Hors-série Mai 2016 REVUE MENSUELLE (10 Nos) fondée en 1959 par L’ASSOCIATION NATIONALE DE LA PRESSE MUTUALISTE 255, rue de Vaugirard – 75719 PARIS CEDEX 15 – Tél. : 01 40 43 36 81 Abonnement : Le numéro ...................................................................................................... 10 numéros par an (pour 1 abonnement) ............................... 68,00 € 680,00 € Vente et abonnement à nos bureaux. Directeur de la publication : Gérard Quittard Secrétariat de l’ANPM : Carole Corbion, 01 40 43 36 81 Christine Jorez, 01 40 43 61 27 Coordination éditoriale : Laurence Hamon Rédactrice en chef : Sylvie Irissou Contact technique : Cyril Dehay, 01 44 49 61 00 Ont collaboré à ce hors-série : Delphine Delarue, Mathilde Leroy, Aliisa Waltari Réalisé par la CIEM 67, rue Blomet 75015 Paris Numéro de CPPAP : 0518 G 83108 Numéro ISSN : 0015 – 9670 Dépôt légal : mai 2016 Les droits d’utilisation des visuels fournis par la Ciem pour illustrer les articles de ce numéro sont strictement limités dans le cadre de France Mutualité (article + photographie). Tout autre usage est interdit. SOMMAIRE PRESSE Lettre aux adhérents de l’ANPM (Gérard Quittard, président) ............................................... 3 Les 50 derniers articles ou dossiers de « France-Mutualité » .............................................. 4 .............................................................................................. 6 ÉTATS GÉNÉRAUX DE LA SANTÉ VISUELLE Des Etats généraux pour la santé visuelle Basse vision : une prise en charge de qualité encore peu répandue L’ophtalmologie, une discipline à la pointe de l’innovation ........................... ................................................... 8 10 La coopération professionnelle comme solution à la pénurie d’ophtalmologistes......................................................................................................................................................... 12 ILLUSTRATIONS ........................................................................................................................................................................................................... 15 Les articles de ce numéro peuvent être repris dans le cadre des 50 % de la surface imprimée des revues mutualistes obligatoirement consacrés à l’information générale. Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 2 Chers amis abonnés de France Mutualité, chers adhérents, La fin de l’année 2014 et une partie de l’année 2015 nous ont conduits à réorganiser la vie administrative et technique de l’association. Cela a perturbé quelque peu la régularité des parutions de France Mutualité et nous nous en excusons. Aujourd’hui, vous le savez, le dispositif est en place à travers notre relation au quotidien avec le secrétariat général de la fédération, nos liens maintenus avec la direction de la communication et de l'information, mais aussi au travers de la convention intervenue avec la Ciem, Coopérative d’information et d’édition mutualiste. C’est la raison pour laquelle votre conseil d’administration avait décidé d’éditer un numéro spécial « hors série ». Pour cela, nous avons retenu l’événement des Etats généraux de la santé visuelle, portés par notre fédération. Ce numéro est prêt, et nous vous l'adressons sous le format numérique désormais convenu pour l’édition de France Mutualité. Cette question de l’évolution des problématiques de vision est au cœur de la stratégie d’action de prévention santé menée par nos mutuelles, par nos SSAM et par les réseaux, en particulier notre partenaire Visaudio. Nous vous souhaitons bonne réception de cette édition spéciale. Faites-nous remonter vos réactions et les utilisations que vous pourrez faire de ce numéro « hors série », compris bien évidemment dans votre abonnement. Avec mes meilleurs sentiments mutualistes. Gérard Quittard, président de l’ANPM Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 3 PRESSE Les 50 derniers articles ou dossiers de « France-Mutualité » Afin de vous aider dans l’élaboration du sommaire de votre revue, « France-Mutualité » publie chaque mois la liste de ses cinquante derniers articles ou dossiers, brèves comprises. Vous pouvez télécharger ces articles sur Mutweb, l’Extranet fédéral : à partir de l’onglet « Réseaux », « Presse mutualiste », et « Collection “FranceMutualité” ». Titre Rubrique Numéro 562 – Mai 2016 Citiz-France : une coopérative pour développer l’autopartage Economie sociale Le dossier médical partagé, pour une meilleure coordination Système de soins des soins Brèves et filets (5) Système de soins Résistance aux antibiotiques : où en est-on ? Médecine Compléments alimentaires : utiles ou dangereux ? Prévention Hammam et sauna : de nombreux bienfaits, Forme – Bien-être peu de contre-indications Brèves et filets (5) Santé Congé parental d’éducation : c’est papa qui s’occupera de Vie pratique / bébé Famille Numéro 561 – Avril 2016 L’HAD, une alternative à l’hospitalisation traditionnelle Système de soins Brèves et filets (5) Système de soins Troubles de l’équilibre : quand l’oreille interne est en cause Médecine Premiers secours : bien réagir pour sauver des vies Prévention Y a-t-il de « bonnes » et de « mauvaises » graisses ? Prévention Les « serious games » : des jeux vidéo thérapeutiques Bien-être Brèves et filets (5) Santé Ateliers solidaires : donner une seconde vie aux objets Vie pratique / Environnement Numéro 560 – Mars 2016 Avantages et limites de la téléconsultation Système de soins Brèves et filets (5) Système de soins Fibromyalgie : un mal intense et invisible Médecine Générations Cobayes : la jeunesse engagée Prévention contre les maladies environnementales Les régimes « tendance » en question Forme Brèves et filets (5) Santé Protéger ses données personnelles Vie pratique sur les réseaux sociaux Voyager avec son enfant Vie pratique Numéro 559 – Février 2016 Cinq bonnes raisons de fréquenter les réseaux de soins Système de soins Brèves et filets (5) Système de soins Nombre de signes 5 789 6 326 4 852 5 616 4 493 3 092 4 960 4 075 6 241 4 939 7 526 7 167 7 985 5 187 5 078 4 058 7 245 5 695 5 986 4 676 6 523 4 679 7 226 5 158 5 600 4 648 Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 4 Numéro 559 – Février 2016 Lyme : une maladie parfois grave et pourtant négligée Médecine Bien choisir ses produits cosmétiques Prévention Vaincre la peur de l’avion Forme Brèves et filets (5) Santé Le viager, comment ça marche ? Vie pratique Socio-esthéticienne : bien loin des salons Vie pratique Numéro 558 – Janvier 2016 La Sécurité sociale et la branche maladie en questions Système de soins Brèves et filets (5) Système de soins Acné : les nouvelles recommandations de la HAS Médecine Parkinson : mieux vivre avec la maladie Médecine grâce aux thérapies complémentaires Cancer : les gestes indispensables Prévention Bien dormir pour être en forme Forme Brèves et filets (5) Santé Vrai-Faux : connaissez-vous les droits et les devoirs Vie pratique / du piéton ? Droits Numéro 557 – Décembre 2015 Complémentaire santé des retraités : Système de soins le gouvernement fait un pas vers les mutuelles Brèves et filets (5) Système de soins « Mon traitement me fait grossir », comment réagir ? Médecine Le don du sang en questions Médecine Cannabis : une drogue pas si douce Prévention 50 ans : le bon âge pour faire un bilan de santé Prévention Brèves et filets (5) Santé Produits ménagers faits maison : on s’y met ! Vie pratique / Environnement Numéro 556 – Novembre 2015 Des entretiens pharmaceutiques pour les patients Système de soins sous anticoagulant Vrai-faux : tout savoir sur le don de gamètes Système de soins 6 433 6 507 4 451 2 120 3 938 5 187 8 988 5 186 5 773 7 539 6 197 4 829 5 055 3 179 4 241 5 755 5 696 8 320 6 893 6 728 5 029 5 388 6 740 5 322 Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 5 Calibrage Texte principal : 4 876 signes Des Etats généraux pour la santé visuelle Le 15 décembre, pour la toute première fois et à l’initiative de la Mutualité française, l’ensemble des acteurs de la santé visuelle s’est réuni à Paris pour débattre des grands enjeux de la filière. Délais d’attente interminables pour obtenir un rendez-vous chez l’ophtalmologiste, coût élevé des équipements visuels, reste à charge important pour les patients… : le secteur souffre d’un ensemble de facteurs qui aggrave l’inégalité d’accès aux soins, au dépistage et aux corrections visuelles. Les ateliers de préparation à cette journée et les débats menés lors des rencontres ont conduit à la rédaction d’un livre blanc qui sera prochainement publié. Susciter un débat citoyen autour des problématiques de la santé visuelle et proposer des pistes d’action pour améliorer la prise en charge de toute la population, tel était l’objectif des premiers Etats généraux du secteur, qui ont eu lieu le 15 décembre à la Maison de la Mutualité, à Paris. Un événement inédit, dont l’initiative revient à la Mutualité française, premier financeur des soins d’optique en France (les complémentaires santé prennent en charge 70 % de ces dépenses, contre 4 % seulement pour l’Assurance maladie). « Ce que nous voulions faire, c’est réunir tous les acteurs de la filièr e […] pour aborder de façon transversale la santé visuelle des Français », expliquait Etienne Caniard, président de la Mutualité, lors de l’ouverture des débats. Pari tenu. Ophtalmologistes, orthoptistes, opticiens, optométristes, représentants de l’industrie optique et de la distribution, institutionnels et usagers : ils étaient tous là, bien décidés à échanger et à engager des pistes de dialogue concrètes. Une demande de soins qui augmente Et il était temps : à l’heure où la demande de soins d’optique et d’ophtalmologie augmente, notamment en raison du vieillissement de la population, la pénurie d’ophtalmologistes guette. En France, il faut désormais attendre en moyenne cent onze jours avant de décrocher un rendez-vous. Des délais qui peuvent même atteindre « six ou neuf mois dans certaines villes, voire excéder un an en Picardie ou en Franche-Comté », précise le rapport Voynet de juillet 2015 sur la restructuration de la filière visuelle**. Si rien n’est fait, la situation devrait encore empirer avec les prochains départs à la retraite de nombreux ophtalmologistes (lire aussi notre article « La coopération professionnelle comme solution à la pénurie d’ophtalmologistes »). Face à de telles difficultés, nombreux sont les patients qui Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 6 s’abstiennent de consulter, malgré les compétences reconnues des ophtalmologues français et la qualité des équipements d’optique (lire aussi notre article « L’ophtalmologie, une discipline à la pointe de l’innovation »). Selon l’enquête Harris Interactive * menée pour la Mutualité française, un tiers des Français déclarent avoir déjà renoncé à des soins, à des lunettes ou à des lentilles principalement en raison de délais d’attente trop importants, mais aussi pour des questions financières (78 % des personnes interrogées estiment que le coût des équipements est trop élevé). Les personnes précaires, âgées ou en situation de handicap pénalisées Cette situation conduit inévitablement à un phénomène d’inégalité d’accès aux soins et aux équipements : malgré des pathologies et des troubles visuels plus fréquents, « le port d’une correction est moins répandu parmi les populations aux revenus modestes que parmi celles aux revenus les plus élevés », souligne l’étude Asterès*** présentée lors des Etats généraux de la santé visuelle (EGSV). Des difficultés d’accès qui concernent aussi les personnes en situation de handicap et les personnes âgées : « La perte d’autonomie rend quasi impossible l’accès à la consultation, souligne le compte rendu des ateliers préparatoires aux EGSV. Les problèmes de santé visuelle sont mal traités en Ehpad (établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, NDLR). […] Près du quart des troubles visuels des patients n’y sont pas pris en charge. » Bref, les problématiques ne manquent pas. Et les solutions non plus : développement de la coopération professionnelle et des réseaux d’opticiens, création d’équipes mobiles dans les déserts médicaux, renforcement du dépistage… Toutes les recommandations évoquées lors des débats seront regroupées dans un livre blanc qui sera publié prochainement. Des propositions auxquelles Jean Debeaupuis, directeur général de l’offre de soins, qui représentait Marisol Touraine le 15 décembre, a promis d’être « particulièrement attentif »… Delphine Delarue * « Les enjeux de la santé visuelle », Harris Interactive, décembre 2015. ** « Restructuration de la filière visuelle », Dominique Voynet, Inspection générale des affaires sociales (Igas), juillet 2015. *** « Filière de la santé visuelle, états des lieux », Asterès, septembre 2015. Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 7 Calibrage Texte principal : 4 735 signes Basse vision : une prise en charge de qualité encore peu répandue Les centres de réadaptation des déficiences visuelles prennent en charge les personnes atteintes de cécité ou de malvoyance pour les accompagner vers davantage d’autonomie. Bien qu’elles contribuent à retarder l’âge de la dépendance et répondent ainsi à un véritable enjeu de santé publique, ces structures sont peu nombreuses en France et leur développement n’est pas vraiment encouragé par les pouvoirs publics. En France, seule une douzaine d’établissements de soins de suite et de réadaptation propose une prise en charge adaptée aux déficients visuels. Une offre dérisoire, qui peine à faire face à la demande. « Dans notre clinique, par exemple, il faut attendre deux ans avant d’obtenir une place », indique le docteur Gérard Dupeyron, médecin chef de l’Association pour la réadaptation des aveugles et malvoyants (Aramav), située à Nîmes. Si l’attente est longue, elle en vaut pourtant la peine. L’approche développée dans ces structures consiste à aider les patients à optimiser au maximum la fonction visuelle qui leur reste et à développer en parallèle des stratégies de compensation de leur handicap. « Cette démarche permet aux déficients visuels d’acquérir une autonomie dans leur vie quotidienne, précise le docteur Dupeyron. Ils reprennent confiance en eux, peuvent gérer leurs déplacements sans danger et retrouver une vie sociale. » Autant d’éléments qui répondent aussi à la problématique de la dépendance, puisqu’ils favorisent le maintien à domicile et retardent le placement en institut (la déficience visuelle causée par des maladies telles que le glaucome ou la DMLA concerne essentiellement les personnes âgées). Bilan orthoptique complet Tous les centres qui disposent d’un accompagnement en déficience sensorielle fonctionnent à peu près de la même façon. En déficience visuelle, c’est l’ophtalmologiste qui coordonne le parcours de soins du patient. Concrètement, ce dernier commence par subir une évaluation poussée de son déficit visuel, conduite par un orthoptiste. L’objectif est de déterminer quel est son niveau de vision fonctionnelle, ou « résidu visuel ». Les orthoptistes développent ensuite de nouvelles stratégies neurosensorielles pour permettre au patient d’utiliser au mieux ses capacités préservées. « Parmi ces stratégies, l’exemple le plus connu Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 8 est celui des points de fixation de suppléance dans la DMLA, ajoute Gérard Dupeyron. La forme humide de cette maladie entraîne l’apparition d’une tache noire dans le champ de vision central. On enseigne alors au patient comment regarder légèrement de travers, là où la vue n’est pas abîmée. » L’équipe élabore ensuite un programme personnalisé de réadaptation qui intègre également de l’ergothérapie et de la psychomotricité. L’idée est de mettre en œuvre toutes les possibilités de compensation du handicap (travail autour de la coordination des gestes, du sens tactile, du schéma corporel, de la tonicité, de la posture et des aides optiques adaptées). Des prises en charge récentes Venues du nord des Etats-Unis et du Québec, puis améliorées en France, ces méthodes donnent de très bons résultats. « Si elles sont peu développées chez nous, c’est surtout parce qu’elles sont récentes, observe le docteur Dupeyron. Le concept de réadaptation basse vision n’est arrivé en France que dans les années 90, période à laquelle on parlait déjà du trou de la Sécu. Il y a donc un problème de financement et de volonté politique. » Mais ce n’est pas tout : même si aujourd’hui les choses évoluent, les ophtalmologistes français sont longtemps restés peu engagés dans la rééducation des déficients visuels. « Ils soignent les pathologies, ils réalisent les interventions chirurgicales nécessaires, mais concernant les conséquences sur la vie quotidienne, ils interviennent peu, faute de temps et parce que c’est un autre métier, explique Francis Guiteau, directeur de la Mutualité française Anjou-Mayenne, qui gère une plate-forme déficience sensorielle à Angers. Cela étant, ces disciplines (visant à une meilleure autonomie du patient, NDLR) intéressent de plus en plus les médecins de MPR (médecine physique et de réadaptation, NDLR), qui considèrent que la rééducation en basse vision fait naturellement partie de leur champ d’action. » La prise en charge des déficients visuels semble donc appelée à poursuivre son développement. Parmi les initiatives actuelles, la Mutualité française, très active en matière de santé visuelle, s’intéresse par exemple à la façon dont les établissements de soins de suite et de réadaptation, assez nombreux sur le territoire, pourraient intégrer davantage d’unités consacrées à la réadaptation de la déficience visuelle ou auditive. Mathilde Leroy Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 9 Calibrage Texte principal : 4 401 signes Encadré : 786 signes L’ophtalmologie, une discipline à la pointe de l’innovation En constante évolution depuis trente ans, l’ophtalmologie atteint aujourd’hui un degré de sophistication extrêmement élevé. La qualité de cette spécialité permet aujourd’hui de corriger la plupart des troubles visuels et de prendre en charge des pathologies lourdes et complexes pouvant conduire à la cécité. « L’ophtalmologie a toujours été novatrice », a rappelé le professeur Gilles Chaine, chef de service d’ophtalmologie du centre hospitalier universitaire (CHU) Avicenne, lors des Etats généraux de la santé visuelle (EGSV). Invention de la microchirurgie et des implants intraoculaires, développement des thérapies géniques, nouvelles molécules, lasers, logiciels de dépistage… Depuis trente ans, l’innovation se poursuit, s’accélère et les progrès sont considérables. Le degré de sophistication est tel qu’il permet aujourd’hui de corriger la plupart des troubles de la vision et d’améliorer la prise en charge de maladies très complexes. « D’un point de vue de santé publique, il y a deux innovations majeures à retenir, a indiqué le professeur Chaine : la photo-coagulation rétinienne pour le traitement de la rétinopathie diabétique (complication du diabète affectant les petits vaisseaux sanguins de la rétine, NDLR), qui a permis d’éviter un nombre considérable de cécités, et la découverte de l’ivermectine pour soigner l’onchocercose. » Cette maladie parasitaire est une cause majeure de malvoyance en Afrique. En stoppant son évolution, qui mène à la cécité, l’ivermectine a amélioré le quotidien de millions de malades. De nouveaux traitements Autre avancée importante : celle des traitements de la forme humide de la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), une pathologie liée au vieillissement de l’œil qui détruit la macula, la région centrale de la rétine. L’arrivée, il y a une quinzaine d’années, des anti-VEGF, des molécules qui stoppent la prolifération de vaisseaux anormaux dans la rétine, a permis de freiner considérablement l’évolution de la maladie en bloquant la baisse de la vision centrale. A noter également : les progrès importants réalisés pour soigner le glaucome. Cette affection causée par l’élévation de la pression intraoculaire entraîne une atteinte du nerf optique et une altération progressive du champ visuel périphérique. Aujourd’hui, la plupart des patients sont traités avec un seul collyre (à base de nouvelles molécules, des prostaglandines Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 10 notamment) qui permet d’abaisser la tension de l’œil à un niveau acceptable. Et quand les collyres sont mal supportés, la chirurgie au laser donne aussi de très bons résultats. Chirurgie réfractive En matière de chirurgie également, les avancées sont notables. Aujourd’hui, cette discipline utilise essentiellement le laser Lasik et l’implantologie intraoculaire. En cas de myopie importante par exemple, le chirurgien utilise une combinaison de deux lasers : un premier qui sert à découper un petit capot sur la cornée en laissant une charnière et un second dont le rôle est d’aplatir le centre de la cornée pour diminuer la longueur de l’œil (la myopie se caractérise par un œil trop long par rapport à son pouvoir de focalisation). Le capot est ensuite remis en place. Avec une telle technique, pratiquée en ambulatoire et sous anesthésie locale, le patient peut ouvrir les yeux et voir net quelques heures seulement après l’opération ! Autre type d’intervention parfaitement maîtrisée : la chirurgie de la cataracte. Première cause de cécité dans le monde, cette maladie se manifeste par la perte de transparence du cristallin, qui ne peut plus assurer la mise au point. Extrêmement robotisée, l’opération s’appuie sur des machines très perfectionnées. Elle consiste à pratiquer une ouverture dans l’œil, puis à introduire un appareil qui émet des ultrasons afin de liquéfier le cristallin. Celui-ci est ensuite aspiré et remplacé par un implant qui a aussi la capacité d’améliorer les défauts visuels préexistants. On le constate, tout va très vite en matière d’ophtalmologie. « Cinquante pour cent des actes que l’on enseigne aujourd’hui à un interne ne seront plus pratiqués dans dix ans, précisait le professeur Philippe Gain, chef du service d’ophtalmologie du CHU de Saint-Etienne, également présent aux EGSV. Il s’agit donc d’une discipline fascinante, en constante évolution, et qui nécessite une formation permanente. » Aliisa Waltari Encadré Quand le progrès technique conduit au regroupement Si l’arrivée de nouveaux appareillages diagnostiques et thérapeutiques très performants a révolutionné la prise en charge des troubles et des pathologies de la vue depuis une trentaine d’années, ces innovations introduisent aussi un nouvel exercice de l’ophtalmologie. Autrefois seul, l’ophtalmologiste a tendance à se rapprocher d’autres confrères, ne serait-ce que pour assumer les coûts particulièrement élevés de tels équipements. Des équipements qui « incitent » donc à la « mutualisation au sein de cabinets de groupe ou de plateaux techniques » et « dont la qualité constitue désormais l’un des principaux arguments de choix au moment de l’installation », précise le rapport Voynet sur la restructuration de la filière visuelle. Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 11 Calibrage Texte principal : 4 621 signes Encadré : 1 649 signes La coopération professionnelle comme solution à la pénurie d’ophtalmologistes Manque croissant d’ophtalmologistes, délais d’attente interminables, population vieillissante en demande de soins… depuis quelques années, l’accès à la santé visuelle est menacé en France. Parmi les solutions évoquées à l’occasion des Etats généraux, la piste de la coopération professionnelle, qui consiste à déléguer certains examens de la vue à des personnels paramédicaux, semble plutôt prometteuse. Cent onze jours : c’est, selon l’Observatoire jalma de l’accès aux soins (janvier 2014), l’attente moyenne en France pour décrocher un rendez-vous chez l’ophtalmologiste. Dans le détail, seuls 7 % des patients obtiendraient une consultation dans les deux semaines, 25 % dans un délai de deux semaines à deux mois et pour 39 % il faudrait attendre plus de six mois ! Face à de tels délais, presque deux personnes sur dix renonceraient à consulter. Une situation pour le moins inquiétante, qui ne semble pas près de s’améliorer : la pyramide des âges des ophtalmologistes annonce de nombreux départs à la retraite dans les deux prochaines décennies et la plupart ne seront pas remplacés. D’après un scénario tendanciel de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees), la profession perdrait ainsi 35 % de ses effectifs entre 2006 et 2030. Or, dans le même temps, la demande de soins oculaires, notamment la prise en charge des maladies graves comme la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) ou le glaucome, devrait continuer de progresser en raison du vieillissement de la population. Réorganiser la filière visuelle Une réorganisation complète de la filière semble donc incontournable. L’idée défendue par la majorité des participants aux Etats généraux de la santé visuelle (EGSV) est de généraliser au maximum les coopérations professionnelles et les délégations de tâches. Depuis quelques années, certains cabinets d’ophtalmologie confient déjà des actes de préconsultation à des personnels paramédicaux. Cela permet aux ophtalmologistes de dégager du temps médical pour se consacrer aux pathologies lourdes et complexes. Ces cabinets s’appuient notamment sur les orthoptistes, des spécialistes de la réadaptation et de l’exploration de la vision, Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 12 pour mesurer l’acuité visuelle du patient ou pour relever sa tension oculaire. Quand ce dernier arrive ensuite devant l’ophtalmologiste, son dossier est prêt : le médecin peut alors procéder à l’examen détaillé de l’œil (dont un fond d’œil) et au dépistage des maladies de la vue. « La mise en place, dès 2005, du travail aidé (la délégation de tâches, NDLR) dans notre cabinet nous a permis d’augmenter notre productivité, de voir plus de patients, de nous concentrer sur notre cœur de métier et de maintenir un bon niveau de prise en charge », constate le docteur Jean-Bernard Rottier, ophtalmologiste au Mans et président du Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof), qui a beaucoup œuvré au développement de la délégation de tâches (lire aussi l’encadré ci-dessous). Déléguer sans démédicaliser Bien que le travail aidé soulève de nombreuses questions non tranchées, notamment en termes de rémunération et de statut des orthoptistes, de tels systèmes, également développés sous forme commerciale par le groupe privé Point Vision, qui compte aujourd’hui trois cents professionnels répartis dans quatorze centres, semblent plébiscités par les usagers. Selon l’étude Harris Interactive réalisée à l’occasion des EGSV, 78 % des Français perçoivent la délégation de tâches comme « une réponse efficace à la pénurie ». A condition toutefois qu’elle reste sous le contrôle des ophtalmologistes : « La visite chez l’ophtalmo, souvent motivée par le besoin de lunettes, est l’unique occasion de dépister d’éventuelles pathologies à un stade précoce, explique le docteur Rottier. Seul l’ophtalmologiste a cette compétence. Il faut donc continuer à déléguer, mais sans démédicaliser. Le médecin doit rester le pivot et le premier recours du système. » Une position partagée par la plupart des acteurs de la filière, même si quelques-uns demandent davantage de prérogatives. Des opticiens et des optométristes, ces « super-opticiens » formés en faculté de sciences, souhaitent par exemple pouvoir prescrire les lunettes et les lentilles. Sans aller jusque-là dans l’immédiat, les EGSV ont conclu à la nécessité de renforcer la formation des paramédicaux, par exemple en organisant un tronc commun orthoptistes-opticiens en faculté de médecine, toujours dans l’idée d’une meilleure coordination autour de l’ophtalmologiste. Delphine Delarue Encadré Les protocoles Pays de la Loire généralisés à l’ensemble du territoire Depuis quelques mois, les protocoles Pays de la Loire, qui permettent le renouvellement des lunettes par les orthoptistes sous le contrôle d’un ophtalmologiste, sont généralisés à l’ensemble du territoire à titre expérimental dans les cabinets qui le souhaitent. Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 13 Lancés au Mans avec le soutien du Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof), ces protocoles autorisent l’orthoptiste à pratiquer un examen visuel complet sur les patients âgés de 6 à 50 ans. Ce bilan est analysé dans les huit jours par l’ophtalmologiste, qui envoie ensuite au patient la prescription de correction visuelle. S’il décèle un problème médical dans le bilan, il rappelle le patient pour un rendez-vous. Celui qui souhaite simplement renouveler ou adapter ses lunettes n’a ainsi plus à attendre qu’une place se libère chez l’ophtalmo : il voit simplement l’orthoptiste, en bénéficiant tout de même de l’analyse du médecin. « Pour la première fois, on peut avoir une ordonnance sans avoir consulté l’ophtalmologiste, souligne le docteur Jean-Bernard Rottier, président du Snof. C’est une petite révolution dans le monde de l’ophtalmologie. Cela montre que les choses évoluent. » Cette initiative permet en outre une prise en charge plus poussée que celle rendue possible par la délégation accordée aux opticiens en 2007. Depuis cette date, ces derniers peuvent renouveler les équipements des patients de plus de 16 ans si leur ordonnance initiale date de moins de trois ans. Mais ici, pas de véritable examen médical des yeux : l’opticien procède à un simple contrôle de l’acuité visuelle. Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 14 ILLUSTRATIONS 05_ExamenVision 01_ChirurgieOculaireAuLaser SurLesYeux 06_Lentilles 02_ChirurgieOphtalmique 07_LunettesTestLecture 03_ChoixLunettes 08_TestDMLA 04_ConsultationOptique Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle – 15