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DOSSIER N°4a
L’échelle de l’Etat-nation : gouverner la France depuis 1946
DOSSIER N°4a
Gouverner la France depuis 1946
Durée : 4h (programme 2014). Février/Mars.
Mise en œuvre du programme : Le programme nous invite à étudier les échelles
de gouvernement : trois ont été retenues (nationale, continentale, mondiale).
L’étude des échelles de gouvernement dans le monde vise à analyser les évolutions
du pouvoir politique depuis 1945. La question centrale qui se pose est celle de la
place de l’État-nation donc du rôle de l’Etat. Il s’agit d’analyser dans quelle mesure
les deux nouvelles échelles de gouvernement du monde, Europe et monde, ont
remis en cause la souveraineté de l’État-nation.
Introduction : Commençons par l’échelle nationale qui correspond en France à deux
régimes politiques distincts : la IVe et la Ve Républiques, respectivement de 1946
à 1958 et depuis 1958.
(Explication du sens du sujet) Le sujet invite à réfléchir sur le le de l’Etat
depuis 1945, sur les différents modes de gouvernement et d’administration à
l’échelle d’un Etat-nation et comment ils ont évolué.
(Analyse des termes du sujet) :
« Gouverner» : action de diriger et administrer, liée à son acteur principal (la
France) ; le pouvoir exécutif (chef de l'Etat et gouvernement) détermine et met
en oeuvre la politique de l'Etat.
« la France» : l'ensemble du territoire métropolitain et les territoires et
collectivités d'outre-mer ; il faudra ne pas oublier les échelles de gouvernement
(centrale, régionale, départementale et municipale).
« depuis 1946» : formulation qui invite à une analyse chronologique et
implicitement à « périodiser les continuités et ruptures chronologiques », i.e. le
tournant de la fin des années 1970 - début des années 1980, pendant lequel le
rôle de l'Etat passe de l'intervention large dans tous les domaines à une
redéfinition de son rôle dans l'acte de gouverner, certains évoquent un tournant
néolibéral.
Comprendre l'évolution du rôle de l'État à travers le principal débat actuel : est-
on passé d'un État-providence à un État libéral ? Mise en valeur de la rupture du
début des années 1980 (1983).
Pb : Comment évolue le rôle de l'État dans le gouvernement de la
France depuis 1946 ? Comment est-on passé d’un Etat centralisé et légitime à
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un effacement progressif de la tradition centralisatrice, voire à une remise en
cause de la légitimité de l’Etat ?
Vocabulaire: - Nationalisations et planification / privatisations- CNR- Extension du
droit de vote (femmes et militaires)- Rôle des syndicats- le de l'ENA- État-
providence- Modèle français (cf. Pascal Gauchon)- Modèle gaulliste- Modèle
néolibéral- DATAR- Décentralisation / intercommunalité / collectivités
territoriales- Tournant de 1983 / Rigueur- Mondialisation- Désindustrialisation-
Référendums décisionnels locaux
(p.295/296, manuel Hachette TL/ES) Les deux photographies qui servent de
documents d’ouverture illustrent tout à la fois le rôle prépondérant du chef de
l’État dans les institutions politiques de la Ve République et la variété des
domaines d’intervention de l’État en France.
I LA IVème REPUBLIQUE DE 1946 A 1958 : LES ORIGINES DE LA
CONSTRUCTION D’UN ETAT CENTRALISE ET UNITAIRE 2 heures
Quels défis la IVe République a-t-elle affrontés de 1946 à 1958 ?
La naissance de la IVe République fut longue et difficile puisque la
Constitution ne fut adoptée qu’en 1946, après la démission du général De Gaulle. La
IVe République ne dura que 12 ans, et s’acheva par le retour du retour du général
De Gaulle en 1958. Pourquoi ces difficultés ? Quelles furent les forces politiques
dominantes de la période ? Quel bilan peut-on faire de ces 12 années ?
1 - Une unité nationale restaurée : 1 heure
a) La République renaît de ses cendres :
La France est le 4e grand pays vainqueur de la Seconde Guerre mondiale (le
général De Lattre de Tassigny est à Reims pour recevoir la capitulation allemande
le 8 mai 1945). La France redevenue une République reçoit un siège permanent au
Conseil de Sécurité de l’ONU (1945).
Mais cette victoire est fragile : deux pouvoirs coexistent en France
même. Celui du GPRF (Gouvernement provisoire de la République française) dirigé
par le général De Gaulle de 1944 à 1946 et représenté par les Commissaires de la
République qu’il a nommés dans les départements (équivalent des préfets actuels).
A cette occasion pour renforcer le symbole de l’unité retrouvée, a été créée
l’ENA en 1945, pépinière de préfets et de grands commis de l’Etat. Puis
opposition au pouvoir central, le CNR (conseil national de la Résistance fondé par
Jean Moulin en 1943 dans la clandestinité) qui réunit les forces de la Résistance
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intérieure (autour de trois grands mouvements politiques : Parti Communiste,
SFIO, Démocrate Chrétiens du MRP = Mouvement républicain populaire). Ex. à
Nice le communiste Virgile Barel (instituteur communiste de Contes) dirige la
commission municipale avant d’être élu député.
Les femmes ayant joué un rôle important dans la Résistance, elles
obtiennent le droit de voter (1944) et participent aux élections (1945). Face à
la légalité républicaine restaurée, l’épuration
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fait le procès des collaborateurs,
mais sans atteindre les vrais acteurs (voir n°4 p. 255 : femmes tondues pour avoir
couché avec des Allemands). Laval et Pétain sont condamnés (juillet et août
1945), seul le premier est exécuté. Il y aura près de 10.000 exécutions
prononcées par des tribunaux parfois improvisés, puis 120.000 condamnations par
procès (c’est le résistantialisme
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triomphant.
b) Les Français « se retroussent les manches » : (Maurice Thorez)
La reconstruction est conduite par l’Etat en application du programme du
CNR. C’est la naissance de l’Etat providence. L’Etat est centralisé et unitaire.
Trois types de mesures sont pris : 1. Nationalisations des entreprises du
secteur de l’énergie cad passage d’une entreprise privée à une propriété de l’Etat,
l’Etat devient dirigiste mais pas collectiviste (Charbonnage de DF, EDF, GDF,
Commissariat Energie Atomique), des banques (BNP, Caisse Nationale Epargne,
Crédit Lyonnais, Société Générale), des transports (Air France), de l’armement
(avionneurs). S’y ajoute Renault (nationalisée pour fait de collaboration, RNUR).
2. Planification indicative, confiée à Jean Monnet (Commissaire général au Plan),
dès janvier 1946. 3. Politique sociale : création de la Sécurisociale (1945)
réunissant les prestations maladie, allocations familiales (pour relancer la natalité),
retraites ; création des Comités d’entreprises chargés de gérer les œuvres
sociales dans l’entreprise et de participer à sa gestion.
c) Les Français choisissent une Constitution :
Le 21 octobre 1945, les électeurs s’étaient prononcés au suffrage
universel intégral en faveur de la République (96% de oui au référendum), et
avaient désigné les députés de l’Assemblée constituante. Le scrutin de liste à la
proportionnelle (nombre de sièges proportionnel aux voies obtenues par chaque
liste) permit aux trois grands partis de la Résistance de remporter les ¾ des
sièges (PCF, SFIO, MRP).
Deux thèses s’affrontent : le général De Gaulle veut un exécutif fort
(pour lui les partis affaiblissent l’Etat par leurs divisions) et un Etat centralisé
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Action visant à punir tous ceux qui ont collaboré avec l’occupant. On distingue une épuration « sauvage »
(exécutions arbitraires et règlements de comptes) et une épuration légale (procès).
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Manière dont certains résistants ont accaparé le pouvoir (chanoine Desgranges).
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dirigé par des fonctionnaires (ENA 1945). Il exprime son idéal de gouvernement
lors du discours de Bayeux du 16 juin 1946 (voir document sonore). Les partis de
gauche (PCF, SFIO) veulent un régime parlementaire (assemblée unique
possédant l’essentiel des pouvoirs). Le général n’ayant pas convaincu les députés, il
démissionna (janvier 1946), mais le projet socialiste fut repoussé (mai 1946).
La Constitution adoptée fut un compromis (octobre 1946) : voir
organigramme n°1 p. 300. Elle repose essentiellement sur trois principes. 1°) La
souveraineté nationale : les élections législatives (tous les 5 ans) ont lieu au
suffrage universel direct à la proportionnelle. L’Assemblée nationale est donc bien
l’expression de la volonté populaire. 2°) La prédominance d’un législatif
bicaméral. Les Français ont adopté un régime parlementaire. Le pouvoir législatif
est partagé entre l’Assemblée nationale et le Conseil de la République (élu tous les
6 ans au SUI). Les deux chambres désignent le Président de la République, dont
la fonction est honorifique. Deux présidents de la République ont été
successivement désignés : Vincent Auriol, socialiste SFIO (1947-1954), et René
Coty, indépendant (1954-1958). 3°) La faiblesse du pouvoir exécutif : le pouvoir
de faire appliquer les lois est attribué au Président du Conseil, qui forme le
gouvernement. Mais ce dernier est responsable de ses actes devant l’Assemblée
nationale, qui le soumet au principe de la double investiture (choix du Président du
Conseil, puis vote d’acceptation du gouvernement), et peut le renverser à tout
moment.
Ce système permet aux grands partis politiques présents à l’Assemblée
nationale de gouverner, dès lors qu’ils peuvent s’insérer dans des systèmes
d’alliances entre formations politiques apparentées. Mais, faute de majorité stable
à l’Assemblée nationale, ce système est la cause principale de l’instabilité
ministérielle, qui sera une des caractéristiques de la IVe République.
2 Les caractères de la vie politique instable et fragile : 1 heure
a) Le gouvernement du Tripartisme (1946 à 1947) :
(1EL : 10/11/46, 182 PCF, 102 SFIO, 173 MRF) Les trois partis au pouvoir
étaient le PCF (Communistes, Maurice Thorez), la SFIO (Socialistes, Léon Blum,
Vincent Auriol), le MRP (Mouvement Républicain Populaire réunissant les
Démocrates Chrétiens). Mais les débuts de la guerre d’Indochine et surtout de
la guerre froide conduisirent à la rupture de la coalition (les ministres
communistes furent renvoyés en mai 1947, le mouvement syndical se divisa : CGT
procommuniste contre FO anti-communiste).
b) Le glissement au centre (1947 à 1954) :
L’expérience de la « 3e Force » (1947 à 1951) : SFIO et MRP
gouvernèrent ensemble contre les Communistes et les Gaullistes (partisans du
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général De Gaulle qui crée le RPF le 14 avril 1947, dissout en 1953). Les
gouvernements de cette période adoptèrent une politique extérieure atlantiste
(tournée vers les Etats-Unis : adhésion à l’OTAN en 1949, à la CECA en
1951) et colonialiste (Indochine).
(2EL : 17/06/51, 103 PCF, 107SFIO, 121RPf) Le retrait de la SFIO du
gouvernement (querelle scolaire) conduit à une période de domination du centre-
droit (1951 à 1954) marquée par l’instabilité gouvernementale (voir la caricature de
Sennep n°4 p. 301 du 30/12/1952 après la démission de Pinay), sauf durant le
gouvernement d’Antoine Pinay (1952) qui s’efforça de stabiliser la monnaie et de
lutter contre l’inflation.
Trois problèmes urgents restèrent sans solution durant cette période : la
crise sociale marquée par la pénurie de logements (l’abbé Pierre défend les sans-
abri en 1953) et le mécontentement des petits commerçants et artisans
touchés par l’inflation (Pierre Poujade crée le mouvement poujadiste en 1953 :
nationalisme xénophobe, antisémite et hostile au parlementarisme) ; la défense
européenne (un projet de CED, Communauté européenne de défense, divise les
Français en 1954 car il conduirait au réarmement allemand) ; la politique coloniale
(l’enlisement des troupes françaises dans la guerre d’Indochine conduit au
désastre de Diên Bien Phû en mai 1954).
c) L’effondrement de la IVe République (1954 à 1958) :
Le gouvernement de Pierre Mendés France (juin 1954 à février 1955) : cet
homme politique du parti radical essaya de résoudre les problèmes cités ci-
dessus en formant un gouvernement de centre-gauche et en adoptant une nouvelle
manière de gouverner, le « mendésisme » (voir n°5 p. 301). Voulant restaurer le
pouvoir exécutif, le Président du Conseil s’adresse directement aux citoyens
et adopte la devise « gouverner c’est choisir » (il signe les accords de Genève).
Mais il échoue dans tous les domaines (montée du poujadisme, rejet de la CED
par l’Assemblée en août 1954, début du soulèvement algérien en novembre 1954).
(3EL : 02/01/56, 150PCF, 94SFIO, 83MRP, 109Indépendants, 52UDCA) Le
gouvernement de Guy Mollet (février 1956 à juin 1957) : ce politicien socialiste
SFIO forma un Front Républicain qui permit la signature du Traité de Rome
(création de la CEE, 1957). Mais il choisit la répression armée en Algérie : les
troupes du général Massu gagnèrent la bataille d’Alger (1956-1957) contre le FLN
(Front de libération nationale) par l’envoi massif des soldats du contingent.
L’armée française s’enlisait dans la guérilla et adoptait des méthodes illégales
(tortures, « corvées de bois » c’est-à-dire exécutions sommaires).
La chute de la IVe République : le 13 mai 1958, jour de l’investiture de
Pierre Pflimlin (MP), le général Massu prenait la tête d’un « Comité de salut
public » à Alger, pensant avoir l’appui de l’armée régulière dirigée par le général
Salan. Pour éviter une guerre civile, ce dernier fit appel au général De Gaulle
retiré à Colombey-les-Deux-Églises. Le 1er juin 1958, l’Assemblée nationale
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