ORGANISATIONS ET MARCHÉS II 3
firmes, ou plusieurs : il est facile de montrer, par récurrence, que si la propriété
ci-dessus est vraie, elle peut s’étendre à un nombre quelconque de firmes. Cette
condition définit un monopole naturel absolu. Il y a simplement monopole naturel
relatif si l’inégalité est large. D’autre part, on peut affaiblir un peu cette condition
en limitant sa validité à une zone assez large comprenant la production effective du
bien en question : pour un bien dont la demande courante n’excède pas la quantité
Q0, si l’inégalité ci-dessus est vérifiée non pas quel que soit Qmais, par exemple,
pour tout Q∈[0,2Q0], on dira qu’on est en présence d’un monopole naturel
au sens large. La plupart des entreprises produisent et commercialisent plusieurs
catégories de biens : par exemple un producteur d’automobiles offre des modèles
variés : ce sont des firmes multiproductrices. La définition du monopole naturel
n’est pas différente, mais doit être reformulée; il convient dans ce cas de noter la
production non comme un nombre, mais comme un vecteur : q= (q1, q2, ..qn). La
condition de sous-additivité des coûts de production devient alors :
C(q)< C(q1)+C(q2)∀q, q1= (q1
1, q1
2, ...q1
n), q2= (q2
1, q2
2, ...q2
n)tel que q=q1+q2
1.2.2 Subadditivité et rendements
Cette définition habituelle du monopole naturel est en relation avec les ren-
dements, et plus spécifiquement les rendements croissants. On peut en effet mon-
trer, dans le cas d’une firme monoproduit, qu’un coût moyen décroissant1entraîne
la sous-additivité : soit une fonction de coût moyen CM(Q)décroissante; on a
alors :
CM(Q1+Q2)< CM(Q1)
CM(Q1+Q2)< CM(Q2)
⇒(Q1+Q2)CM(Q1+Q2)< Q1CM(Q1) + Q2(CM(Q2)
ce qui est la définition de la sous-additivité. Cependant, si un coût moyen dé-
croissant est une condition suffisante pour la sous-additivité, il n’en est pas une
condition nécessaire; si la fonction de coût moyen est globalement décroissante,
tout en connaissant quelques petites portions croissantes, la propriété de sous-
additivité peut très bien être vraie de manière stricte (voir graphique 1).
Pour une firme multiproductrice, les relations entre rendement et sous-additivité
sont beaucoup plus complexes : tout d’abord la notion de coût moyen n’existe
plus, et ensuite il convient de prendre en compte non seulement les économies
d’échelle mais aussi les économies d’envergure2. Ce dernier terme désigne les
1la décroissance du coût moyen est un indice que le rendement est croissant, mais non une
preuve absolue : si les prix des facteurs sont décroissants au fur et à mesure que la firme accroît
ses achats, des rendements constants ou même décroissants peuvent aboutir à un coût moyen
décroissant.
2respectivement economies of scale et economies of scope en anglais