« Ceci n'est pas le Péloponnèse, mais bien l'Ionie ».
J'ajoute que les Atthidographes, parmi toutes leurs divergences d'opinion, s'entendent
généralement sur un point (je ne parle bien entendu que des principaux), c'est que Pandion
ayant eu quatre fils, Ægée, Lycus, Pallas et Nisus, et ayant voulu partager l'Attique en quatre
lots, la Mégaride échut à Nisus, le quatrième fils, qui y fonda Nisée. Suivant Philochore, le
royaume de Nisus s'étendait depuis l'Isthme jusqu'à Pythium, mais Andron d’Halicarnasse en
recule les limites jusqu'à Éleusis et au champ Thriasien. Sur la distribution même des lots
entre les quatre frères, fait très diversement exposé par les auteurs, qu'il nous suffise de citer
le témoignage de Sophocle. Voici les propres paroles qu'il met dans la bouche d'Ægée ¹ :
« Mon père a décidé dans sa sagesse que j'irais prendre possession de l'ACTÉ [ou
rivage occidental de la contrée], tel est le lot qu'il m'a assigné à titre d'aîné ; [au
second de ses fils], à Lycus, il a destiné [la côte opposée], le riant jardin qui regarde
l'Eubée ; il a fait ensuite en faveur de Nisus, un domaine à part de tout le canton qui
avoisine les roches de Sciron ; quant aux terres qui se prolongent vers le Midi, elles
ont été attribuées par lui au plus rude de ses enfants, père lui-même d'une race de
géants, elles forment le lot de Pallas ».
Or, ces différentes preuves n'établissent-elles pas que la Mégaride faisait anciennement
partie de l'Attique ?1
1. Voyez dans les Vind. Strab., pages 129-130, la restitution tentée par Auguste Meineke de
ce fragment de Sophocle.
7. Mais après le retour des Héraclides et le partage du Péloponnèse qui intervint alors,
beaucoup des anciens habitants, s'étant vu chasser par les conquérants et par les Doriens
qui les accompagnaient, durent passer en Attique. Mélanthus, roi de Messène, était du
nombre, et, comme il avait été vainqueur en combat singulier de Xanthus, chef des Béotiens,
les Athéniens spontanément l'élurent pour leur roi. La population de l'Attique cependant
s'était considérablement accrue par l'arrivée de tous ces émigrants, les Héraclides alors
prirent peur, et, comme ils étaient d'ailleurs excités par les Péloponnésiens, par les
Corinthiens surtout et les Messéniens, jaloux de l'Attique, les premiers pour raison de
voisinage, les seconds parce que l'Attique avait alors pour roi Codrus, propre fils de
Mélanthus, ils envahirent l'Attique à main armée. Vaincus en bataille rangée, ils durent
évacuer le reste du pays, mais ils retinrent la Mégaride, y fondèrent la ville de Mégare, et,
ayant transformé les habitants, tous Ioniens jusque-là, en une population dorienne, ils firent
disparaître la stèle qui séparait naguère les possessions des Ioniens de celles des
Péloponnésiens.
8. Malgré les nombreuses révolutions dont elle a eu à souffrir, la ville de Mégare est encore
debout. On sait qu'elle possédait naguère jusqu'à une école philosophique, dite école de
Mégare parce qu'elle remontait à Euclide, disciple de Socrate et mégarien de naissance, tout
comme l'école d'Élée, qu'a illustrée, entre autres philosophes, Pyrrhon, remontait à Phédon
l'éléate, autre disciple de Socrate, et l'école d'Érétrie à l'érétrien Ménédème. Le territoire de
Mégare est, comme celui de l'Attique, d'une extrême stérilité ; il est, en effet, dans la plus
grande partie de son étendue, couvert par les monts Onées, longue arête qui part des
Roches Scironides et ne se termine qu'à la Béotie et au Cithéron, formant ainsi la séparation
entre la mer sur laquelle s'ouvre la port de Nisée et la mer [qui baigne Pagæ] ¹ autrement dit
la mer Alcyonide.