VI INERTIE – GEOMETRIE DES MASSES Dans l’étude de la dynamique des systèmes matériels et des solides il est important d’étudier la répartition géométrique des masses, afin d’exprimer simplement les concepts cinétiques qui apparaissent dans les lois fondamentales. 1. Masse d’un système matériel a) Masse volumique Définition : Soit un ensemble de points matériels (Gi , mi ) . En chaque point M de l’espace occupé par les (Gi , mi ) on définit un volume de mesure V(M) fermé. La densité volumique de masse au point M, ρ ( M )∈R + , est alors donnée par : ρ (M ) = masse de V ( M ) V (M ) ρ est aussi appelée masse volumique, son unité est le kg/m3 Remarque La fonction densité ρ : ε → R + ainsi définie n’est généralement pas continue (distribution discrète des points). Cette définition correspond à un procédé physique simple de mesure de ρ (on prend un volume dont on mesure la masse et on fait la division). On peut cependant modifier légèrement la définition de ρ pour obtenir une fonction continue, en affectant un poids à chaque point matériel par exemple. Nous supposerons ρ généralement continu dans la suite. Mécanique - VI - 1 / 8 b) Masse Définition : Avec le modèle du milieu continu, un système matériel S est représenté par un volume V fermé et borné de ε sur lequel on a défini la densité volumique de masse ρ. La masse de S est alors définie par : m( S ) = ∫ dm = ∫ V M ∈S ρ ( M ) dV ( M ) V est le domaine volumique contenant l’ensemble des masses. Remarque : En mécanique newtonienne, la masse d’un système matériel présente la propriété d’additivé (faux en mécanique relativiste). n Pour un ensemble discret de n points matériels de masse mi, on a : m = ∑ mi i =1 c) Elément de volume Rappel : Suivant le type de coordonnées choisi pour décrire le système, l’élément de volume dV(M) s’exprime différemment : • Coordonnées cartésiennes : dV = dx dy dz • Coordonnées cylindriques : dV = ρ d ρ dθ dz • Coordonnées sphériques : dV = r 2 sin ϕ dr dθ dϕ 2. Centre de masse (ou d’inertie) a) Définition On appelle centre de masse d’un système matériel S le barycentre des différents points de S affectés de leurs masses respectives. !!!!" " m GG ∑ i i =0 n Pour un système de n points matériels (Gi , mi ) , sa position est définie par : i =1 Mécanique - VI - 2 / 8 !!!" n !!!!" Cette relation est équivalente à : m OG = ∑ mi OGi i =1 n où O est une origine quelconque et m la masse totale du système ( m = ∑ mi ) i =1 Pour un milieu continu de domaine Ω (volume, surface ou courbe) sur lequel est définie une densité uniforme (volumique, surfacique, linéique) son centre de masse G est alors défini par : !!!!!!!!" " !!!" !!!!!!!!" , ou la relation équivalente : GM dm = 0 m OG = OM dm , ∀ O ∫ ∫ M ∈Ω M ∈Ω Remarques : - Le centre de masse est souvent appelé centre de gravité (abus de langage) - La définition du centre d’inertie est indépendante du point O choisi b) Propriétés (i) Associativité Soient 2 systèmes matériels disjoints S1 et S2 de centres de masse respectifs G1 et G2, alors ( S1 ∪ S2 ) a pour centre de masse G tel que : !!!" !!!!" !!!!" m( S1 ∪ S 2 ) OG = m( S1 ) OG1 + m( S 2 ) OG2 Généralisation : Si un système matériel S est une somme de n systèmes matériels simples Si, cette propriété permet de déterminer le centre de masse de l’ensemble à partir des centres de masse Gi de chacune des parties : !!!" n !!!!" m( S ) OG = ∑ m( Si ) OGi i =1 (ii) Symétrie matérielle Définition : Un système matériel possède un élément de symétrie matérielle (point, droite, plan) si la masse volumique en tout point de ce système est égale à la masse volumique au point symétrique par rapport à cet élément de symétrie. ⇔ Soit sα : ε → ε l’application symétrie par rapport à α alors ∀A , ρ ( sα ( A) ) = ρ ( A) Mécanique - VI - 3 / 8 Propriété : Si un élément matériel S admet une symétrie matérielle par rapport à α (point, droite ou plan) alors le centre d’inertie de S, G, appartient à la symétrie : G ∈ α (iii) Théorèmes de Guldin → Détermination des centres de masse de courbes et de surfaces matérielles simples. 1er Théorème : Soit un système matériel S modélisé par un arc de courbe C plan (π) de densité linéique de masse ρl homogène. Soit ∆ une droite de (π) ne coupant pas C, alors on a : 2π l h∆ = S∆ où l = longueur de la courbe C h∆ = distance de G à ∆ S∆ = aire de la surface engendré par la rotation de C autour de ∆ Exemple : Position du centre de masse d’un quart de cercle de rayon R " " En prenant successivement pour ∆ les axes ex et ey délimitant le quart de cercle , on obtient : xG = yG = 2 R π 2ème Théorème : Soit un système matériel modélisé par une surface S dans le plan (π) de densité surfacique de masse ρ s homogène. Soit ∆ une droite de (π) telle que S ne coupe pas ∆, alors on a : 2π A h∆ = V∆ où A = aire de la surface S h∆ = distance de G à ∆ V∆ = volume du domaine engendré par la rotation de S autour de ∆ Mécanique - VI - 4 / 8 Exemple : Position du centre de masse d’un quart de plaque circulaire de rayon R Même démarche que pour le quart de cercle. On obtient : xG = yG = 4 R 3π 3. Moments d’inertie a) Moment d’inertie par rapport à un axe Définition On appelle moment d’inertie d’un système matériel continu S par rapport à un axe ∆, la quantité positive : I ( S / ∆) = ∫ M ∈S d ( M , ∆ )2 dm où d ( M , ∆) est la distance du point M à l’axe ∆ !!!!" d ( M , ∆ ) = HM Remarque : Pour un système matériel discret (ensemble de n points matériels (Gi , mi ) ), on a : n I ( S / ∆) = ∑ mi d (Gi , ∆)2 i =1 Théorème de Huygens-Schteiner Soit un système matériel S de densité de masse ρ et de centre d’inertie G. Soit ∆ un axe et ∆ G la droite parallèle à ∆ passant par G. Alors on a : I ( S / ∆) = I ( S / ∆ G ) + m(S ) d 2 où d = d (G, ∆) (distance entre les deux axes parallèles ∆ et ∆ G ) Mécanique - VI - 5 / 8 b) Opérateur et matrice d’inertie Définition : Soit un système matériel S de domaine Ω (volume, surface ou courbe) et de densité de masse ρ ( M ) (volumique, surfacique ou linéique), on appelle opérateur d’inertie de S en A ∈ ε " l’application linéaire J AS : E → E vérifiant : !!!!" " !!!!" " " " ∀u ∈ E , J AS (u ) = ∫ ( AM ∧ u ) ∧ AM dm Ω Cette opérateur est aussi appelé tenseur d’inertie. Théorème : " " Quelque soit l’axe définit par la droite ( A, u ) , avec u = 1 , l’opérateur d’inertie vérifie : " " " I ( S / ∆) = u . J AS (u ) Définition : " La matrice carrée suivant laquelle s’explicite l’opérateur J AS dans une base orthonormée " " " directe B = (e1 , e2 , e3 ) est appelée matrice d’inertie. J11 J = J 21 J B 31 S A J12 J 22 J 32 J13 J 23 J 33 avec ∀(i, j ) = 1, 2,3 " " " i ≠ j , J ij = ei . J AS (e j ) , − J ij est appelé produit d’inertie i= j " " , J ii représente le moment d’inertie de S par rapport à ( A, ei ) , J ii = I ( S / ei ) = I Ai Remarque : Dans le cas fréquent où S est un solide par rapport auquel la base B est fixe, la matrice J SA est constante Théorème : " " " " " " " " " L’application linéaire J AS est symétrique ( ∀ (u , v ) ∈ E 2 , u . J AS (v ) = v . J AS (u ) ) ⇒ la matrice d’inertie est symétrique Mécanique - VI - 6 / 8 Application : " " " Soient ( x, y , z ) les coordonnées cartésiennes relatives au repère R = (O, ex , ey , ez ) alors la matrice d’inertie s’écrit : A −D −E J = −D B −F −E −F C R S O avec A = I Ox = ∫ ( y 2 + z 2 ) dm D = I xy = ∫ xy dm B = I Oy = ∫ ( x 2 + z 2 ) dm E = I xz = ∫ xz dm C = I Oz = ∫ ( x 2 + y 2 ) dm F = I yz = ∫ yz dm S S S S S S Démonstration : Il suffit d’utiliser dans la définition du moment d’inertie l’expression de la distance à un axe issue de la géométrie vectorielle : !!!!" " OM ∧ u d= " u c) Axes principaux d’inertie Théorème : " Soit une application linéaire L : E → E symétrique, alors il existe au moins une base " orthonormée dans laquelle la matrice de L est diagonale. Définition : Soit un système matériel S et un point A ∈ ε , alors il existe au moins une base orthonormée directe dans laquelle la matrice de J SA est diagonale. → Il est possible de trouver, par changement de base un système d’axes orthonormés " " " B ' = (e1 , e2 , e3 ) tel que les produits d’inertie soient nuls : I1 J = 0 0 B' S O 0 I2 0 0 0 I 3 Mécanique - VI - 7 / 8 Cette base est appelée base principale d’inertie, ses axes, axes principaux d’inertie, la matrice, matrice principale d’inertie et les termes diagonaux, I1, I2, I3, moments principaux d’inertie. Théorème : Symétrie matérielle Soit un système matériel S de domaine Ω (volume, surface ou courbe) et de densité ρ. (i) Plan de symétrie : Si S admet une symétrie matérielle par rapport à un plan (π), alors tout axe ∆ perpendiculaire à (π) est axe principal d’inertie. " " " ⇒ Soit (π ) = (Oxy ) par exemple, alors J OS (ez ) = I Oz ez et I xz = 0 = I yz (ii) Axe de symétrie : Si S possède un axe ∆ de symétrie matérielle, alors ∆ est axe principal de symétrie " " " ⇒ Soit ∆ = (Oz ) par exemple, alors J OS (ez ) = I Oz ez et I xz = 0 = I yz Corollaire " " " Soit un système matériel S et R = (O, e1 , e2 , e3 ) un repère orthonormé direct de E, alors J OS est " " " une matrice diagonale et (e1 , e2 , e3 ) est trièdre principal d’inertie dans les deux cas suivants : " " " " (i) S admet une symétrie matérielle par rapport à 2 des 3 plans (O, e1 , e2 ) , (O, e2 , e3 ) et " " (O, e1 , e3 ) " " " (ii) S admet une symétrie matérielle par rapport à 2 des 3 axes (O, e1 ) , (O, e23 ) et (O, e3 ) Théorème de Huygens : Généralisation aux matrices d’inertie !!!" " " " " " " Soit S un système matériel de centre d’inerte G tel que OG = a e1 + b e2 + c e3 et B = (e1 , e2 , e3 ) une base orthonormée directe, alors le transport des moments d’inertie permet d’écrire : b2 + c 2 J OS = J GS + m( S ) − a b −a c −a b a 2 + c2 −b c −a c −b c a 2 + b 2 (transport des opérateurs d’inertie) Mécanique - VI - 8 / 8