Le 13 avril 2004 « Par télécopieur » Me Lise Cadoret, Conseillère à la Direction des registres et de la certification Ministère de la Justice 1 rue Notre-Dame est 7e étage, bureau 735 Montréal, Québec H2Y 1B6 Objet : Avocats autorisés à agir à titre d’agent de vérification de l’identité en vertu des articles 15.9 et 15.11 du Règlement sur le registre des droits personnels et réels mobiliers Notre dossier : 3530-0015 ___________________________________________________________ Me Cadoret, Suite à la modification des articles 15.9 et 15.11 du Règlement sur les registres des droits personnels et réels mobiliers1 visant à permettre, en plus des notaires, aux avocats autorisés par l’Officier de la publicité des droits personnels et réels mobiliers2 de procéder à la vérification de l’identité de ceux qui désirent transmettre leur réquisition d’inscription par voie électronique au bureau de la publicité des droits, vous avez requis de Me Annie Chapados du Barreau du Québec des éclaircissements relativement à la responsabilité civile de l’avocat et au pouvoir de ce dernier d’attester de l’identité des signataires d’un document. 1 2 Gazette officielle du Québec, Partie II, page 1228, ci-après le « Règlement ». Ci-après «l’Officier». Me Lise Cadoret, Conseillère à la direction des registres et de la certification Ministère de la Justice Le 13 avril 2004 2 À cet égard, vous avez soumis les deux questions suivantes : 10 L’avocat a-t-il une obligation d’inscrire la mention « avocat » suivant la signature de son nom lors de l’exécution de documents? Dans la négative, peut-il éluder par le fait même sa responsabilité professionnelle? 20 L’avocat a-t-il le pouvoir d’attester de l’identité des signataires d’un document? Voici les réponses à vos questions : 1. La simple mention du terme « avocat » suivant la signature d’un avocat lors de l’exécution de documents ou l’absence d’une telle mention n’est pas le facteur déterminant de la responsabilité professionnelle de l’avocat. L’avocat n’a pas l’obligation de mentionner la qualification « avocat » suite à la signature de son nom lors de l’exécution d’un document. En effet, la Loi sur le Barreau et le Code de déontologie des avocats 3 ne prévoient pas une telle obligation. Malgré l’absence d’une obligation légale à cet effet, l’avocat ne peut se soustraire à sa responsabilité professionnelle par le simple fait qu’il ne mentionne pas sa qualité officielle d’avocat suivant sa signature. En d’autres termes, la simple mention du terme « avocat » suivant la signature d’un avocat lors de l’exécution de documents ou l’absence d’une telle mention n’est pas le facteur déterminant de la responsabilité professionnelle de l’avocat. Afin de déterminer si un avocat encourt sa responsabilité professionnelle, il faut plutôt que l’avocat ait posé un « acte professionnel » exécuté à titre d’avocat4. C’est pourquoi, la qualification d’un acte à titre d’« acte professionnel » se fait en prenant en considération un ensemble de facteurs dont, notamment, l’acte lui-même, le contexte dans lequel il fut conçu et le titre professionnel de la personne qui l’a posé. En l’espèce, le contexte dans lequel l’avocat agit à titre d’agent de la vérification est très précis puisqu’il est prévu par le Règlement. L’article 15.9 du Règlement prévoit que les avocats et les notaires autorisés par l’Officier seront aptes à remplir les fonctions d’agent de la vérification de l’identité au terme du Règlement. Il sera donc loisible à l’Officier de vérifier préalablement à l’autorisation d’agir à titre d’agent de la vérification de l’identité si un avocat est inscrit au Tableau de l’ordre et est un membre en règle du Barreau du Québec5. 3 Ci-après le «Code de déontologie». Voir notamment l’affaire Théôret c. Robert, R.E.J.B. 2000-17923. 5 Voir article 60 de la Loi sur le Barreau du Québec. 4 Me Lise Cadoret, Conseillère à la direction des registres et de la certification Ministère de la Justice Le 13 avril 2004 3 De plus, comme il en sera question à la section 2 de la présente, l’attestation de l’identité d’une personne est un acte professionnel que l’avocat est habilité à poser à titre d’avocat. En conséquence, l’avocat qui atteste de la vérification de l’identité d’une personne qui désire transmettre une réquisition d’inscription par voie électronique au bureau de la publicité des droits, pose un acte professionnel pour lequel sa responsabilité professionnelle peut être engagée. Par ailleurs, je désire vous rappeler que l’article 3.04.01 du Code de déontologie impose à l’avocat l’obligation de ne pas éluder sa responsabilité professionnelle dans l’exercice de sa profession. Ainsi, il ne fait aucun doute que les personnes qui retiendront les services des avocats autorisés par l’Officier à agir à titre d’agent de vérification de l’identité, seront protégées. 2. L’avocat a le devoir d’attester de l’identité des signataires d’un document. Conformément à l’article 128 de la Loi sur le Barreau, l’avocat est habilité à préparer plusieurs documents juridiques que ce soit des procédures, des contrats, des testaments et autres documents. De la nature même de ces actes professionnels que l’avocat pose couramment, il en ressort clairement que ce dernier a l’obligation de vérifier l’identité des personnes signataires d’un document juridique ou ayant des effets juridiques. Afin de respecter les règles de l’art de sa profession en cette matière, l’avocat doit prendre les moyens qui s’imposent pour s’assurer de la validité des documents qu’il prépare ainsi que de leur caractère inattaquable. Il s’agit du respect de son devoir de compétence6. Lors de la Réforme du Code civil du Québec, le législateur a reconnu ce rôle fondamental de l’avocat. En vertu de l’article 2991 du Code civil du Québec, l’avocat qui prépare un acte sous seing privé donnant lieu à une inscription ou à la suppression d’un droit sur le registre foncier, ou à la réduction d’une inscription doit joindre une attestation qui indique notamment qu’il a vérifié l’identité des parties7. 6 7 DESLAURIERS, P., La responsabilité des avocats, Collection de droit 2003-2004, vol. 4. De plus, selon l’article 3009 du Code civil du Québec, ce que l’avocat a attesté est tenu pour vérifié par l’Officier. Me Lise Cadoret, Conseillère à la direction des registres et de la certification Ministère de la Justice Le 13 avril 2004 4 Par ailleurs, l’article 129 de la Loi sur le Barreau permet aux avocats « d’accomplir tout autre acte non expressément interdit par la présente loi et les règlements du Barreau. » À ce jour, il n’existe aucune disposition légale qui interdise à l’avocat d'agir à titre d’agent de vérification de l’identité. Au contraire, ce rôle dévolu à l’avocat cadre parfaitement avec son rôle général d’officier de la justice et de collaborateur à la saine administration de la justice. J’ose espérer que ces commentaires répondent entièrement à vos questions. N’hésitez pas à communiquer avec Me Sylvie Champagne du Service de Recherche et de Législation du Barreau du Québec pour de plus amples informations. Veuillez recevoir, Me Cadoret, l’expression de mes sentiments distingués. Le bâtonnier du Québec, Pierre Gagnon PG/cto/0068