40 | La Lettre de l’Infectiologue ̐ Tome XXVII - n° 1 - janvier-février 2012
IMAGERIE
Imagerie typique et atypique
de la tuberculose bronchopulmonaire
M.F. Carette*, L. Mizouni*, A. El Amri*, J. Korzek*, A. Khalil*
L’imagerie diagnostique de la tuberculose bronchopulmonaire est dominée par
la radiographie du thorax, très évocatrice dans les formes typiques. La tomodensitométrie
volumique (TDMV) du thorax prend de plus en plus de place, car elle améliore l’approche
sémiologique et le suivi des lésions et, dans certains cas, apporte une aide au diagnostic
histologique et bactériologique. Elle est en première ligne, sous forme d’angio-TDMV
(ATDMV), en cas de complication grave telle que l’hémoptysie, avant d’envisager
un traitement par radiologie interventionnelle, ce qui permet de choisir
entre artérioembolisation bronchique ou vaso-occlusion artérielle pulmonaire.
Parallèlement à l’aspect radiologique, que nous
allons développer, il faut tenir compte d’un
certain nombre de données cliniques et épidé-
miologiques et de certaines modifications récentes (1).
On sait que :
➤la tuberculose peut être cliniquement latente ;
➤
les symptômes évocateurs associent : une toux
sèche ou productive de crachats hémoptoïques, une
fébricule vespérale, une asthénie, un amaigrissement,
une anorexie, des sueurs nocturnes, une aménorrhée,
parfois, chez la femme.
Des formes pneumoniques peuvent s’associer à
une hyperthermie importante ; des formes miliaires
peuvent se compliquer de dyspnée voire d’insuffi-
sance respiratoire aiguë (2). La complication majeure
la plus fréquente est l’hémoptysie. La contagiosité
interhumaine importante de Mycobacterium tuber-
culosis impose un diagnostic le plus précoce possible
pour isoler les patients bacillifères non traités. L’ima-
gerie aide notablement à cette prise en charge. Les
patients jeunes, non immunisés et les patients fragi-
lisés (sujets âgés, diabétiques, malnutris, insuffisants
rénaux, cancéreux) ou immunodéprimés (patients
VIH+, greffés d’organes, sous immunosuppres-
seurs) sont les plus exposés. L’aspect radiologique
est fonction non seulement du délai d’exposition
qui fait classiquement distinguer la primo-infection
tuberculeuse, ou primo-invasion tuberculeuse, de
la tuberculose postprimaire, mais encore du terrain
sous-jacent et de sa capacité à réagir à l’infection
(en fonction de l’ethnie, du type et du degré de l’im-
munodépression), de la sensibilité du germe, avec
l’apparition de M. tuberculosis multirésistants (MDR)
et, enfin, du type de dissémination, bronchogène ou
hématogène.
Nous envisagerons successivement :
➤
la sémiologie radiologique analytique de base
(tableau I) ;
➤
les “grands tableaux” de la tuberculose thoracique,
sous-tendus en partie par l’aspect immun ou non
du terrain (tableau II), avec :
●
l’imagerie typique de la tuberculose postprimaire
(TPP) de l’adulte “commun”, d’ethnie blanche et non
immunodéprimé,
●
l’imagerie de la primo-infection ou primo-invasion,
●
l’influence du terrain (ethnie noire, VIH, autres types
d’immunodépression),
●les aspects évolutifs et séquellaires ;
➤
l’intérêt de la radiologie dans la complication
majeure qu’est l’hémoptysie.
Sémiologie radiologique
analytique de base (tableau I)
La “caverne” tuberculeuse
La “caverne” tuberculeuse concerne deux tiers des
patients atteints de tuberculose postprimaire ou
“immune” (tableau II) ; elle est visible sur les radiogra-
phies de 20 à 45 % d’entre eux (3) ; elle est parfois mise
en évidence uniquement par l’examen TDM : M. Azencot
a ainsi détecté 42 cas par TDM alors que seuls 27 cas
avaient été mis en évidence par les méthodes classiques,
dans son étude menée en 1993 (p > 0,01) [4]. C’est une
image cavitaire (figure 1), de taille variable, siégeant
au sein d’un infiltrat alvéolaire ou d’un macronodule,
habituellement au niveau des segments apicaux et
dorsaux des lobes supérieurs (67 %) ou au niveau des
* Service de radiologie,
hôpital Tenon, AP-HP,
Paris.