LA CHRONIQUE D'ÉRIC LE BOUCHER
La Chine aux dépens du monde
[ 04/12/09 ] 30 commentaire(s)
La Chine n'assume pas son rôle de troisième puissance économique du monde. Elle continue
d'agir comme lorsque sa taille était négligeable, profitant de son insertion dans la division
internationale du travail, exportant et prospérant en passager clandestin. Désormais le passager
clandestin occupe toute la cale, il met le navire en péril.
La façon dont a été éconduit Barack Obama lors de sa visite à Pékin sur la question d'une
réévaluation du yuan a signé un refus de responsabilité. Il fut répondu au président américain
que le coupable de la crise était les Etats-Unis. Que la Federal Reserve hausse ses taux d'intérêt
et que la Maison-Blanche resserre ses déficits budgétaires, le dollar se redressera et le yuan
avec.
La façon dont les autorités chinoises ont reçu, quinze jours plus tard, MM. Almunia, Juncker et
Trichet, venus le week-end dernier à Nankin demander la même chose sur le yuan y a ajouté du
mépris. Wen Jiabao, le Premier ministre chinois, a sèchement refusé toute discussion et il a fait
paraître un communiqué agressif expliquant que cette réévaluation ne viserait en fait qu'« à
restreindre le développement de l'économie chinoise ». Les trois Européens venus en
quémandeurs ont été repoussés comme s'ils étaient encore à bord d'une canonnière. L'Europe
voudrait du mal à la Chine.
La nouvelle puissance chinoise accepte, très doucement, de participer à certaines affaires du
monde. On l'a vu en Corée du Nord et, très singulièrement, sur l'Iran, les Chinois ayant rejoint les
Américains et les Européens, en même temps que les Russes, pour condamner le programme
nucléaire secret de Téhéran. La promesse de réduire de 45 % son intensité carbone est, si l'on
veut être indulgent, à ranger dans cette catégorie. Encore que la promesse est faible (au total les
émissions de CO2 augmenteront d'au moins 50 %) et elle s'accompagne d'une exigence de
compensations financières et technologiques que le Nord, là encore « coupable », doit verser au
Sud, dont la Chine.
En matière économique, on ne voit aucun progrès. La question du yuan est déterminante car elle
signifie que la stratégie chinoise reste l'exportation. Sans doute ne peut-on demander à ce pays,
qui détient 2.200 milliards de dollars dans ses caisses, de dévaluer cette richesse en réévaluant
brutalement le yuan. Mais il faudra pourtant que Pékin accepte de voir que la demande des
Américains et des Européens est légitime. Un pays qui croît de 8 % l'an, comme ce sera la cas
cette année, et qui accumule des excédents commerciaux gigantesques doit voir sa monnaie se
réévaluer. La réévaluation du yuan rendrait les importations moins onéreuses, c'est-à-dire
améliorerait le pouvoir d'achat de la population chinoise.
Le refus monétaire s'accompagne d'un plan de relance axé sur les investissements. La Chine a
décidé d'une relance gigantesque de 14 % de son PIB (contre 2 % en France) ; tout le monde la
félicite. Elle devient un « moteur » qui se substitue à l'américain, défaillant. Mais, dans le contenu