L`espace urbain dans l`oeuvre de William Petty

publicité
CJRS/RCSR 35(1/3) 2012 11 L’espace urbain dans l’œuvre de William Petty Michel Dimou et Bernard Pecqueur Respectivement, Université de Toulon et Université J. Fourrier -­‐ Grenoble I. Adressez vos commentaires à dimou@univ-­‐reunion.fr Soumis 3 Novembre 2011. Accepté 26 Janvier 2012. © Canadian Regional Science Association/ Association canadienne des sciences régio-­‐
nales 2012. Dimou, M, & Pecqueur, B. 2012. L’espace urbain dans l’œuvre de William Petty. Canadian Journal of Regional Science / Revue canadienne des sciences régionales 35(1/3), 1-­‐7. L’histoire de la pensée économique spatiale considère les écrits de William Petty sur l’agglomération, comme un travail précurseur mais isolé, à l’origine de nombreux ques-­‐
tionnements contemporains sur la formation des villes et la localisation des activités et des ménages. A part les travaux de Caire (1965) et de Dockès (1969), on ne trouve cu-­‐
rieusement aucune référence sur la dimension organisationnelle de l’espace chez Petty. Cet article prétend combler ce besoin en étudiant les écrits de Petty sur la croissance urbaine et la formation des agglomérations, dans les différents volumes des Arithmé-­‐
tiques. Il met en lumière les analyses de cet auteur du dix-­‐septième siècle sur la forma-­‐
tion de la rente foncière, l’organisation spatiale des activités productives et des trans-­‐
ports et l’évolution des hiérarchies urbaines. Il montre, ainsi, que les écrits de Petty sont à l’origine d’un paradigme spatial de l’agglomération prolongé par Marshall puis par les écrits contemporains sur la formation des villes et la croissance urbaine William Petty’s writings appear as an important but isolated contribution on agglomer-­‐
ation forces within the history of economic thought. Although his writings are consid-­‐
ered a basis of many contemporary theories on location and agglomeration, few papers (Caire, 1965; Dockès, 1969) analyze the organizational dimension of cities in Petty’s work. This paper sheds light on these issues by studying different aspects of Petty’s work on real estate prices, on the spatial dimension of economic activity and the role of the transportation sector or on the evolution of urban hierarchies. This analysis shows that Petty’s ideas appear in the agglomeration paradigm developed later by Marshall and in more-­‐recent theories on agglomeration and urban growth.
Par son caractère original et intuitif, l’œuvre de William Petty (1623-­‐1687)—
classée chronologiquement dans le mercantilisme anglais—dépasse lar-­‐
gement le cadre strict de ce courant de pensée et fonde l’économie poli-­‐
tique moderne,1 en introduisant l’étude économétrique,2 la démogra-­‐
phie économique,3 et la comptabilité nationale.4 Dans différents essais sur l’Arithmétique Politique (1682, 1683, 1687) [1905], Petty développe un en-­‐
semble d’analyses sur la croissance des espaces urbains à partir des exemples de Londres, de Paris ou de Constantinople. Ces analyses,—
revisitées dans le cadre de d’une his-­‐
toire de la pensée économique spa-­‐
tiale5—mettent au cœur de l’émergence des villes, la division du travail et les externalités d’agglomération6—plutôt que les ef-­‐
fets de marché révélés par Hotelling (1935)—et utilisés dans les modèles contemporains d’économie géogra-­‐
phique7 ou la concentration spatiale du capital humain, qui est à la base des théories de la croissance urbaine en-­‐
dogène.8 Comme le souligne Dockès (1969), l’analyse de Petty peut être présentée comme une apologie de la concentra-­‐
tion spatiale des industries: s’opposant à toute perspective d’éparpillement des activités et d’égalisation des richesses dans l’espace. Selon Petty, l’espace homo-­‐
gène est résolument sous-­‐optimal. À l’inverse, l'hétérogénéité spatiale est issue d’une recherche d’efficacité des entreprises et des travailleurs. Elle est construite à partir de processus histo-­‐
riques de concentration des activités productives: alimentés par les effets rétroactifs de différents types d’externalités d’agglomération. Ces dernières sont décrites de façon empi-­‐
rique, presque deux siècles avant l’invention même du concept d’économie externe par Marshall (1898) [1971]. Les nombreuses références des auteurs contemporains9 à la pensée originale de Petty prouvent la fascina-­‐
tion qu’exerce cet auteur du XVIIème siècle sur l’économie spatiale contem-­‐
poraine. Néanmoins, très peu de tra-­‐
vaux explorent de façon systématique ses écrits sur la ville, hormis les contri-­‐
butions séminales de Caire (1965) et de Dockès (1969). L’objectif de ce papier est de com-­‐
bler ce besoin et proposer une lecture critique des écrits de Petty, en extra-­‐
polant les composantes d’un modèle de croissance urbaine, susceptible de générer une concentration spatiale extrême des ressources et des hommes. Il prétend montrer, ainsi, le caractère à la fois précurseur et con-­‐
temporain des analyses de cet auteur, allant à l’encontre d’un équilibre spa-­‐
tial fondé sur l’allocation équitable des ressources et permettant d'interpré-­‐
ter l’émergence des agglomérations. La section 1 énumère les hypo-­‐
thèses fondamentales qui cadrent le modèle de croissance démographique des villes chez Petty. La section 2 se focalise sur la nature de la croissance urbaine, ainsi que sur l’identification des effets externes qui entretiennent le processus d’agglomération cumula-­‐
tive des travailleurs et des entreprises dans le temps. La section 3 met en évidence les conséquences de ce mo-­‐
dèle. D'une part, il permet d’interpréter la formation des coûts fonciers et des coûts de transport dans le cadre d’une approche mono-­‐
centrique. D'autre part, il conduit à une première lecture des systèmes de villes et des hiérarchies urbaines. En-­‐
fin, la section 4 conclut sur les pers-­‐
pectives d’un paradigme spatial dont les fondements résident dans cette Reproduit avec la permission du détenteur du copyright. Toute autre reproduction est interdite. 2 Dimou et Pecqueur nouvelle lecture de Petty et l’analyse de la localisation industrielle de Marshall revisitée par plusieurs théo-­‐
ries contemporaines temps peuvent constituer un atout. Les hypothèses de base Dans les travaux de Petty, quatre hy-­‐
pothèses fondamentales condition-­‐
nent les mécanismes économiques sous-­‐jacents au processus de crois-­‐
sance urbaine: l’accroissement démo-­‐
graphique naturel, la libre mobilité des ménages, l’absence de Capital phy-­‐
sique et le rôle des attributs de pre-­‐
mière nature dans la localisation des villes. A travers ses travaux sur l’arithmétique politique, Petty cherche à mesurer la population des villes et des pays, ainsi que leur progression dans le temps. Comme le souligne Süssmilch (1741) [1998], cette re-­‐
cherche est dictée à la fois par la vo-­‐
lonté de démontrer la suprématie de l’Angleterre dans la compétition éco-­‐
nomique et politique avec la France et les autres pays du Continent euro-­‐
péen, mais aussi par une vision philo-­‐
sophique proche de la théologie natu-­‐
relle qui le conduit à tenter une inter-­‐
prétation mathématique des écrits de la Bible sur l’évolution de la population mondiale.10 Dans son analyse démographique, Petty soulève la question du temps nécessaire pour un doublement de la population, tout en cherchant à dé-­‐
terminer le mode de calcul le plus adéquat. Cette question, fondamen-­‐
tale chez les philosophes du milieu du dix-­‐septième siècle, réside dans la dé-­‐
termination de l’auteur de calculer la vitesse d’évolution de la population humaine depuis le Déluge jusqu’à son époque, puis, dans une démarche prospective, jusqu’au moment, «dans les 2000 prochaines années, où il y au-­‐
ra une tête pour chaque deux acres de terrain dans la partie habitable de la Terre. Alors, suivant la prophétie des écritures, il y aura nécessairement des guerres et un grand massacre».11 Petty précède la pensée de Mal-­‐
thus et suppose que les ressources de la Terre sont une limite naturelle à L’espace urbain et William Petty l’accroissement de la population. Ce-­‐
pendant, contrairement à son succes-­‐
seur, il ne maîtrise pas la progression exponentielle; à travers ses calculs de progression arithmétique, il estime que la saturation naturelle de l’augmentation de la population n’intervient que dans un futur loin-­‐
tain.12 Son schéma d’analyse des faits économiques s’inscrit, ainsi, résolu-­‐
ment dans un contexte de croissance continue de la population et des den-­‐
rées agricoles et non pas dans un envi-­‐
ronnement de ressources stables. La croissance urbaine est alimentée, à la fois par les migrations campagne-­‐ville mais aussi par le changement démo-­‐
graphique naturel. Afin de calculer la vitesse de la croissance urbaine, Petty étudie la fréquence de la mortalité. Sa princi-­‐
pale méthode de mesure de l’accroissement démographique s’appuie sur le nombre d'enterre-­‐
ments enregistrés dans les bulletins de mortalité, ce qui révèle un souci d’utiliser des données statistiques fiables dans une époque d’absence d’un quelconque service de recense-­‐
ment de la population. A partir de ces informations, il entame une démarche prospective pour calculer la popula-­‐
tion des villes, en ajoutant des élé-­‐
ments sociologiques susceptibles d’influencer la démographie urbaine13, tels que la taille des unités familiales en milieu urbain et rural ou l’apparition historique de chocs exogènes (épidé-­‐
mies, disettes, guerres). La deuxième hypothèse de base dans le travail de Petty est la libre mo-­‐
bilité des ménages. En supposant plu-­‐
sieurs configurations possibles quant au taux d’urbanisation ou le poids de la ville primatiale, Petty admet un envi-­‐
ronnement de mobilité des ménages nécessaires à la concentration indus-­‐
trielle et urbaine. Cette mobilité des ménages et des travailleurs ne se ré-­‐
duit pas à l’espace fermé d’un quel-­‐
conque pays, par exemple l’Angleterre, puisque Petty envisage le transfert de toute la population irlan-­‐
daise en Angleterre, en «réduisant» l’Irlande à un «parc à bestiaux gardée par quelques bergers».14 Cette solu-­‐
tion extrême relève à la fois d’une vo-­‐
lonté de résoudre le problème poli-­‐
tique de son pays natal, l’Irlande, par une assimilation de sa population avec celle de l’Angleterre mais aussi par une farouche opposition à la dispersion démographique. Il préconise la même politique pour les habitants de la Nou-­‐
velle-­‐Angleterre dont il souhaite «le transport dans la Vieille-­‐Angleterre dans les vingt années qui vont suivre».15 Il se positionne à l’encontre de la politique expansionniste de l’Empire britannique qui se fait au dé-­‐
triment d’une densification de l’Angleterre. La troisième hypothèse de base dans le modèle de Petty est celle d’un système de production caractérisé par l’absence de Capital physique. Selon Petty, «le travail est le père et le prin-­‐
cipe actif de la Richesse et la Terre en est la mère».16 La terre présente, à la fois, une va-­‐
leur intrinsèque liée à la productivité moyenne capitalisée du sol et une va-­‐
leur extrinsèque, relative aux avan-­‐
tages de la localisation.17 Il est intéres-­‐
sant de noter que, chez Petty, la pro-­‐
ductivité agricole n’est pas une don-­‐
née intangible liée à la seule producti-­‐
vité du sol mais dépend également de la densité de la population agricole, synonyme d'une plus grande division du travail. Cette lecture qui suppose un régime de rendements décrois-­‐
sants s’avère ex-­‐post erronée car ne prend pas en considération l'hypo-­‐
thèse d’une intensification possible de la production agricole due à l’investissement et au progrès techno-­‐
logique. Le second facteur de production, le travail, est déterminé par deux ca-­‐
ractéristiques: sa quantité réelle – qui correspond à la fraction active de la population totale – et sa productivité qui dépend de l’étendue de la division du travail et des tâches. Petty est, certes, conscient que le niveau de qua-­‐
lification joue également un rôle im-­‐
portant, mais il reste résolument atta-­‐
ché à une conception de la valeur-­‐
travail qui réside sur le coût de sa re-­‐
production («la nourriture moyenne d’un travailleur»)18 et non pas sur la va-­‐
leur de sa production journalière. Reproduit avec la permission du détenteur du copyright. Toute autre reproduction est interdite. CJRS/RCSR 35(1/3) 2012 L’absence de considération pour le capital physique chez Petty se justifie par le mode de production dominant du milieu du dix-­‐septième siècle qui précède la révolution industrielle et l’accumulation intensive du Capital, en restant essentiellement axé sur l’activité artisanale et commerciale. Certes, comme le souligne Caire (1965), il paraît peu probable que Pet-­‐
ty, observateur fin de son époque, ait pu méconnaître les premiers efforts d’industrialisation: «on gagne beau-­‐
coup plus par l’industrie que par l’agriculture, et plus par le commerce que par l’industrie»,19 mais dans sa construction analytique, le Capital est traité comme un prolongement des deux facteurs de production essen-­‐
tiels, la terre et le travail. Par le biais de cette analyse, Petty s’inscrit en pré-­‐
curseur de la pensée Classique sur la valeur-­‐travail. Enfin, la quatrième hypothèse de base dans le modèle de Petty con-­‐
cerne le rôle des attributs de première nature dans la détermination de la lo-­‐
calisation des villes. En étudiant le cas de la ville de Londres, Petty argumente que ce site est idéal, car «la Tamise est le fleuve le plus commode de l’île et l’emplacement de Londres la région la plus commode des bords de la Ta-­‐
mise».20 La localisation de Londres est, ainsi, essentiellement liée aux caracté-­‐
ristiques d’accessibilité du site géo-­‐
graphique: l’emplacement au bord de la Tamise qui est la voie navigable la plus longue et convenable de l’Angleterre, peu éloigné de la mer, permettant un développement urbain important et extensible.21 Le caractère mercantiliste de la pensée de Petty, marqué par l’importance du commerce maritime et l’accumulation des richesses par l’exportation, le conduit à privilégier le rôle des ports où résident les com-­‐
merçants et artisans soucieux de ré-­‐
duire les coûts de transport des mar-­‐
chandises et des matières premières. L’exemple de la Hollande, située à l’embouchure de trois grands et longs fleuves, dont les villes portuaires do-­‐
minent une grande partie du com-­‐
merce mondial est, à ses yeux, em-­‐
blématique. Il admet, en même temps, que les régions intérieures qui ne bé-­‐
néficient pas de ces attributs de pre-­‐
mière nature, à savoir l’accès fluvial ou maritime, ont intérêt à se spécialiser dans la production agricole. Cette analyse sera actualisée par les travaux de Fujita et Mori (1996) qui proposent un modèle évolutionniste où la localisation des villes portuaires apparaît comme le résultat d’une combinaison d'attributs de première nature, à savoir l’accessibilité par voie maritime, et d’attributs de seconde nature, liés aux forces auto-­‐
organisatrices du marché.22 Cepen-­‐
dant, contrairement à ses successeurs lointains, Petty considère que les at-­‐
tributs de première nature continuent à jouer un rôle actif dans la direction de la croissance démographique d’une ville, notamment lorsqu’ils se combi-­‐
nent avec des attributs de seconde na-­‐
ture, manifestés par des externalités positives ou négatives d'aggloméra-­‐
tion. Il montre, ainsi, que l’étalement de Londres ne peut se faire que «vers l’ouest, car les vents soufflant pendant presque trois quarts de temps de l’année vers l’est, les (nouvelles) habi-­‐
tations sont à l’abri de la fumée, de la vapeur et des odeurs de toute la partie est de la ville».23 En tenant compte de ces quatre hypothèses de base, Petty façonne les ébauches du premier modèle de crois-­‐
sance urbaine dont les applications restent étonnement actuelles. Un modèle de croissance urbaine L’analyse de la croissance urbaine de Petty s’appuie sur l’étude des évolu-­‐
tions démographiques de Londres et de quelques autres villes européennes pour lesquelles il arrive à obtenir des données chiffrées, mais également sur une série de simulations permettant de déterminer le rôle de la capitale anglaise avec une concentration dé-­‐
mographique plus ou moins élevée. D’après ses calculs basés sur l’enregistrement des décès mais éga-­‐
lement sur le nombre d’habitations, leur taux d'occupation et la surface to-­‐
tale de la ville, Petty considère que Londres regroupe, en 1680, 665000 33 habitants. A partir des taux de pro-­‐
gression démographique estimés sur la période 1642-­‐1682 il montre que la population de la ville de Londres double en 40 ans, tandis que celle de l’Angleterre en 360 ans. Cette vitesse supérieure d’accroissement démogra-­‐
phique est alimentée par trois fac-­‐
teurs: la croissance naturelle de la po-­‐
pulation, les migrations campagne-­‐
ville et le taux de mortalité plus faible dans les grandes agglomérations (hors effets de chocs aléatoires tels que les épidémies). Selon Petty, si ces rythmes de croissance se maintiennent dans le long terme, la ville de Londres devrait accueillir, en 1840, la moitié de la po-­‐
pulation anglaise, soit environ dix mil-­‐
lions d’habitants. Elle aurait cependant atteint, à ce stade, une taille optimale, compte tenu des capacités de produc-­‐
tion agricole du reste du territoire na-­‐
tional et des modalités de transport des denrées alimentaires vers la ville. Zito (1972) compare les prévisions de différentes études démographiques de cette époque avec les résultats du premier recensement officiel de la po-­‐
pulation anglaise en 1801, pour mon-­‐
trer que Petty avait surévalué les rythmes de croissance démographique de son époque. Ainsi la capitale an-­‐
glaise comptait, au début du dix-­‐
neuvième siècle, autant d’habitants que Petty avait prévus un siècle plus tôt. Par la suite, Petty simule deux si-­‐
tuations contrastées: une ville de Londres sept fois plus grande, accueil-­‐
lant 4,7 millions habitants contre 2,7 millions pour le reste de l’Angleterre et la même ville avec une population égale à un septième de sa démogra-­‐
phie actuelle; il en résulte une ville de taille moyenne de 96 000 habitants dans un royaume anglais de sept mil-­‐
lions de personnes. Petty considère que les deux configurations sont viables et le calcul économique entre les avantages et les inconvénients de chaque situation permet de détermi-­‐
ner laquelle des deux est préférable. Une analyse semblable est dévelop-­‐
pée, dans une forme actualisée, par Krugman (1991) qui revendique une fi-­‐
liation avec Petty, lorsqu’il examine les forces centripètes et centrifuges qui Reproduit avec la permission du détenteur du copyright. Toute autre reproduction est interdite. 4 Dimou et Pecqueur conditionnent la formation et la crois-­‐
sance d’une agglomération. Tout en tenant compte des limites du modèle, notamment en termes d’approvisionnement de la population en denrées agricoles, Petty énumère et prouve les avantages de la concen-­‐
tration urbaine. La première série d’avantages pro-­‐
vient essentiellement de la division du travail et de la spécialisation produc-­‐
tive. Selon Petty, si «dans la fabrica-­‐
tion d’une montre, un homme fa-­‐
brique les roues, un autre le ressort; si un autre grave le cadran et un autre fabrique le boitier, la montre sera meil-­‐
leure et moins couteuse que si on chargeait un seul homme du travail entier».24 Cette mise en perspective de l’efficacité de la division du travail et des tâches précède, presque d’un siècle, les travaux de Smith [1776] (1991). Il convient de rappeler qu’à cette époque la manufacture n’est pas en-­‐
core le lieu privilégié de la division du travail et des tâches, ce qui explique, chez Petty, la non-­‐prise en compte du capital physique en tant que facteur de production. Ceci le conduit à consi-­‐
dérer l’intérêt de l’agglomération du facteur travail, faute de concevoir l’hypothèse de sa concentration à l’intérieur de la firme sous l’effet de l’accumulation interne du capital: «nous voyons, de même, que dans les villes et dans les rues d’une grande ville où tous les habitants font le même commerce, le produit spécial à ces endroits et mieux fait et moins coûteux qu’ailleurs».25 En somme, Pet-­‐
ty conçoit l'agglomération spatiale non pas comme une alternative à la concentration industrielle, mais comme le seul modèle efficace sur le plan de l’organisation de la produc-­‐
tion. La division du travail et des tâches conduit ainsi à l’apparition d’économies d’échelle externes aux entreprises et aux artisans mais in-­‐
ternes à l’agglomération londonienne. Celles-­‐ci sont liées à la baisse des coûts de transport et de stockage, la limita-­‐
tion des risques de rupture des appro-­‐
visionnements, l’échange direct entre L’espace urbain et William Petty artisans spécialisés dans des phases différentes de la fabrication d’un même produit. L’apparition de telles externalités est proportionnelle à la densité moyenne de la population ur-­‐
baine: «dans une grande cité, les in-­‐
dustries s’y engendrent l’une et l’autre et chaque industrie sera divisée en au-­‐
tant de parties que possible afin que le travail de chaque artisan soit simple et facile».26 Selon Caire (1965), le fil conduc-­‐
teur de la pensée de Petty sur l’agglomération et l’espace urbain est l’utilité marginale sociale. La concen-­‐
tration urbaine favorise un régime de concurrence qui conduit à une baisse des coûts et une amélioration de la qualité des produits, ce qui augmente le niveau de vie et de consommation des citadins, qualifié par Petty de sur-­‐
plus social.27 Il permet, par ailleurs, d’améliorer la compétitivité des en-­‐
treprises anglaises à l’exportation et réduire les coûts de transport des ma-­‐
tières premières importées: «quand toutes sortes d’industries sont exploi-­‐
tées dans un même endroit, chaque vaisseau en partance peut être chargé rapidement de tous les articles spé-­‐
ciaux et de tous les genres de pro-­‐
duits, de même, si les importations sont consommées dans le port de leur débarquement, il n’y a aucune sur-­‐
charge pour de tels produits».28 Comme le signale Dockès (1969), Petty ne parvient pas, cependant, à prendre en compte le fait que la divi-­‐
sion du travail dépend de l’étendue du marché, ce qui sera un des piliers de la construction analytique de Smith (1991), repris par certains pionniers de l’économie du développement tels que Rosenstein-­‐Rodan (1943) et Nurkse (1953). Il ignore, ainsi, résolu-­‐
ment les effets de revenu et de mar-­‐
ché qui découlent de la concentration urbaine, mis en exergue par Krugman (1991) et les approches contempo-­‐
raines de l’économie géographique. Ceci est probablement lié au fait que son époque précède celle de la pro-­‐
duction en séries longues des manu-­‐
factures; il est, ainsi, moins conscient de la standardisation des produits et du besoin d’assurer leur écoulement. Une deuxième limite dans le travail de Petty est l’absence d’identification des avantages liés à la concentration du capital humain localisé. Il rappelle, certes, l'intérêt des artisans et des commerçants à se regrouper, non seu-­‐
lement pour profiter des avantages de la division du travail et des tâches, mais aussi pour favoriser une «saine simulation grâce à une augmentation de l’aptitude créatrice de l’homme».29 Il ne cherche pas, cependant, à étudier la façon dont ces interactions condui-­‐
sent à des avantages technologiques dans les processus de production loca-­‐
lisés. Marshall (1898) y remédie dans ses travaux de jeunesse, puis dans les parties de son œuvre dédiée aux dis-­‐
tricts, en s’appuyant sur le concept «d’atmosphère industrielle» qui décrit les avantages de la localisation indus-­‐
trielle en termes de transmission des savoirs et des connaissances.30 Selon Petty, un deuxième en-­‐
semble d’avantages d'agglomération provient de l’apparition d'économies d’échelle internes au secteur public lo-­‐
cal. L’augmentation de la densité moyenne de la population entraîne, en premier lieu, une diminution des dé-­‐
penses publiques par tête.31 La dé-­‐
fense, la justice, l’éducation et la santé représentent des services publics dont l’indivisibilité relative des équipements associés rend l’action plus efficace dans les grandes villes plutôt qu’en mi-­‐
lieu rural. Ces services améliorent la productivité du travail et permettent une accession plus rapide des habi-­‐
tants au statut de population active. A côté des économies générées par l’action publique, Petty souligne les avantages en termes de transport nés de la proximité de la main d’œuvre, tous secteurs confondus: «supposez que la construction de quelque grande fabrique occupe mille hommes, n’y aura-­‐t-­‐il pas beaucoup de temps économisé s’ils vivent sur mille acres que s’ils sont obligés de vivre sur dix fois cette étendue de territoire».32 Ces économies sont contrecarrées par des déséconomies d’agglomération liées, d’une part au développement de la criminalité et d’autre part aux risques de propaga-­‐
tion plus élevés de certaines épidé-­‐
Reproduit avec la permission du détenteur du copyright. Toute autre reproduction est interdite. CJRS/RCSR 35(1/3) 2012 mies, telles la peste et le choléra. Lorsque de tels chocs exogènes sur-­‐
gissent, leurs effets sont multipliés en fonction de la densité de la popula-­‐
tion, ce qui rend les grandes villes plus vulnérables. Les effets négatifs de l’agglomération urbaine restent, ce-­‐
pendant, résolument inférieurs aux ef-­‐
fets positifs générés par la division du travail et des tâches, ce qui conforte Petty quant au besoin d’une crois-­‐
sance urbaine explosive, conduisant à une concentration absolue des hommes et de l’activité économique. Conséquences sur la rente, le trans-­‐
port et les hiérarchies urbaines Le modèle de croissance urbaine de Petty conduit à deux séries de consé-­‐
quences: les premières concernent l’évolution de la rente et des coûts de transport dans une grande cité; les se-­‐
condes portent sur les systèmes de villes et permettent d’esquisser une première analyse en termes de hiérar-­‐
chies urbaines. Petty est le premier auteur à con-­‐
sidérer l’existence d’une rente diffé-­‐
rentielle de la terre, cent cinquante ans avant Ricardo et Von Thünen, bien qu’il ne la modélise pas comme ses successeurs. La conception de la rente chez Petty est très proche de celle de Von Thünen mais, étrangement, l’histoire de la pensée économique n’a jamais fait le parallélisme en considé-­‐
rant que les deux œuvres devaient être considérées de façon séparée. Le schéma de Petty est celui de la ville mono-­‐centrique, lorsqu’il cherche à étudier la formation de la rente. Il appuie son exemple sur la production et la distribution du blé. Rappelons que, selon Petty, la productivité du sol est a priori homogène et la valeur du travail se mesure par son coût de re-­‐
production et non pas par sa produc-­‐
tion effective. Dans ce cas, le rende-­‐
ment du sol ne dépend que de la quantité du travail sur place. L’agriculture apparaît, ainsi comme une activité à rendements décrois-­‐
sants non pas sur la base de la fertilité du sol, comme chez Ricardo, mais en fonction de la densité des agriculteurs. Le prix du blé varie selon l’offre et la demande: «un grand besoin de blé en augmente le prix et, par suite, la va-­‐
leur de la terre qui porte le blé et fina-­‐
lement la valeur de la terre, elle-­‐
même».33 La demande n’est pas équi-­‐
tablement répartie dans l’espace mais essentiellement concentrée en milieu urbain. Selon Petty, le prix du blé est déterminé par le coût de l’unité pro-­‐
duite dans la contrée la plus lointaine du centre urbain, reflétant son coût de production et son coût de transport. Ceci signifie que les terres agricoles les plus proches du centre bénéficient d’une rente supérieure à celles qui en sont éloignées, ce qui est conforme aux prévisions du modèle mono-­‐
centrique de Von Thünen, tout en le précédant de cent cinquante ans. Il convient, néanmoins de reconnaître que l’approche de Petty ne s’engage pas dans la démarche marginaliste qui fait la richesse de l’œuvre de Von Thünen. Il est intéressant de noter que dans la construction analytique de Petty, le prix du blé reflète fondamen-­‐
talement son prix naturel (le coût de production) augmenté des frais de transport; or, lorsqu’une région de production abondante est éloignée du centre urbain, les transports s’organisent pour améliorer son ac-­‐
cessibilité et réduire le coût de son acheminement. Les transports ont, ainsi, la même fonction que dans le modèle de Krugman (1991), à savoir l’amélioration de l’accessibilité des hommes et des biens vers la grande ville; ils représentent un moyen d'accé-­‐
lération de la concentration urbaine et non pas de rééquilibrage du territoire, comme ceci fut conçu par les ap-­‐
proches en matière d'aménagement du territoire. Notons, enfin, que Petty introduit dans l’analyse de la formation de la rente et des coûts fonciers des consi-­‐
dérations non seulement productives mais également en termes de de-­‐
mande d’habitation et d’aménités: «il arrive que des terres intrinsèquement semblables près d’endroits popu-­‐
leux… obtiennent un prix d’achat en revenus annuels plus élevé que dans les endroits éloignés».34 Le prix des terrains augmente, alors plus que pro-­‐
55 portionnellement à la rente, lorsque les terrains se rapprochent des villes.35 Ceci est lié «au plaisir et l’honneur ex-­‐
traordinaires dont jouissent les per-­‐
sonnes qui possèdent ces terres, car omne tulit punctum, qui miscuit utile dulci»36. A côté de cette analyse, essentiel-­‐
lement axée sur l’organisation éco-­‐
nomique de la ville et de sa périphérie, Petty propose une première approche comparative des tailles des villes eu-­‐
ropéennes puis mondiales. Ce travail s’inscrit dans le contexte d’une véri-­‐
table polémique entre les arithméti-­‐
ciens de la fin du dix-­‐septième siècle, cherchant à déterminer laquelle des capitales française ou anglaise était la plus grande ville du monde.37 Dans sa série des essais sur l’arithmétique politique, Petty dé-­‐
montre la suprématie de Londres, tout en essayant de donner des éléments de comparaison, permettant un clas-­‐
sement des villes. Il «prétend, ainsi, prouver qu’il y a plus de peuple à Londres qu’à Paris et à Rouen en-­‐
semble et que Londres est aussi plus considérable à plusieurs autres égards».38 Par ailleurs, il explique, «à ce que nous pouvons connaître du né-­‐
goce et de la douane de Bristol en An-­‐
gleterre, que cette ville est aussi grande que celle de Rouen en France; il paraît que la ville de Dublin en Ir-­‐
lande a un plus grand nombre de che-­‐
minées, et par conséquent plus de peuple que Bristol».39 Il engage, ainsi, un travail compa-­‐
ratif des tailles des villes qui pourrait se révéler, à juste titre, comme l’ancêtre des lois rang-­‐taille des villes, sans évidemment que Petty puisse maîtriser ces modèles de mesure des hiérarchies urbaines: que l’on prouve qu’ «il y a dans les 28 villes de Flandre, les 3 grandes villes de France ou les 2 de la Chrétienté ou 1 dans le monde, autant de monde ou plus de loge-­‐
ments ou plus de commerces qu’à Londres, l’année de l’avènement de Jacques 1er»40 lance-­‐t-­‐il à ses détrac-­‐
teurs, en donnant par-­‐là un ordre de mesure des tailles des villes dans le système urbain européen. Reproduit avec la permission du détenteur du copyright. Toute autre reproduction est interdite. 6 Dimou et Pecqueur Dans d’autres essais, Petty essaie de comparer les populations de Cons-­‐
tantinople, de Rome ou de Pékin avec celles de Londres mais ses calculs res-­‐
tent fortement approximatifs et éloi-­‐
gnés de la réalité, du fait d’une ab-­‐
sence quasi-­‐totale de données fiables. Cette première classification des villes européennes n’est cependant pas mise en relation avec son «mo-­‐
dèle» de croissance urbaine. Ainsi, Pet-­‐
ty ne donne pas fondamentalement les raisons économiques qui condui-­‐
sent à une différentiation des tailles des villes, dans le même pays ou en Europe. Son argumentation repose davantage sur un certain sentiment de nationalisme et de supériorité anglaise et non pas sur des mécanismes éco-­‐
nomiques qui peuvent engendrer une distribution de villes de taille diffé-­‐
rente. Enfin, ce travail permet également de mettre en avant certaines autres caractéristiques des villes, telles que la densité de la population ou l’étalement urbain: «les habitants de Paris étant à l’égard de ceux de Londres comme environ 6 à 7 et les maisons comme 6 à 9, nous en infé-­‐
rons que les habitants de Londres ne sont pas si entassés ni si serrés dans leurs demeures que ceux de Paris et qu’ils sont en état de se donner plus d’espaces et de liberté».41 Ces indica-­‐
teurs statistiques sont d’une éton-­‐
nante actualité et apparaissent, au-­‐
jourd’hui encore, au service des déci-­‐
deurs publics en matière de politiques de la ville, notamment dans l’arbitrage entre densification et étalement ur-­‐
bain. Conclusion Selon Sauvy (1977), «si Petty est génial, c’est parce qu’il a l’art de poser les questions, de soulever des mon-­‐
tagnes, de détruire d’immenses es-­‐
paces calmes et des dogmes qui les appuient. Peu importe les réponses, le mal est fait, le trouble est entré».42 Par le caractère précurseur de son travail, Petty peut être considéré comme le père de l’économie spatiale contem-­‐
poraine. De Marshall à Schumpeter et jusqu’à aujourd’hui, les intuitions de Petty sur le rôle de l’espace restent L’espace urbain et William Petty une référence, bien que peu de tra-­‐
vaux investissent l’étude critique de ses écrits sur l’agglomération et la ville. Chez Petty, la concentration ex-­‐
trême des travailleurs et des firmes sur une seule localité est une configura-­‐
tion organisationnelle optimale, fon-­‐
damentalement antinomique avec une vision d’équilibre spatial caractérisé par une distribution équitable des res-­‐
sources sur le territoire. Est-­‐ce que, comme Dockès (1969) le souligne, l’objectif de Petty est celui d’annuler le rôle de l’espace en réduisant l’activité économique sur un seul point, donc en la rendant définitivement à-­‐spatiale? Ou, à l’inverse, l’espace ne trouve-­‐t-­‐il pas sa définition dans la proximité des hommes et des ressources permettant d’augmenter l’efficacité de l’activité économique, grâce à l’apparition d’un certain nombre d’avantages que l’on pourrait qualifier d'externalités d’agglomération? La deuxième option semble davantage justifiée par l’analyse plurielle que livre l’auteur en matière de formation de la rente fon-­‐
cière, d’organisation de l'activité éco-­‐
nomique et des transports et de géné-­‐
ration des hiérarchies urbaines. Ce-­‐
pendant, bien qu’il en esquisse la trame, Petty ne parvient pas à mettre en place un véritable modèle d’agglomération, permettant d’expliquer la formation et le déve-­‐
loppement des villes, du fait qu’il ne maîtrise pas, à cette époque, une ins-­‐
trumentation mathématique adé-­‐
quate. Le prolongement d’une analyse approfondie des écrits de Petty exige des travaux complémentaires envers deux directions: en premier lieu, une comparaison plus systématique avec les approches mono-­‐centriques et les écrits de Von Thünen sur la formation de la rente foncière. Certes, les hypo-­‐
thèses de base sur le rôle de l’espace ne sont pas les mêmes chez les deux auteurs, car Petty admet que l’activité économique urbaine est caractérisée par l’apparition de rendements crois-­‐
sants quand Von Thünen admet des rendements constants; néanmoins, leurs travaux sur la rente foncière convergent sur de nombreux points qu’il convient d’élucider. En second lieu, l’œuvre de Petty s’inscrit à l’origine d’un paradigme spatial de l’agglomération écono-­‐
mique, dont les fondements analy-­‐
tiques se trouvent dans les écrits de Marshall sur les districts industriels, alimenté par une série de travaux con-­‐
temporains sur la formation des villes43 et la croissance urbaine44. Il se-­‐
rait, alors, intéressant d’établir les liens entre ces travaux diachroniques de façon plus systématique et recon-­‐
sidérer l’évolution de la pensée éco-­‐
nomique sur l’espace urbain et le con-­‐
cept d’agglomération. Références Aspromourgos, T. 2005. The invention of the concept of social surplus: Petty in the Hartlib circle. European Journal of the History of Economic Thought 12(1), 1 – 24. Becattini, G. 1979. Dal settore industriale al distretto industrial. Rivista di Economia e Politica Industriale 5(1), 7-­‐21. Black, D, & Henderson, JV. 1999. A Theory of Urban Growth. Journal of Political Economy 107, 252-­‐284. Caire, G. 1965. Un précurseur négligé: Wil-­‐
liam Petty ou l’approche systémique du développement économique. Revue Economique 16(5), 734-­‐776. Derycke, P-­‐H. 1979. Economie Régionale et Urbaine. Paris: PUF. Dockès P.. 1969. Histoire de la pensée éco-­‐
nomique spatiale: XVI-­‐XVIII siècles. Paris: Flammarion. Dostaler, G. 2008. Les lois naturelles en économie. Émergence d’un débat. L'Homme et la société 4(170-­‐171), 71-­‐92. Dupaquier J. 1998. Londres ou Paris? Un grand débat dans le petit monde des arithméticiens politiques (1662-­‐1759). Population 53 (1-­‐2), 311-­‐325. Eaton, J, & Eckstein, Z, 1997. Cities and growth: theory and evidence from France and Japan. Regional Science and Urban Economics 27, 443-­‐474. Fujita, M, & Krugman, P. 1995. When is the economy monocentric? Von Thünen and Chamberlin unified. Regional Science and Urban Economics 25, 505-­‐528. Fujita, M, & Mori, T. 1996. The role of ports in the making of major cities: self-­‐
agglomeration and hub-­‐effect, Journal of Development Economics 49, 93-­‐120. Reproduit avec la permission du détenteur du copyright. Toute autre reproduction est interdite. CJRS/RCSR 35(1/3) 2012 Fujita, M, & Thisse, J-­‐F. 1997. Economie géographique: problèmes anciens et nouvelles perspectives. Annales d'Éco-­‐
nomie et de Statistique 45, 37-­‐87. Fujita & Thisse. 2001, Agglomération et marché, Cahiers d’économie et de socio-­‐
logie rurales 58-­‐59, 12-­‐ 57. Guitton, H. 1963. Statistique et économétrie. Paris: Dalloz. Hotelling H.1935. Demand functions with limited budgets. Econometrica, 3(1), 66-­‐
78. Krugman, P. 1991. History vs. expectations. Quarterly Journal of Economics 106, 651-­‐
667. Krugman, P. 1996. The Self-­‐organizing Econ-­‐
omy. London: Blackwell Press. Krugman, P, & Venables, A. 1995. Globaliza-­‐
tion and the inequality of nations. The Quarterly Journal of Economics 110(4), 857-­‐880. Le Bras, H. 2000. Naissance de la mortalité. L’origine politique de la statistique et de la démographie. Paris: Gallimard/Le Seuil. Lucas, R. 1993. Making a miracle. Econome-­‐
trica 61(2), 251-­‐272. Markzewski, P. 1964. Précis de Comptabilité Nationale. Paris: Dalloz. Marshall, A. 1898 [1971]. Principles of Economics, traduction française de la quatrième édition. Paris: Librairie de Droit et de jurisprudence et Gordon & Breach. Marx, K. 1867 [1971]. Le Capital, Vol. I Paris: Éditions sociales. Murata, Y. 2008. Engel's law, Petty's law, and agglomeration. Journal of Develop-­‐
ment Economics 87, 161–177. Nurkse, W. 1953. Problems of Capital For-­‐
mation in Underdeveloped Countries. New York: Basil Blackwell. Petty, W. [1905]. Les œuvres économiques complètes. Paris: Giard et Briere. Rohrbasser, M. 1999. William Petty (1623-­‐
1687) et le calcul du doublement de la population. Population 54 (4/5), 693-­‐705. Rohrbasser, M. 2008. Süssmilch lecteur de Petty Arithmétique politique et théolo-­‐
gie naturelle. Journal électronique d’Histoire de la probabilité et des statis-­‐
tiques 4(1), jehps.net Rosenstein-­‐Rodan, L. 1943. Problems of in-­‐
dustrialization of Eastern and Southern Europe. Economic Journal, 53, 202-­‐211. Sauvy, A. 1977. Éléments de démographie. PUF, Paris. Schaffar, A. 2010. La nature de la croissance urbaine indienne. Revue d’économie du développement 2, 101-­‐120. 77 20
21
Petty (1905: 40). Dockès (1969). 22
Schaffar (2010). Schumpeter, J. 1949. Economic theory and entrepreneurial history. Reprinted in Schumpeter, J, 1989, Essays on Entrepre-­‐
neurs, Innovations, Business Cycles and the Evolution of Capitalism. New Bruns-­‐
wick: Transaction Publishers. 2 23
Petty (1905: 41). Smith, A, 1776 [1991] An Inquiry Into the Na-­‐
ture and the Causes of the Wealth of Na-­‐
tions. Oxford: Campbell & Skinner. 27
Süssmilch, J, 1741 [1998]. Les changements de l’espèce humaine, démontré par la naissance, la mort et la propagation de celle-­‐ci. Paris: INED. Zhang, Y, & Zhao, X. 2004. Testing the scale effect predicted by the Fujita-­‐Krugman urbanization model. Journal of Economic Behaviour and Organization 55, 207-­‐244. Zito, G. 1972. A note on the population of seventeenth century London. Demogra-­‐
phy 9(3), 511-­‐514. 24
Petty (1905: 521). 25
Petty (1905: 521). 26
Marx (1867 [1967]) et Schumpeter (1949). 2
Guitton (1963). 3
Dupaquier (1998). 4
Markzewski (1964). 5
Caire (1965), Dockès (1969), et Derycke (1979). 6
Zhang & Zhao (2004), et Murata (2008). Aspromourgos (2005). 28
Petty (1905: 522). 29
Petty (1905: 520). 30
Becattini (1979). 31
Caire (1965). 32
Petty (1905: 522). 33
Petty (1905: 49). 34
35
Petty (1905: 49). Dockès (1969). 36
37
1
Petty (1905: 521). Petty (1905: 49). Dupaquier (1988). 38
Petty (1905: 512). 39
Petty (1905: 512). 40
41
Petty (1905: 512). Petty (1905: 39). 42
Sauvy (1977: 2). 43
Krugman (1996). 44
Black et Henderson (1999). 7
Krugman (1991) et Fujita & Krugman (1995). 8
Lucas (1993, Eaton & Eckstein (1997), et Black & Henderson (1999). 9
Krugman & Venables (1995), Fujita & Krugman (1995), Krugman (1996), et Fujita & Thisse (2001). 10
11
Rohrbasser (1999). Petty (1905: 463). 12
Rohrbasser (2008). 13
Le Bras (2000). 14
15
Petty (1905: 331). 16
17
Petty (1905:180). Petty (1905: 416). Caire (1965). 18
Petty (1905: 60). 19
Petty (1905: 61). Reproduit avec la permission du détenteur du copyright. Toute autre reproduction est interdite. 
Téléchargement
Study collections