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À ce moment, l'organisation politique de l'archipel est marquée par une division en de nombreux petits États
tribaux. Une reine-prêtresse, HIMIKO ("Fille du Soleil"), serait à la tête d'une confédération regroupant une
partie d'entre eux. Ce mystérieux "Pays de la Reine" ou royaume du Yamatai, vraisemblablement situé dans le
nord de Kyushu, aurait envoyé un tribut aux Chinois en 238 ap. J.-C. Ces sociétés agraires, plus ou moins
structurées, où les guerriers doivent jouer un rôle important, obéissent à des monarques-chamanes, guides
spirituels plus encore que politiques. Ainsi, HIMIKO, qui n'apparaissait jamais au commun de ses sujets, aurait
gouverné en tandem avec son frère cadet, par l'intermédiaire duquel elle aurait commandé à son peuple.
Kofun et État du Yamato
À partir de la fin du IIIe siècle ap. J.-C., des cavaliers lourdement armés d'arcs et d'épées de fer, protégés de
cuirasses de métal et de cuir, imposent progressivement, partis du nord de Kyushu, un pouvoir centralisé dans la
plaine du Yamato (région de Nara, île principale de Honshu).
La question de leur origine est discutée. Il s'agirait peut-être de "peuples cavaliers" altaïques arrivés, depuis
steppes continentales et via la Corée, par vagues successives dans l'île de Kyushu. Ils auraient formé une
aristocratie qui aurait imposé sa suzeraineté aux populations rurales Yayoi, en se plaçant au sommet de leur
hiérarchie sociale. À moins que l'évolution économique locale n'ait abouti à la création d'une couche sociale
supérieure de guerriers autochtones, nourris par le travail des paysans.
Ces cavaliers sont à l'origine d'une nouvelle civilisation dite des "Anciens Tertres" (ou kofun). En effet, ce ne
sont plus des poteries, mais des monuments funéraires qui servent de critère déterminant pour cette période. Ces
tombeaux monumentaux, des tumuli en forme de "trou de serrure" pour les plus connus, sont bâtis pour les
hauts dignitaires de leur aristocratie, dans le Kyushu et le Honshu, du IIIe jusqu'au VIIe siècle ap. J.-C. Ils sont
entourés de plusieurs rangs de cylindres-figurines en terre cuite. Ces haniwa serviraient, sur le modèle des
coutumes chinoises, de substituts à des victimes sacrificielles accompagnant, à l'origine, le défunt dans sa
dernière demeure. À moins que leur usage ne se résume à retenir la terre du tumulus. Quoi qu'il en soit, de telles
sépultures n'ont commencé à être fouillées que tardivement, après la Deuxième Guerre mondiale. Car certaines
font l'objet d'une vénération particulière, vues comme les tombes des premiers empereurs japonais.
Selon le Kojiki et le Nihon Shoki, les plus anciennes sources historiques traditionnelles japonaises (début du
VIIIe siècle ap. J.-C.), la cour impériale japonaise aurait été établie dans les années 660 av. J.-C. par le premier
empereur JIMMU . Celui-ci aurait quitté Kyushu pour, guidé par un faucon, faire la conquête du Yamato.
Cependant, comme JIMMU, les dix, sinon les trente premiers monarques japonais (660 av. J.-C. à 538 ap. J.-C.)
ont vraisemblablement été inventés pour soutenir la comparaison avec les très anciennes dynasties chinoises.
Cependant, cette légende nationale repose certainement sur le
souvenir de la soumission progressive de peuplades
antagonistes par un groupe unique de cavaliers venus de
Kyushu, jusqu'à la fondation du royaume de Yamato. Mais
cette unification politique daterait en fait du IVe siècle ap. J.-
C. Ainsi, les premiers dirigeants de cet État du Yamato
donnent naissance à la famille impériale. Sa dynastie règne
encore aujourd'hui sur le Japon.
Pétris de croyances chamaniques, ces monarques se
réclament alors de la descendance de la déesse solaire
AMATERASU. Le grand sanctuaire d'Ise, dont les bâtiments
en bois sont aujourd'hui encore reconstruits tous les 20 ans, renferme les trois trésors impériaux : un miroir en
bronze symbole de la divinité, un sabre de fer et un bijou magique en forme de croc (magatama). De tels
mythes se greffent à ceux dus aux périodes antérieures Jomon et Yayoi pour former la religion proprement
indigène du Japon. Celle-ci est appelée ultérieurement shinto (voie des dieux), pour la différencier du
bouddhisme, importé au Japon au VIe siècle ap. J.-C. Outre la vénération de la déesse solaire et de multiples
divinités (kami), notamment protectrices des clans guerriers, ou la célébration du culte des ancêtres, le shinto
fait la part belle au panthéisme et à l'animisme. On établit des fêtes religieuses et des sanctuaires, entre autres
dans des lieux naturels propices à des manifestations surnaturelles. Les pratiques rituelles sont marquées par un
grand souci de pureté : importance des ablutions et des bains chez les Japonais, défiance à l'égard de tâches
incompatibles qui mettent en contact avec la mort, le sang et la souillure en général.