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risque. Par conséquent l’emploi du terme sert à la dénonciation, une dénonciation qui s’adresse très
souvent aux formations HES.
On comprend implicitement que derrière le mot académisation, est dénoncé un éloignement de la
réalité « vraie », je mets des guillemets bien sûr, cette réalité que l’on peut toucher avec ses mains et
que l’on ne trouve que sur le terrain. C’est la raison pour laquelle le mot académisation est volontiers
accompagné de la métaphore de la tour d’ivoire qui caractériserait les universités. Comme les HES et
les HEP ont été intégrées dans le paysage des hautes écoles en compagnie des universités et des
écoles polytechniques fédérales, elles se trouveraient en quelque sorte confrontées au risque de la
contamination.
Il faut toujours se méfier des mots-valise à connotation péjorative car ils ont une fonction d’intimidation.
On ne discerne pas bien ce qui est dénoncé par le terme d’académisation, on sait en revanche qu’il y a
des coupables potentiels : ce sont les directions des hautes écoles, les responsables de filière et les
professeurs. Le terme d’académisation sert d’arme rhétorique dans une argumentation, contre laquelle
il est très difficile de se défendre parce que justement l’accusation n’est pas claire, ne porte pas sur des
faits ou sur une description de la réalité.
Nous faisons régulièrement l’expérience de l’utilisation de cette arme rhétorique par les milieux qui
soutiennent les écoles supérieures, dans les controverses au sujet des niveaux de formation pertinents
pour une même profession. L’accusation d’académisation lancée aux HES s’accompagne d’un discours
laissant entendre que les écoles supérieures sont plus orientées vers la pratique.
Or la loi sur les HES inscrit l’orientation vers la pratique comme une mission fondamentale des HES ; et
faire croire que les formations HES dans les filières de la santé et du travail social sont insuffisamment
orientées vers la pratique relève de la malhonnêteté intellectuelle. Un tiers de la formation menant au
Bachelor, en moyenne, se déroule sur les terrains de la pratique professionnelle dans une démarche
d’alternance qui est travaillée par les enseignants et les PF : c’est exactement la même proposition que
dans les plans d’études des écoles supérieures.
Mais essayons de regarder de plus près le mot valise lui-même. Académisation renvoie bien sûr au
terme « académie » dont l’étymologie ne manque pas d’intérêt dans le sujet qui nous occupe. Le terme
est emprunté au grec. Akademeia désigne les jardins d’un riche citoyen grec, Akademos, qui se
trouvaient près d’Athènes et dans lesquels Platon avait l’habitude de donner ses enseignements. Ce
terme a désigné d’ailleurs l’école de philosophie platonicienne.
Le terme a été repris dans les langues modernes à partir de l’Italie où se sont développées dès le
XVIème siècle des académies célèbres dont par exemple l’accademia del disegno à Florence, qui
formait des artistes ingénieurs à l’image d’un Leonard de Vinci. Les académies étaient des héritières,
mieux organisées et en quelque sorte scolarisées, des formations sur le tas qui étaient assurées par les
corporations pour répondre aux besoins de leurs pratiques. Elles étaient chargées de donner des
enseignements de haut niveau et utiles à la résolution de problèmes concrets des professions. C’est sur
ce modèle que se sont basés les protestants de Suisse romande quand ils ont créé à Genève, à
Lausanne et à Neuchâtel les académies chargées de préparer les pasteurs, et qui sont devenues nos
universités.
L’académie est donc, en référence directe à la philosophie platonicienne, un lieu de formation dans
lequel se travaille l’application des savoirs théoriques dans la réalité pratique. Elle a comme anti-modèle