps de prise légèrement plus court, ne leur
permet pas d’enregistrer le joint vélo-palatin quand le voile est en
position haute et que sa mobilisation demande plus de temps.
Par ailleurs, la pâte de Kerr qui est le matériau le plus ancien reste
toujours d’actualité, sauf pour les cas présentant de fortes contres
dépouilles. Elle peut même être utilisée conjointement avec les
matériaux élastiques.
Enfin, le bénéfice obtenu par l’enregistrement du joint périphérique
ne doit pas être ruiné au moment de la coulée, d’où l’intérêt de sa
préservation au moyen du coffrage (fig 9).
Conclusion
Le joint périphérique joue un rôle capital dans la rétention des
prothèses amovibles complètes. Son enregistrement permet de
construire des bords prothétiques les plus hauts et les plus épais
possibles, en accord avec la limite d’action périphérique des
organes para-prothétiques. Cet enregistrement peut être conduit
indifféremment avec plusieurs matériaux, mais nécessite le respect
d’une méthodologie rigoureuse alliée à un sens aigu de
l’observation clinique.
Bibliographie
1) BATAREC.E.
Lexique des termes de prothèse dentaire. Paris : Editions CDP ,
1986.
2) BEGIN.M – ROHR.M.
Le joint vélo-palatin en prothèse complète maxillaire. Cah de
Proth , 1983 ; N°43 : 55-77.
3) GOUMY R. – DAULCE GOUMY V.
Techniques d’empreinte en prothèse adjointe. Paris : Editions
Masson, 1987.
4) HOORNAERT A. – CHALARD F. – UNGER J. – UNGER F.
Les empreintes aux polyéthers. Cah de Proth, 1997 ; N°98 : 7384.
5) LE JOYEUX J.
Prothèse complète. Paris : Editions Maloine (3ème édition), tome
1, 1979.
6) MILLERT C. – ALLARD Y.
Empreintes secondaires en prothèse complète : utilisation d’un
nouveau silicone. Clinic ; 2003 ; 24 (10) : 667- 672.
7) NASER.B – POSTAIRE.M.
Elastomères et joint périphérique en prothèse complète
maxillaire. Cah de Proth, 1991 : N°75 : 47-55.
8) POMPIGNOLI M.
Le joint périphérique. Inf dent ; 1987 : N°2 : 91-103.
9) POMPIGNOLI M.
Le joint sublingual. Inf dent ; 1987 : N°6 : 451-459.
10) POMPIGNOLI M ;
Doukhan.J.Y ; Raux.D . Prothèse Complète : clinique et
laboratoire. Tome 1. Paris : Editions CDP , 1993.
11) ROBERT P.
Dictionnaire de langue française. Paris : Editions S.N.L, 1982.
12) TAIB M.
Le joint palatin postérieur : son importance, sa conception. Cah
de Proth; 1976 : N°13 : 103-112.
ICONOGRAPHIE
Figure 1 : augmentation des forces de rétention lors de l’activité de la musculature
paraprothétique (7)
Figure 2 : l’enregistrement du joint périphérique au maxillaire.
1 et 2 : ouverture forcée et latéralités droite et gauche ;
3 et 4 : creuser les joues, porter les lèvres en avant ;
5 : lèvre vers le bas, simulation du baiser ;
6 : prononciation du « ah » grave
Figure 3 : mouvements de la langue et zones concernées pendant
le réglage du porte empreinte individuel (10).
1-1’ : langue au palais ;
2-2’ : langue sur la joue gauche ;
3-3’ : langue sur la lèvre supérieure à gauche. Les mouvements
du côté opposé concernent les zones symétriques ;
4 : langue en avant et sur la lèvre supérieure ;
5 : zone concernée par la déglutition ;
6 : zone concernée par la simulation du baiser
Figure 4 : mouvements de la langue pendant l’enregistrement du joint sublingual (10)
Figure 5 : étude comparative des matériaux d’enregistrement du joint périphérique : coupe
frontale (7)
Figure 6 : joint périphérique au maxillaire à la pâte de Kerr
Figure 7 : joint périphérique au Xantopren vert® (silicone)
Figure 8 : joint périphérique au maxillaire à l’Impregum® (polyéther).
Figure 9 : coffrage
Summary :
To have a retention is a major stake of the treatment of the complet edentation.it results
from the complicated interactions of the different factors : biological, physical, mechanical
and technical.
One of the most important stake is the creation of a functional junction, a tight between the
prosthesis of the surfaces support.
This junction is assured by the existence of a peripherical, permanent and continuous seal,
at the prosthetistic borders level.
Key words:
Peripherical seal, retention , complet adjoined prosthesis
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