3
b) Des méthodes différentes pour mesurer les
variations de prix affectent les comparaisons des
évolutions aux États-Unis et en Europe
L'évolution des prix de vente des produits ou des ser-
vices modifiés par le progrès technique intègre deux
dimensions : une pure variation de prix, le prix à payer
pour une même qualité de produit ou de service
variant d'une période à la suivante, mais aussi une
variation de la qualité du produit ou du service d'une
période à l'autre. Une mesure exacte de la croissance
implique de dissocier ces deux dimensions et d'ajuster
les mouvements de prix observés pour tenir compte
de l'amélioration de la qualité. Ces ajustements sont
délicats, et ils ne sont pas standardisés dans les comp-
tes nationaux. Cela aboutit à des indices de prix pour
les nouvelles technologies fortement divergents d'un
pays à l'autre, qui reflètent plus des différences de
méthode que des mouvements de prix réels. Les
États-Unis se caractérisent par des ajustements pour la
qualité plutôt plus importants qu'en Europe par des
méthodes dites «hédoniques». L'impact de cette diffé-
rence sur les comparaisons de croissance en volume
est assez délicat à établir, parce que ces produits sont
fréquemment importés. La fourchette de l'impact est
donc assez large, comprise entre 0,1 et ¼ de point sur
la croissance américaine de la fin des années 90.
D'une façon générale, le partage volume-prix est pro-
blématique dans des services qui prennent une impor-
tance croissante dans le PIB : services bancaires,
commerce de détail, services de santé. Les conven-
tions adoptées pour isoler les mouvements de prix
dans ces secteurs sont différentes d'un pays à l'autre,
et aboutissent parfois à des évolutions négatives de la
productivité. L'OCDE a mené des simulations en
calant à zéro la productivité dans ces secteurs en
France et aux États-Unis. Cela aboutit à relever la
croissance de 0,2 point par an en France, et seulement
de 0,1 point aux USA.
Enfin Américains et Européens utilisent des formules
de pondération différentes pour agréger les évolutions
individuelles et dégager une croissance d'ensemble de
l'économie. Les Américains ont recours à des indices
dits de Fischer, les Européens à des indices dits de
Laspeyres. L'utilisation des indices de Fischer diminue
la croissance américaine d'un peu plus de 0,1 point par
an.
Les biais ainsi identifiés dans la mesure favorisent les
États-Unis, de 4 points sur le niveau du PIB et de 0,3 à
0,4 point sur la croissance annuelle quand on en fait
masse. Ainsi les faibles écarts observés avec les statis-
tiques actuelles sur le niveau de la productivité horaire
(6,5 points) et les évolutions du PIB par habitant
(0,3 point par an) ou de la productivité horaire
(0,4 point par an) sont à la limite de la robustesse sta-
tistique.
Tableau 2 : effets des différences de méthode sur
le niveau du PIB américain et de sa croissance
Source : OCDE, calculs DP.
Les conclusions des calculs d'évolution sur le PIB par
habitant ou la productivité horaire sont par ailleurs
assez sensibles au choix de l'année de départ, en raison
du déphasage des cycles au début des années 90 entre
l'Europe et les États-Unis ou au choix du champ
(l'union européenne plutôt que la zone euro).
En d'autres termes, une fois passés au crible, seuls les
éléments suivants paraissent robustes dans les écarts
de performance économique entre l'Europe et les
États-Unis : un niveau de PIB par habitant supé-
rieur, un niveau de productivité horaire compara-
ble, une croissance plus rapide aux États-Unis,
des gains de productivité qui accélèrent aux
États-Unis alors qu'ils décélèrent en Europe.
2. Les écarts sur le taux d'emploi et la durée
du travail paraissent expliquer l'essentiel
de l'écart de niveau de vie, mais ils pour-
raient masquer une productivité intrinsè-
quement plus faible en Europe
a) Les écarts sur la quantité de travail expliquent
que le niveau de vie soit plus faible en zone euro
alors que la productivité observée est à peu près
la même
Tableau 3 : quantité de travail aux États-Unis
et en zone euro
Source : OCDE.
Impact sur le
niveau du PIB
Impact sur la
croissance
Amortissement du matériel
militaire ½ à 1 point – 0,06 point
Imputation des services
bancaires non facturés 2,3 points < 0,1 point
Immobilisation des logiciels 1 à 1 ½ point ¼ point
Ajustement qualité pour les
prix des nouvelles technologies – 0,1 à ¼ point
Indices des prix dans certains
services – 0,1 point
Technique d'agrégation – –0,15 point
Total 4 points 0,3 à 0,4 point
2002 États-Unis Zone euro Zone euro/
États-Unis
Population totale
(en millions) 289 305 +5%
Population en âge de travailler
(15-64 ans, en millions) 192 203 +5%
Population participant au
marché du travail
(en millions)
146 142 –3%
Emploi total (en millions) 138 130 – 6%
Durée moyenne par employé
(en heures par an) 1815 1548 –15%
Heures travaillées
(en milliards) 250 201 –20%