FranceMutualite_EtatsGeneraux_mai2016

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Hors-série
Mai 2016
REVUE MENSUELLE (10 Nos) fondée en 1959 par
L’ASSOCIATION NATIONALE DE LA PRESSE MUTUALISTE
255, rue de Vaugirard – 75719 PARIS CEDEX 15 – Tél. : 01 40 43 36 81
Abonnement :
Le numéro
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Vente et abonnement à nos bureaux.
Directeur de la publication : Gérard Quittard
Secrétariat de l’ANPM : Carole Corbion, 01 40 43 36 81
Christine Jorez, 01 40 43 61 27
Coordination éditoriale : Laurence Hamon
Rédactrice en chef : Sylvie Irissou
Contact technique : Cyril Dehay, 01 44 49 61 00
Ont collaboré à ce hors-série : Delphine Delarue, Mathilde Leroy, Aliisa Waltari
Réalisé par la CIEM
67, rue Blomet
75015 Paris
Numéro de CPPAP :
0518 G 83108
Numéro ISSN :
0015 – 9670
Dépôt légal :
mai 2016
Les droits d’utilisation des visuels fournis par la Ciem pour illustrer les
articles de ce numéro sont strictement limités dans le cadre de France
Mutualité (article + photographie). Tout autre usage est interdit.
SOMMAIRE
PRESSE
Lettre aux adhérents de l’ANPM (Gérard Quittard, président) ............................................... 3
Les 50 derniers articles ou dossiers de « France-Mutualité »
..............................................
4
..............................................................................................
6
ÉTATS GÉNÉRAUX DE LA SANTÉ VISUELLE
Des Etats généraux pour la santé visuelle
Basse vision : une prise en charge de qualité encore peu répandue
L’ophtalmologie, une discipline à la pointe de l’innovation
...........................
...................................................
8
10
La coopération professionnelle comme solution à la pénurie
d’ophtalmologistes......................................................................................................................................................... 12
ILLUSTRATIONS
...........................................................................................................................................................................................................
15
Les articles de ce numéro peuvent être repris dans le cadre des 50 % de la surface
imprimée des revues mutualistes obligatoirement consacrés à l’information générale.
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
2
Chers amis abonnés de France Mutualité, chers adhérents,
La fin de l’année 2014 et une partie de l’année 2015 nous ont conduits à
réorganiser la vie administrative et technique de l’association. Cela a perturbé
quelque peu la régularité des parutions de France Mutualité et nous nous en
excusons.
Aujourd’hui, vous le savez, le dispositif est en place à travers notre relation
au quotidien avec le secrétariat général de la fédération, nos liens maintenus avec
la direction de la communication et de l'information, mais aussi au travers de la
convention intervenue avec la Ciem, Coopérative d’information et d’édition
mutualiste.
C’est la raison pour laquelle votre conseil d’administration avait décidé
d’éditer un numéro spécial « hors série ». Pour cela, nous avons retenu l’événement
des Etats généraux de la santé visuelle, portés par notre fédération. Ce numéro est
prêt, et nous vous l'adressons sous le format numérique désormais convenu pour
l’édition de France Mutualité. Cette question de l’évolution des problématiques de
vision est au cœur de la stratégie d’action de prévention santé menée par nos
mutuelles, par nos SSAM et par les réseaux, en particulier notre partenaire Visaudio.
Nous vous souhaitons bonne réception de cette édition spéciale. Faites-nous
remonter vos réactions et les utilisations que vous pourrez faire de ce numéro « hors
série », compris bien évidemment dans votre abonnement.
Avec mes meilleurs sentiments mutualistes.
Gérard Quittard,
président de l’ANPM
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
3
PRESSE
Les 50 derniers articles ou dossiers
de « France-Mutualité »
Afin de vous aider dans l’élaboration du sommaire de votre revue,
« France-Mutualité » publie chaque mois la liste de ses cinquante
derniers articles ou dossiers, brèves comprises. Vous pouvez
télécharger ces articles sur Mutweb, l’Extranet fédéral : à partir de
l’onglet « Réseaux », « Presse mutualiste », et « Collection “FranceMutualité” ».
Titre
Rubrique
Numéro 562 – Mai 2016
Citiz-France : une coopérative pour développer l’autopartage Economie sociale
Le dossier médical partagé, pour une meilleure coordination Système de soins
des soins
Brèves et filets (5)
Système de soins
Résistance aux antibiotiques : où en est-on ?
Médecine
Compléments alimentaires : utiles ou dangereux ?
Prévention
Hammam et sauna : de nombreux bienfaits,
Forme – Bien-être
peu de contre-indications
Brèves et filets (5)
Santé
Congé parental d’éducation : c’est papa qui s’occupera de Vie pratique /
bébé
Famille
Numéro 561 – Avril 2016
L’HAD, une alternative à l’hospitalisation traditionnelle
Système de soins
Brèves et filets (5)
Système de soins
Troubles de l’équilibre : quand l’oreille interne est en cause Médecine
Premiers secours : bien réagir pour sauver des vies
Prévention
Y a-t-il de « bonnes » et de « mauvaises » graisses ?
Prévention
Les « serious games » : des jeux vidéo thérapeutiques
Bien-être
Brèves et filets (5)
Santé
Ateliers solidaires : donner une seconde vie aux objets
Vie pratique /
Environnement
Numéro 560 – Mars 2016
Avantages et limites de la téléconsultation
Système de soins
Brèves et filets (5)
Système de soins
Fibromyalgie : un mal intense et invisible
Médecine
Générations Cobayes : la jeunesse engagée
Prévention
contre les maladies environnementales
Les régimes « tendance » en question
Forme
Brèves et filets (5)
Santé
Protéger ses données personnelles
Vie pratique
sur les réseaux sociaux
Voyager avec son enfant
Vie pratique
Numéro 559 – Février 2016
Cinq bonnes raisons de fréquenter les réseaux de soins
Système de soins
Brèves et filets (5)
Système de soins
Nombre
de signes
5 789
6 326
4 852
5 616
4 493
3 092
4 960
4 075
6 241
4 939
7 526
7 167
7 985
5 187
5 078
4 058
7 245
5 695
5 986
4 676
6 523
4 679
7 226
5 158
5 600
4 648
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
4
Numéro 559 – Février 2016
Lyme : une maladie parfois grave et pourtant négligée
Médecine
Bien choisir ses produits cosmétiques
Prévention
Vaincre la peur de l’avion
Forme
Brèves et filets (5)
Santé
Le viager, comment ça marche ?
Vie pratique
Socio-esthéticienne : bien loin des salons
Vie pratique
Numéro 558 – Janvier 2016
La Sécurité sociale et la branche maladie en questions
Système de soins
Brèves et filets (5)
Système de soins
Acné : les nouvelles recommandations de la HAS
Médecine
Parkinson : mieux vivre avec la maladie
Médecine
grâce aux thérapies complémentaires
Cancer : les gestes indispensables
Prévention
Bien dormir pour être en forme
Forme
Brèves et filets (5)
Santé
Vrai-Faux : connaissez-vous les droits et les devoirs
Vie pratique /
du piéton ?
Droits
Numéro 557 – Décembre 2015
Complémentaire santé des retraités :
Système de soins
le gouvernement fait un pas vers les mutuelles
Brèves et filets (5)
Système de soins
« Mon traitement me fait grossir », comment réagir ?
Médecine
Le don du sang en questions
Médecine
Cannabis : une drogue pas si douce
Prévention
50 ans : le bon âge pour faire un bilan de santé
Prévention
Brèves et filets (5)
Santé
Produits ménagers faits maison : on s’y met !
Vie pratique /
Environnement
Numéro 556 – Novembre 2015
Des entretiens pharmaceutiques pour les patients
Système de soins
sous anticoagulant
Vrai-faux : tout savoir sur le don de gamètes
Système de soins
6 433
6 507
4 451
2 120
3 938
5 187
8 988
5 186
5 773
7 539
6 197
4 829
5 055
3 179
4 241
5 755
5 696
8 320
6 893
6 728
5 029
5 388
6 740
5 322
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
5
Calibrage
Texte principal : 4 876 signes
Des Etats généraux pour la santé visuelle
Le 15 décembre, pour la toute première fois et à l’initiative de
la Mutualité française, l’ensemble des acteurs de la santé
visuelle s’est réuni à Paris pour débattre des grands enjeux
de la filière. Délais d’attente interminables pour obtenir un
rendez-vous chez l’ophtalmologiste, coût élevé des
équipements visuels, reste à charge important pour les
patients… : le secteur souffre d’un ensemble de facteurs qui
aggrave l’inégalité d’accès aux soins, au dépistage et aux
corrections visuelles. Les ateliers de préparation à cette
journée et les débats menés lors des rencontres ont conduit à
la rédaction d’un livre blanc qui sera prochainement publié.
Susciter un débat citoyen autour des problématiques de la santé
visuelle et proposer des pistes d’action pour améliorer la prise en
charge de toute la population, tel était l’objectif des premiers Etats
généraux du secteur, qui ont eu lieu le 15 décembre à la Maison de la
Mutualité, à Paris. Un événement inédit, dont l’initiative revient à la
Mutualité française, premier financeur des soins d’optique en France
(les complémentaires santé prennent en charge 70 % de ces
dépenses, contre 4 % seulement pour l’Assurance maladie). « Ce
que nous voulions faire, c’est réunir tous les acteurs de la filièr e […]
pour aborder de façon transversale la santé visuelle des Français »,
expliquait Etienne Caniard, président de la Mutualité, lors de
l’ouverture des débats. Pari tenu. Ophtalmologistes, orthoptistes,
opticiens, optométristes, représentants de l’industrie optique et de la
distribution, institutionnels et usagers : ils étaient tous là, bien
décidés à échanger et à engager des pistes de dialogue concrètes.
Une demande de soins qui augmente
Et il était temps : à l’heure où la demande de soins d’optique et
d’ophtalmologie augmente, notamment en raison du vieillissement de
la population, la pénurie d’ophtalmologistes guette. En France, il faut
désormais attendre en moyenne cent onze jours avant de décrocher
un rendez-vous. Des délais qui peuvent même atteindre « six ou neuf
mois dans certaines villes, voire excéder un an en Picardie ou en
Franche-Comté », précise le rapport Voynet de juillet 2015 sur la
restructuration de la filière visuelle**. Si rien n’est fait, la situation
devrait encore empirer avec les prochains départs à la retraite de
nombreux ophtalmologistes (lire aussi notre article « La coopération
professionnelle comme solution à la pénurie d’ophtalmologistes »).
Face à de telles difficultés, nombreux sont les patients qui
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
6
s’abstiennent de consulter, malgré les compétences reconnues des
ophtalmologues français et la qualité des équipements d’optique (lire
aussi notre article « L’ophtalmologie, une discipline à la pointe de
l’innovation »). Selon l’enquête Harris Interactive * menée pour la
Mutualité française, un tiers des Français déclarent avoir déjà
renoncé à des soins, à des lunettes ou à des lentilles principalement
en raison de délais d’attente trop importants, mais aussi pour des
questions financières (78 % des personnes interrogées estiment que
le coût des équipements est trop élevé).
Les personnes précaires, âgées ou en situation de handicap
pénalisées
Cette situation conduit inévitablement à un phénomène d’inégalité
d’accès aux soins et aux équipements : malgré des pathologies et
des troubles visuels plus fréquents, « le port d’une correction est
moins répandu parmi les populations aux revenus modestes que
parmi celles aux revenus les plus élevés », souligne l’étude
Asterès*** présentée lors des Etats généraux de la santé visuelle
(EGSV). Des difficultés d’accès qui concernent aussi les personnes
en situation de handicap et les personnes âgées : « La perte
d’autonomie rend quasi impossible l’accès à la consultation, souligne
le compte rendu des ateliers préparatoires aux EGSV. Les problèmes
de santé visuelle sont mal traités en Ehpad (établissement
d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, NDLR). […] Près
du quart des troubles visuels des patients n’y sont pas pris en
charge. »
Bref, les problématiques ne manquent pas. Et les solutions non plus :
développement de la coopération professionnelle et des réseaux
d’opticiens, création d’équipes mobiles dans les déserts médicaux,
renforcement du dépistage… Toutes les recommandations évoquées
lors des débats seront regroupées dans un livre blanc qui sera publié
prochainement. Des propositions auxquelles Jean Debeaupuis,
directeur général de l’offre de soins, qui représentait Marisol Touraine
le 15 décembre, a promis d’être « particulièrement attentif »…
Delphine Delarue
* « Les enjeux de la santé visuelle », Harris Interactive, décembre 2015.
** « Restructuration de la filière visuelle », Dominique Voynet, Inspection générale
des affaires sociales (Igas), juillet 2015.
*** « Filière de la santé visuelle, états des lieux », Asterès, septembre 2015.
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
7
Calibrage
Texte principal : 4 735 signes
Basse vision : une prise en charge de qualité
encore peu répandue
Les centres de réadaptation des déficiences visuelles prennent
en charge les personnes atteintes de cécité ou de malvoyance
pour les accompagner vers davantage d’autonomie. Bien
qu’elles contribuent à retarder l’âge de la dépendance et
répondent ainsi à un véritable enjeu de santé publique, ces
structures sont peu nombreuses en France et leur
développement n’est pas vraiment encouragé par les pouvoirs
publics.
En France, seule une douzaine d’établissements de soins de suite et
de réadaptation propose une prise en charge adaptée aux déficients
visuels. Une offre dérisoire, qui peine à faire face à la demande.
« Dans notre clinique, par exemple, il faut attendre deux ans avant
d’obtenir une place », indique le docteur Gérard Dupeyron, médecin
chef de l’Association pour la réadaptation des aveugles et malvoyants
(Aramav), située à Nîmes. Si l’attente est longue, elle en vaut
pourtant la peine. L’approche développée dans ces structures
consiste à aider les patients à optimiser au maximum la fonction
visuelle qui leur reste et à développer en parallèle des stratégies de
compensation de leur handicap. « Cette démarche permet aux
déficients visuels d’acquérir une autonomie dans leur vie quotidienne,
précise le docteur Dupeyron. Ils reprennent confiance en eux,
peuvent gérer leurs déplacements sans danger et retrouver une vie
sociale. » Autant d’éléments qui répondent aussi à la problématique
de la dépendance, puisqu’ils favorisent le maintien à domicile et
retardent le placement en institut (la déficience visuelle causée par
des maladies telles que le glaucome ou la DMLA concerne
essentiellement les personnes âgées).
Bilan orthoptique complet
Tous les centres qui disposent d’un accompagnement en déficience
sensorielle fonctionnent à peu près de la même façon. En déficience visuelle,
c’est l’ophtalmologiste qui coordonne le parcours de soins du patient.
Concrètement, ce dernier commence par subir une évaluation poussée
de son déficit visuel, conduite par un orthoptiste. L’objectif est de
déterminer quel est son niveau de vision fonctionnelle, ou « résidu
visuel ». Les orthoptistes développent ensuite de nouvelles stratégies
neurosensorielles pour permettre au patient d’utiliser au mieux ses
capacités préservées. « Parmi ces stratégies, l’exemple le plus connu
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
8
est celui des points de fixation de suppléance dans la DMLA, ajoute
Gérard Dupeyron. La forme humide de cette maladie entraîne
l’apparition d’une tache noire dans le champ de vision central. On
enseigne alors au patient comment regarder légèrement de travers,
là où la vue n’est pas abîmée. » L’équipe élabore ensuite un
programme personnalisé de réadaptation qui intègre également de
l’ergothérapie et de la psychomotricité. L’idée est de mettre en œuvre
toutes les possibilités de compensation du handicap (travail autour de
la coordination des gestes, du sens tactile, du schéma corporel, de la
tonicité, de la posture et des aides optiques adaptées).
Des prises en charge récentes
Venues du nord des Etats-Unis et du Québec, puis améliorées en
France, ces méthodes donnent de très bons résultats. « Si elles sont
peu développées chez nous, c’est surtout parce qu’elles sont récentes,
observe le docteur Dupeyron. Le concept de réadaptation basse
vision n’est arrivé en France que dans les années 90, période à
laquelle on parlait déjà du trou de la Sécu. Il y a donc un problème de
financement et de volonté politique. » Mais ce n’est pas tout : même
si aujourd’hui les choses évoluent, les ophtalmologistes français sont
longtemps restés peu engagés dans la rééducation des déficients
visuels. « Ils soignent les pathologies, ils réalisent les interventions
chirurgicales nécessaires, mais concernant les conséquences sur la
vie quotidienne, ils interviennent peu, faute de temps et parce que
c’est un autre métier, explique Francis Guiteau, directeur de la
Mutualité française Anjou-Mayenne, qui gère une plate-forme
déficience sensorielle à Angers. Cela étant, ces disciplines (visant à
une meilleure autonomie du patient, NDLR) intéressent de plus en
plus les médecins de MPR (médecine physique et de réadaptation,
NDLR), qui considèrent que la rééducation en basse vision fait
naturellement partie de leur champ d’action. »
La prise en charge des déficients visuels semble donc appelée à
poursuivre son développement. Parmi les initiatives actuelles, la
Mutualité française, très active en matière de santé visuelle,
s’intéresse par exemple à la façon dont les établissements de soins
de suite et de réadaptation, assez nombreux sur le territoire,
pourraient intégrer davantage d’unités consacrées à la réadaptation
de la déficience visuelle ou auditive.
Mathilde Leroy
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
9
Calibrage
Texte principal : 4 401 signes
Encadré : 786 signes
L’ophtalmologie,
une discipline à la pointe de l’innovation
En constante évolution depuis trente ans, l’ophtalmologie atteint
aujourd’hui un degré de sophistication extrêmement élevé. La
qualité de cette spécialité permet aujourd’hui de corriger la plupart
des troubles visuels et de prendre en charge des pathologies
lourdes et complexes pouvant conduire à la cécité.
« L’ophtalmologie a toujours été novatrice », a rappelé le professeur
Gilles Chaine, chef de service d’ophtalmologie du centre hospitalier
universitaire (CHU) Avicenne, lors des Etats généraux de la santé
visuelle (EGSV). Invention de la microchirurgie et des implants
intraoculaires, développement des thérapies géniques, nouvelles
molécules, lasers, logiciels de dépistage… Depuis trente ans,
l’innovation se poursuit, s’accélère et les progrès sont considérables.
Le degré de sophistication est tel qu’il permet aujourd’hui de corriger la
plupart des troubles de la vision et d’améliorer la prise en charge de
maladies très complexes. « D’un point de vue de santé publique, il y a
deux innovations majeures à retenir, a indiqué le professeur Chaine :
la photo-coagulation rétinienne pour le traitement de la rétinopathie
diabétique (complication du diabète affectant les petits vaisseaux
sanguins de la rétine, NDLR), qui a permis d’éviter un nombre
considérable de cécités, et la découverte de l’ivermectine pour soigner
l’onchocercose. » Cette maladie parasitaire est une cause majeure de
malvoyance en Afrique. En stoppant son évolution, qui mène à la
cécité, l’ivermectine a amélioré le quotidien de millions de malades.
De nouveaux traitements
Autre avancée importante : celle des traitements de la forme humide de
la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA), une pathologie liée
au vieillissement de l’œil qui détruit la macula, la région centrale de la
rétine. L’arrivée, il y a une quinzaine d’années, des anti-VEGF, des
molécules qui stoppent la prolifération de vaisseaux anormaux dans la
rétine, a permis de freiner considérablement l’évolution de la maladie en
bloquant la baisse de la vision centrale. A noter également : les progrès
importants réalisés pour soigner le glaucome. Cette affection causée
par l’élévation de la pression intraoculaire entraîne une atteinte du
nerf optique et une altération progressive du champ visuel
périphérique. Aujourd’hui, la plupart des patients sont traités avec un
seul collyre (à base de nouvelles molécules, des prostaglandines
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
10
notamment) qui permet d’abaisser la tension de l’œil à un niveau
acceptable. Et quand les collyres sont mal supportés, la chirurgie au
laser donne aussi de très bons résultats.
Chirurgie réfractive
En matière de chirurgie également, les avancées sont notables.
Aujourd’hui, cette discipline utilise essentiellement le laser Lasik et
l’implantologie intraoculaire. En cas de myopie importante par
exemple, le chirurgien utilise une combinaison de deux lasers : un
premier qui sert à découper un petit capot sur la cornée en laissant
une charnière et un second dont le rôle est d’aplatir le centre de la
cornée pour diminuer la longueur de l’œil (la myopie se caractérise
par un œil trop long par rapport à son pouvoir de focalisation). Le
capot est ensuite remis en place. Avec une telle technique, pratiquée
en ambulatoire et sous anesthésie locale, le patient peut ouvrir les
yeux et voir net quelques heures seulement après l’opération !
Autre type d’intervention parfaitement maîtrisée : la chirurgie de la
cataracte. Première cause de cécité dans le monde, cette maladie se
manifeste par la perte de transparence du cristallin, qui ne peut plus
assurer la mise au point. Extrêmement robotisée, l’opération s’appuie
sur des machines très perfectionnées. Elle consiste à pratiquer une
ouverture dans l’œil, puis à introduire un appareil qui émet des
ultrasons afin de liquéfier le cristallin. Celui-ci est ensuite aspiré et
remplacé par un implant qui a aussi la capacité d’améliorer les
défauts visuels préexistants.
On le constate, tout va très vite en matière d’ophtalmologie. « Cinquante
pour cent des actes que l’on enseigne aujourd’hui à un interne ne seront
plus pratiqués dans dix ans, précisait le professeur Philippe Gain, chef
du service d’ophtalmologie du CHU de Saint-Etienne, également
présent aux EGSV. Il s’agit donc d’une discipline fascinante, en
constante évolution, et qui nécessite une formation permanente. »
Aliisa Waltari
Encadré
Quand le progrès technique conduit au regroupement
Si l’arrivée de nouveaux appareillages diagnostiques et thérapeutiques
très performants a révolutionné la prise en charge des troubles et des
pathologies de la vue depuis une trentaine d’années, ces innovations
introduisent aussi un nouvel exercice de l’ophtalmologie. Autrefois
seul, l’ophtalmologiste a tendance à se rapprocher d’autres confrères,
ne serait-ce que pour assumer les coûts particulièrement élevés de tels
équipements. Des équipements qui « incitent » donc à la
« mutualisation au sein de cabinets de groupe ou de plateaux
techniques » et « dont la qualité constitue désormais l’un des
principaux arguments de choix au moment de l’installation », précise le
rapport Voynet sur la restructuration de la filière visuelle.
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
11
Calibrage
Texte principal : 4 621 signes
Encadré : 1 649 signes
La coopération professionnelle
comme solution à la pénurie d’ophtalmologistes
Manque croissant d’ophtalmologistes, délais d’attente
interminables, population vieillissante en demande de soins…
depuis quelques années, l’accès à la santé visuelle est
menacé en France. Parmi les solutions évoquées à l’occasion
des Etats généraux, la piste de la coopération professionnelle,
qui consiste à déléguer certains examens de la vue à des
personnels paramédicaux, semble plutôt prometteuse.
Cent onze jours : c’est, selon l’Observatoire jalma de l’accès aux
soins (janvier 2014), l’attente moyenne en France pour décrocher un
rendez-vous chez l’ophtalmologiste. Dans le détail, seuls 7 % des
patients obtiendraient une consultation dans les deux semaines,
25 % dans un délai de deux semaines à deux mois et pour 39 % il
faudrait attendre plus de six mois ! Face à de tels délais, presque
deux personnes sur dix renonceraient à consulter. Une situation pour
le moins inquiétante, qui ne semble pas près de s’améliorer : la
pyramide des âges des ophtalmologistes annonce de nombreux
départs à la retraite dans les deux prochaines décennies et la plupart
ne seront pas remplacés. D’après un scénario tendanciel de la
Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des
statistiques (Drees), la profession perdrait ainsi 35 % de ses effectifs
entre 2006 et 2030. Or, dans le même temps, la demande de soins
oculaires, notamment la prise en charge des maladies graves comme
la dégénérescence maculaire liée à l’âge (DMLA) ou le glaucome,
devrait continuer de progresser en raison du vieillissement de la
population.
Réorganiser la filière visuelle
Une réorganisation complète de la filière semble donc
incontournable. L’idée défendue par la majorité des participants aux
Etats généraux de la santé visuelle (EGSV) est de généraliser au
maximum les coopérations professionnelles et les délégations de
tâches. Depuis quelques années, certains cabinets d’ophtalmologie
confient déjà des actes de préconsultation à des personnels
paramédicaux. Cela permet aux ophtalmologistes de dégager du
temps médical pour se consacrer aux pathologies lourdes et
complexes. Ces cabinets s’appuient notamment sur les orthoptistes,
des spécialistes de la réadaptation et de l’exploration de la vision,
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
12
pour mesurer l’acuité visuelle du patient ou pour relever sa tension
oculaire. Quand ce dernier arrive ensuite devant l’ophtalmologiste, son
dossier est prêt : le médecin peut alors procéder à l’examen détaillé de
l’œil (dont un fond d’œil) et au dépistage des maladies de la vue. « La
mise en place, dès 2005, du travail aidé (la délégation de tâches, NDLR)
dans notre cabinet nous a permis d’augmenter notre productivité, de
voir plus de patients, de nous concentrer sur notre cœur de métier et
de maintenir un bon niveau de prise en charge », constate le docteur
Jean-Bernard Rottier, ophtalmologiste au Mans et président du
Syndicat national des ophtalmologistes de France (Snof), qui a
beaucoup œuvré au développement de la délégation de tâches (lire
aussi l’encadré ci-dessous).
Déléguer sans démédicaliser
Bien que le travail aidé soulève de nombreuses questions non
tranchées, notamment en termes de rémunération et de statut des
orthoptistes, de tels systèmes, également développés sous forme
commerciale par le groupe privé Point Vision, qui compte aujourd’hui
trois cents professionnels répartis dans quatorze centres, semblent
plébiscités par les usagers. Selon l’étude Harris Interactive réalisée à
l’occasion des EGSV, 78 % des Français perçoivent la délégation de
tâches comme « une réponse efficace à la pénurie ». A condition
toutefois qu’elle reste sous le contrôle des ophtalmologistes : « La
visite chez l’ophtalmo, souvent motivée par le besoin de lunettes, est
l’unique occasion de dépister d’éventuelles pathologies à un stade
précoce, explique le docteur Rottier. Seul l’ophtalmologiste a cette
compétence. Il faut donc continuer à déléguer, mais sans
démédicaliser. Le médecin doit rester le pivot et le premier recours
du système. »
Une position partagée par la plupart des acteurs de la filière, même si
quelques-uns demandent davantage de prérogatives. Des opticiens
et des optométristes, ces « super-opticiens » formés en faculté de
sciences, souhaitent par exemple pouvoir prescrire les lunettes et les
lentilles. Sans aller jusque-là dans l’immédiat, les EGSV ont conclu à
la nécessité de renforcer la formation des paramédicaux, par
exemple en organisant un tronc commun orthoptistes-opticiens en
faculté de médecine, toujours dans l’idée d’une meilleure coordination
autour de l’ophtalmologiste.
Delphine Delarue
Encadré
Les protocoles Pays de la Loire
généralisés à l’ensemble du territoire
Depuis quelques mois, les protocoles Pays de la Loire, qui
permettent le renouvellement des lunettes par les orthoptistes sous
le contrôle d’un ophtalmologiste, sont généralisés à l’ensemble du
territoire à titre expérimental dans les cabinets qui le souhaitent.
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
13
Lancés au Mans avec le soutien du Syndicat national des
ophtalmologistes de France (Snof), ces protocoles autorisent
l’orthoptiste à pratiquer un examen visuel complet sur les patients
âgés de 6 à 50 ans. Ce bilan est analysé dans les huit jours par
l’ophtalmologiste, qui envoie ensuite au patient la prescription de
correction visuelle. S’il décèle un problème médical dans le bilan, il
rappelle le patient pour un rendez-vous. Celui qui souhaite
simplement renouveler ou adapter ses lunettes n’a ainsi plus à
attendre qu’une place se libère chez l’ophtalmo : il voit simplement
l’orthoptiste, en bénéficiant tout de même de l’analyse du médecin.
« Pour la première fois, on peut avoir une ordonnance sans avoir
consulté l’ophtalmologiste, souligne le docteur Jean-Bernard Rottier,
président du Snof. C’est une petite révolution dans le monde de
l’ophtalmologie. Cela montre que les choses évoluent. »
Cette initiative permet en outre une prise en charge plus poussée
que celle rendue possible par la délégation accordée aux opticiens
en 2007. Depuis cette date, ces derniers peuvent renouveler les
équipements des patients de plus de 16 ans si leur ordonnance
initiale date de moins de trois ans. Mais ici, pas de véritable examen
médical des yeux : l’opticien procède à un simple contrôle de
l’acuité visuelle.
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
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ILLUSTRATIONS
05_ExamenVision
01_ChirurgieOculaireAuLaser
SurLesYeux
06_Lentilles
02_ChirurgieOphtalmique
07_LunettesTestLecture
03_ChoixLunettes
08_TestDMLA
04_ConsultationOptique
Mai 2016 – Etats généraux de la santé visuelle –
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