résumant à l’époque aux seules dépenses des couches moyennes et aisées et aux
dépenses publiques, elle ne pouvait donc pas constituer, à elle seule, la base d’une
dynamique de croissance, malgré les efforts entrepris par l’Etat comme, par exemple,
l’augmentation des salaires des fonctionnaires de 26%, rendue possible par le
triplement des prix du phosphate entre 1973 et 1974.
La forte corrélation entre le PIB agricole et le PIB global explique donc largement la
forte volatilité de la croissance économique tout au long de la décennie. De 5,6% en
1974, le taux de croissance était monté à 10,8% en 1976 avant de tomber jusqu’à -
2,8% en 1981. La reprise de 1982 ne fut qu’une illusion parce que le pays était déjà
confronté à une situation difficile.
Mais avant d’en arriver là, la volonté des pouvoirs publics était, pour doper la
croissance, d’axer la stratégie économique sur les exportations. Ce choix s’est
concrétisée par la mise en place du plan quinquennal de 1973-77, fondé sur une
politique de substitution aux importations, de grands projets d’infrastructure
(barrages, routes, industrie,…) et un protectionnisme censé protéger l’industrie
naissante, plan rendu possible, rappelons-le, par le triplement du prix du phosphate.
La forte hausse des dépenses publiques et d’investissement, que l’on peut aussi
expliquer par l’exécution du programme d’équipement intensif du plan (1973-77) et
la hausse des dépenses militaires (conflit du Sahara), était liée à cette orientation
économique.
Cependant, malgré les revenus du phosphate et la croissance des recettes fiscales et
non fiscales, les dépenses étaient telles que le recours à l’endettement extérieur était
devenu une nécessité. L’Etat ayant entretemps été surpris par le retournement brutal
des cours du phosphate, à partir de 1975. L’endettement n’a donc cessé de progresser
en passant de 22,4% du PIB, en 1974 à 53,38% en 1981.
En outre, la politique monétaire expansionniste destinée à accompagner la politique
de relance par les investissements a provoqué une situation permanente de forte
inflation avec une moyenne de 10% sur la période 1973-1983 (pic de 17,5% en
1974), aggravée par un très faible niveau de concurrence dans le secteur privé, dû à
une situation de marché monopolistique et de rente, dont l’effet immédiat fut une
sous-utilisation des capacités productives, et la non-nécessité d’une recherche de
réduction des coûts de production.
A ces contraintes, il s’est ajouté, malgré tous les efforts de l’Etat, que la contribution
du commerce international à la croissance était négative
(-2 points du PIB) durant la période 1975-1981, du fait du recul de la demande
mondiale causé par la récession économique, mais aussi d’une progression plus
importante des importations par rapport aux exportations, suite notamment aux chocs
pétroliers (1973 et celui de 1979 engendré par la guerre Iran-Irak). Ce qui a provoqué
un déficit de la balance des paiements courants tout au long de la période citée. De -
504 MDH, le gap avait atteint -1,86 milliard en 1981.
Une croissance qui alimente le déficit des comptes extérieurs
La convergence de tous ces déséquilibres intérieurs -malgré une restriction des
dépenses en 1978- et extérieurs n’a pas manqué de peser sur la croissance, dont la
tendance fut baissière tout au long de la décennie. Le plus grave est qu’elle a
débouché sur une situation de quasi-cessation de paiement.