Evaluation psycho clinique

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PIRON Marie
1ère année Carrières Sociale
Groupe 3 ; année 2005- 06
L’ENTRETIEN CLINIQUE
C’est dans le terme « clinique » qui repose la particularité de ce type d’entretien. Il
revoie au domaine de soin dans sa généralité. Il est plus spécifiquement utilisé par les
psychologues clinicien, les psychiatres et les psychothérapeutes.
Il n’est pas un processus thérapeutique. Il vise à concevoir et à comprendre le
fonctionnement psychologique d’un sujet en prenant en compte sa vie, son vécu et en mettant
l’accent sur la relation.
L’entretien clinique est une relation intersubjective, c'est-à-dire qui se produit entre
deux sujets humains. Cette situation de communication entre deux personnes est un
croisement de deux subjectivités. Il s’agit de subjectivité car nul n’est totalement objectif et
que chacun se crées son identité par rapport à sa vie. Chacun à donc sa réalité et ses idées.
Le clinicien doit savoir écouter et faciliter la parole de l’autre avant de parler luimême. « Ce qui le différencie d’un entretien ordinaire, c’est qu’il prend en compte
l’inconscient » (Michel LEROUX).
L’entretien clinique permet ainsi d’accéder aux représentations les plus personnelles
des personnes. C’est pour cela qu’il est indispensable.
Le psychologue a une place qu’accompagnateur, et a comme but de mener le client à
comprendre son malaise afin qu’il puisse le régler (s’il y a lieu).
L’entretien peut se dérouler de différentes manières. Le cas de figure où nous
retrouvons un psychologue et son patient n’est pas unique. Il peut être face à une famille, un
couple ou un groupe de personne. Et il est de plus en plus fréquent que celui-ci travaille avec
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la collaboration d’un confrère. (Un travail d’équipe est conseillé dans le cadre d’un suivit
d’une famille par exemple).
« Le client vient rarement en connaissance de cause. Il vient par pression, par hasard,
par erreur ou sur demande… ».
Il ne s’agit pas forcément de personnes malades psychiquement et en souffrances
patient ou client ou d’avantage approprié, le sujet, peut être une personne qui demande à être
rassurée en raison de son état de doute, d’incertitude qui le contrarie.
Selon ANXIEU, la psychologie clinique « est une psychologie individuelle et sociale,
normal et pathologique ; elle concerne le nouveau- né, l’enfant, l’adolescent, le jeune adulte,
l’homme mûr, l’être vieillissant et enfin mourant. Le psychologue clinicien remplit trois
grandes fonctions : de diagnostic, de formation, d’expert…
Les objectifs diffèrent selon les personnes. Il peut s’agir d’une visée diagnostique, de
recherche ou thérapeutique. Selon ceux-ci, le déroulement peut varier, cependant des règles
restent stables. La conduite de l’entretien doit être non directive ou semi directive et le
« clinicien » doit appliquer le respect, la neutralité et l’empathie.
L’âge, la personnalité et la psychopathologie vont jouer un rôle dans la manière dont
un entretien va débuter. « Entre le bébé qui fonctionne à partir de ses sensorialités
naissantes, la personne sénescente confrontée au deuil…il y a lieu d’ajuster et d’aménager
l’approche clinique de l’entretien ».
« Le sujet a une « certaine méconnaissance de ce qu’il demande et de ce qui peut lui
être apporté ». Parfois le sujet s’étonne du bénéfice qu’il tire de l’entretien, d’autres fois,
aucune communication ne s’établi sans que l’on puisse déceler les raisons.
« Ce qui va se passer est imprévisible et dépend de la personne du clinicien et de la
personne du client ». Le psychologue ne fait pas de miracle, régler un problème demande un
investissement personnel. La personne doit être mise en confiance, accepter la situation et être
demandeuse pour pouvoir avoir la capacité de fournir un travail sur elle, car « on ne peut pas
résoudre un problème de vie sans changer soi-même ». Des fois « le client demande une
solution miraculeuse sans avoir à payer le prix du changement », cela ne peut fonctionner.
L’entretien clinique fait partie de la méthode clinique et des techniques d’enquête en
sciences sociales, et comprend :

Une clinique « à mains nues » (l’observation et l’entretien) ;

Une clinique instrumentale (tests projectifs, échelle clinique, etc.)
2
Une médecine à mains nues.
Lié à la médecine par le mot « clinique ». Il ne comporte pourtant aucun instrument
pour sonder l’être humain. Le psychologue est l’instrument : « à mains nues ». A différencier
de la psychologie « à mains armée » : magnétophone, magnétoscope, dite « à instrument ».
Cependant, ne sont pas de réels instruments palpables sur lesquels le psychologue peut se
reposer lorsqu’il exerce sa profession.
Elle ne s’appuie donc sur aucune machine, mais peut le faire sur des instruments
psychologiques qui ont été travaillés, préparés, étudiés, élaborés au par avant : les tests. Ceuxci sont élaborés au sein de la profession et constituent un appui précieux au sein de l’exercice
du psychologue (surtout pour ceux qui débutent dans le métier).
« La situation étant standardisée, ce qui est à observer se trouve réduit, cadré, et l’on
peut devenir assez vite sensible à des nuances dans le comportement et les réponses du
sujet ».
Le psychologue élabore une relation de soins à la personne dans la mesure où il
participe « aux actions de prévention d’hygiène mentale ». On parlera plus souvent d’aide ou
de « conseil ». Mais il faut être prudent quant à l’interprétation de ces mots car bien que le
patient soit en demande d’aide et de conseils, il ne s’agit pas véritablement de donner des
conseils. A aucun moment il ne faut affirmer des réalités et penser pour l’autre. Le
psychologue doit simplement amener l’autre à réfléchir sur ce qu’il semble bon et juste de
faire pour sa personne et sa situation.
« Militant de la santé mentale », « intérêt porté à l’individu »,
« au service
d’autrui », tels sont les définitions du rôle du psychologue clinicien selon Colette CHILAND.
Trois types d’entretiens : non directif, semi- directif et directif
Les plus importants sont les deux premiers. La non directivité est un type d’entretien
qui est centré sur la personne et qui permet de déceler le système d’association que fait le
sujet spontanément. La semi- directivité comprend le fait que le clinicien dispose d’un
« guide d’entretien », « il a en tête quelques questions qui correspondent à des thèmes sur
lesquels il se propose de mener son investigation ». (BENONY)
« Le clinicien invite à parler et ne pose pas de question, ou en pose le moins
possible », cela permet de parvenir au « recueil d’une anamnèse (histoire de la vie et de la
maladie) aussi complète que possible… ». Les questions posées si nécessaires ne doivent pas
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coincer le client en déclenchant chez lui un sentiment trop douloureux qui pourrait l’amener à
mentir, refuser de répondre, ou encore «se sentir obligé de répondre et ne pas le supporter ».
« Il faut que la patient puisse supporter ce qu’il nous dit sans que l’estime de soi, la
cohérence, l’unité et la continuité de soi ne soient remises trop brutalement en cause ».
Si de telles choses arrivent, le client risque de ne pas poursuivre les entretiens. Devant
d’un côté éviter de déclencher un type d’aveux inacceptable, le clinicien doit également tenter
de le prévenir. Le clinicien doit s’efforcer d’établir une communication authentique. « Un
client ne peut pas tout dire au premier entretien ». D’ailleurs ce ne pourra être le cas tant
« qu’il n’aura pas pris confiance dans son interlocuteur ».
L’entretien directif qui se présente sous forme de questionnaire appartient à la clinique
instrumentale. Il n’est donc pas centré sur la verbalisation spontanée, le sujet répond à des
questions précises. Il est utilisé pour compléter des recherches.
« La non directivité, c’est d’abord une attitude envers le client ». Le clinicien ne doit
pas guider son patient dans une direction ni penser et juger que celui-ci ait à agir d’une
manière déterminée.
Le patient est « roi ». Chaque individu est différent. Un vécu, une appartenance à un
groupe, des représentations propres, une manière d’appréhender la vie… Il agit et pense en
fonction de ces données qui lui sont « offertes » depuis sa naissance. De plus, toute chose qui
l’entoure interagit sur lui. Aussi, aucune situation analysée ne peut être identique. C’est là
toute la complexité de l’être humain, et c’est là également que vient prendre toute
l’importance du métier du psychologue clinicien qui a pour fonction de placer la dimension
« humaine » au premier plan.
L’entretien verbal et non verbal.
L’entretien est verbal. Mais l’importance ne réside pas uniquement dans le verbe :
toutes les communications sont « parlantes », c'est-à-dire fructueuses et à ne pas négliger. La
communication non verbale participe à la compréhension de l’être.
« La communication verbale ou « digitale » s’accompagne toujours d’une
communication non verbale ou « analogique » et ces deux modes peuvent s’accorder ou se
contredire ».
Selon A BLANCHET (1997), le discours comporte trois dimensions : référentielle (que
dit le sujet des faits ?), modale (que pense le sujet des faits et qu’en dit-il ?), illocutoire (quels
actes accomplit le sujet lorsqu’il parle ?) (BENONI). On parlera aussi de :
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
Contenu manifeste (ce qui est dit)

Contenu latent (représentation et signification inexprimée)
Les manifestations non verbales viennent apporter des indications supplémentaires
précieuses. Tout est important, passant des mimiques du visage, au sourire, regard, gestuelle
et
posture,
communication
tactile,
investissement
de
l’espace,
manifestations
neurovégétatives (rougeur, pâleur, sudation), à l’aspect vocal (intensité de la voix, débit,
silence…), beaucoup de choses peuvent ainsi être détectées (en s’appuyant sur des recherches
donnant à présent des explications pour un certain nombre de réactions non verbales).
Respect, neutralité et empathie.
L’attitude clinique relève d’une attitude déontologique et éthique. C’est le respect des
droits fondamentaux des personnes, leur dignité, leur liberté, leur protection, le secret
professionnel et implique le consentement des personnes concernées. Un respect de la
personnalité du sujet : ses appartenances sociales, culturelles, professionnelles…
En psychologie clinique, l’on sait que patient détient sa vérité, c’est lui qui sait où et
comment il souffre. Ainsi, c’est lui qui a le pouvoir de la communiquer. Mais pour cela, pour
comprendre le pourquoi et le comment de sa souffrance il faut qu’il puisse s’exprimer et être
écouté. L’entretien « se révèle un outil indispensable et irremplaçable pour accéder aux
informations subjectives des individus » (Hervé BENONY).
L’entretien clinique n’est pas simplement un examen « clinique psychiatrique
classique », qui lui est une sorte d’interrogatoire qui dresse l’inventaire des symptômes du
patient. Les recherches psycho clinique estiment que « la révélation brutale du secret
risquera de provoquer une syncope de l’ouverture du placard, un effondrement, plus que la
mise en place instantanée de relations nouvelles et saines ». Aussi ne favorise- t- il pas la
révélation brutale de lourds secrets.
Le client ne doit pas être poussé mais plutôt le laissé libre d’avancer à son rythme.
Freud parle de « neutralité bienveillante ». Le psychologue clinicien, a la neutralité et la
bienveillance comme devoir, sachant que ces deux comportements ne vont pas de soi, c’est
un travail à faire. Apprendre à ne pas porter de jugement ni émettre de critique. Il s’agit de ne
pas laisser paraître nos émotions. Celles –ci risqueraient de porter « préjudice » à la personne
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en face. Cela implique la prise de conscience de ce que l’on éprouve afin de pouvoir dominer
nos réactions.
Rappelons que le but du psychologue est de mener le client à comprendre son malaise
afin qu’il puisse le régler (s’il y a lieu). Ainsi il faut ne pas négliger divers points mobilisés
dans l’entretien clinique et reconnus comme faisant partie des réaction humaines.
Il s’agit de faire le point avec soi-même afin d’éviter que nos émotions liées à notre
vécus ne puissent transparaître. Le patient n’a pas à surmonter les malaises, chocs,
étonnements…alors que lui-même a besoin de régler les siens et qu’il risquerait de ne plus
être lui- même mais plutôt de faire ressortir une chose ou l’autre de son histoire en fonction
des réactions du clinicien. Il doit pouvoir se sentir le plus libre possible pour pouvoir exposer
ses problèmes.
Selon Béatrice MARBEAU-CLEIRENS pour cela il faut analyser et prendre en compte
ce qui est mobilisé chez le psychologue et son patient. Les relations inconscientes néfastes à
la compréhension de l’autre doivent être connues du psychologue afin de les éviter.
Ainsi, dans la compréhension d’autrui qu’à le clinicien, il existe trois menaces
principales en terme d’identification : « l’identification affective » (être touchée, ému par la
personne), « l’identification à une autre personne » (se mettre dans la peau d’une personne de
son entourage plutôt que de rester dans celle de son interlocuteur) et celle « d’accepter de
façon excessive son faut self » (faut soi : ce qui n’est pas lui en réalité). Si la manifestation de
l’identification est trop forte, baisse de disponibilité pour la situation présente peut se
déclarer. Le danger est que le psychologue renvoie une part de son émotivité qui risque elle
d’influencer le comportement du patient voire de tendre la situation.
La projection, le transfert, le contre- transfert et les groupes d’appartenance, jouent
également des rôles de barrière.
La projection concerne des souvenirs et des affects qui viennent inconsciemment nous
perturber dans notre relation à l’autre.
Le transfert est la répétition inconsciente du patient envers le psychologue d’une
relation qu’il a vécu au par avant.
Le contre-transfert est l’ensemble des réactions inconscientes du psychologue dirigées
vers son patient. Il est emporté par sa subjectivité qui induit son comportement, bien que
l’origine de ses réactions relève d’événements passés.
Chaque individu appartient inévitablement à des groupes d’appartenances, et ceux-ci
viennent consciemment et inconsciemment modeler les attitudes de l’individu.
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Aussi, pour palier aux mieux à ces barrières, le psychologue doit exercer l’empathie et
apprendre à se connaître.
En ce qui concerne l’empathie, il s’agit selon C. ROGERS de « sentir le monde privé
du client comme s’il était le vôtre, mais sans jamais oublier la qualité de « comme si »…».
Utiliser l’empathie, c’est se mettre à la place de l’autre pour essayer de comprendre comment
il éprouve les choses. Cela tout en gardant ma différence et une distance qui permette de faire
quelque chose de notre relation et de ne pas éloigner ni écraser l’autre.
Certains mettent aujourd’hui en avant les techniques provoquant des libérations
d’émotions empressées par lesquelles l’on attend le retour d’un souvenir refoulé. « Il peut
arriver que ce soit bénéfique ; plus souvent, c’est une effraction dans l’aménagement
défensif ». En d’autres termes, cela se traduit par le « viole » du refoulement et de
l’autocensure.
Bien entendu une neutralité totale est impossible et le parti- pris vient forcément se
nicher au cours d’un entretien. Le clinicien reste avant tout un humain (cela permet aussi au
client de ne pas avoir l’impression d’être face à une machine), mais celle –ci doit être la plus
infime possible.
Les savoirs sensibles de la profession ne peuvent se résumer à un enseignement en un
bloc mais demandent plutôt un travail dans le temps. Une formation continue. Un point
marquant du métier est le « travail sur soi ». L’aspect clinique de l’entretien qui est de
«…chercher à aider autrui à s’exprimer, être disponible pour l’écouter et comprendre…», ce
qui demande « un travail d’observation de soi-même, d’auto-analyse et de contrôle de soi »
de façon continue (Béatrice MARBEAU-CLEIRENS). C’est savoir se maîtriser pour pouvoir
s’utiliser comme instrument.
Si nous voulions simplement garder quelques mots parlants pour exposer ce qu’est un
entretien clinique, nous pourrions sélectionner : « laisser parler l’autre », « faire dire »,
« permettre de dire », « écouter », « s’informer ».
« L’entretien vise à comprendre et à appréhender le fonctionnement psychique d’un
sujet en se centrant sur son vécu et en mettant l’accent sur la relation ».
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ET QU’EN EST-IL
POUR LE METIER DE
TRAVAILLEUR SOCIAL ?
Un texte de Denise JODELET m’a permis de réaliser que nous jugeons tous, et à
chaque instant. L’entretien clinique lui, vise à concevoir et à comprendre le fonctionnement
psychologique de l’autre en prenant en compte sa vie, son vécu et en mettant l’accent sur la
relation. Pour appliquer son métier, le psychologue doit apprendre à ne pas porter de
jugement ni émettre de critique.
Tout métier qui a l’humain comme objet de travail, demande de savoir être à l’écoute
de l’autre pour le laisser vivre et ne pas l’anéantir ou le mettre mal à l’aise par le biais de
jugements. Je relève ainsi de nombreuses précautions et applications qui s’appliquent dans
l’entretien clinique et qui s’avèrent très intéressantes et utiles pour tout travailleur social.
Considérer la personne dans sa globalité apparait comme un point fondamental. Bien
que des regroupements soient opérables, un humain est unique. Il se différencie de tout autre
par son vécu. Et ce depuis les premières secondes de sa conception (alors qu’il ne fait pas
encore partie de ce monde terrestre).
« Militant de la santé mentale », « intérêt porté à l’individu »,
« au service
d’autrui », tels sont les définitions du rôle du psychologue clinicien selon Colette CHILAND.
Ce rôle est un rôle « d’entre- aide » que tout le monde devrait pouvoir appliquer. Pourtant, la
nature humaine en a décidé autrement. L’application de ces trois visions ne sont pas innées,
elles relèvent d’un ou plutôt de plusieurs métiers. Ce qui représente les bases de la
psychologie clinique concerne donc à mon sens simultanément les psychologues, les
travailleurs sociaux et les professionnels de la santé.
Par le biais des trois idées de Colette CHILAND nous retrouvons l’aide « médicale »
du corps et celle de la « pensée ». Si par malchance celle du corps empiète ou anéanti la
deuxième, l’humain n’a plus (ou peu) sa place en tant que tel et se résume au statut d’objet.
Le manque de reconnaissance (qui elle s’avère primordiale pour tout humain) crée un terrain
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propice au développement de diverses pathologies. C’est pour cette raison que nous devons
tenir compte de l’autre et lui laisser une place. La place de vivre, la place de s’exprimer, et ce,
le plus fréquemment possible (dans la vie de tous les jours) dans la limite du respect de soi.
En effet il faut faire quelque chose de la relation (autre- moi). Il entendons nous bien, je ne
parle pas d’accorder la toute puissance à l’autre et de se négliger.
Un point marquant d’un métier social est le « travail sur soi ». Pour se préoccuper et
s’occuper des autres ou encore leur accorder une place, il faut avoir fait le point avec soimême. Il faut être un minimum en « paix avec son âme » si l’on veut faire des apports positifs
et ne pas être envahi par les histoires d’autrui ou de son propre vécu (ou envahir l’autre par
nos histoires).
La projection, le transfert, le contre-transfert sont des concepts de grande valeur dans
l’exercice de la relation d’aide et de compréhension de l’humain. En effet la prise de
conscience de ces mécanismes permet, tout comme le fait un psychologue de viser à les
amoindrir. Ces mécanismes ne sont pas cantonnés au domaine du professionnalisme. Il est
vrai que les termes relèvent du métier mais en pratique ils font partie de la vie de tous les
jours et personne n’y échappe. Chacun, à chaque instant de sa vie réagit inconsciemment à un
individu, à une couleur, à une odeur, à un son… Etre au courant de l’existence de ceux-ci,
pouvoir leur accorder un nom, c’est aussi se rendre compte de leur importance et travailler sur
leurs automatismes. Puisque tout humain est concerné, le travailleur social, qu’il soit
psychologue ou animateur l’est forcément.
Le fonctionnement des groupes d’appartenance est aussi une des composantes de la
compréhension de l’autre comme étant réellement autre. C'est-à-dire que compte tenu de nos
inégalités de vie et des personnes différentes que nous côtoyons et qui nous entourent nous ne
pouvons agir et avoir des réactions et des points de vues totalement similaires. Les groupes
d’appartenance que chaque individu connaît, côtoie et investi jouent un rôle dans son
comportement. C’est une donnée qui bien que pouvant apparaître comme évidente me semble
souvent négligée. Qui dit comportement différent, associe souvent comportement inconnu et
incompris. Et pour finir, incompris va souvent avec rejet. Pourtant, un fonctionnement
différent, une autre perception de la vie, ne doivent pas constituer une négation en soi. Ils
doivent pouvoir être bonifiés et utilisés de manière à constituer des apports positifs à un
individu comme à celui qui lui fait face.
C’est pour la mise en garde de jugement trop hâtif et négatif de l’autre différent, qu’il
est important d’être conscient de ce mécanisme des comportements liés aux groupes
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d’appartenances. Pour faire quelque chose de notre relation avec l’autre il faut apprendre à
détecter, accepter et gérer les barrières.
Si je reprends les termes : « non directivité, semi directivité, directivité », je me rends
compte que je peux les mettre en œuvre avec le groupe de personnes avec lesquelles je
travaille.
Le travailleur social est là pour amener quelque choses de positif, mais son rôle n’est
pas d’arriver en imposant son programme achevé. Son travail doit se construire avec
l’implication du groupe (ou de la personne). Ce qui veut bien dire qu’il est en son devoir de
leur laisser la parole. D’après moi si l’on emprunte les trois termes utilisés par la psychologie
clinique, c’est la « semi directivité » qui convient davantage à l’exercice du métier
d’animateur social. Le professionnel doit laisser un espace de liberté aux personnes avec
lesquelles il travaille, mais simultanément les guider, leur donner un « cadre de travail », ou
leur suggérer des directions. Tel le psychologue qui « a en tête quelques questions qui
correspondent à des thèmes sur lesquels il se propose de mener son investigation »,
l’animateur doit avoir en tête des idées à donner aux autres sans qu’ils s’en aperçoivent.
Pour être le plus professionnel possible dans la compréhension de soi et de l’autre il
convient de se former continuellement tel le psychologue clinicien. Un regard sur les
recherches et travaux effectués dans le milieu social et de l’animation, les projets mis en place
antérieurement sera favorable pour l’orientation des travaux sur le terrain. Il permettra d’aller
de l’avant et d’éviter de répéter les erreurs déjà commises.
Le travailleur social doit se questionner sur le pourquoi de ses actions, le pourquoi de
ce métier ? Qu’est-ce qui l’a amener à faire un métier dans le social et pour qui ou pour quoi
a-t-il réellement envie de mettre en place ses actions, ses projets. Est-ce que ce doit être
effectivement « ses » actions et projets ? Faire un travail sur soi a toute son importance dans
la période qui précède un travail.
Mais je conseillerai également d’entrer dans une logique de constante remise en cause
et de réévaluation. Que la réévaluation soi personnelle ou concerne le public, l’entourage ou
la société, elle s’avère obligatoire car le monde et l’humain sont en évolution constante.
Ajoutons à cela que toutes ces réalités sont très condensées, nous découvrons perpétuellement
et inévitablement des choses nouvelles qui nous aident à la compréhension de notre monde et
par la même occasion la compréhension personnelle et d’autrui. Il me semble qu’il faut
simultanément évoluer avec le temps, aller de l’avant et ne pas faire abstraction du passé.
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Pour cette réflexion, j’aborde un autre point de l’entretien clinique qui fait parti des
qualités requises pour un psychologue. Ce dernier semble également sollicité pour tout travail
« social ». Il s’agit de l’exigence d’empathie.
Pour le mot « social », je trouve entre autre les phrases suivantes dans Le Petit Robert
2006 : « Relatif à un groupe d’individus, d’hommes, conçu comme une réalité distincte
(société) ; qui appartient à un tel groupe et participe de ses caractères », puis : « Relatif aux
rapports entre les personnes, au groupe ».
Pour « empathie », je trouve : « Faculté de s’identifier à quelqu’un, de ressentir ce
qu’il ressent ». L’empathie, c’est bien cela mais c’est davantage. C’est essayer de se
reconnaître dans l’autre, c'est-à-dire de se mettre à la place de l’autre pour être au plus proche
de ce qu’il ressent. Ainsi cela évitera les jugements trop hâtifs basés sur notre vécu, nos
représentations, la vision et la pensée subjective qui nous est propre. Et qui de ce fait est bien
loin de celle de l’autre. L’empathie c’est également savoir garder sa différence et ne pas
vouloir s’assimiler à l’autre. Mais c’est encore avoir la faculté de garder une certaine distance
pour ne pas étouffer l’autre et lui permettre de faire quelque chose de la relation.
Social et empathie s’avèrent donc des mots allant de paire. Dans « social » l’on trouve
les notions de groupes distincts et de rapport entre les groupes. Dans « empathie », c’est
l’acceptation de l’autre et de rapport constructif avec les autres dont il est question.
Dans l’acceptation de l’autre, il n’est pas tant question de compréhension que de
respect des divergences, des distinctions et des différents ; de liberté de s’exprimer et
d’exister.
Évidemment celle-ci ne laissera pas échapper quelques jugements qui sont le propre
de l’humain, mais elle permettra de les réduire considérablement pour accorder une place
« légitime » à l’autre.
Dans ses cours (étude socio-historique de la pauvreté,
de la marginalité et de
l’exclusion), Alexandre PAGES nous écrit que la « sociologie de la pauvreté est en réalité
une sociologie du lien social ». Cela veut dire que notre société réalise que la pauvreté n’est
pas uniquement un problème d’argent mais également en lien avec un manque ou une perte
de socialisation. Une personne peut être pauvre en relation à autrui. C’est aussi là que vient se
nicher l’importance du métier de travailleur social. Celui –ci a pour vocation le maintien ou la
création du lien social. Pour parvenir à cela, nous devons être à la « disposition » des gens.
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Pour cela il faut les comprendre au mieux, les accepter et pour y parvenir il faut exercer
l’empathie.
Cette fameuse empathie touche divers domaines. Le domaine de l’acceptation, mais
celui-ci est directement relié au domaine de la connaissance des individus et des sociétés.
C’est par la recherche d’informations concernant la personne, son éducation et le contexte
global de son existence qu’une approche pourra être la plus objective possible. Pour cela, des
lectures sont à faire et l’écoute de l’autre est indispensable. Je dis l’écoute, mais comme dans
l’entretien clinique, le non verbal (l’observation) vient prendre une grande importance au sein
de la relation. Il faut faire attention à la personne qui est face à nous. Il faut porter l’attention
sur les phénomènes des mécanismes de l’inconscient, ils représentent des éléments de
compréhension ou plutôt des base de questionnements qui éviterons les jugements trop hâtifs
et permettrons d’obtenir des informations supplémentaire (qui agrémenteront nos
connaissances).
Le système de l’empathie permet comme nous l’avons vue précédemment dans
l’entretien clinique, d’accéder aux représentations les plus personnelles des personnes.
Dans un autre volet, savoir ce qu’est un entretien clinique est indispensable pour nous
(ainsi que pour des professionnels de santé, des instituteurs ou autre métier proche de
l’humain). En premier lieu, il est recommandé d’être au courant des activités existantes dans
le domaine social. D’avoir une idée la plus juste possible des corps de métiers qui nous
entourent ainsi que de connaître leur rôle et vocation. De cette façon tant dans notre
profession que dans notre entourage propre, nous serons en capacité d’orienter des personnes
vers ces professionnels en question (et ce type d’entretien).
Le métier provoque vraisemblablement une réticence en règle générale, et cela par
manque d’information. La personne non informée a une vision négative de la profession et de
l’entretien, et peut exprimer une réticence face à la demande de ce dernier en raison de leur
inquiétude et angoisse. L’inquiétude et l’angoisse sont déclenchées par l’inconnu (le manque
d’information). De cette étiquette négative, il arrive que des personnes refusent la rencontre
de l’entretien. En générale, l’individu est chargé de représentations et d’aprioris. Face à cela,
nous serons en mesure d’apporter des informations sur le propos et par la même occasion
d’attiser les angoisses des patients ou de l’entourage (enfant, parent, professeur, conjoint...).
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Puisque chaque individu est une personnalité à part entière, puisque chacun se forme
en partie avec son entourage, puisque la société est en évolution constante, le métier de
travailleur social doit nécessairement se former continuellement pour évoluer avec son
entourage. Tel est le devoir de celui –ci comme celui de son confrère le psychologue. Tout
métier ayant l’« humain » comme « objet » de travail doit être en éternel questionnement pour
répondre le plus justement aux besoins afin de ne pas tomber dans les clichés ou recettes
toutes faites. En effet, les travailleurs sociaux ne peuvent se contenter de répondre à une
personne en se référant à l’histoire d’un autre. Chacune d’entre- elles a des agissements,
pensées, vécu distincts ; ainsi une situation ne peut être associée à une autre.
L’individu, est le seul à se connaître. Seul lui a le pouvoir de déceler les réactions liées
à son inconscient. Puisque la psychologie est la « connaissance de l’âme » (Le Petit Robert
2006). La psychologie c’est d’abord intégrer certaines bases, certains faits et mécanismes
connus ayant fait l’objet de recherche, puis, c’est apprendre à l’autre à se questionner, se
découvrir.
Dans le cadre d’animateur ou travailleur social, il s’agit d’écouter l’autre, de lui
accorder une place, de l’accompagner dans ses idées, de lui ouvrir ses visions, de l’aider à se
réaliser. Il s’agit de constituer un guide pour favoriser l’indépendance de l’autre, pour ne
constituer au final plus qu’une personne ressource et en aucun cas devenir indispensable.
Par le biais de ma vision, j’ai certainement mis en avant certains points aux détriments
d’autres. En espérant que ma compréhension et ma conception ne sont pas à l’opposé que
celles qu’un travailleur social devrait avoir ; il me semble que par l’intermédiaire de cette
réflexion, j’ai pu tirer quelques bénéfices à l’échelle personnelle.
Je suis bien consciente que la réalité n’accorde à personne l’objectivité absolue mais
j’espère à présent être en mesure de mettre en œuvre mes acquis nouveaux, pour réduire ma
subjectivité et développer des compétences indispensables pour un travail basé sur la relation
avec autrui.
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BIBLIOGRAPHIE
BENONY Hervé et CHAHRAOUI Khadija (2005). L’entretien clinique. DUNOD.
Première édition 1999. (Les topos).
PEDINIELLI Jean- Louis (2005). Introduction à la psychologie clinique. ARMAND
COLIN. Première édition 1994 par Nathan.
CHILAND Colette, sous la direction de ; (2005). L’entretien clinique. PUF. Première
édition 1983.
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