De nos jours, nous observons que nos sociétés connaissent une montée de l’individualisme.
Comment la cohésion sociale peut-elle être préservée face au primat de l’individu ?
Comment les instances d’intégration des individus réalisent-ils encore leur fonction ? Assiste-
t-on à la crise de l’intégration ou plutôt à une reconstruction des instances d’intégration ?
I- Comment assurer une certaine cohésion dans une société individualiste ?
A- La naissance de l’individualisme selon Emile Durkheim
La naissance, à la fin du 19e siècle, de la sociologie comme discipline visant une connaissance
scientifique du social, résulte fondamentalement des inquiétudes provoquées par la montée de
l’individualisme dans les sociétés occidentales. Sous la poussée conjointe des révolutions
démocratique et industrielle, de nouveaux rapports sociaux, économiques et politiques
bouleversent progressivement l’ordre social traditionnel. On observe simultanément un
affaiblissement de l’emprise de la religion sur les représentations (sécularisation et
laïcisation), une baisse de l’influence de la famille sur les destinées (égalisation des chances et
idéal méritocratie) et un recul du pouvoir des autorités traditionnelles sur les individus
(démocratisation).
Son projet peut se résumer à l’élucidation d’un paradoxe : « comment se fait-il que tout en
devenant plus autonome, l’individu dépende plus étroitement de la société ? Comment peut-il
être à la fois plus personnel et plus solidaire ? » (Durkheim E., De la division du travail
social, [1893], PUF, Quadrige, 2e éd., 1991. p.XLIII )
La nature sociale du lien social : il considére que le lien social ne serait pas de nature
politique contrairement à ce que supposent Locke, Hobbes et Rousseau qui expliquent la
société à partir d'un contrat social constituant l'État. Il va aussi écarter un lien de nature
utilitariste fondé sur le besoin que chacun a des autres dans l'échange.
Il fondera le lien social sur des règles qui doivent constituer pour l'homme des contraintes
acceptées pour vivre en société et un idéal à atteindre. Ces règles vont prendre un caractère
moral.
Pour Durkheim la morale est extérieure à l'individu, elle existe dans toute société organisée et
est le fondement de la solidarité à l'intérieur d'un groupe. Cette morale exerce son emprise sur
les individus de façon plus ou moins forte. Lorsqu'elle est forte, elle pousse les hommes les
uns vers les autres et fortifie le lien social ; lorsqu'elle est faible alors le lien social se défait.
La manifestation extérieure de la morale est le droit, lequel va ériger en règles les principes de
la solidarité sociale, chaque type de droit va donc concerner un type précis de solidarité
sociale.
La conscience collective est l'ensemble des croyances communes à tous les membres d'un
groupe. Elle fonde des relations sociales dont la transgression est sanctionnée par le droit
répressif. Exemple : le sacrilège comme transgression d'un état fort de la conscience collective
inspirera une réaction passionnelle du groupe.
Le droit restitutif ne concerne pas la conscience collective mais règle des différents liés à des
transgressions concernant des parties circonscrites du groupe social (droit commercial pour
les litiges entre commerçants par exemple), la réaction est donc plus mesurée et vise à réparer.
A partir de là Durkheim distingue deux types de solidarité sociale :
la solidarité mécanique dans laquelle les individus sont semblables et partagent la même
conscience commune sans spécialisation des tâches ;