De l’approche par compétences à la mise en place de cheminements d’apprentissage différenciés…vers
une meilleure prise en compte de l’hétérogénéité des apprenants ? Violaine Page-Lamarche AIPU
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De l’approche par compétences à la mise en place de cheminements
d’apprentissage différenciés…vers une meilleure prise en compte de
l’hétérogénéité des apprenants ?
Violaine Page-Lamarche, Ph.D
Télé-université (UQAM)
100, rue Sherbrooke Ouest, Montréal (Québec) Canada, H2X 3P2
Téléphone :
(514) 843-2015, Télécopieur :
(514) 843-2160
Page-Lamarche.Violai[email protected]m.ca
Résumé
Cet article se classe dans la catégorie Communication et se rattache au thème 5 du
colloque de l’AIPU 2008 : Qualité des ressources pédagogiques des dispositifs de soutien
et d’aide à la réussite. Cette communication questionne et analyse le potentiel des
environnements d’apprentissage informatisés à prendre en compte les caractéristiques des
apprenants à travers une activité d’autodiagnostic des compétences facilitant la mise en
place de cheminements d’apprentissage différenciés dans le but d’optimiser la
persévérance et la réussite dans les formations à distance. Elle le fait en s’appuyant sur un
modèle d’un cours à distance qui intègre l’outil d’autodiagnostic des compétences :
Compétences+ et qui favorise la mise en place de cheminements d’apprentissage
différenciés. L’originalité de cette communication est la prise en compte des différences
dans une approche par compétences intégrée dans un scénario pédagogique.
Mots clés : Environnements d’apprentissage informatisés, apprentissage différencié,
approche par compétences.
Abstract
This article is allocated into Communication categorie and related to topic 5 of sAIPU
2008symposium: Quality teaching resources of the support and assistance to success.
This paper discusses and analyzes the potential of computerized learning environments to
take into account the characteristics of learners through self skills facilitating the
establishment of learning paths distinguishable, with the aim of optimizing the
perseverance and success in distance learning. It is based on a model from a distance
courses tool that integrates self Skills: Compétences + that promote the development of
differentiated learning paths. The originality of this communication is to take account of
differences in a skills-based approach in an integrated educational scenario.
Keywords: Learning Environments computerized, differentiated learning, skills-based
approach.
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Introduction
La formation continue fait maintenant partie du quotidien de nombreux adultes et nous
progressons dans une société l'apprentissage s’inscrit tout au long de la vie plutôt
qu’en préparation de l’existence. Plus que jamais les technologies de l'information et de
la communication donnent aux formations en ligne une place de tout premier plan dans
l'éducation et l'apprentissage (Merriam et Caffarella, 1991). Plus encore, la flexibilité de
ces environnements d’apprentissage apparait être une des solutions possibles pour une
mise en place et une prise en compte effective des différences d’apprentissage des
apprenants dans le but de réduire la distance transactionnelle inhérente à tous actes
pédagogiques. En effet, dans le cadre de l'apprentissage présentiel, la question de la prise
en comptes des différences individuelles a été éprouvée par de nombreuses recherches
théoriques et empiriques. Il est maintenant généralement admis que la prise en compte de
ces différences est un facteur déterminant dans le comportement des apprenants en
situation d'apprentissage. L'utilisation de méthodes d'enseignement et d'approches
spécifiques, telle que l’approche par compétence, améliore en effet, la performance et
l'attitude des apprenants. C'est à la suite d'autres chercheurs, qui reconnaissent
l'importance, la pertinence et la priorité de cette question dans le domaine de la formation
à distance, que la présente communication se situe (Le Blanc et Chevrier, 2000;
Tweedell, 2000, Lenning & Ebbers, 1999; Mac Kinnon, Franklin, 1997, 1994; Dirkx &
Jha, 1994; Koehler, 1992; Octernaud, 1990; Eastmond, 1992).
En plus de la présente introduction, la communication comprend trois parties. La
première situe la question de la prise en compte des différences d’apprentissage dans une
problématique plus générale; à savoir celle de l’identification des facteurs influençant la
persévérance dans les formations à distance. La deuxième partie présente la théorie de la
distance transactionnelle et introduit à la démarche de la pédagogie différenciée vue
comme un outil pour créer une proximité entre apprenant et situation d’apprentissage.
Enfin, la troisième et dernière partie analyse un modèle de cours à distance qui intègre
l’outil d’autodiagnostic des compétences : Compétences+ en vue de favoriser la mise en
place de cheminements d’apprentissage différenciés.
1. L’abandon, un mal endémique dans les formations à distance
La question de l’optimisation des formations à distance est à mettre directement en
relation avec l’une des problématiques centrales à ce type de formation, à savoir le
problème de l’abandon. Ainsi, au delà de l’engouement que suscite la formation à
distance avec l’avènement des cours en ligne, celle-ci souffre d’un mal endémique,
identifié dès la première génération des cours par correspondance et qui se perpétue avec
l’apprentissage en ligne. Les principales recherches menées dans le domaine des
technologies de l’information et de la communication en contexte éducatif (TICE) font
en effet encore état d’un taux élevé de décrochage. Les statistiques à ce sujet sont plutôt
rares, souvent confidentielles, et variables d’une institution à une autre. Il est toutefois
généralement admis que le taux de réussite d’un cours à distance est de 10 à 20 %
inférieur à la réussite d’un cours en présentiel. Le problème de l’abandon représente donc
un problème majeur en formation à distance.
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Si la recherche de solutions s'est d'abord portée vers une amélioration de la
configuration des environnements d'apprentissage, puis vers une modélisation des
contenus à mettre en ligne, nous entrons depuis quelques années dans une dynamique qui
se centre davantage sur l'apprenant et ses besoins. Ces recherches visent à comprendre les
relations entre les caractéristiques des apprenants, le matériel pédagogique et le contexte
dans lequel se déroule l’apprentissage en ligne. Le processus d’apprentissage est
influencé par des dimensions psychologiques, socio-affectives et environnementales
propres à l’apprenant ainsi que par des dimensions cognitives dont relève notamment
l’examen des différences et des caractéristiques des apprenants (Peng, 2003). Ainsi l’une
des clés avancées pour expliquer la persévérance aux études viendrait de la prise en
compte des différences comme facteur influençant et optimisant les résultats
d’apprentissage (Peng, 2003). Lorsqu’on interroge les apprenants sur les raisons de leur
abandon, ces derniers mettent très fréquemment en avant les problèmes liés à des
obstacles matériels, le manque de temps (ou la difficulté à gérer le temps) ou les
contraintes familiales et professionnelles. Ces causes sont bien entenduelles, mais
insuffisantes pour expliquer l’ampleur du phénomène. La recherche a tenté d'expliquer le
phénomène de l’abandon en mettant l'accent sur différentes variables; telles que les
caractéristiques socio-démographiques des apprenants, leurs aptitudes, leurs résultats
scolaires antérieurs, leurs sources de motivation, leurs traits de personnalité ou encore
leur situation financière (Bertrand, Demers, Dion, 1994; Powell, Conway & Ross, 1989;
Coldeway, 1986). Un autre axe de recherche s’est intéressé aux variables liées au
phénomène de la distance (Gibson et Graff, 1992; Garrison, 1987; Roberts 1984) ou
encore à celles portant sur l'interaction entre les caractéristiques des institutions de
formation et celles des apprenants (Kember, 1989; Sweet, 1986). Depuis le début des
années 1990, les théoriciens (Coldeway, 1986; Garrison, 1987) insistent sur la nécessité
d'une approche qui prenne en compte les caractéristiques des apprenants au centre des
systèmes d'apprentissage, ce qui amène à considérer les environnements d'apprentissage
dans une perspective socioconstructiviste.
Kember (1990), a élaboré un modèle de l’abandon spécifiquement adapté aux
formations à distance et qui représente le modèle de référence actuelle pour expliciter
l’abandon dans ce type de formation. Ce modèle porte sur l’intégration académique et
sociale. S’interrogeant au départ sur la différence entre les étudiants qui attribuaient leur
échec à l’impossibilité de concilier leurs études et les autres contraintes de leur vie, et
ceux qui, aux prises avec les mêmes contraintes, complétaient leurs études avec succès,
Kember propose un modèle qui explique cette différence au moyen du concept
d’intégration (Bourdage, Delmotte, 2001) c’est à dire la capacité de l’apprenant à intégrer
toutes les demandes liées à sa situation : vie professionnelle, vie familiale, vie associative
et vie étudiante. Chacune de ces composantes influence les autres composantes selon une
dynamique systémique. Parmi les composantes du modèle de Kember on trouve :
1) Des aspects académiques : matériel pédagogique, interactions entre les différents
acteurs de l’apprentissage, etc.;
2) L’engagement : la motivation intrinsèque et extrinsèque;
3) Les caractéristiques de l’apprenant : genre, âge, statut civil, nombre enfants,
style d’apprentissage;
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4) Les aspects sociaux lié au travail : intégration étude-famille, étude-emploi;
5) Les dimension des coûts : les coûts en terme de temps et d’argent et les bénéfices
que l’apprenant escompte retirer de sa formation.
En plus des ces variables on retiendra également que suivre une formation en ligne
requiert des aptitudes particulières telles que : identifier le dispositif de communication à
distance dans lequel on se situe, choisir un mode de communication synchrone ou
asynchrone, évaluer et gérer le temps d’utilisation d’un média, formuler linguistiquement
le problème rencontré (Perriault, 1996); savoir se débrouiller seul en situation complexe
mais aussi collaborer. Cet ensemble d’aptitudes, et il en manque certainement, montre le
degré de compétences requis pour suivre une formation à distance. Cette capacité de
gestion le plus souvent métacognitive, devient alors un préalable (Linard, 2000). Or, la
situation d’auto-apprentissage, au cœur même des formations à distance, est précisément
ce qui concentre nombre des variables liées à l’abandon. Cette situation place l’apprenant
dans une situation d’autonomie. L’autoformation devient alors, dans la plupart des
situations de formation, synonyme « d’autonomisation » de l’apprenant. Or il y a un
paradoxe évident, car si l’autonomie relève du pouvoir de soi sur soi-même, elle ne peut
se décréter et encore moins être imposée. Cette autonomie requise doit bien évidemment
être relativisée en fonction des différentes institutions de formation à distance, mais il
n’en reste pas moins vrai qu’elle reste au cœur des processus d’ingénierie pédagogique.
L’une des voies mises en avant pour favoriser l’autonomie de l’apprenant est de
concevoir des environnements d’apprentissage susceptibles de rencontrer les différences
des apprenants à distance. Car, comme le souligne les recherches de Tweedell (2000),
Lenning & Ebbers (1999), Mac Kinnon, Franklin (1997; 1994), Dirkx & Jhalr (1994),
Koehler (1992), ou encore Octernaud (1990), la prise en compte des caractéristiques dans
le processus d’enseignement favorise et optimise la persévérance et la réussite des
apprenants. Sarasin (1999) insiste d’ailleurs sur la nécessité que les enseignants et les
concepteurs de cours fassent converger non seulement les activités et le contenu du cours
avec les caractéristiques des apprenants, mais adaptent également les techniques, le
design pédagogique et les stratégies d’enseignement-apprentissage, à ces différences
spécifiques à chaque apprenant.
Ainsi si l’on souscrit à l’hypothèse que les apprenants sont tous différents, un
environnement d’apprentissage flexible devrait donc proposer des stratégies
d’apprentissages adéquates (Schmeck, 1988; Pask, 1988; Dao, 2000). La solution semble
alors couler de source, et consisterait donc à proposer des environnements
d'apprentissage susceptibles de prendre en compte ces préférences d’apprentissage. Nous
entrons ici de plain-pied dans les préoccupations liées à la mise en place d’une pédagogie
différenciée.
2. Distance transactionnelle : fondement théorique et pédagogie différenciée
La théorie de la distance transactionnelle (Moore 1993; Moore et Kearsley 1996)
stipule qu’une problématique fondamentale en enseignement à distance n’est pas tant la
distance physique entre enseignants et apprenants mais plutôt le degré de distance
pédagogique dans les transactions, ou échanges, entre enseignants et apprenants ainsi que
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la qualité de ces transactions. Cette distance pédagogique, dont le degré d’écart est relatif
aux individus engagés dans les transactions, est caractérisée par une différence dans les
représentations ayant trait aux rôles et responsabilités réciproques des intervenants à
l’intérieur du cours qui les réunit. Selon cette théorie, pour que le degré de distance soit
réduit au minimum à l’intérieur de ces transactions, deux outils entrent en jeu : la
structure du cours et le dialogue, définit pour l’un comme la planification et la réalisation
subséquente de tous les éléments d’un cours conçu et pour l’autre, comme le flux
d’informations produit entre apprenants et matériels didactiques, entre apprenants eux-
mêmes et entre apprenants et professeurs. En effet, Moore et Kearsley (1996) soutiennent
que : « Les procédures qui servent à surmonter cette distance sont le design pédagogique
et les procédures d’interaction ». Quant à l’autonomie, autre élément clé de cette théorie,
elle se trouve entre les mains des apprenants eux-mêmes et que « plus le degré de
distance transactionnelle est élevé, plus l’apprenant doit exercer son autonomie »
(Moore et Kearsley 1996). Ainsi, cette théorie pose le fait que la structure d’un
environnement devrait comprendre tous les éléments permettant aux apprenants de
cheminer dans leur apprentissage. La distance transactionnelle renvoie donc à l'ensemble
des facteurs pouvant contribuer à l'écart de communication entre l'apprenant et
l'enseignant.
Parmi ceux-ci, et en relation avec les recherches actuelles en ingénierie pédagogique et
en éducation, la prise en compte des caractéristiques des apprenants par la mise en place
d’une pédagogie différenciée. Il s’agirait en effet de concevoir la structure pédagogique
(objectifs, contenu, activités et évaluations d’apprentissage) en regard des différences des
apprenants. La conception d'un tel système reposerait sur la planification du processus
d'apprentissage des apprenants dont l'objectif serait de prendre en compte les
caractéristiques et les besoins des apprenants. Depuis les années 1960, l’un des champs
d’action de la démocratisation de l’enseignement s’intéresse à la prise en compte des
différences dans les situations d’apprentissage. Cependant, sur le terrain on constate que
la mise en place pratique de la pédagogie différenciée souffre d’un manque de
représentation, non en raison d’un quelconque désintérêt (les écrits théoriques ne
manquent pas à ce sujet) mais davantage en raison de difficultés à transposer le concept
en faits.
Le concept de pédagogie différenciée apparaît dès 1973 (Legrand 1986, 1995) et
trouve son origine dans la psychologie différentielle qui préconise un effort de
diversification des réponses à la mesure de la diversité des apprenants. La pédagogie
différenciée pose à la fois une question et un enjeu paradigmatique : Enseigner fait-il
apprendre ? (Saint-Onge 1996). Reprenant à son actif les postulats de Burns (1972) la
pédagogie différenciée tente d’apporter une réponse à la prise en compte de
l’hétérogénéité des apprenants. Partant du principe qu’il est absurde d’enseigner la même
chose au même moment, avec les mêmes méthodes, à des apprenants différents, la
différentiation de l’enseignement s’inscrit dans les pratiques et les dispositifs qui
intègrent des concepts socioconstructiviste et interactionnistes. En référence à Piaget
(1969) ou encore à Vygotski (1978), ces systèmes priorisent notamment : 1) la mise en
place de situations d’apprentissage qui soient les plus significatives possibles pour
l’apprenant; 2) davantage en lien avec les caractéristiques personnelles de l’apprenant,
ses difficultés d’apprentissage, ses erreurs, son propre rythme de développement et
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