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De plus, l’utilité d’une loi punissant la négation du génocide arménien est
toute relative puisque la France s’est déjà dotée d’un texte, le 29 janvier
2001, qui stipule que la France reconnaît publiquement l’existence du
génocide arménien. Cette nouvelle loi vient en complément du texte de
2001. L’appareil législatif français n’avait donc aucunement besoin de
s’encombrer avec une nouvelle loi qui n’apporte rien à la position de la
France sur ce sujet.
Une telle loi a provoqué quelques incidents diplomatiques. En effet, les
turcs ont l’impression que les députés français les forcent à reconnaître
leur passé. Soit dit en passant, la France ferait mieux de reconnaître
toutes les erreurs de son passé avant d’imposer cela à d’autres pays. Par
conséquent, de nombreux turcs ont montré leur mécontentement à
travers des manifestations devant l’ambassade de France à Ankara et à
Istanbul. Le premier ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, a condamné lui-
même cette loi et il a demandé à M. Chirac, dans un entretien
téléphonique, de la retirer au plus vite (ce que devrait faire le président).
Mais au delà de tous les calculs électoralistes et des quelques incidents
diplomatiques, il faut voir à travers ce texte tout le problème que pose les
lois mémorielles. En effet, ces dernières sont des lois déclarant, voire
imposant, le point de vue officiel d’un état sur des évènements
historiques. Sont donc à classer dans cette catégorie, les lois Gayssot
(punissant la négation des crimes contre l’humanité), Taubira
(reconnaissance par la France de l’esclavage comme contre l’humanité et
enseignement de l’esclavage comme tel dans les écoles) et l’article 4,
désormais retiré, de la loi du 23 février 2005 qui reconnaissait « en
particulier le rôle positif de la présence française outre-mer, notamment
en Afrique du Nord et accordent à l’histoire et aux sacrifices des
combattants de l’armée française issus de ces territoires la place éminente
à laquelle ils ont droit ».
Un peu moins d’un an après le débat qui avait enflammé la France autour
des effets positifs de la colonisation, les députés français persistent et
signent dans la bêtise ! De plus, il est amusant, mais surtout désolant, de
constater que des députés socialistes renient les arguments, qu’ils avaient
utilisé à bon escient lors du débat sur la colonisation positive, en
proposant une loi décrétant une vérité historique à l’instar de la loi votée
en février 2005. Ces lois empêchent la progression de la recherche
historique puisqu’elles placent un fait historique comme une vérité
générale : le révisionisme sur ce sujet devient alors beaucoup plus difficile
voire impossible.
En plus de figer la recherche, le parlement n’est pas dans son rôle lorsqu’il
décide de légiférer sur l’histoire. En effet, comme cela a été rappelé à
l’occasion du débat autour de la loi du 23 février 2005, l’histoire
appartient uniquement aux historiens et ne doit être écrite que par les
historiens qui, eux seuls, sont spécialistes de cette matière et sont aptes à
s’approcher de la vérité.