Introduction
La microéconomie
ou l’analyse des choix rationnels
Ce cours a pour objet l’analyse des décisions des consommateurs, des entreprises,
de l’État et, plus généralement, des propriétaires d’actifs (immobiliers, financiers,
naturels, …). Comprendre les choix individuels et leurs conséquences sera au centre de
nos préoccupations. Le principe élémentaire qui sera décliné tout au long de ce livre
est que l’action humaine est toujours motivée par recherche du profit. Parfois, ce profit
sera matériel et aura une valeur matérielle. Parfois, ce profit, tout comme les coûts à
supporter, sera non pécuniaire (c’est-à-dire psychologique). Toutes nos décisions
supposent une comparaison des gains et des coûts, psychologiques ou non, à attendre.
C’est un principe de rationalité qui permettra de comprendre tant les comporte-
ments individuels que le fonctionnement et les résultats de marché.
Section 1
Comportements des individus
et fonctionnement des marchés
La théorie microéconomique ou théorie des prix a pour objet l’étude du comportement
économique des centres de décision composant une économie de marché tels que les
consommateurs, les producteurs et les propriétaires des ressources. Cette définition de
la théorie appelle plusieurs remarques :
la notion de théorie : le but d’une théorie est d’expliquer et de prévoir. Une théorie
est une hypothèse qui a été vérifiée avec succès. Une hypothèse est une proposition
du type « si... alors » (si les quantités offertes diminuent alors le prix augmentera) (non
encore soumise à la vérification). Une hypothèse se vérifie non en raison du caractère
réaliste de ses prémisses mais par sa capacité à expliquer et à prévoir avec précision.
Enfin, lorsque la théorie s’avère toujours vraie dans des circonstances identiques, on
parle de loi économique (loi de l’offre et de la demande, loi d’airain des salaires, loi de
la baisse tendancielle du taux de profit, etc.) ;
la notion de comportement économique : le caractère économique d’un compor-
tement est étroitement associé à la notion de rareté (l’économie est la lutte organisée
contre la rareté). Comme les ressources nécessaires à la fabrication des biens deman-
dés sont en quantité limitée, elles ont un prix. De cette façon on définit un bien écono-
mique (c’est-à-dire un bien ayant un prix). Les biens économiques se différencient donc
des biens non économiques en raison de leur rareté. Les biens économiques satisfont
des besoins économiques.
Par besoin économique on entend toute sensation d’insatisfaction qui ne peut être réduite
qu’au prix d’un travail, d’un effort. De là tout besoin qui peut être satisfait sans le moindre
effort (comme le besoin de respirer) ne peut être qualifié de besoin économique.
Par bien économique on entend tout bien capable de réduire l’intensité d’un besoin,
qui n’existe pas ou très rarement dans la nature et qui, en conséquence, exige, pour
qu’il soit obtenu, un effort de la part de l’homme.
On le voit donc, la rareté constitue l’élément clé de tout problème économique. Si les
biens n’étaient pas rares tous nos besoins pourraient être satisfaits. Sous cette hypothèse,
nous ne serions jamais confrontés à un problème de choix d’utilisations de nos ressources
entre des usages alternatifs. La rareté contraint donc à choisir (écouter un cours d’éco-
nomie plutôt que de voir un film, par exemple). Le choix implique alors un coût qui se
mesure en termes de biens, services ou usages auxquels on a renoncé. Tout choix
implique alors un coût d’opportunité (c’est-à-dire le coût des opportunités abandonnées)
en raison de la rareté. La répartition du revenu entre les différents postes de consomma-
tion, par exemple, pose le même problème. En choisissant de consommer tel bien plutôt
que tel autre, le consommateur renonce à certaines utilisations de son revenu.
Section 2
Rareté, prix et système économique
C’est donc la rareté des biens face au caractère infini de nos besoins qui crée un
problème économique, un problème de choix. En raison de la rareté, toutes les socié-
tés sont confrontées aux mêmes problèmes : Que produire ? Comment produire ? Pour
qui produire ? Deux systèmes économiques permettent de répondre aux trois questions
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14 MÉMENTO – MICROÉCONOMIE
de Samuelson : le marché et le plan. Dans une économie de marché l’État n’inter-
vient pas, ces problèmes sont résolus par le mécanisme des prix. Reprenons les trois
questions de Samuelson.
«Que produire? » signifie quels biens ou services faut-il produire? En quelle
quantité ? Comme les ressources sont rares ou limitées, aucune économie ne peut
produire autant de biens et services que ses membres pourraient en désirer. Si l’on
produit davantage d’un bien, il faudra réduire la production d’un ou plusieurs autres
biens. Ici, c’est le mécanisme des prix qui joue le rôle de guide. Seuls seront produits
les biens et services pour lesquels les consommateurs seront prêts à payer un prix suffi-
samment élevé pour, au moins, couvrir les coûts de production.
«Comment produire? » pose la question de la combinaison des facteurs. Le
problème est alors de savoir quelle technique utiliser pour produire un bien, sachant
qu’il existe plusieurs combinaisons alternatives. À nouveau le choix d’une technique de
production (c’est-à-dire d’un certain arrangement capital/travail) va être guidée par les
prix des facteurs de production. En d’autres termes, c’est la relative abondance ou
rareté des facteurs qui influera sur le choix d’une combinaison de production. Si le prix
d’un facteur de production augmente par rapport à un autre, les producteurs choisi-
ront des techniques qui permettent d’économiser sur le facteur onéreux.
«Pour qui produire ? » pose le problème de la répartition de la production entre les
consommateurs. Ce problème est encore une fois résolu par le système des prix.
Effectivement, l’économie produira les biens et services qui satisfont le mieux les
besoins des consommateurs qui ont la capacité de payer.
Dans une économie de marché, c’est donc le mécanisme des prix qui permet de
répondre aux trois questions de Samuelson. Ainsi, les prix s’ajustent jusqu’à ce que les
plans de consommation et de production soient rendus compatibles (c’est-à-dire jusqu’à
ce que les offreurs et les demandeurs de biens ou de services s’accordent sur un prix).
Section 3
Optimisation et équilibre
Nous avons dit que la microéconomie avait pour objet l’étude des choix individuels. Deux
principes directeurs servent de base à l’analyse : 1 l’optimisation et 2 l’équilibre.
1RATIONALITÉ, OPTIMISATION
ET RAISONNEMENT À LA MARGE
Le principe d’optimisation conduit à énoncer que: parmi les différentes structures
de consommation ou de production que les agents peuvent acquérir, les individus
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15
Introduction
essaient toujours de choisir les meilleures. Cela signifie que les individus choisissent ce
qu’ils aiment plutôt que ce qu’ils n’aiment pas ; qu’ils sélectionnent les techniques de
production efficaces plutôt que celles non efficaces ou plus coûteuses.
Définition : l’optimisation se définit comme la maximisation (du chiffre d’affaires, du bien-être, de
la satisfaction) compte tenu des contraintes budgétaire, temporelle et/ou technique auxquelles
l’agent économique est confronté.
Les choix, des entreprises ou des ménages, relèvent toujours de comportements
optimisateurs et sont alors qualifiés de rationnels. Agir rationnellement, c’est utiliser
ses ressources au mieux. Agir rationnellement consiste, pour le consommateur, à
dépenser son revenu aux usages qui lui procurent le plus de satisfaction. Agir ration-
nellement consiste, pour le producteur, à combiner travail et capital de sorte que son
profit soit le plus grand possible.
Les choix sont-ils toujours rationnels ? N’y a-t-il pas des situations les choix
pourraient ne pas répondre à cette logique de l’optimisation? Cherchons-nous
toujours PLUS? La réponse à ces questions nécessite de se rappeler que les objectifs
des agents économiques ne sont pas simplement financiers. Le consommateur, par
exemple, ne cherche pas à faire du profit mais à maximiser la satisfaction que lui
procure les biens qu’il consomme. En conséquence, s’il a choisi certains biens, s’il a
décidé de mener telles actions plutôt que telles autres, c’est que ces biens ou actions
lui procuraient le maximum de satisfaction. De fait, tout comportement est, par défini-
tion, rationnel. Le suicide est-il un comportement rationnel ? Oui, car il signifie que la
mort était préférable à la vie. Le mariage répond-il à la rationalité économique ? Oui,
car pour chaque partenaire, il s’agit de maximiser ses gains (pécuniaires et affectifs!).
Bien entendu, les agents, différant par leurs préférences et leurs revenus, ne réaliseront
pas forcément les mêmes choix. Mais, les critères de décision employés par des indivi-
dus différents seront les mêmes. S’ils agissent rationnellement, les agents cherchent à
maximiser leur satisfaction, leur profit: ils agiront tant qu’un intérêt à agir existe, tant
qu’il existe un profit à réaliser. Maximiser signifie donc produire ou consommer jusqu’à
ce que la dernière unité ne rapporte pratiquement plus rien. C’est d’ailleurs ce que
tente de montrer l’analyse néoclassique en se fondant sur le raisonnement à la marge.
Le calcul à la marge (initié par Jevons, Menger et Walras) implique que l’on s’intéresse
aux variations plus qu’aux niveaux absolus que les variables atteignent. Le producteur,
par exemple, incorporera des facteurs à la production tant que la recette retirée d’une
unité supplémentaire soit au moins égale au coût du facteur supplémentaire. Si, par
exemple, pour produire 1 de plus il faut à la firme 2 de travail ou de capital, la firme
choisira de ne pas produire une unité supplémentaire. L’entreprise produira donc
jusqu’à ce que le bénéfice marginal (le bénéfice procuré par l’achat d’une unité supplé-
mentaire de travail) soit nul (au delà il deviendrait négatif). On retiendra donc que le
calcul à la marge revient à s’interroger sur les effets de la consommation ou de la
production d’une unité supplémentaire d’un bien ou d’un facteur.
Concernant le consommateur, la théorie microéconomique est sous-tendue par la
théorie de la valeur utilité. L’utilité est le degré de satisfaction généré par la consom-
mation d’un bien ou d’un service. Le consommateur choisira donc de consommer un
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16 MÉMENTO – MICROÉCONOMIE
bien tant que l’utilité marginale retirée de la consommation d’une unité supplémen-
taire excèdera la désutilité engendrée par l’achat du bien (c’est-à-dire le prix à payer).
De même, concernant l’entreprise, le principe directeur est que la firme produit, achète
des facteurs de production, tant qu’un euro de dépense supplémentaire génère au
moins 1 de recette supplémentaire. Supposons, par exemple, qu’une entreprise
estime qu’une dépense publicitaire (P) supplémentaire de 1 accroisse le volume de
ses recettes (R) de 2 , on dira alors que la recette marginale a été de 2 :
Recette marginale = 2/1 = R/P
Cette firme continue alors à incorporer des dépenses publicitaires, mais observe que :
R2/P2= 1,5 et R3/P3= 1,1
On dira alors que le revenu marginal des dépenses publicitaires est décroissant. Le
revenu diminue à mesure que des dépenses publicitaires augmentent. La décroissance
de la recette publicitaire marginale pose un problème intéressant : déterminer quand il
devient inutile d’incorporer des dépenses supplémentaires.
Supposons que R4/P4= 0,9999. L’entreprise aura-t-elle intérêt à dépenser un
quatrième euro en publicité ? Non, puisque la recette publicitaire serait inférieure à son
coût. Dans ce cas, le comportement maximisateur de l’entreprise doit la conduire à
investir 3 en publicité.
Supposons, en revanche, que R4/P4= 1,000001 (et R5/P5= 0,9999). L’entreprise
aura-t-elle intérêt à dépenser un quatrième euro en publicité ? Oui, puisque la recette
publicitaire serait supérieure à son coût. Dans ce cas, le comportement maximisateur
de l’entreprise doit la conduire à investir 4 en publicité.
En d’autres termes, un comportement maximisateur consiste à saisir tout profit, aussi
infime soit-il (même s’il n’y avait qu’un milliardième d’euro à gagner, mieux vaudrait le
récupérer que le laisser). Optimiser, c’est-à-dire maximiser sous contrainte, signifie
donc que le gain procuré par le énième euro de dépense (on dira « le gain procuré par
l’euro marginal ») soit nul, tout investissement au delà cet euro marginal ayant un
rendement négatif.
Lorsque l’agent a maximisé son bien-être ou son profit, il n’aura alors plus d’incitations
à modifier ses choix. Cette situation conduit alors à définir le second principe directeur
de la microéconomie : l’équilibre.
2INCITATION À AGIR, ÉQUILIBRE ET OPTIMUM
Le principe d’équilibre conduit à énoncer qu’une fois l’équilibre atteint, les agents
n’ont plus aucune incitation à modifier leur comportement. S’ils sont à l’équilibre, les
consommateurs n’ont aucune incitation à consommer (ou à demander) plus d’un bien,
et les producteurs n’ont aucune incitation à produire et offrir plus de biens et services.
La notion d’équilibre est donc, en premier lieu, une notion relative aux agents écono-
miques. Mais, elle est aussi une notion relative à l’interaction entre ces mêmes agents,
ce qui nous conduit à voir des équilibres partiels et un équilibre général :
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