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- la troisième tension, surtout perceptible dans l’enseignement général, résulte de la conciliation
délicate du développement des compétences transversales et des compétences
disciplinaires (Fourez, 1997) ;
- enfin, la dernière tension, transversale, oppose l’éducation à la citoyenneté et la conformation
à des rôles sociaux différenciés. Alors que, par définition, l’éducation à la citoyenneté doit être
la plus semblable pour tous, il apparaît que les compétences terminales prévues pour
l’enseignement qualifiant mettent préférentiellement l’accent sur une seule des trois
dimensions de la citoyenneté (la responsabilité), alors que l’enseignement de transition
privilégie les deux autres (le sens critique et la participation active à l’orientation de la société).
L’analyse indique que chaque acteur, et particulièrement les enseignants, peut être amené,
individuellement ou collectivement, à gérer les tensions présentes dans les documents officiels, à
prendre des options, par exemple en privilégiant l’un des pôles de la tension. Leurs options
dépendent notamment de la manière dont les responsables du système éducatif traduisent les
objectifs dans les dispositifs concrets d’encadrement du travail enseignant (programmes, grilles
d’évaluation,…). Ainsi peut-on montrer que, pour chacune des tensions, les dispositifs tendent à
privilégier un des deux pôles de la tension :
- le pôle de la préparation pointue à un métier plutôt que celui de l’adaptabilité (du fait
notamment que les programmes des options groupées sont essentiellement structurés autour
d’une liste répertoriant les différents agir propres à un métier) ;
- le pôle de l’insertion professionnelle directe plutôt que celui de la poursuite des études du fait
du flou qui subsiste à propos de la distinction entre les cours généraux orientés et ceux qui ne
le sont pas ;
- le pôle des compétences disciplinaires plutôt que celui des compétences transversales, du fait
que les intitulés des cours restent disciplinaires ;
- le pôle de la conformation à des rôles sociaux différenciés plutôt que celui de l’éducation à la
citoyenneté, du fait qu’aucun socle commun aux différentes filières n’a été défini au-delà du
1er degré (Delvaux, 1999).
L’analyse ainsi menée ouvre un vaste champ de questions, parmi lesquelles :
- la question de la structuration des dispositifs d’accompagnement et d’encadrement des
enseignants des 2ème et 3ème degrés ;
- la question de la structuration des filières au niveau du 2ème degré de l’enseignement
secondaire.
Sur ce dernier point, force est de constater qu’une proportion très importante des trajectoires
scolaires comporte des changements de filières et d’options en cours ou à l’issue du deuxième
degré. Pour certains, cette instabilité pourrait être réduite grâce à une amélioration des aides à
l’orientation et à une revalorisation des filières qualifiantes. Pour d’autres, l’instabilité ne pourra
être combattue par ces seules mesures : la prolongation de la scolarité et l’ancrage fort de la
hiérarchie des enseignements conduisent à penser qu’il est difficile d’espérer une orientation
définitive de la majorité des élèves à l’âge de 14 ans. Dans cette perspective, il conviendrait dès
lors de réfléchir à une redéfinition des filières, et plus précisément à une atténuation de leurs
spécificités qui, en aucun cas, ne devrait consister en un alignement des différentes filières sur les
caractéristiques de l’enseignement général. Ce rapprochement des différentes filières pourrait
consister notamment en une atténuation des différences horaires en matière de cours généraux
(dont les contours devraient être redéfinis), et en une remise en cause de la liaison souvent étroite
faite entre nature du tronc commun et option (qui interdit par exemple la combinaison de