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INTRODUCTION
La communauté scientifique mondiale s’accorde aujourd’hui à conclure que la hausse
générale des températures dans le monde, provoquant la fonte des banquises et la fréquence
accélérée des cyclones et autres phénomènes météorologiques dévastateurs qui mettent en
péril l’avenir de l’espèce humaine, est causée par l’augmentation exponentielle de la
concentration des gaz à effet de serre dans l’atmosphère rejetés par les activités humaines
depuis la Révolution industrielle.
« Avec cette législation internationale et communautaire, l’air et sa « pathologie », à
savoir la pollution, se retrouvent aux frontières du domaine marchand. Une telle démarche
peut sembler immorale tant la notion de droit est traditionnellement associée à des contenus
positifs, ce qui n’est pas le cas de la pollution. De plus, l’idée que les agents privés puissent
gagner de l’argent avec de la pollution, en exerçant une fonction d’intermédiaires financiers
en quotas d’émission, semble inadmissible. »1 Les quotas d’émission de gaz à effet de serre ne
seraient-ils que des « droits à polluer » ?
Le décor est planté. L’un des instruments de lutte contre le réchauffement climatique
choisi par les Etats signataires du Protocole de Kyoto le 11 décembre 1997, dans la continuité
de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques de New York du 9
mai 1992, est un marché mondial d’échange de quotas d’émission de gaz à effet de serre.
L’article 17 du Protocole de Kyoto prévoit que les parties ayant souscrit des engagements de
réduction d’émission de gaz à effet de serre peuvent échanger entre elles des droits d’émission
aux fins de remplir leurs engagements de réduction. Cet outil révolutionnaire de « permis
d’émission négociables » n’est pas une pure nouveauté : en effet, le Clean Air Act a été adopté
aux Etats-Unis d’Amérique en 1990 pour combattre les pluies acides engendrées par le
dioxyde de soufre (SO2) dégagé par les installations industrielles, et passe par un système
d’autorisation d’émettre une certaine quantité de ce gaz nocif (allowances) délivrée à chaque
installation et de droits d’émission négociables (credits) correspondant à la différence entre la
quantité autorisée et celle effectivement rejetée dans l’atmosphère. Le Protocole de Kyoto
s’est directement inspiré de ce système.
1 Benoît Le Bars, « La nature juridique des quotas d’émission de gaz à effet après l’ordonnance du 15 avril
2004 », JCP - La Semaine Juridique édition générale, 7 juillet 2004, n° 28, p. 1268.