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Introduction
Les Conseils économiques et sociaux (CES) sont l’institution démocratique du dialogue
social et civil. Mais ils sont aussi une institution ayant vocation de conseiller le
Gouvernement pour améliorer la politique économique et sociale, c’est-à-dire de promouvoir
à la fois le développement économique et la cohésion sociale du pays. Ce faisant, ils
contribuent à la gouvernance démocratique, la définition de démocratie étant le
gouvernement par le peuple (en représentant les forces vives de la société) et pour le
peuple (en cherchant l’intérêt général). Les Conseils économiques et sociaux répondent en
outre potentiellement à une aspiration de la vie démocratique contemporaine, d’aller au-delà
du système classique de délégation des élus en offrant une place à la participation
citoyenne, à coté et en complément du Parlement.
L’expérience prouve que pour qu’un organe puisse remplir une tâche aussi complexe que de
promouvoir le dialogue social, travailler à la réduction des clivages dans la société et de
participer au processus de prise de décision gouvernementale afin de contribuer au
développement économique et social du pays, il faut qu’il réunisse un certain nombre de
critères en matière de représentativité, d’expertise, d’indépendance et d’insertion
institutionnelle dans les processus législatifs et réglementaires.
Ces 4 dimensions – représentativité, expertise, indépendance et insertion dans les
processus législatifs et réglementaires – forment un ensemble complexe et parfois
contradictoire : une stricte représentativité de la structure du Conseil ne permet peut-être pas
toujours d’intégrer toute l’expertise (notamment scientifique) nécessaire. Mais un Conseil qui
ne serait constitué que d’experts ne serait pas, par manque de représentativité, en mesure
de construire un consensus stable entre les forces vives de la société. De même, si une
implication forte du CES dans les mécanismes politiques pourrait améliorer la prise en
compte de ses propositions, elle nuirait à son indépendance et donc à sa qualité d’institution
de la construction du consensus et de lieu d’expertise sociétale. C’est donc une judicieuse
balance entre ces dimensions qui permet à l’institution CES de contribuer à construire une
culture politique basée sur les valeurs démocratiques et le dialogue social du pays.
La présente étude vise à présenter – sur la base d’un regard croisé sur certains éléments
institutionnels et fonctionnels – quelques unes des lignes de force communes qui
assurent le bon fonctionnement de ces institutions, mais aussi des variantes qui se
déclinent autour d’elles, ainsi qu'à en discuter – dans la mesure du possible – les
conséquences. L’objectif de l’étude est de présenter la richesse du monde des CES afin
d'inspirer l’échange d’idées entre ces institutions et de fournir une base comparative pour
d'éventuelles réformes.
Le regard se concentrera sur les CES de l’Union européenne et la Francophonie, ces deux
groupements de pays étant liés par des relations historiques fortes et représentant une
variété considérable de traditions politiques et culturelles. L'étude est basée principalement
sur les informations accessibles par internet (sites des CES, lois et textes réglementaires),
mais également sur des travaux effectués par le CES européen et l’UNDESA. Vu le grand
nombre d’institutions concernées et la rapidité de certains changements institutionnels, il est
possible que certaines des informations intégrées dans cette étude ne soient pas à jour. Le
lecteur voudra bien nous en excuser et nous signaler d'éventuelles erreurs que nous nous
empresserons de corriger.
L'inclusion des quatre dimensions précités sera examinée à travers cinq grande questions :
les bases juridiques des CES; leur composition et les modalités de nomination de leurs
membres; leur gouvernance; leurs missions; et les modalités de leur saisine.