Frederic-Nathan-Murat_Heurts-et-malheurs-de-l`identite-Identite

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Colloque ALI : Fez 25-28 05 06
Heurts et malheurs de l'identité
Frédéric NATHAN-MURAT
10 rue Saint Antoine 75004
Tel 01 48 87 29 40
06 80 90 99 65
Identité : two in one like libido
Identique : sont-ils deux, analogues, égaux, équivalents, pareils
semblables, bien que parfaitement distincts ou est-il unique, toujours
le même bien qu'il se voit nommé ou représenté de manière
différente ? Est-ce l'individu qui se trouve identique à lui-même,
rigidifié dans sa psychose à se croire toujours le même, égal à luimême, comme il se dit ? Ou es-ce la langue qui se voudrait identique,
selon ce qu'il en va de sa proposition logique, celle de l'identique, où
sujet et prédicat se condensent tautologie ?
Déjà faut-il différencier s'il s'agit d'une notion à prendre dans l'univers
dont on parle ou dans l'univers où l'on parle.
Car comme il est dit dans l'argument qui préside au colloque, si aucun
groupe humain ne se distingue sans se référer à une instance qui lui
confère identité, force est de s'apercevoir que cette instance peut-être
totémique, politique, religieuse, nationale, voire au-delà du point de
vue sociologique, philosophique, scientifique, oedipienne, éthique.
En un mot que cette instance de reconnaissance auprès de laquelle le
sujet cherche à s'y voir reconnu être, que cette instance est discursive.
Mais alors, il n'y aurait pas de connaissance pré ou mieux extra
discursive ? Et si les hommes pouvaient tout connaître avant le
discours, pourquoi parleraient-ils ?
Mais alors, si toutes les connaissances ne peuvent qu’être discursives
pourquoi y a-t-il des silences proprement humains ?
C'est que l'univers du discours vient peupler de ses fictions le cosmos
où nul être animé ne réside, tout comme le monde peuplé de ces êtres
animés trop végétaux ou trop animaux pour que les cris et
mugissements qu'ils entendent dans leur fuite, ne les fassent prendre
conscience d'un eux-même qu'ils auraient soif de discuter.
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L'uni-vers des lents gagiers conjugue son identité sur le mode de la
coupure, celle qui nous précipite dans la fameuse crise de l'identité,
qui, comme le dit C.Lévy-Strauss, "apparaît comme l'indice
attendrissant et puéril que nos petites personnes approchent du point
où chacune doit renoncer à se prendre pour l'essentiel."
Comme il le dit encore, il s'agit "de déconstruire la notion d'identité en
récusant le mythe d'une insularité."
Dans le même ouvrage F.Héritier nous en donne illustration à travers
l'identité Samo faite de la conjonction d'un corps, de sang, de l'ombre
portée, de chaleur et de sueur, du souffle, de la vie, de la pensée, du
double et enfin du destin individuel.
Auxquels s'ajoutent des attributs : le nom, qui situe à sa place,
l'homonyme surréel, puissance hostile extra humaine, qui a bien voulu
tolérer cette naissance et qui sert de terme par lequel s'interpellent
deux personnes portant le même nom, la marque d'une hérédité
incarnant un ancêtre, qui parfois récusent de revenir et enfin la
présence de génies qui déterminent sa clairvoyance ou sa folie.
Bref, comme il se peut constater la complexité se fait nouage où
chaque signifiant ne représente le sujet qu'auprès d'autres signifiants
nous dirait Lacan.
Serions-nous donc forcés à admettre qu'il soit impossible d'introduire
dans le discours ce qui n'y est pas déjà ? Qu'on ne puisse pas définir le
sens d'une notion sans la connaître discursivement, soit sans l'avoir
déjà définie ? Nous voilà, en présence d'un cercle discursif, qui
s'exprime dans la tautologie, qui dit qu'on ne peut parler que de ce
dont on parle.
C’est de là, que Lukasiewicz, conçoit le principe d’identité.
« Il est impossible de formuler le principe de contradiction, si cher à
Aristote, sans avoir deux jugements, dont l’un est la négation de
l’autre et qui forment ensemble un produit logique. Le principe
d’identité comme de double négation, se laissent au contraire formuler
sans recours à deux jugements constituant un produit logique.
De plus on peut exprimer le principe d’identité, sans utiliser la notion
de négation, alors qu’il est impossible d’en faire autant avec le
principe de contradiction.
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Avec le principe d’identité, chaque définition concerne alors un fait
qui apparaît avec elle et qu’elle contient et pour cette raison chaque
définition est vraie. »
Si quelqu’un dit : « J’entends par jugement vrai, un jugement qui
attribue à l’objet la propriété qu’il possède. » Il s’attribue la propriété
de comprendre quelque chose par le jugement vrai, propriété qu’il
possède effectivement puisqu’il l’affirme par l’énonciation de la
définition. Cette définition est donc vrai conformément à la
description de la vérité qu’elle contient.
Ainsi, pour que le cercle ne soit pas vicieux, force nous est de le
parcourir complètement, au point qu'il nous faudra bien constater que
la fermeture de notre savoir absolu ne s'en soutiendra pas moins d'un
écart qui s'honore de son seul parcours.
La définition se fait compréhension et la compréhension se fait
définition.
"Le sens du compréhensible, c'est à dire de la chose pouvant être
comprise dans et par une notion, est l'essence de celle-ci, en tant que
détaché de son existence."
Là joue la transcription. Thèse. Là, le lien se fait à l'univocité.
Ou "le sens du compréhensible est le sens de la notion qui se rapporte
à la chose, en tant que détaché de son morphème."
Là joue la translittération. Antithèse. Là le lien se fait à la plurivocité.
Le concept est l'uni-totalité des essences détachées de l'existence.
Ou, le concept est l'uni-totalité des sens détachés de tout morphème, le
concept est temps, nous dit A. Kojéve dans son commentaire du savoir
absolu Hégélien. Les deux et entre les deux la traduction. Synthèse.
Entre deux rapports métonymiques, un rapport métaphorique.
Le concept oscille ainsi entre sa saisie complète en termes de logique
classique et le risque d’incomplétude de sa saisie en terme de logique
ensembliste, pourrait-on dire en suivant les théorèmes de gödel.
Entre les deux, trône l’algèbre de Boole, qui du haut de sa séquence
fixe 1 0 0 1, comme les mille et une nuit, peut jouer le métafort,
propre à combler la faille des métaphores, celles où se singulariseront
les « troumatismes » des transmissions des noms des pères, au gré des
coupures qu’induisent les recettes de cuisine de leurs prohibitions
incestueuses.
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Puis Kojéve précise, un morphème dont le sens ne peut être détaché
est un signe, un morphème dénué de sens est un symbole.
Et voilà qu'il nous faut nous interroger sur le petit "a", l'objet du
fantasme, qui vient se coincer là, dans ce lieu du non-sens, pour y
instruire la mathématique symbolique de ses enjeux oedipianisés.
C’est que « l’un », n’étant pas une notion univoque, récuse de se
confondre avec « l’Un » du nombre et se comporte à la barbe de la
psychologie, comme « Pas un ».
Car si l’on peut supposer une identité admissible dans le champ de la
psychanalyse, elle ne peut se concevoir, que comme celle première qui
nous produit « prématuré » et nous réduit « parl’être ».
« L’ordre du symbole n’est pas constitué par l’homme, mais le
constitue. » écrit Lacan. « L’extériorité du symbolique par rapport à
l’homme est la notion même de l’inconscient, qui ne laissent aucune
des actions de l’être humain hors de son champ. »
Le savoir grec nouait géométrie et arithmétique. Concept et nombre.
Et il fallut que Descartes conceptualise les espaces sur le mode
algébrique, pour que Désargues puisse élaborer la théorie des
coniques, permettant de concevoir la transformation d'un même objet,
de sa finitude à son infinitude. Selon l'inclinaison qu'il donnait au plan
de coupe d'un conique, il pût démontrer l'unité qui présidait au cercle
et à l'élipse, objet fini, avec la parabole et l'hyperbole, objet infini.
Ainsi conciliait-il le divin de la course des astres célestes, avec le trou
topologique par lequel l'humain se devait indéfiniment de passer.
Exemple d'identité surprenante, le dessin qui circule, analogisant trois
droites parallèles à un croisement à trois brins témoigne de l'écriture
des méridiens, vus localement dans leur finitude à l'équateur ou
globalement dans leur infinitude aux pôles.
Avant sa naissance et au-delà de sa mort, la lettre produit ses effets
dans l’homme, dont la folie est la limite de sa liberté, car loin de
l’être, la lettre, force lui est d’en acquérir l’usage, s'il veut inférer sur
la façon dont il en subit l'instance.
Mais le trait unien, identification de l’Autre à l’un, aliène le sujet dans
une identification première, qui forge l’Idéal de son Moi.
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L’Etre au niveau du symbolique n’est autre que le réel, qui ne se
manifeste nulle part ailleurs que dans la coupure, car il est le moins
signifiant des signifiants, dit Lacan.
C’est qu’il y entre, comme sujet par la voie d’une béance spécifique
de sa relation imaginaire à son semblable, qui le projette dans le défilé
radical de la parole, induisant qu’il ne sait plus dans son image au
miroir, laquelle de ses « dits mentions », à donc bien pu s’inverser.
Là, la chose Freudienne, le désir se fait tourment pour l'homme, dans
la quête de son bien. Le principe de plaisir trouble la perception de
l'objet et récuse de se mettre au service du principe de réalité.
Car le miroir produit ses ombres. Pour les objets à deux dimensions,
comme une main découpée dans une feuille de papier, il ne produit
aucune inversion. Dés que la main se trouve orientée par la
nomination ou discrimination de ses faces, on ne sait plus quelle
dimension s'inverse. Essayez donc de vous y serrer la main !
Et voilà que dans la diachronie du discours, la structure de langage
insiste de sa synchronie.
Et voilà que dans la connaturelle harmonie où le sujet, sous l'égide de
la théorie de la connaissance, s'identifie profondément à son objet, le
désir dévoile le sujet dans un rapport tiers à son fantasme.
C'est qu'en s'identifiant au savoir absolu de la connaissance, l'homme
advient machinique, mais quand il préfère l'ignorer, il persiste animal.
Et voilà que plus il se sent défaillir dans sa certitude, dans sa
désignation de sujet, plus il s'accroche à son support, l'objet "a" de son
fantasme.
C'est qu'il à son désir dans l'Autre et que dans ce lieu de la parole,
quelque chose fait défaut, pour lui permettre de s'identifier comme
sujet de ce discours qu'il tient. C'est que ce discours de l'inconscient
est pris à ses dépens de sujet bien réel, bien vivant, assujettissant ses
besoins à la demande, pour les lui restituer aliénés.
Et voilà que chaque fois qu'il s'agit de désir, il lui faudra payer la
castration, le prix nécessaire à ce repérage défaillant de lui-même.
Et voilà que quelque chose de réel, sur lequel il n'a que prise
imaginaire, est porté à la pure et simple fonction de signifiant, le
remaniant tout entier.
Celui qui parle ne sera jamais qu'un "je" qui s'acoquine avec n'importe
qui, le réduisant à n’être qu’un « tu » qui se tait, puisqu’il s’objective
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dans la dialectique de l’identification à l’autre et que loin de pouvoir
supposer se connaître, il se doit de se faire reconnaître.
L'objet de la castration n'est autre que le phallus. C'est que l'objet
phallique n'est pas comme les autres objets, car il s'instruit d'une
exigence narcissique, dirait Freud. "a" se fera l'élément réel du sujet,
propre à le soutenir pour en supporter l'effet.
C'est que le phallus paternel n'est jamais tant redouté que quand il se
trouve dans le vagin maternel.
Là gisent les coercitions sur la virginité. Surtout qu'elle ne devienne
pas mère se fait le souci obsessionnel du père.
Là, il y extrapole, l'extériorisation de l'imaginaire intérieur du sujet,
portant cette extirpation à la fonction de symbole, au point d'en faire la
menace à l'intégrité de l'image qu'il se fait de lui, insiste Lacan.
Et voilà que le "a" résidu de la dialectique de la demande advient
rançon.
Car c'est en terme d'alternative signifiante que s'articule
primordialement le besoin du sujet et que s'instaure ce rapport du sujet
à lui-même, qui s'appelle le désir.
L'Autre, ici incarné réel par l'interpellation de la demande, lui
permettra d'en changer la valeur, pour advenir demande d'amour, au
gré de sa présence ou de son absence.
C'est que l'autre réel, en permettant que la demande devienne autre
chose que la satisfaction d'un besoin, advient Autre, qui joue ou pas un
certain jeu.
L'Autre, instauré sujet, inaugure alors la tragédie de la subjectivité.
Celle d'une instance où le sujet devra se faire reconnaître, non plus
comme demande, non plus comme amour, mais comme sujet.
Et Dieu sait, qu'il lui faudra foi en la parole, car il ne trouvera aucun
Autre de l'Autre, aucun signifiant qui garantisse la suite concrète
d'aucune manifestation de signifiants. Et même si l'autre s'évertue à
lui répondre, par toute une série d'additions de dons et de refus, il ne
trouvera en l'Autre, en ce lieu de la parole, que manque à se repérer.
Dès lors on conçoit combien il s'attache à toutes les expériences que
lui offre son Autre maternelle, dont le désir rend compte de la
métaphore paternelle, au travers de la transmissions de ses rites et de
ses coutumes. Là il lui faudra bien perdre le plus essentiel de sa vie,
s'il veut se situer dans le désir.
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Perdre le phallus, ce caractère assertif du dire, de la traduction, cet
objet opaque, obscur, un rien auquel il se réduit, ombre de sa vie
perdue de toujours, que la nature même du désir ne cesse de
déconstruire et reconstruire de sa dialectique.
Personne ne « nique » jamais sa mère, mais tout un chacun se fait
toujours « niquer » par le désir de sa mère. Là, se lit la dénégation de
notre supposée civilisation.
C’est que sa mère elle-même à put croire que c’était d’elle qu’il se
voyait soudain séparé, quand il eut à assumer sa première coupure,
celle qui vint le disjoindre de l’organe qui lui avait jusqu’ici servit de
bouée de sauvetage, de véritable chambre à air, son placenta.
D’avoir soudain respiré, l’avait fait crier ou siffler, mais il n’y avait
justement plus de fuite possible. L’air immatériel l’entraînait soudain
dans ce rapport métaphorique imperceptible de pulsation à son vide.
Et le souffle se fit ex-istance.
Bien sûr aussitôt d’autres objets s’étaient enquis à venir faire bouchon
au vide, pour le rassurer et le familiariser à cette nouvelle situation.
Ainsi, s’était-il pris allégrement les pieds dans l’illusion
homophonique que ce sein, que l’on ne saurait voir, mais qui comblait
si allègrement ses besoins, n’était autre que sien. C’est qu’il
pressentait bien que la vérité de sa première expérience refoulée par sa
mère elle-même, était pourtant à prendre au pied de la lettre, sans plus
en omettre aucune.
Et voulant que le fait cesse, il s’y recolla pourtant en confondant son
identité avec ses fécés.
Que voulez-vous, c’est que ces objets, au-delà de la complétude de
leur logique, ne révélaient que partiellement la fonction signifiante,
celle où se jouait son incontournable perte.
C’est qu’ils étaient propres à transcrire son essence, qu’il vivait ainsi
désencombré, non castré, d’avoir à traduire un quelconque sens.
Il en alla de même par la suite, quand il roulait des yeux ou élevait la
voix croyant ainsi calculer comment il pouvait au mieux
impressionner son interlocuteur. C'est qu'il redoutait que l'assertif de
ses demandes, de ses énonciations, ne suffisent à produire ses effets.
Son Moi se soutenait ainsi de toute une série enveloppante
d’identifications imaginaire, dont il méconnaissait l’aliénation, tant
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elles lui laissaient croire qu’il était un système central d’identifications
idéales. Ainsi sombrait-il volontiers dans le collectionnisme d’objets.
Ceux qui reflétaient au mieux la voix de son maître, que la psychose
généralisée avait réduite en kit portable, de préférence stérile, jetable,
à usage unique, qu’il aurait dorénavant toujours dans sa poche ou
mieux autour du cou. Là, il compensait la béance de ses actes, en se
rassurant « parlettres », à coup de S.M.S. et autres emails, que lui
autorisait le petit « a » divin de l’arobase, qui le localisait dans le hic
et nunc.
Et il finissait sa collection, par les objets qui reflétaient au mieux son
image, l’autorisant à en effacer la trace du temps, par de multiples
retouches.
Là, sourd à son désir, il réitérait sans fin sa demande délirante : «
m’aimes-tu ? », « Mais me tue ! »
Car il voulait du solide, du concret, si possible écrit noir sur blanc.
C’est qu’il aurait volontiers effacé tous ces blancs, qui le happait dans
les nimbes, ce paradis pour prématuré, en jouant la trace de
l’effacement de nulle trace qui ne soit d’avant.
Une simple croix n’était-elle pas, quoiqu’il en soit, plus propice à le
représenter ?
C’est qu’il n’avait pas tort de s’y croire, fixé sur la croix, celle où, il
ne trouvait ex-istence hors d’une structure de langage.
Mais cela ne suffisait pas, la société humaine lui réclamait d’accepter
que son être s’identifie à un nom, un patronyme, qui viendrait ensuite,
comme une injure, dénoncer où revendiquer qu’il n’était que cela et
rien que cela.
Alors, il compensait, en le revendiquant haut et fort, puisque si celui
du « dit vain » était imprononçable, de seulement occuper la place de
la fonctionnalité, il n’en était lui que l’extension réelle, terrestre,
« hume haine », qui pouvait tout se permettre.
Heurs, malheurs et doux leurres de l’identité, quand son ambivalence
se laisserait sans doute percevoir, dans le rapport à son sobriquet, ce
trait d’esprit, que d’autres lui lanceraient pour mieux le croquer, le
translittérer.
Attention à l'usage qui se fait de la parole, car elle est le préalable à
tout vivre ensemble. Mieux vaut rester dupe de la bonne façon, car
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l'identité s'attache au nom des pères pour mieux en denier l'effet de
coupure, de métaphore du désir de la mère.
C'est que si l'écriture se pose toujours identique à elle-même, la parole
elle ne joue que de différence.
Que voulez-vous, c’est que l’homme est lent gage, fait de dits courts.
Et si la sexualité fait trou dans la vérité, c’est que la béance n’est pas
dans le rapport entre le psychique et le physique, mais qu’elle est entre
le psychique et le logique. Une façon d’apprendre à jouer, qui jusqu’à
la puberté se moque du nombre et du concept, nous enseigne Lacan
dans le désir et son interprétation.
Le désir est ce qui s’inscrit en tant que conséquence de l’articulation
langagière au niveau de l’Autre. Il prend le sujet comme un rat, au
piége de sa métonymie, l’obligeant à y perdre un organe, un objet, qui
vient là, à la place du sujet comme désir.
Le sujet qui parle ne peut-être tenu pour initiateur libre de son
discours, divisé, il est lié à cet autre sujet, celui de l’inconscient, celui
d’une instance de reconnaissance, celui de la structure langagière,
auprès de qui il puisse se faire reconnaître, s'il veut obtenir satisfaction
à ses attentes.
L’inconscient ne cesse de se répéter, puisque le sujet ne peut s’y
nommer lui-même, que comme celui qui porte la marque, les
stigmates de l’inaccessible.
Dehors, ça parle.
L’inconscient insiste comme ce qui cloche : peut-on penser, sans
savoir qu’on pense ?
Vous savez comme avec le transfert les choses vous arrivent à point
nommé. Pas plus tard que lundi, une analysante, psychiatre, avec qui
se réalise un travail didactique, évoquait son rêve.
« J’étais chez vous dans un hôtel particulier du marais. Les pièces
étaient extrêmement spacieuses. Un peu désorienté, je visitais, ne
pouvant retrouver la pièce que je connaissais »
Puis elle associe aussitôt sur son mari, qui restait un enfant et sur le
fait que, décidément, elle n’aurait jamais connu d’homme.
Il me parut important de bousculer les idées qu’elle se faisait en
matière d’identités sexuées et pour lui éviter d’imaginer pouvoir
seulement guérir en couchant avec moi, je m’autorisais à lui dire :
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« Si vous venez en ce lieu, ce n’est point pour rencontrer un homme,
mais pour y être analysante. Et de ce point de vue, il est clair que ce
lieu de l’Autre, de la structure du langage, est particulièrement
spacieux. » Et n’étant pas sans savoir qu’elle avait récemment été
désorientée par l’ablation d’un sein, qui lui interdisait simultanément
une deuxième grossesse, j’ajoutais : « Les nourritures terrestres sont
plus que diverses. La sexuation est avant tout affaire de signifiant, ça
n’est pas affaire de corps, c’est affaire de logique. »
Un rien soulagée, elle répondit « C’est vrai que pendant longtemps, je
cherchais à m’identifier à votre façon de faire, à votre façon de
m’accueillir, mais ça ne suffisait pas. »
« Oui, la question n’est pas celle de la représentation ou d’une
quelconque mimésis, car quoiqu’il en soit chacun intervient selon la
théorie qu’il se fait de l’analyse. »
Là, dans la cure, ruissellent les modes singuliers des identifications
qui façonne l’idée qu’elle se fait de son être, celles qui ravinent les
champs discursifs de ses appartenances, de ses identités, celles dont la
lecture peut ravir ses choix personnels, sexuels, sociaux, religieux,
politiques, éthiques.
Mais l’omnipotence n’est jamais celle du sujet, dont l’horizon de toute
puissance, n’est jamais qu’un récit …. non fait.
L’omnipotence est toujours du côté de l’Autre, du côté de la parole en
tant que telle.
Et si les identifications se jouent de trois façons distinctes, celle du
trait unaire, celle de la métaphore paternelle, celle de l’identification
hystérique, Freud nous indique que la quatrième laisse le sujet
identifié à son symptôme. C’est là, qu’en fin d’analyse, mieux vaudra
savoir y faire avec cette dernière.
Entre l'Esprit et la Raison trône le désir et ses enjeux narcissiques.
Entre le Penser et l'Etre trône la parole et ses suggestions.
Le passage se fait de grandes à petites lettres. Car la lettre n'est pas un
outil, ni même un instrument, bien qu'elle les fomentent, pour l'hume
un, elle est l'organe où il s'entretient two in one, like libido.
La fonction du désir de l’Autre est essentielle quant à l’organisation
des sociétés, puisqu’il résulte de l’institution de la liberté, comme
d’une justice distributive. Gare qu’il ne mène aux plus grandes
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injustices, quand il laisse croire que la parole ne serait pas un gage,
qu’on peut tout dire et que rien ne vaut.
Là est la raison qui fait que la psychanalyse s’intéresse tant à l’usage
qui se fait des discours.
Entre religion et science, l'identité selon Hegel est le formel, même si
elles ne sont pas toujours d'accord sur les forces et causes qui
président à la matière.
Entre la religion et la philosophie, le substantiel, Dieu, l'Esprit,
l'Absolu. Car le substantiel qui meut et résiste, se constitue pensée.
Mais alors Dieu ayant institué l'Autorité et les Rois selon la loi
mosaïque étant les oints du seigneur, que faire de cette pensée, qui de
prétendre être vraie de résider dans l'entendement humain, prétend
tout réformer ? Car voilà que la philosophie se voulant sagesse du
monde, ne s'en tient plus aux objets intérieurs, mais prétend s'occuper
des choses terrestres finies, même si ayant même fin que la religion, le
monde reste concrètement déterminé par l'idée divine.
Avec la Renaissance, la philosophie s'attaque autant à la nature, qu'à la
moralité ou à l'état. Hobbes, Descartes, les idées générales de la
métaphysique rebondissent dans les matières empiriques.
Ainsi à l'Autorité ecclésiale qui légiférait Droit public et privé, se voit
substitué une théologie et une jurisprudence devenues sciences
positives.
Et comme il fallait justifier maintenant le pouvoir des princes par
d'autres biais que d'Autorité Divine, on posa comme principe la liberté
de l'homme et de la Raison Humaine au fondement de la société
humaine.
L'esprit et un moment de symptôme entre la philosophie et le savoir.
Pour la religion, il ne s'agit là que de connaissance finie détachée de
l'Esprit de Dieu.
Ainsi si philosophie et religion sont apparentées par le contenu, la
religion se veut le contraire de la culture, puisque ce qu'elle envisage
n'est autre que l'infini. Sa représentation trouve ainsi appui des
mythes, des mystères, de la poésie.
Quelle conscience l'homme a-t-il de Dieu ?
La détermination de la pensée s'oppose à l'essence de la divinité,
chose de l'au-delà, étrangère à l'homme.
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Pour s'élever à Dieu, à la conscience de son unité propre avec cette
essence, il y faut recueillement et culte.
Pour les Grecs, la jouissance en était immédiate, puisque l'essence en
soi n'appartenait pas à l'au-delà.
Pour la philosophie, la religion exprime la conscience que l'homme à
de l'objet suprême, celui qui est vrai en soi et pour soi. Soit l'œuvre
suprême de la Raison Universelle qui est en soi et pour soi.
Fi de la réconciliation du divin et de l'humain que promet le
recueillement. Il n'est qu'aspiration à la pensée. La connaissance qui
pense suffit.
Entre la religion et la philosophie, la différence n'était donc que
question de point de vue.
La conclusion s'imposa, le divin n'était qu'une production humaine
pour s'expliquer sa nature.
Quoiqu'il en soit, l'universalité de l'Esprit, qu'il soit philosophique ou
religieux est absolue, elle pénètre tout.
"L'Esprit est libre, car il est auprès de Soi.
Sa nature consiste à empiéter sur l'Autre, de s'y retrouver, de s'y réunir
à lui-même, de s'y posséder et d'y jouir de lui-même."
Jouir est donc le propre de l'Esprit.
Là où, la jouissance Autre se fait entendre, la jouis sens phallique y
déverse son credo.
"L'esprit qui entend ainsi l'Esprit absolu est l'esprit subjectif.
Il trouve unité dans la détermination de soi-même et celle de l'Autre.
Il est universel et son propre objet. Ainsi il se détermine et devient
particulier. Ainsi l'universalité est dualité."
"L'un empiète sur l'Autre, le pénètre et en lui revient à soi. L'Autre est
son Autre et cet autre, le sien et lui-même font un."
two in one, like Libido.
Universel et particulier. U. P. Il n'est pas d'universel, qui ne se
soutienne d'un particulier qui le nie. Nous dit Lacan.
"Le sujet se réalise dans la perte où il a surgi comme inconscient, par
le manque qu'il produit dans l'Autre." dit Lacan dans position de
l'inconscient.
Chez Spinoza, le monde exprime Dieu, qui n'est plus transcendant,
mais immanent. Dieu est Natura, substantiel objectif, passé au grill de
l'humaine subjectivité. L'invite est à la lecture du symptôme.
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Là où la religion voit double, dans l'objectivité de la transcendance, la
philosophie voit de l'Un, dans sa spiritualité immanente.
Car le besoin de la philosophie et de la religion sont une seule et
même chose, rechercher ce qui est vrai.
Ainsi pour la philosophie comme pour la religion, l'existence précède
l'essence, là où pour la psychanalyse le jugement d'attribution précède
le jugement d'existence.
La psychanalyse partage avec la religion, de maintenir entier le champ
de l'Autre, ce lieu de la structure du langage, où la seule loi humaine,
celle de la parole vient produire ses scansions absolues.
Là le corps tente d'écrire ce qu'il a lu à l'insu, avec ce matériel
inaproprié qu'il est.
C'est que poussé par les trous pulsionnels il écrit mal.
Là, le désir tente de se concilier à la loi.
Mais là où l'une voit Dieu, dans une vision anthropomorphe, l'autre
pressent le Di(eu)re de l'énonciation, oublié derrière les
imaginarisations qu'induit le réel incarné de ses énoncés.
"La vérité n'est rien d'autre que ce dont le savoir ne peut apprendre
qu'il le sait, qu'à faire agir son ignorance."
Car là, l'esprit rationnel concret se renverse lui-même, pour se laisser
surprendre trait d'Esprit.
En ces temps, où il ne ferait plus bon vivre athée, en ces temps, où il
ne ferait plus bon vivre en démocratie, impossible de ne pas parler de
sexualité, de politique, de religion, car la question relève de ce qui fait
autorité au discours du maître. Car l’autorité du maître est celle de
l’exécutif, celle de l’économique. Or là, la démagogie, jouant
d’iconomie, usurpe la parole de l’espace public pour y substituer le
mensonge, qui y est intolérable.
Et quand la démagogie s’acoquine avec la technocratie, elles
n’enfantent que totalitarisme.
En France on à vu récemment un français, ministre de l’intérieur,
stigmatiser racailles, d’autres français, au nom d’une identité
française, dont on peut craindre que la notion soit plus celle de Vichy,
que celle de la révolution française.
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Il est pourtant grand temps de sortir de la méconnaissance qui
s’entretient des conceptions ontologiques de l’identité, même quand
elle se font nouménique, car elle ne font qu’entretenir de nouveau
pharmakos, dans une stigmatisation toujours aussi avilissante.
Pourtant force est de « n’être » à la signifiance.
Mais les maîtres, pour être mieux idéalisés et dominer ainsi l’ordre
social, dénient d’être eux-mêmes assujettis à l’inconscient cette
pourriture noble et surenchérissant dans les fictions d’essence de
l’Etre, s’entretiennent dans les rivalités phalliques de luttes à mort.
Là, à l’image de l’occident scientiste, le réel des actes de maîtrise de
notre caillera, rivalisent dans la jouissance en image de la puissance à
avilir.
A l’image des télés officielles d’état, les visiophones privés affichent
complet. En direct, comme si vous y étiez, comme si vous en étiez,
bombardements intensifs, attentats kamikazes, corps décharnés,
humiliations, tortures, viols en nombre, sous l’œil goguenard du héros,
fier de la gloire de pouvoir rendre compte de ses forfaits.
C’est que les uns comme les autres voudraient bien en finir avec
l’impossible, qu’ils confondent avec l’interdit, les faisant redoubler de
violence, comme de censure, face à leur impuissance à éliminer
l’inéliminable.
Et voilà qu’au nom de l’état ou de la religion, les plus hautes autorités
des peuples, récusant la division subjective inhérente à ce que parler
veut dire, assignent les bonnes et mauvaises identités, qui ne font
qu’exacerber la haine de soi, comme la paranoïa généralisée des
amours narcissiques, qui se rassemblent en imaginaire groupal pour
mieux organiser l’épuration des camps.
Les paroles sont des ordres et le langage se fait lieu où les monstres se
font normes, énonce Brice Parrain.
Pourtant mieux vaut se tenir loin de l’obscénité du groupe qui y croit,
loin de la vertu hypnotique de l’objet collectif, qui standardise le sujet.
Révélation, incarnation, inspiration ou encore prédestination, les
structures grammaticales de nos monothéismes n’en relèvent toujours
pas moins de logotopes hexadiques, voir même hectadiques.
Force leur est quoiqu’il en soit nécessaire de préciser l’idée qu’ils se
font des rapport entre Dieu, la divinité, la foi, la liturgie, le rite, le
recueillement, la révélation et le rituel.
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Que voulez-vous, il n’est d’autres vérités que celle du Dieeeuuu…re,
du Dieu Dire.
Là où la religion promet vie dans l’au-delà, la psychanalyse recherche
l’existence de l’incorporation de l’en deçà du sens.
Le petit « a » est nœud, effaçon sur quoi Lacan fonde la signifiance.
Sa littoralité est affaire de witz, où se lit l’après coup rétrogrédient qui
impose l’impact préalable du symbolique sur tout réel.
La pratique de la psychanalyse produit un objet réfractaire à la
collectivisation et si elle argue d’un savoir, il n’est pas référentiel, car
elle n’en assure la référence qu’en acte.
Seul l’analysant et non un quelconque diplôme, fût-il d’état, peut
garantir que du psychanalyste, il y en eût.
Le père n'est jamais qu'un homme banal, tenu d'occuper une fonction
tierce exceptionnelle, dans le rapport à la castration de notre
prématuré, jusqu'à le mener au lien social, à la citoyenneté, à l'égalité
devant la loi, là où, les générations font avec les générations.
Loin de toute incarnation à se vouloir petit père des peuples, la
fonction paternel réclame d'être dupe de la bonne façon, d'admettre
l'identité comme fiction aux seules fins de se soutenir au mieux
parl'être, d’assurer de la pulsation, de jouer de la faille, sans la rendre
consistante, de nouer du jugement sans l’aliéner Autre, en un mot de
concilier le désir et la loi.
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