fleuve de l Euphrate. » C’est un fleuve dont les eaux ont des propriétés
particulières, permettant une certaine opération, préparant la route des
Rois du Levant : « Puis le sixième répandit sa coupe sur le grand fleuve
de l Euphrate, et les eaux en furent desséchées, afin de livrer passage
aux rois venant de l’Orient » (Apocalypse XVI, 12).
Il existe aussi un Euphrate mythologique, qui renvoie à un homme
nommé Euphratès, qui tua son propre fils par erreur. Reconnaissant sa
méprise, il se jeta par désespoir dans le fleuve Médos, qui prit alors le
nom d’Euphrate (P. Grimal, Dictionnaire de Mythologie grecque et
romaine). Il existe ensuite un Euphrate alchimique, selon Dom Pemety en
son Dictionnaire mytho-hermétique : « L’Euphrate est un des noms
donnés par les Chymistes Hermétiques à la matière du Grand Œuvre
parvenue à la couleur blanche. »
Il existe enfin un Euphrate étymologique, riche en enseignements.
Euphrate vient de la racine phradzo qui veut dire « mettre dans l’esprit,
faire comprendre, expliquer, indiquer par signe aussi bien que par la
parole ». Selon le dictionnaire de Bailly, Homère utilise ce verbe dans
l’Odyssée (I, 270-273 ), dans le sens d’« expliquer clairement à tous ce
qu’on veut dire » : « Il faut bien me comprendre et peser mes paroles :
convoque dès demain l’assemblée achéenne; dis-leur ton mot à tous, en
attestant les dieux » (trad. V. Bérard). Il peut s’agir aussi d’expliquer, en
parlant des maîtres qui exposent [457] quelque chose à leurs élèves, ou
d’expliquer des oracles, des rêves, des signes dans les sacrifices,
indiquant ce qu’il faut faire. Le préfixe eu suggère l’idée de noblesse, de
bien, de bonté, de justesse, d’achèvement, de perfection, de bonheur.
L’Euphrate pourrait donc signifier la bonne formulation, explication et
compréhension de quelque chose, phrasis, qui a donné « phrase », étant
l’action d’exprimer par la parole, l’élocution, le langage, le discours.
Selon le dictionnaire de Chantraine, eu-phradès signifie « qui parle avec
justesse, bien exprimé, avec éloquence » (Simplicius, Suidas, Homère).
L’Euphrate renvoie à la parole droite et vraie, à la parole sage ou
prophétique, qui révèle. Tel Homère, Philalèthe ne fait donc pas de la
littérature : il fait œuvre de poésie et de création. « L’intention des
grands poètes de lAntiquité étant la révélation, non la littérature, la
fonction des aèdes était prophétique; or, il n y a pas de poésie sans