
nProtection sociale et réduction de la pauvreté
Sur le plan international, on considère que les pays nordiques, y compris la
Finlande, valorisent fortement non seulement l’égalité des chances mais
aussi l’égalité des résultats. Sous le vocable « modèle nordique (ou scandi-
nave) », on ne fait pas seulement référence à la taille du secteur public
(caractérisé notamment par une lourde fiscalité et des dépenses sociales éle-
vées), mais aussi aux résultats comme une distribution des revenus équi-
table, l’égalité des sexes, et de faibles taux de pauvreté. La vaste
comparaison entre pays de l’OCDE, réalisée par Atkinson et al. (1995),
bâtie sur des données des années quatre-vingt, valide cette image : parmi les
pays industrialisés, les pays nordiques avaient les plus faibles disparités de
revenus et les plus bas taux de pauvreté. En croisant les données sur les
dépenses sociales et les taux de pauvreté, nombre d’études vont dans le
même sens : plus un pays investit dans la protection sociale, plus faible est
son taux de pauvreté (Mitchell, 1991 ; Atkinson, 1998).
De telles analyses ressources-résultats au niveau macro ont reçu des criti-
ques très diverses. Tout d’abord, une même somme dépensée peut être
utilisée de manières diverses, avec des conséquences différentes (Esping-
Andersen, 1990). Ensuite, les variations de dépenses sociales résultent non
seulement de choix politiques généraux, mais aussi des contraintes dues
aux structures de population ou d’emploi. Troisièmement, les dépenses
sociales sont définies par rapport au PIB ; or, celui-ci peut fluctuer de
manière considérable. Quatrième critique : les statistiques de dépenses
sociales ne tiennent pas compte, le plus souvent, de l’imposition des presta-
tions (Adema, 2001). On a également pu soutenir que les conditions de vie
des citoyens sont fortement influencées, par d’autres dimensions des politi-
ques sociales – en plus des revenus de transfert –, comme l’éducation et la
politique des rémunérations ou du logement (cf. par exemple Castles et
Mitchell, 1990). Ainsi, la prudence s’impose s’agissant de la relation entre
dépenses de protection sociale et pauvreté. La covariation n’implique pas
nécessairement la causalité.
Si l’on peut, certes, critiquer l’usage du niveau de dépenses sociales comme
indicateur d’une politique globale, il faut néanmoins se rappeler que les lut-
tes politiques portent le plus souvent sur des questions d’argent, et souvent
aussi sur la pauvreté. C’est pourquoi nous utilisons ici des données sur la
part des dépenses sociales dans le PIB et sur le taux de pauvreté pour donner
une image synthétique des priorités des différents pays, et servir ainsi de
point de départ à des analyses approfondies.
Les données comparatives sur la pauvreté utilisées par Atkinson et al. pro-
venaient de la base de données LIS, qui malheureusement n’est pas très à
jour. La plupart des données récentes sur la protection sociale et la pau-
vreté proviennent d’Eurostat. Toutefois, compte tenu de la diversité des
RFAS No4-2003
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