Le Système monétaire international depuis 1944
Qu’est-ce qu’un système monétaire international (SMI) ? C’est l’ensemble des mécanismes et
des règles qui président à la création et à l’utilisation des moyens de règlement entre agents
appartenant à des nations différentes. Ainsi, le SMI permet concrètement l’existence
d’institutions à travers lesquelles les paiements internationaux sont réalisés et fixe par
conséquent la nature des « liquidités internationales », c’est-à-dire des moyens de paiement
qui, étant acceptés partout dans le monde, ont de ce fait également les fonctions d’unité de
compte. Il permet aussi de déterminer les taux de change et l’influence que les
gouvernements peuvent avoir dessus. On comprend donc que le type de SMI a un impact
considérable sur l’économie mondiale.
Trois grands systèmes ont existé depuis le milieu du 19e siècle : l’étalon-or qui a fonctionné
de 1850 à 1914 et s’est désagrégé dans l’entre-deux-guerres, le Gold Exchange Standard
(GES) de 1944 à 1971 environ puis le système monétaire international actuel. La célèbre
conférence de Bretton Woods qui a duré du 4 au 12 juillet 1944 a mis en place le GES, dont
les institutions et certains des principes régissent encore l’économie d’aujourd’hui, même si
les objectifs actuels ne sont plus les mêmes que ceux de 1944, et que la situation actuelle se
caractérise par un « non-système » sans véritable règle directrice générale.
Le système monétaire international actuel a-t-il solu les difficultés et les contradictions du
GES et permis d’instaurer un cadre bénéfique aux échanges et au développement ?
Pour répondre à cette question il faut étudier les principes et le fonctionnement du Gold
Exchange Standard (partie I), puis les réponses que tente d’apporter le SMI actuel face à aux
différentes évolution des économies nationales au sein du commerce international (partie II).
I) Le Gold Exchange Standard permet la reconstruction et l’essor des échanges après la
guerre mais comporte des déséquilibres fondamentaux
A) La conférence de Bretton Woods
1) Les 2 thèses en présence
Keynes voulait un système éliminant l’or et ne donnant aucun rôle privilégié à une monnaie
nationale. Il avait imaginé un système avec une unité de compte internationale, le bancor
détaché de l’or. White, sous secrétaire au trésor américain préconisait quant à lui un système
où le dollar se définit par une parité fixe par rapport à l’or (35$ l’once), et où les autres
monnaies se définissent par rapport au dollar. C’est finalement le plan américain qui sera
adopté.
2) L’accord sur les principes d’organisation du SMI
Les Accords de Bretton Woods mettent donc en place le système du Gold Exchange standard,
en français étalon-devise-or. Ils instaurent des changes fixes ajustables (fixité de la parité des
monnaies), et la création d’organismes internationaux.
B) Le fonctionnement du SMI après Bretton Woods
1) point théorique : le triangle de Mundell
Ce triangle schématise l’impossibilité pour un SMI de réunir les 3 caractéristiques que sont
les changes fixes, la mobilité parfaite des capitaux et l’autonomie de la politique monétaire. Il
peut seulement en réunir 2 d’entre elles ou bien réaliser un compromis et ne remplir aucune
des 3 parfaitement. Par exemple, on ne peut pas avoir des politiques monétaires autonomes et
des changes fixes si on ne restreint pas la liberté de circulation des capitaux (c’est le contrôle
des changes).
2) Les garants du SMI de Bretton Woods
Le SMI repose sur les Etats et leurs banques centrales ainsi que sur des institutions
internationales.
Le FMI joue 3 rôles dont le plus important est celui de prêteur à ses pays membres quand ils
rencontrent des difficultés de paiement. La banque mondiale qui effectue des prêts à long
terme aux pays pauvres pour favoriser leur développement. Je ne m’étends pas là-dessus.
Les Etats membres doivent, par l’intermédiaire de leur banque centrale maintenir la parité de
leur monnaie, avec une marge de fluctuation de 1%.
C) Le déséquilibre intrinsèque du système
1) Les facteurs de déséquilibre
Le système des changes fixes ne pouvait être maintenu dès lors que les économies des
différents pays ont enregistré une évolution trop divergente qui a entraîné des crises
monétaires spéculatives lorsque la mobilité des capitaux a été possible. De plus le prix de l’or
fixé à 35$ l’once n’a pas pu non plus être maintenu, ce qui a entraîné également une
spéculation sur l’or rapidement incontrôlable. Enfin le système accordait aux USA un
privilège exorbitant puisqu’ils pouvaient conserver un déficit de la balance des paiements,
réglé par l’émission de dollars.
2) Le dilemme de Triffin : pas d’alternative à l’instabilité
Pour permettre le rétablissement du commerce mondial, il fallait que les dollars et l’or sortent
des USA afin que les BC reconstituent des réserves. Ceci ne pouvait se faire que grâce à un
déficit de la balance des paiements, mais son caractère permanent a suscité la méfiance des
investisseurs qui ont spéculé sur l’or, pensant que les passifs des USA dépasseraient ses actifs
de réserves et que la parité ne pourrait être maintenue : c’est ce qui a entraîné l’effondrement
du système. Mais d’un autre côté, si les USA avaient pris des mesures pour réduire
l’exportation de leur monnaie, cela aurait privé le système de la liquidité nécessaire.
Conclusion partielle : La situation était insoluble, ce dilemme et l’évolution divergentes des
économies nationales vont mettre fin au système de Bretton Woods avec l’annonce le 15 août
1971 par Nixon de la fin de la convertibilité du dollar en or.
II) Le « non-système » monétaire international actuel est une réponse empirique aux
problèmes qui ont ébranlé le GES.
A) La mise en place d’un nouveau système est finalisée à la conférence de Kingston
par les Accords de la Jamaïque de 1976
1) La fin du rôle prépondérant de l’or
Le prix officiel de l’or est réévalué à deux reprises, en 1971 et 1973 avant qu’il ne soit
totalement démonétisé en 1976; on ne peut plus alors définir une monnaie par rapport à l'or,
qui devient une matière première comme les autres et ne remplit plus par ailleurs la fonction
de monnaie internationale, remplacé en cela par le dollar et les DTS.
2) La création d’une nouvelle unité de compte : le DTS
DTS = droit de tirage spécial. Leur création remonte à 1969, l’objectif était que les DTS se
substituent aux dollars comme principal instrument de réserve, pour que la création des
liquidités internationales ne soit plus liées à un éventuel déficit de la balance américaine des
paiements. Le DTS constitue l’unité de compte du FMI. Il est calculé par rapport à un panier
des plus importantes monnaies. Son développement a été freiné par les USA qui refusent de
voir le dollar remplacé par un instrument monétaire géré par un accord international.
B) Un nouveau système de changes émerge à partir de 1973
1) Une mosaïque de régimes de change
Les Etats doivent prendre en compte dans leur politique économique la détermination de leur
régime de change. La diversité des intérêts nationaux a induit la multiplicité des systèmes de
change. 4 types de possibilités s’ouvrent aux pays :
-le flottement indépendant
-le flottement régulé par le pays seul ou par un groupe de pays
- le rattachement à un panier de monnaies
-le rattachement à une seule monnaie
2) Les changes contrôlés
Actuellement, les monnaies dominantes que sont le dollar, l’euro et le yen ont un taux de
change flexible entre elles, cependant, les banques centrales peuvent quand elles le jugent
nécessaire intervenir sur le marché : il s’agit donc d’un taux de change contrôlé. Beaucoup de
PVD ont préféré rattacher leur monnaie au dollar (la Chine et beaucoup de pays d’Amérique
latine par exemple), d’autres à un panier de monnaies. Dans ce cas, si l’on se réfère au
triangle de Mundell, afin d’assurer la mobilité des capitaux et des changes fixes, les pays
perdent une très grande partie de leur autonomie monétaire.
C) Le système face aux défis de l’avenir
1) La nécessaire collaboration des institutions nationales face aux acteurs
privés
Le développement exponentiel des échanges a entraîné par ailleurs une interdépendance
croissante des économies nationales qui oblige aujourd’hui les pays à coordonner leurs
politiques économiques. Pour l’instant on ne peut cependant que constater l’absence d’action
commune de la Fed et de la BCE, leurs politiques de taux d’intérêts n’étant pas du tout
coordonnées, on assiste à un dérapage du dollar. La BCE ne veut pas sacrifier ses objectifs
intérieurs au maintien de la parité euro-dollar.
2) L’émergence de l’euro et l’endettement américain
Dans le système actuel, le dollar n'est plus la seule monnaie acceptée internationalement,
l’euro et le Yen le sont aussi, bien qu’à un moindre degré. Les Etats-Unis ne peuvent plus
s’endetter autant qu’ils le veulent puisque l’euro pourrait le remplacer comme monnaie
internationale en cas de perte de confiance des investisseurs dans le dollar.
Ainsi, si les banques centrales et les acteurs privés chez qui ont fini par se concentrer les
dollars souhaitent les changer pour acheter non des titres en dollars mais des titres en euro, le
dollar baissera vis-à-vis de l'euro. La compétition entre le dollar et l'euro a donc commencé.
Conclusion : Le SMI a beaucoup évolué depuis 1944, essentiellement pour s’ajuster aux
changements importants intervenus dans la structure des échanges internationaux depuis la fin
de la guerre. Actuellement, une réforme apparaît assez improbable. Si on veut rétablir des
changes fixes, il faudra alors renoncer à l’autonomie des politiques monétaires nationales, ce
qui supposerait un accord au niveau mondial. On voit cependant mal les Etats-Unis accepter
de déléguer cette compétence à une institution internationale, alors qu’ils admettent déjà
difficilement d’abandonner un peu de ce qu'ils considéraient jusqu'ici comme une liberté
absolue : conduire la politique monétaire américaine en fonction des seuls intérêts des Etats-
Unis. Il ne faut pourtant pas sombrer dans le pessimisme, car pour reprendre les termes de M.
Wolf, même sans institutionnalisation de ses principes et de ses mécanismes, "le « non-
système » actuel constitue le plus mauvais des systèmes à l’exception de tous les autres ".
Le Triangle de Mundell
Mobilité parfaite
des capitaux
Autonomie de la
politique monétaire
Changes fixes
1 / 4 100%