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TEMPS FORT : Mettre la sant
é en réseaux?
Date de parution:
Mercredi 4 juin 2008
Auteur:
Sylvie Arsever
Après l'échec de l'article sur la santé, beaucoup comptent sur les réseaux pour sortir le financement de l'impasse.
Mais les réseaux restent mal connus et peu utilisés, y compris par les assureurs. Tour d'un paysage contrasté.
Max
-Albrecht Fischer est médecin à Seengen (AG). Il y a quelques années, il a transformé son cabinet en société par actions.
But de l'op
ération: assurer son maintien et le développer en cabinet de groupe. Une expérience encore assez rare pour avoir
fait l'objet d'un expos
é le 23 mai, à l'occasion de l'assemblée annuelle de la Société suisse de médecine interne à Lausanne.
Mais la tendance est l
à: les médecins se regroupent. Pour partager les frais généraux, assurer une couverture horaire large
sans assumer des horaires d'esclaves, voire pouvoir travailler
à temps partiel. Et parfois, pour faire une médecine différente.
C'est ce qu'ont fait Marc
-André Raetzo et Philippe Schaller à Genève. Ils assument la responsabilité du réseau Delta qu'ils ont
cr
éé en 1991. Le modèle se retrouve chez MediX, à Zurich et à Berne. Une société, créée par des médecins, assume la
responsabilit
é économique des soins. Elle passe avec les assureurs un contrat prévoyant une rémunération au forfait par
patient. Le forfait couvre l'ensemble des soins dispens
és, à l'intérieur du réseau comme à l'extérieur: recours à des spé
cialistes,
hospitalisations, etc.
Les patients doivent passer par un m
édecin du réseau pour tous leurs problèmes de santé. Moyennant cet engagement, ils
obtiennent des baisses de primes qui peuvent atteindre 25%.
Les m
édecins membres s'engagent à participer, une fois par semaine, à des cercles de qualité où sont discutées les prises en
charge. Leur patient
èle est composée à la fois d'assurés «réseau» dont ils coordonnent les traitements et de patients
ext
érieurs. Dans les deux cas, ils sont rémunérés à l'acte selon le Tarmed.
Compliqu
é? On peut faire plus simple. L'assurance Swica salarie des médecins dans ses centres de santé de Winterthour,
Zurich, Berne, B
âle, Saint-Gall et Genève. Le principe est le même: obligation pour le patient de passer par un médecin du
centre et pour ces derniers de participer
à des groupes de qualité. Le salariat diminue la responsabilité économique du mé
decin
mais, nuance Danilo Janjic, responsable du cabinet Swica de Gen
ève, «avec le Tarmed, tous les mé
decins sont plus ou moins
des salari
és des caisses».
Les animateurs de ces diff
érents réseaux ont en commun une motivation: faire une mé
decine plus collective et plus consciente
de ses implications
économiques. C'est aussi, ils en sont convaincus, une meilleure médecine.
«
Les médecins du groupe Delta, relève Marc-André Raetzo, passent en moyenne plus de temps avec leurs patients. Mais ils
recourent moins aux sp
écialistes, aux examens et aux hospitalisations. C'est la conséquence d'une meilleure gestion de
l'angoisse et d'une meilleure culture du diagnostic qui s'
élabore dans les cercles de qualité.»
Ces derniers sont con
çus de faç
on plus ou moins directive, la formule plus souple semblant dominer en Suisse romande. Chez
MediX, les cercles sont organis
és par thèmes et modérés et l'on y exprime sans complexe le souci de pratiquer une médecine
é
conomique. Au centre Swica de Genève, la discussion, plus informelle permet surtout, pour Danilo Janjic, une «
ventilation des
é
motions» favorable à une bonne prise en charge.
Ce dernier point est essentiel, estime Marc
-André Raetzo: l'inquiétude du médecin contribue à allonger la liste des examens
inutiles. D'autant plus que le m
étier de géraliste ne s'apprend pas vraiment à l'hôpital. «On y pratique une médecine
descriptive: on
établit un diagnostic par élimination, ce qui implique un grand nombre d'examens. Cette approche a permis les
progr
ès de la médecine. Mais dans un cabinet, on ne peut pas procéder ainsi. On doit travailler avec le risque, choisir les
mesures diagnostiques en fonction de leur pertinence pour le patient. C'est une culture tr
ès différente, qui se construit par le
partage des exp
ériences dans les cercles de qualité.»
Le m
édecin genevois attribue à cet affinement de l'approche diagnostique l'essentiel des économies réalisées par les réseaux.
Felix Huber insiste sur un autre aspect: la n
égociation, parfois tendue avec les spé
cialistes. A ce stade, ils ne font pas partie du
r
éseau. Logique: ce dernier a entre autres pour but de recourir le moins possible à eux. Mais il s'efforce de nouer des liens
privil
égiés avec ceux d'entre eux qui partagent ou acceptent ses valeurs et envisage même de les admettre à certaines
conditions.
Un autre facteur d'
économie propre aux réseaux est en passe de se généraliser, relève Danilo Janjic: le recours systématique
aux g
ériques et au médicament le moins cher à efficacité égale. Depuis que la quote-part des assurés qui ne font pas cet
effort a doubl
é, les patients réclament d'eux-mêmes une prescription qu'il fallait, il n'y a pas longtemps, les convaincre
d'accepter.
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TEMPS FORT : Une bonne solution peu encourag
ée
Date de parution:
Mercredi 4 juin 2008
Auteur:
Sylvie Arsever
Jusqu'ici, les politiques ont renonc
é aux mesures les plus efficaces pour encourager les réseaux.
Favoriser les r
éseaux: tout le monde en parle après le rejet massif de l'article constitutionnel sur la santé dimanche dernier.
Mais comment? Jusqu'ici, les parlementaires n'ont gu
ère brillé dans la recherche de solutions.
La loi actuelle permet aux caisses de consentir jusqu'
à 20% de rabais sur les primes des assurés qui optent pour un modèle
restreignant leur acc
ès aux prestataires de soins. Si l'assurance peut démontrer, sur au moins cinq exercices, qu'un modèle
permet des
économies plus importantes, elle peut dépasser cette limite. Rares sont toutefois celles qui le font.
Strat
égies commerciales
Ce n'est, d'abord, pas facile. Mais surtout la recherche d'
économies ne constitue qu'un élément de leur straté
gie et ce n'est pas
le plus important. Aujourd'hui, la cl
é du succès, voire parfois de la simple survie, est dans la chasse aux bons risques. Mieux
vaut donc multiplier les offres
«light» à l'efficacité douteuse mais séduisantes pour les personnes en bonne santé que de
chercher
à isoler et à promouvoir, parmi ces offres, celles qui permettent de vraies économies réalisées sur des assurés peu
d
ésirables car malades.
Pour permettre aux r
éseaux de se développer, il faut donc améliorer la compensation des risques. C'est l'avis des docteurs
Raetzo et Huber mais aussi d'une caisse comme CSS. Les premiers d
ésignent aussi les franchises à option, qui diminuent
l'avantage comparatif des r
éseaux.
Les d
éputés ont envisagé une autre piste: permettre aux réseaux de récompenser leurs clients par des prestations
suppl
émentaires et/ou par des participations moins élevées aux coûts. Cette façon de faire a l'avantage de viser les assurés
consommateurs de soins, c'est
-à-dire ceux pour lesquels un réseau performant peut permettre les économies les plus
substantielles. La majorit
é des Etats l'a toutefois écartée en décembre 2006 pour voter un texte inodore qui a été
temporairement mis de c
ôté par le National.
Un mod
èle controversé
Mais l'id
ée a resurgi récemment dans le cadre du débat sur la liberté de contracter. La caisse Helsana a lancé l'idée
d'augmenter la participation aux soins et la franchise des assur
és désireux de garder le libre choix de leur médecin - un moyen
de favoriser ceux qui accepteraient une limitation. Ce mod
èle ne mentionne pas les réseaux et suscite à gauche et chez une
partie des m
édecins le soupçon de viser une médecine à deux vitesses. La FMH a toutefois marqué son intérêt, non pour le
d
étail mais pour la démarche.
On le voit, le simple souhait de favoriser les r
éseaux ne suffit pas, et de loin, à mettre tout le monde d'accord. De nombreux
m
édecins restent jaloux de leur indépendance et de nombreuses caisses refusent toute législation susceptible de limiter leur
libert
é commerciale. C'est notamment le cas du Groupe Mutuel. Présent dans de nombreux ré
seaux, ce dernier souhaite rester
libre de sa man
œuvre et verrait d'un bon œil un remplacement des rabais de primes a priori par des bonus a posteriori sur les
é
conomies réellement réalisées par les réseaux.
Mais les choses changent. Les jeunes m
édecins sont toujours plus nombreux à souhaiter travailler en groupe. La chasse aux
bons risques devrait diminuer
à partir de 2012, en raison d'une compensation des risques affinée.
La question des r
éseaux devrait revenir prochainement dans le cadre du débat sur l'obligation de contracter. La commission
des Etats qui est charg
ée du dossier explorait la possibilité d'une levée partielle, dont la viabilité est fragile après le vote de
dimanche. Les m
édecins espèrent lui substituer une promotion efficace des réseaux - dont la plupart revendiquent le droit de
contracter librement avec les caisses.
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TEMPS FORT : Le
«managed care» fait encore peur
Date de parution:
Mercredi 4 juin 2008
Auteur:
Sylvie Arsever
Comment responsabiliser le m
édecin sans pénaliser le patient?
Qui dit r
éseau ne dit pas toujours la même chose. De nombreuses caisses proposent à leurs assurés des listes de praticiens
parmi lesquels ils doivent imp
érativement choisir un généraliste pour obtenir un rabais sur leurs primes. Les médecins figurant
sur ces listes participent parfois
à des cercles de qualité. Mais souvent, ils n'entretiennent aucun lien particulier.
Pour permettre de r
éelles économies sur les traitements, estiment les économistes, un réseau doit assumer une responsabilité
é
conomique. C'est le principe du «managed care», face auquel de nombreux médecins conservent une solide mé
fiance. Le lien
entre
économies réalisées sur le traitement et revenu du médecin, notamment, fait problème, relève Charles Favre-Coune,
pr
ésident de la Société vaudoise de médecine. Dans les règles qu'elle a fixées à l'intention des médecins membres de ré
seaux,
cette derni
ère précise que la participation aux bénéfices doit être peu importante.
C'est le cas chez Delta. L'essentiel des profits r
éalisés par le réseau est investi dans des offres de prévention pour les patients
ou de formation continue pour les membres et la ristourne en cas de bon exercice se limite
à quelques milliers de francs par
m
édecin et par an. MediX est plus généreux - jusqu'à 40000 francs par an et par médecin. Toujours acceptable, estime Felix
Huber, du moins dans un syst
ème où le médecin doit impérativement fidéliser des patients susceptibles de déserter à tout
moment
-, un avis qui ne convaincrait sans doute pas tous les médecins romands.
Autre crainte: celle d'une situation o
ù le médecin se retrouverait soumis au fameux «diktat des caisses». C'est thé
oriquement le
risque majeur chez Swica. Risque pour le moment th
éorique, estime Danilo Janjic: «
Nous devons respecter le budget mais tant
que celui
-ci est calculé de façon adéquate, ça va. C'est d'ailleurs la profession tout entière qui va devoir s'habituer à l'idée que
les ressources disponibles pour soigner sont limit
ées.» Les économies réalisées n'ont, en outre, pas d'incidence sur les
salaires.
Rationaliser les soins
La fixation du budget est centrale. Dans les r
éseaux suisses, on procède par capitation, c'est-à-dire au forfait par patient. Ce
forfait est toutefois modul
é en fonction des pathologies. «Nous tenons compte de l'âge, du sexe, des frais médicaux
occasionn
és l'an précédent et de certains groupes de médicaments prescrits en cas de maladie chronique, explique Felix
Huber: un mod
èle que nous céderions volontiers à la compensation des risques entre caisses.»
L'ensemble de ces r
éseaux sont constitués autour du principe du «gatekeeper» - de la porte d'entrée contrôlée par un mé
decin
vers l'ensemble du syst
ème de soins, D'autres s'efforcent au contraire de faciliter l'accès à ce réseau aux personnes atteintes
de maladies chroniques. Il s'agit alors d'optimiser la prise en charge en
évitant les ruptures de traitement entre hôpital et
ambulatoire, consultation sp
écialisée et médecin de famille. Le ré
seau Diabaide, construit avec l'aide du canton de Vaud pour la
prise en charge du diab
ète, en fait partie. Le principe, là, est celui du «disease management», la gestion de la maladie. Plus
cibl
ées, ces approches sont aussi susceptibles de générer des économies. Leur marge de développement est importante dans
un monde o
ù la coordination et le partage de compétence ne sont pas encore le point fort du milieu médical et hospitalier.
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