Chapitre V : Ostéoporose: physiopathologie, diagnostic et traitements
Plan
I. Introduction
II. Physiopathologie de l'ostéoporose
III. Diagnostic de l'ostéoporose
IV. Examens biologiques à effectuer
V. Traitements de l'ostéoporose
a- Le traitement hormonal substitutif
b- Les SERMs
c- Les biphosphonates
d- Les sels de Fluor
e- Les calcitonines
f- Calcium et vitamine D
g- Mesures annexes
VI. Suivi thérapeutique
I. Introduction
L'ostéoporose associe sur le plan anatomo-pathologique:
- une diminution d'épaisseur des corticales osseuses
- une diminution d'épaisseur des travées osseuses de l'os
spongieux
- une disparition de certaines de ces trabécules
- des modifications de l'architecture osseuse (disparition
des anastomoses inter-travées.
L'os reste cependant normalement minéralisé.
Cette raréfaction osseuse, ces troubles de l'architecture
osseuse aboutissent à une diminution de la solidité
osseuse, favorisant les fractures pour des traumatismes
minimes (figure 1).
L'ostéoporose concernera plus de 30% des femmes
ménopausées et près de 10% des hommes.
Aux Etats-Unis, le nombre de fractures du poignet est évalué à
250000 par an; le nombre de tassement vertébraux
ostéoporotiques à 1 million par an.
II. Physiopathologie de l'Ostéoporose
L'os est en perpétuel remodelage: sans cesse, il se
résorbe et se forme. Ce remodelage osseux permanent
assure l'homéostasie phosphocalcique. La résorption
osseuse est assurée par des cellules multinuclées
dénommées ostéoclastes. La formation de tissu ostéoïde
qui se minéralisera ultérieurement sous l'action de la
vitamine D est assurée par les ostéoblastes. Il existe un
équilibre strict entre résorption osseuse et formation
osseuse. Dès que cet équilibre est rompu, soit parce que
les ostéoclastes sont hyperactifs, soit du fait d'une
déficience ostéoblastique, l'ostéoprose peut survenir.
Chez la femme ménopausée, la baisse du taux
d'oestrogènes entraîne une hyperrésorption
ostéoclastique non compensée par une augmentation
des fonctions ostéoblastiques.
Chez le sujet âgé, quel que soit son sexe, la carence en
calcium et vitamine D induit un hyperparathyroïdisme
réactionnel qui stimule anormalement la résorption
osseuse et entraîne, lui aussi, une ostéoporose.
L'acquisition du capital osseux, l'épaisseur des travées
osseuses, se constituent lors de l'adolescence,
essentiellement dans la période pré-pubertaire. Ce gain
de masse osseuse dépend de l'activité physique, des
apports calciques, et, pour moitié, est génétiquement
déterminé. Une mauvaise acquisition de ce capital osseux
pourra expliquer, chez certains malades, la survenue
précoce d'une ostéoporose.
Un traitement par corticoïdes, une hyperthyroïdie ou
encore une hyperparathyroïdie primitive peuvent aussi
favoriser la déminéralisation.
III. Diagnostic de l'ostéoporose
L'ostéoporose est parfois diagnostiquée à l'occasion de
ses complications fracturaires que nous envisagerons
ultérieurement.
Elle doit, de nos jours, être diagnostiquée avant les
fractures par une mesure de la densité minérale
osseuse (DMO). L'examen le plus performant pour définir
ce paramètre est actuellement l'Absorptiométrie à
rayons X ou Ostéodensitométrie ou DEXA. Cette
méthode est plus performante que d'autres examens
parfois proposés: radiographies digitalisées,
tomodensitométrie, ultra-sons. Il s'agit d'une méthode
juste, précise (1 à 2%), reproductible (coefficient de
variation: 0,5 à 1%), non irradiante. L'appréciation de la
DMO, exprimée en g/cm2, est très prédictive du risque
fracturaire ultérieur. Toute diminution de 10% ou d'une
déviation standard de la DMO multiplie par 2 le risque
fracturaire.
La DMO peut être exprimée en grammes par cm2 ou bien en
% ou déviations standards (DS) par rapport à un sujet de
même sexe et de même âge: Z score ou de même sexe et
de masse osseuse maximum (entre 25 et 40 ans): T score.
L'ostéoporose est définie par l'OMS à partir de critères
densitométriques exprimés en T score:
Le sujet est considéré normal si sa DMO est comprise entre -1 et 0
DS, il est ostéopénique pour une DMO comprise entre -1 et 2,5 DS
et ostéoporotique pour une DMO inférieure à -2,5 DS.
La DEXA doit être réalisée dès que l'on évoque
l'ostéoporose:
- chez une femme ménopausée, d'autant qu'il existe des
facteurs de risque: antécédents fracturaires personnels,
antécédents fracturaires familiaux, faible poids, précocité
de la ménopause, consommation excessive d'alcool,
tabagisme, carence calcique, sédentarisme;
- lorsque des radiographies effectuées pour un autre
motif font évoquer une déminéralisation;
- lorsqu'existe une maladie potentiellement
déminéralisante: hyperthyroïdie, prise de corticoïdes…;
- dans l'évaluation et le suivi d'une ostéoporose avec
tassement vertébraux.
La DEXA est remboursée depuis Juillet 2006 aux
femmes ménopausées ayant : un BMI < 19, des
antécédents personnels de fracture ostéoporotique, des
antécédents familiaux au premier degré de fracture du
col, une ménopause avant 40 ans, une corticothérapie,
une maladie npouvant donner de l'ostéoporose.
Le diagnostic d'ostéoporose peut aussi être porté devant
des fractures ostéoporotiques.
La fracture du poignet ou de Pouteau-Colles survient le
plus souvent après une chute, mais plusieurs études
épidémiologiques ont montré que les femmes qui
avaient eu une fracture du poignet avaient une densité
minérale osseuse inférieure à la normale.
Les tassements vertébraux surviennent entre 60 et 75
ans. Ils sont dans 75% des cas responsables d'un
dorsalgo ou d'un lumbago survenu après un effort de
soulèvement minime. 20% des tassements vertébraux,
indolores, passent inaperçus. L'intégrité des murs
postérieurs vertébraux, lors des tassements
ostéoporotiques explique l'absence de complications
neurologiques. Tout lumbago de la femme de 65 ans ou
plus doit faire évoquer un tassement vertébral et implique
un examen clinique pour écarter une compression
neurologique, chercher un cancer primitif éventuel ( sein,
thyroide etc..) une endocrinopathie (hyper thyroidie,
hypercorticisme)
la réalisation de radiographies du rachis dorsal et lombaire
(de face et de profil) (figure 2).
Les fractures du col fémoral surviennent surtout après 70
ans. Les fractures du col sont graves sur le plan
fonctionnel puisque 50% des femmes ne retrouveront pas
leurs possibilités physiques antérieures. Certaines devront
être institutionnalisées. 20% de ces femmes, après 75
ans, décéderont durant les 6 mois suivant la fracture, de
décompensation de maladies associées.
A noter que l'ostéoporose est indolore lorsqu'elle n'est pas
fracturaire, quelle que soit sa gravité densitométrique et
que les fractures ostéoporotiques guérissent après
immobilisation ou ostéosynthèse comme les fractures sur
os normal.
Il peut exister des fractures par insuffisance osseuse et
qui concernent essentiellement les membres inférieurs:
pieds, chevilles, col fémoral et sacrum. Elles se traduisent
par des douleurs mécaniques, survenant à la mise en
charge, avec hyperfixation à la scintigraphie au
pyrophosphate de technicium, alors que les radiographies
sont très souvent normales. La mise en décharge durant
15 à 20 jours guérit les patients.
IV. Examens biologiques à effectuer
Quel que soit le type d'ostéoporose (densitométrique ou
fracturaire), le bilan biologique a pour but d'éliminer une
déminéralisation maligne, une ostéopathie endocrinienne.
Certes, plus de 90% des ostéoporoses sont secondaires à
la ménopause ou à la carence vitamino-calcique mais la
découverte d'une ostéopathie secondaire, nécessitant un
traitement spécifique, est indispensable.
Le bilan biologique minimum comprend donc:
- une VS
- une électrophorèse des protides
- un dosage de la TSH immunosensible
- un bilan phosphocalcique avec dosage de la calcémie
et de la phosphorémie, de la créatininémie, de la
calciurie, de la phosphaturie, de la créatininurie, sur les
urines de 24 heures ou selon la méthodes de Nordin
(urines recueillies le matin à jeun pendant 2 heures).
Ce bilan permettra d'écarter un myélome, des
métastases osseuses, une hyperparatyroïdie, une
ostéomalacie et une hyperthyroïdie.
Dans l'ostéoporose post-ménopausique, ce bilan est
strictement normal. Il ne doit pas être renouvelé au
cours du suivi thérapeutique.
Les dosages de la vitamine D ou de ses dérivés
hydroxylés et de la parathormone ne doivent être
effectués que si le bilan phosphocalcique de base est
anormal.
Les nouveaux marqueurs biologiques de remodelage
osseux: l'ostéocalcine dans le rum évalue spécifiquement
et précisément la fonction ostéoblastique. Dans le sérum ou
les urines, les Crosslaps*, Pyrilinks* et Ostéomark* dosant
les molécules de pontage du collagène osseux, évaluent la
résorption osseuse. Ces marqueurs augmentent de 40%
environ après la ménopause et sont normalisés par les
traitements de l’ostéoporose. Le Crosslaps sérique est le
plus reproductible et dosé à JO puis à 3 ou 6 mois, il permet
de vérifier l’observance et prédit la réponse au traitement,
motivant les malades à poursuivre celui-ci.
V : Autres examens complémentaires : Scanner,
IRM, scintigraphie osseuse ne sont effectués
Que s'il existe un doute clinique, radiologique
Ou biologique sur la bénignité de l'ostéoporos
VI. Les traitements de l'ostéoporose
Le traitement a pour but d'éviter les fractures, qu'il soit
administré à un malade ayant eu une fracture (traitement
dit curatif) ou à un malade dont la densitométrie est basse
(traitement dit préventif).
a- Le traitement hormonal substitutif de la
ménopause (THS) est le traitement préventif
d’excellence.
De nombreuses études longitudinales ont démontré que le
THS diminue l'incidence des fractures ostéoporotiques. Ce
sont les oestrogènes qui ont une action osseuse majeure.
Le traitement doit être maintenu pendant 5 ans au moins
pour que son action préventive sur l'ostéoporose soit
significative. Il est à noter que le THS a d'autres actions
bénéfiques: amélioration des bouffées de chaleur et action
trophique cutanéo-muqueuse entre autres. En revanche, il
majore le risque thrombo-embolique et lorsqu'il est pris
pendant plus de 4 ans, il augmente le risque de cancer du
sein. L’effet bénéfique supecté sur la prévention du risque
cardio-vasculaire n’a pas été retrouvé dans l’étude
américaine WHI mais il s’agissait d’hormones équines et
de femmes âgées ayant de nombreux facteurs de risque
vasculaire
Les contre-indications absolues sont les antécédants de
cancer du sein, les antécédants thrombo-emboliques et
les néoplasies de l'endomètre. L’absence d’études
controlées conséquentes fait que le THS ne doit pas être
isolément prescrit dans l’ostéoporose fracturaire.
b- Les SERMs (Specific Estradiol Receptor Modulator)
. Le Raloxifène (Evista* ou Optruma*) 60 mg/jour en 1
prise, est commercialisé en France.
Cette molécule a été développée pour conserver les
actions bénéfiques des oestrogènes sur l'os, sur le
métabolisme lipidique et écarter les effets néfastes sur le
tissu mammaire et les récepteurs utérins.Les SERMs n'ont
pas d'action sur les manifestations climatériques et le
risque thrombo-embolique est identique à celui des
oestrogènes.
, il est remboursé et diminue de près de 30% le risque
de tassement vertébral sans avoir d’action sur les
fractures périphériques. Il diminue de 50 %l’incidence
des cancers du sein chez des femmes à risque. Coût
mensuel : 35,5 euros.
c- Les bisphosphonates
Plusieurs molécules sont disponibles.
Le Fosamax* (Alendronate); cp à 70 mg: 1 cp par
semaine. Il est contre indiqué chez l'insuffisant rénal et
les sujets atteints de pathologies oesophagiennes
retardant le transit. Parmi les effets indésirables, citons
les oesophagites et les ulcérations oesophagiennes.
Coût mensuel du traitement : 37,5 euros.
L'Actonel* (Risédronate) (35 mg/semaine) est équivalent
au Fosamax* en terme d’efficacité, peut-être mieux toléré
sur le plan digestif. Coût mensuel : 37,5 euros.
Le Bonviva* (Ibandronate)est administré une fois par
mois, per os.
Ces 3 bisphosphonates réduisent de près de 50 %
l'incidence des fractures vertébrales . Actonel et
Fosamax préviennent aussi les fractures non vertébrales
mais pas le Bo,nviva*
En pratique: Ces drogues doivent être associées à du
calcium (1 gr/j) et à des doses physiologiques de
vitamines D dès que les apports alimentaires sont
inférieurs à 1 g/jr .
Les bisphosphonates doivent être pris à distance des
repas pour être absorbés. En raison de sa toxicité
digestive potentielle (toxicité par contact direct avec la
muqueuse), le Fosamax* et l’Actonel* doivent être pris
avec 2 verres d'eau, sans que le malade ne se couche
après la prise.
L'efficacité a été démontrée à 7 ans pour lActonel*, à 10
ans pour le Fosamax* à 5 Ils sont rapidement efficaces,
réduisant l’incidence des nouvelles fractures vertébrales
de 60% dès la première année.
La Parathormone (PTH) 1-34 ou
Tériparatide
Administrée par injection sous-cutanée, la PTH
stimule plus la formation que la résorption
osseuse. Elle a, de plus, une action bénéfique sur
larchitecture osseuse.
Le gain densitométrique est important, de lordre
de 10 % par an au rachis. La PTH prévient les
fractures vertébrales et périphériques. L’efficacité
est peut-être supérieure à celle des autres
molécules, mais les critères d’inclusion des
patients concernés par l’étude princeps ayant
validé l’efficacité de la PTH étaient différents
(ostéoporose plus sévère).
Les effets secondaires sont des phalées, des
nausées, des hypotensions orthostatiques. Une
hypercalcémie asymptomatique transitoire survient
assez fréquemment dans lheure qui suit
l’injection.
Le Forstéo* s’administre à 20 micro-grammes par
jour, par voie sous cutanée. La durée de traitement
est, au maximum, de18 mois. Le remboursement
est autorisé si la malade a au moins 2 fractures
vertébrales.
Les contre-indications sont : maladie de Paget,
antécédents de radiothérapie, hypercalcémie.
Le Coût du traitement mensuel est de 390 euros.
sous le nom de Protélos*:
Cette molécule, ayant obtenue lAMM
Européenne,est originale par son mode
d’action : elle stimule la formation osseuse et
freine la résorption. Lors des essais cliniques,
les modifications des marqueurs de
remodelage osseux sont cependant très
modérées, de l’ordre de 10 %. Il prévient la
survenue de fractures vertébrales ( -40%) et
périphériques.
d- Les calcitonines
En France, les calcitonines ne sont commercialisées
que sous forme injectable et n'ont d'intérêt que dans le
traitement antalgique du tassement vertébral récent.
e- Calcium et vitamine D
Du fait d'une diminution physiologique de l'absorption
digestive du calcium chez les sujets âgés, il est logique
de proposer "larga manu" une supplémentation vitamino-
calcique après 70 ans. Plusieurs enquêtes ont montré
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