Lyme : être ou ne pas être, telle est la question

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Éditorial
mt 2016 ; 22 (6) : 352-3
Lyme : être ou ne pas être,
telle est la question !
Emmanuel Andrès1, Thomas Vogel1, Anne Bourgarit2
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.70.218 le 16/04/2017.
1 Centre hospitalier régional universitaire de Strasbourg, Strasbourg, France
<[email protected]>
2 Hôpital Jean Verdier, Université Paris 13, Bondy, France
À
Tirés à part : E. Andrès
bords, qui sont légion dans notre pays
de nos jours. Ils s’appuient sur les
données – ou plutôt sur les « inconnues » – actuelles de la science et de
la clinique : quid des formes vues aux
microscopes électroniques alors que
les tests sont négatifs ? Quid de la viabilité de l’ADN trouvé dans certains
tissus ? Quid des formes chroniques
et de leur traitement ? [7-9].
Pour le « non-initié », qu’il soit
patient ou professionnel de santé,
la maladie de Lyme est devenue un
terrain mouvant, une énigme, une
incertitude. . . une sorte de « patate
chaude » oserions-nous même écrire.
Ainsi, que faire en pratique devant un
patient qui souffre et qui ne trouve
pas la solution à ces maux, persuadé qu’il est d’avoir une maladie
de Lyme ? Les preuves actuelles sontelles suffisantes pour que le praticien
prenne une décision, en toute légitimité et en toute quiétude, pour le
bien de son patient ? Ou au contraire,
n’est-on pas dans l’incertitude la plus
totale pour revenir à un certain empirisme et à l’« Art médical » de nos
anciens maîtres.
Les médias, la « grande » presse,
les sociétés savantes (telles la Société
de pathologie infectieuse de langue
française), et même l’Académie de
médecine occupent le terrain et/ou
y ont été appelés pour tenter de
faire avancer les choses (dans le bon
sens bien sûr), documenter les faits
et émettre un avis voire une recommandation [6-8]. Le gouvernement et
les autorités françaises de santé sont
aussi de la partie et un plan national contre la maladie de Lyme a vu le
jour [7] !
Pour citer cet article : Andrès E, Vogel T, Bourgarit A. Lyme : être ou ne pas être, telle est la question ! mt 2016 ; 22 (6) : 352-3 doi:10.1684/met.2016.0599
352
doi:10.1684/met.2016.0599
l’orée de 2017, à l’heure de la
toute-puissante médecine scientifique et factuelle, il nous a
semblé opportun, à travers ce dernier éditorial de l’année 2016 de
Médecine Thérapeutique, de mettre
en lumière le combat « fratricide »,
quoique à fleurets mouchetés, qui
se mène autour de la maladie de
Lyme [1], la « grande simulatrice »
des XXe et XXIe siècles au même titre
que la syphilis dans les siècles
passés.
La France de 2017, tout comme
celle du siècle des Lumières, que
peuplaient grands philosophes,
scientifiques et médecins, est friande
de renouveau, de polémiques et de
remises en question [2]. Ces dernières semaines, le débat médical
s’est ainsi enflammé autour de la
maladie de Lyme, opposant ce que
l’on pourrait appeler les « septiques »
et les « convaincus » [3, 4].
Les « convaincus » (les professeurs Jaulhac, Christmann et Hansmann) s’appuient sur les données
robustes de la médecine factuelle
[5], sur les études prospectives randomisées, se soumettant ainsi à
une méthodologie éprouvée mais
également au dictat du petit p,
avec comme arguments : la bonne
sensibilité et spécificité des tests
diagnostiques validés [5], la nonsignificativité statistique des traitements des formes chroniques. . . [6].
Les « septiques » (les professeurs
Perronne et Montagnier) réfutent ces
données, ou du moins l’interprétation
qui en est parfois faite [7, 8]. Ils
affûtent leurs arguments et surfent
sur la vague des mécontents de tous
Copyright © 2017 John Libbey Eurotext. Téléchargé par un robot venant de 88.99.70.218 le 16/04/2017.
À côté de ces initiatives louables, des dérives se sont
hélas, comme souvent, faites jour avec la classique « théorie du complot ». . . le rôle de l’industrie pharmaceutique
qui est montré du doigt. . . le tout entretenu par Internet et
le besoin d’informations 24 heures/24.
En 2016, le praticien de terrain reste sur sa faim :
quels tests pratiquer dans les différentes populations ou
aux divers stades de la maladie ? Quid de la prolongation de l’antibiothérapie ? Quel traitement pour les formes
chroniques ?
La période des vœux approchant, on ne peut souhaiter
que 2017 soit une année faste pour la maladie de Lyme et
surtout pour les patients en souffrance.
J’en profite pour présenter nos meilleurs vœux aux
lecteurs et longue vie à Médecine Thérapeutique.
2. http://www.liberation.fr/debats/2016/09/06/la-franceempoisonnee-par-ses-polemiques_1486797; site consulté
30 octobre 2016.
le
3. http://sante.lefigaro.fr/actualite/2016/05/27/25026-maladielyme-plainte-collective-apres-annees-polemiques; site consulté le
30 octobre 2016.
4. http://www.leprogres.fr/sante/2016/09/21/lyme-tiques-etpolemique; site consulté le 30 octobre 2016.
5. Shapiro ED. Lyme Disease. N Engl J Med 2014; 370:
1724-31.
6. Berende A, Hofstede H, Vos FJ, et al. Randomized trial of longerterm therapy for symptoms attributed to Lyme disease. N Engl J Med
2016 ; 374 : 1209-20.
7. http://ffmvt.org/pr-christian-perronne-pour-lyme-les-choses-sonten-train-de-bouger/; site consulté le 31 octobre 2016.
Références
8. http://www.sciencesetavenir.fr/sante/maladie-de-lyme-la-drole-dannonce-du-pr-luc-montagnier_30694; site consulté le 31 octobre
2016.
1. http://www.lyme-sante-verite.fr/La_maladie.B.htm#La_maladie.B;
site consulté le 31 octobre 2016.
9. Melia MT, Auwaerter MG. Time for a different approach to
Lyme disease and long-term symptoms. N Engl J Med 2016 ; 374 :
1277-8.
mt, vol. 22, n◦ 6, novembre-décembre 2016
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