A P P L I C A T I O N Stockage Les mémoires relèvent le défi de l’« infoplosion » dans les systèmes embarqués L’industrie des mémoires numériques vit une période de changement spectaculaire avec une utilisation croissante des technologies flash NAND pour la mémoire embarquée. Depuis son invention en 1984 par Toshiba, leur capacité a considérablement augmenté, tandis que le coût par gigaoctet a fondu. Pourtant il reste de nombreux défis à relever. Revue de détail. AUTEUR Axel Stoermann, directeur général marketing OEM et Applications mémoire, Toshiba Electronics Europe. L es données qui sont créées, enregistrées et partagées aujourd’hui à un rythme phénoménal dans l’économie numérique génèrent une véritable « explosion d’information », que l’on pourrait nommer en utilisant le néologisme « infoplosion » et qui menace de submerger les entreprises et les consommateurs. La société d’études de marché IDC prévoit ainsi que la capacité de stockage brute disponible dans le monde passera de 2 596 Eo (exaoctets) en 2012 à 7 235 Zo (zettaoctets) en 2017. Pour mettre ce nombre en perspective, 1 Eo est égal à 1.000.000.000.000.000.000 octets ou 1018 octets (et 1 Zo égale 1021 octets). Concrètement, 1 Eo est équivalent à la mémoire disponible sur 31 millions d’iPads dotés chacun de 32 Go de mémoire. L’essor des terminaux intelligents tels que les tablettes, les smartphones, les montres intelligentes, les réfrigérateurs ou les compteurs communicants fait rapidement croître la demande envers des technologies de mémoire flash NAND capables d’être embarquées dans des espaces restreints. En outre, les périphériques de stockage à base de flash NAND, comme les disques SSD (Solid State Disk), ou disques à semi-conducteurs, ou les clés USB remplacent désormais de plus en plus les disques durs traditionnels et les médias optiques, notamment lorsque la vitesse d’accès aux données est critique. Dans de nombreux systèmes informatiques du type Big Data ou Cloud, les SSD sont tout en haut des systèmes de stockage intégrant à la fois des SSD et des HDD (Hard Disk Drive) ou disques durs magnétiques. 28 / L’EMBARQUÉ / N°7 / 2014 Les puces NAND gravés en 19 nm sont dotées d’une capacité qui va de 60 Go à 512 Go, sous différents formats. On les retrouve dans les disques durs SSD 2,5 pouces, mSATA et M2 (simple et double face). Les versions destinées aux entreprises disposent d’une option d’autochiffrement conforme aux spécifications du Trusted Computing Group. ● Corollaire de la croissance de la demande en technologie NAND, le coût par gigaoctet a diminué, stimulant ainsi davantage la demande. Une des raisons principales de cette évolution est que la densité de données stockables sur une puce flash NAND de dimension donnée n’a fait qu’augmenter. Les flash NAND ont en effet toujours été en pointe et pionnière dans la mise en œuvre industrielle des procédés de lithographie utilisés par l’industrie électronique. Conséquence, à l’heure actuelle, les mémoires NAND sont parmi les circuits intégrés produits en masse les plus denses. Quelques chiffres : depuis l’introduction des NAND en 1984, la taille de la cellule élémentaire est passée de 700 nm à 19 nm et, avec l’introduction de nouvelles technologies au niveau des cellules, la densité de bits des NAND a été multipliée par plus de 2 000 ! Parallèlement à cette augmentation de densité, on a pu obser- ver une formidable réduction du prix par gigaoctet, qui a diminué encore plus rapidement que la densité de bits n’a augmenté. En plus des avantages de coût résultant de la miniaturisation lithographique, l’introduction de traitements automatisés plus efficaces et de wafers (plaquettes de silicium) de plus grand diamètre a permis aux NAND de devenir le support de stockage favori de nombreuses applications. Les mémoires NAND face à de nombreux défis L’un des principaux défis à relever pour ceux qui veulent utiliser les tout derniers types de NAND brutes dans leurs projets tient au fait que ces nouvelles technologies ont besoin de moteurs ECC (Error Correction Code, ou code de correction d’erreur) plus puissants intégrés aux contrôleurs. Et cette course est devenue permanente puisqu’en général les contrôleurs ont du mal à tenir la cadence. Comme Stockage A P P L I C A T I O N les blocs de mémoire NAND se classiques et offrent ainsi une comTENDANCES DES FLASH NAND dégradent et s’usent, on doit fixer patibilité avec les mémoires flash On voit ici les avantages de la réduction du coût une limite haute au nombre d’écri- NAND SLC au niveau commandes, des technologies de mémoires avancées par rapport tures de chaque emplacement fonctionnement général, conditionau surcroît de complexité des codes de correction mémoire. Des algorithmes de « nive- nement et brochage. d’erreurs. lage d’usure » doivent aussi être intéEsquisses des mémoires Cost grés aux contrôleurs NAND pour du futur assurer une utilisation équitable de tous les emplacements mémoire. Si la technologie existe pour produire Pour ceux qui souhaitent réduire le des NAND à cellules élémentaires nombre de composants système et encore plus petites, cette diminution ne pas se préoccuper d’architecture de la taille va à l’encontre de leur 4 x nm 3 x nm 2 x nm contrôleur, les NAND e-MMC offrent endurance et de leur fiabilité. Pour une alternative intéressante, qui surmonter cela, des cellules NAND ECC 8 bits intègre à la fois la puce mémoire capables de stocker plusieurs bits 4 bits flash et le contrôleur NAND dans un mémoire ont été développées. Car si même module. Ces dispositifs sont les cellules SLC ne peuvent stocker 1 bit typiquement utilisés dans les cartes que 1 bit par cellule, les MLC (Mulmémoire et les clés USB rapides, et ti-Level Cell, ou cellule multinisont conformes aux normes JEDEC. veaux), de leur côté, peuvent en stoc4 x nm 3 x nm 2 x nm Les contrôleurs embarqués exécutent ker 2, tandis que les TLC (Triple level des opérations de contrôle comme Cell, ou cellule triple-niveau) peuvent liés à l’augmentation du nombre de la correction d’erreurs, le nivelage stocker 3 bits par cellule. Cependant, bits par cellule est de considérer de d’usure et la gestion des blocs défec- l’endurance à l’écriture et à l’effacenouvelles technologies NAND. tueux pour garantir le bon fonction- ment est impactée par de telles Parmi celles-ci, la plus proche de la nement de la mémoire NAND. approches. Les SLC peuvent ainsi phase de production en série est la L’un des défis associés à la migration supporter environ 100 000 cycles, NAND 3D. Il s’agit ici d’empiler pluvers de plus petits éléments de stoc- contre 5 000 cycles pour les MLC, et sieurs couches de NAND l’une sur kage est le besoin de contrôle ECC seulement 1 000 cycles pour les TLC. l’autre, afin d’augmenter la capacité plus complexe, et donc de proces- Aujourd’hui la situation est la suisans devoir rétrécir les dimensions seurs hôtes de plus en plus puissants. vante : les NAND SLC et MLC sont horizontales. Pour des SLC (Single Level Cell, ou désormais utilisées couramment dans La mémoire RAM magnétorésistive cellule simple niveau) produite en les disques d’entreprise qui doivent (MRAM) est une autre technologie technologie 43 nm, 1 bit d’ECC par résister à de fréquents cycles d’écriprometteuse. Il s’agit d’une forme de tranche de 512 octets est nécessaire. ture ou d’effacement tandis que les mémoire non volatile extrêmement Un chiffre qui monte à 8 bits par NAND MLC et TLC se rencontrent rapide, offrant une endurance pratitranche de 512 octets pour des SLC dans les SSD grand public, là où la quement illimitée à l’écriture et à l’efen 24 nm. vitesse de lecture et le prix par facement. De ce fait, la technologie Pour de nombreuses applications gigaoctet sont devenus les facteurs les MRAM a le potentiel de changer la existantes qui utilisent de la mémoire plus influents dans les profils d’achat. manière dont tous les appareils élecNAND SLC, comme les produits Une façon d’éviter ces problèmes troniques utilisent la mémoire industriels, les processeurs de flash NAND. Aujourd’hui, on uticommunication ou les systèmes ● Les modèles BENAND de Toshiba soulagent le processeur lise en effet la flash NAND comme automobiles, des ECC à 1 bit sont hôte de la tâche de correction d’erreurs, sans nécessiter de contrôleur matériel supplémentaire. Ces mémoires utilisent la un disque dur : les données sont implémentés dans le logiciel même interface que les NAND classiques et offrent ainsi une copiées au démarrage depuis la hôte sans impact significatif sur compatibilité ascendante avec les mémoires flash NAND SLC flash NAND vers la DRAM la performance des applications. au niveau commandes, fonctionnement général, (mémoire vive dynamique), puis Cependant, migrer vers des conditionnement et brochage. le code est exécuté à partir de mémoires de pointe nécessitant cette DRAM. Avec la MRAM, plus des ECC à 4, 8, voire 24 bits, augbesoin de mettre en œuvre cette mente sensiblement la charge du approche dite de « shadowing » processeur, réduisant ainsi ses (recopie des données de la RAM performances. Afin d’éviter cet vers la DRAM). Les données sont écueil, les puces NAND à coren effet déjà prêtes dès la mise rection d’erreurs embarquée sont sous tension, et la vitesse de lecdésormais préférées. A l’instar ture est quasiment la même que des modèles BENAND de celle de la DRAM. Ce qui offre Toshiba qui soulagent le procesl’avantage supplémentaire de seur hôte de la tâche de correcnécessiter moins d’endurance de tion d’erreurs sans nécessiter de la flash NAND, qui peut alors sercontrôleur matériel supplémenvir à l’archivage des données à taire. Ces BENAND utilisent la plus long terme. n même interface que les NAND L’EMBARQUÉ / N°7 / 2014 / 29