2) Vous parlez des « minorités et plus largement des pauvres »… Après la
ségrégation raciale, il semble que ce soit désormais la pauvreté qui représente
le défi majeur pour les États-Unis?
NOTE DH : Je reviens sur Martin Luther King. Quand il était assassiné, le révérend
King se trouvait à Memphis pour organiser le soutien à une grève des éboueurs de la
ville. Il avait pris la tête d’une nouvelle campagne, le « Poor People’s Movement ».
Pour rester avec la thèse sociologique, il aurait reconnu que sans droits sociaux —
i.e., une égalité économique — les droits politiques et même civiques sont menacés.
Plus concrètement, un récent sondage de la Fondation Pew indique que 2/3 des sondés
considèrent que le conflit entre pauvres et riches est devenu plus important que les
conflits raciaux. Le sondage indique aussi que c’est une augmentation de 19% par
rapport au même sondage en 2009. Évidemment, les manifestants de « Occupy Wall
Street » ont trouvé un écho… ou pour mieux le dire : ils ont touché un vrai problème
que le conflit racial — et le sentiment anti-immigrés — masquait!
3) C’est justement un thème qui a fait son apparition dans les primaires
républicaines… On en parlait la semaine passée : Newt Gingrich et son «
Super-Pac » s’attaquent au leader, Mitt Romney, dont ils dénoncent la
pratique du « capitalisme vautour » ou « sauvage »! Est-ce que ces attaques
touchent Romney?
NOTE DH : Comme les judokas, Gingrich tourne contre Romney son argument
principal: son expérience d’homme d’affaires. La fortune du candidat vient de l’achat
(à crédit), suivi de la réorganisation (avec d’éventuels licenciements), puis la revente
(ou la faillite), d’entreprises en difficulté. Jouant la carte du populisme, cette pratique
est dénoncée comme du « capitalisme vautour »! Romney a beau répondre que ces
attaques font le jeu de Barack Obama; la haine en politique ne connaît pas de limites.
Romney se défend, bien sûr, mais de façon souvent maladroite — dénonçant ce qu’il
appelle « une politique amère fondée sur la jalousie » et suggèrent qu’en effet, la
question de l’inégalité est une question légitime, mais qu’elle doit se discuter — je
cite – dans « des lieux calmes » et « des discussions de politique fiscale ».
Concrètement, il affirme avoir créé 100,000 postes de travail, mais cela n’est pas
démontré; et en attendant, il refuse de rendre publique sa feuille d’impôts, malgré la
tradition aux US depuis les années 1960.
Enfin, est-ce que la tactique de Gingrich — et plus tard, d’Obama, sans doute —
marchera? Selon l’idéologie du parti républicain, c’est « une politique de classe » qui
met en question le fondement de la démocratie américaine. Selon les républicains, la
lutte contre l’inégalité revient à demander une égalité réelle — ce pourquoi ce parti
dénonce des visées « socialistes » ou du moins « européennes » chez Barack Obama.
Or, comme le savait Martin Luther King, lutter contre l’inégalité, c’est simplement
demander une égalité d’opportunité!