Orchestre de Limoges et du Limousin
Rimski-Korsakov | Medtner | Rachmaninov
Hiver à lest
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Nikolaï Rimski-Korsakov (1844-1908)
Suite symphonique « Antar » op. 9 (1869)
I. Largo – Allegro giocoso
II. Allegro – Molto allegro – Allargando
III. Allegro risoluto alla marcia
IV. Allegretto vivace – Adagio amoroso
Nikolaï Medtner (1880-1951)
Concerto pour piano n°1 en do mineur op. 33 (1918)
Allegro – Tranquillo, meditamente – Tempo I – Coda. Allegro molto
• Entracte •
Sergueï Rachmaninov (1873-1943)
Symphonie n°2 en mi mineur op. 27 (1908)
I. Largo – Allegro moderato
II. Allegro molto
III. Adagio
IV. Allegro vivace
Sergio CASTELLÓ LOPEZ, clarinette solo
Durée : environ 2 h 30 - 1 entracte
Le bar de l’Opéra sera ouvert pendant l’entracte.
Mar. 2 février 2016 à 20 h - à l’Opéra de Limoges
Jeu. 4 février 2016 - 20 h 30 - à Brive / Théâtre des Treize Arches
Ven. 5 février 2016 - 20 h 30 - à Saint-Junien / La Mégisserie
Daniel Kawka, direction
Cyril Huvé, piano
Orchestre de Limoges et du Limousin
Hiver à lest
Rimski-Korsakov | Medtner | Rachmaninov
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Repères
Rimski-Korsakov, Medtner et Rachmaninov
sont bien ce que l’on pourrait appeler trois
figures conservatrices de la musique russe.
Le premier pèche par son appétence pour le folklore,
le classicisme des harmonies, l’intégrité religieuse dont
il fait preuve – il ira jusqu’à modifier la fin de la
Nuit
sur le mont chauve
de Moussorgski, dont il réalise
l’orchestration, pour calmer le sabbat démoniaque
peint par son confrère en figurant le lever du soleil et
le triomphe du jour.
Les deux autres ne se plieront pas aux avancées
musicales du XXe : lun, Medtner, refusera celles de
son temps, militant contre l’avant-gardisme de toutes
les nations ; l’autre, Rachmaninov, refusera celles de
son pays, fuyant le régime soviétique pour déployer
librement son néoromantisme occidental et parfois
hollywoodien.
Mais, sous leurs habits d’austères fondamentalistes de
la musique, Rimski, Medtner et Rachmaninov défendent
une autre vision : celle de notre héritage, celle de notre
civilisation libérée des idéologies – révolutionnaires
comme religieuses. Avec eux, plus quavec beaucoup
d’autres, l’Homme est sujet de son histoire.
Lombre de Palmyre
Antar est un fier guerrier qui s’est peu à peu éloigné
de toute humanité. Au milieu du désert persan, il erre
dans les ruines de l’antique cité de Palmyre… C’est
de ces brumes de sable et de chaleur que l’on émerge
avec les premières notes. Nous errons avec Antar
dans le sanctuaire de la civilisation, le cœur de notre
mémoire, un lieu d’histoire sur lequel l’Histoire n’a pas
et naura jamais de prise.
Au thème russe et majestueux des altos qui figure
par Constance Clara Guibert, dramaturge musicale
Site archéologique de Palmyre, Syrie - Temple de Bêl (avant sa destruction)
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l’origine du héros répond une flûte orientalisante
semblant séchapper entre les colonnes des temples :
c’est une gazelle qui se retrouve aux prises avec
un rapace. Antar la sauve et sendort… En rêve lui
apparaît l’ancienne reine de Palmyre, Gul-Nazar :
c’était elle qu’il a sauvée en sauvant la gazelle, et
elle lui offre en récompense les trois grands plaisirs
terrestres : la vengeance, le pouvoir et l’amour.
Les trois mouvements suivants se consacrent à chacun
de ces plaisirs. Rimski est à la recherche d’une forme
idéale, qu’il trouvera également dans
Schéhérazade
,
plutôt que d’un respect aveugle des codes : si ces
quatre mouvements feront d
Antar
sa « deuxième
symphonie », comme il l’avait lui-même nommée à une
certaine époque, ils sont surtout le reflet d’une écriture
strophique –
Antar
est un bien un poème dont chaque
strophe évoque un caractère et une atmosphère.
Le guerrier avait accepté le don mais avait également
demandé à mourir si ces plaisirs venaient à le lasser.
Après les avoir abondamment goûtés, il se laisse enfin
embrasser par la reine d’un baiser si vigoureux qu’elle
l’emporte avec lui vers un autre monde.
Palmyre, lieu abandonné par l’Homme, offre ce qu’il
désire à l’homme abandonné. Le temps et lhistoire
l’ont enchanté pour donner un sens à sa condition.
Elle offre la jouissance dans le rêve et le bonheur dans
la mort. Accueillant dans son palais éternel celui qui
a sauvé un être innocent, elle permet aux héros de
s’accomplir.
Et pour cela, nous continuerons à la rêver.
Medtneractionnaire ?
La Muse et la Mode : Défense des fondements de
l’art de la musique
fut le grand (et l’unique) ouvrage
de Nikolaï Medtner, publié en 1935 aux Etats-Unis,
quatorze ans après son exil. Lennemi de Medtner
nétait pas le Parti, bien qu’opposé au bolchévisme :
c’était la modernité. Le « Brahms russe », comme il fut
surnommé, croyait aux lois inaltérables de la musique
et à la suprématie de l’harmonie classique – car
naturelle.
A la manière des grands compositeurs romantiques,
il écrivit uniquement pour le piano, seul (quatorze
sonates, trente-huit
Contes
et plusieurs petites pièces),
soliste (trois concertos) ou accompagnateur (un large
répertoire de chambre, trois sonates pour violon,
cent huit mélodies). Son écriture se développe dans
son attachement aux racines russes, manifeste dans
ses
Contes
, et aux racines occidentales que lon entend
dans ses sonates. Dans son concerto, on entend bien
sûr l’héritage mélodique de Rachmaninov qui a déjà
composé ses trois premiers concertos, mais aussi
celui de Liszt qui lui confère une richesse harmonique
étrangère à la musique russe.
Aux Etats-Unis, d’abord, où il retrouva son ami
Rachmaninov, puis en France et à Londres, Medtner
fuyait à la fois le bolchévisme et la modernité. A-t-il
réussi à quitter le XIXe siècle qui s’est éteint quand il
avait vingt ans ? Sans doute pas. A-t-il réussi à dire
adieu à la Russie impériale qui s’est écroulée quand
il en eut trente-sept ? Peut-être pas non plus. Son
écriture, comme celle de Scriabine, sest suffit à elle-
même et n’a pas fait de lui pour autant un compositeur
de droite. Son héritage était celui des grands maîtres,
russes et occidentaux. Il refusa les frontières que les
bolchéviques et les dictatures totalitaires du XXe siècle
séchinèrent à ériger, mais aussi le nihilisme artistique
(mouvements dada) dans lequel l’Europe plongea à
l’issue de la Grande Guerre qui lui avait fait perdre tous
ses repères culturels et humains.
En consacrant sa vie à ce qui fondait sa culture
plutôt qu’à ce qui déchirait les peuples, en se libérant
des idéologies révolutionnaires (tant politiques
qu’artistiques), Medtner se comporta en homme du IIIe
millénaire.
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