1
Ressource naturelle et ingration sous
régionale en Afrique Centrale
Version intérimaire
Août 2013
2
Résumé : L’objectif de cette étude est de mettre en évidence le rôle des ressources naturelles
dans le processus de l’intégration économique des pays de l’Afrique centrale. Plus
spécifiquement il a été question de montrer les effets des ressources pétrolières sur les
exportations intracommunautaires et la diversification de la structure de production dans la
région Afrique Centrale. La démarche méthodologique adoptée repose sur une approche
descriptive et analytique de l’influence du pétrole sur le commerce régional et la
diversification des économies de la CEMAC. Il ressort de nos analyses que le pétrole est un
frein à la dynamique de l’intégration en zone CEMAC. En effet, le pétrole réduit le potentiel
du commerce intracommunautaire et la diversification des économies de la zone CEMAC.
Mots clés : ressource naturelle, pétrole, intégration, Afrique centrale
Classification JEL : F10 ; F11.
3
I. Introduction
Après avoir été reléguée au second plan, pendant de nombreuses années, la question de
l’intégration
1
économique se pose avec plus d’acuité que jamais pour les pays en
développement en général et les pays africains en particulier. Une résurgence qu’on peut
imputer, en partie, à la tendance à la formation de gros blocs commerciaux dans le monde. De
nouveau, l’intégration se présente comme le moyen d’atteindre une croissance économique
plus rapide, plus diversifiée et plus durable, et de réduire la dépendance vis-à-vis des sources
extérieures.
Cependant, le bilan n’est guère satisfaisant lorsqu’il s’agit de l’intégration économique ou de
coopération en Afrique subsaharienne (Berg, 1993). Plusieurs facteurs sont mis en évidence
pour expliquer les résultats médiocre des regroupements régionaux en ASS. Parmi ces
facteurs, on note les facteurs politiques (macroéconomiques divergentes), des facteurs
structurels (tissu industriel semblable), des facteurs culturels et historiques (différence), etc.
Toutefois, peu d’études ont cherché à expliquer les résultats de l’intégration régionale par les
ressources naturelles (Fouquin et al., 2006 ; Carbaugh, 2007 ; Collier et Venables, 2008 ;
OMC, 2010 ; Venables, 2011, etc.). Les résultats qui se dégagent de ces études est qu’il peut y
avoir une relation à double sens entre les ressources naturelles et l’intégration gionale.
L’intégration régionale influe différemment sur le développement potentiel des pays riches en
ressources et des pays pauvres en ressources (qui produisent des articles manufacturés), en
termes d’efficience économique, de bien être et d’économie politique. Mais cet effet dépend
souvent de la situation géographique des pays concernés et du type de ressources naturelles
dont ils sont dotés. Ainsi, l’abondance relative des ressources dans ces différents contextes
peut elle même avoir une influence sur l’incitation des pays à s’engager dans l’intégration
régionale. Notre analyse s’inscrit dans la dynamique de l’analyse unidirectionnelle des effets
des ressources naturelles sur l’intégration régionale en ciblant la Communauté Economique et
Monétaire d’Afrique Centrale (CEMAC). Malgré la forte dépendance des pays de l’Afrique
centrale des ressources naturelles, il n’existe pas à notre connaissance une étude ayant mis en
évidence le lien entre les ressources naturelles et l’intégration dans la sous région. Et pourtant,
la Communauté économique et monétaire de l'Afrique centrale apparaît comme l’une des
régions au monde présentant le profil économique le moins diversifié et le moins intégré.
L’économie de la zone CEMAC est essentiellement « minière » reposant sur l’exploitation
1
En général, l’intégration régionale est un processus par lequel des pays concluent un accord pour renforcer la
coopération régionale. La motivation peut être économique ou politique et le degré d’intégration peut varier
considérablement.
4
rentière d’un nombre limité de ressources naturelles non durables. À l'exception de la RCA, le
pétrole brut est important pour les pays de la CEMAC: il représente 86% des exportations de
la Communauté (principalement à destination d'Europe et d'Asie); le Congo en dépend pour
61% de son PIB, le Gabon pour moitié, le Tchad pour 40%, et le Cameroun pour près de 10%
(OMC, 2013). Le bois est le second produit à l'exportation de la communauté; hormis le
Tchad, les quatre autres pays y tirent de substantielles recettes à l'exportation.
Cette forte dépendance des pays de la CEMAC des ressources naturelles ne permet pas
d’entamer une mutation profonde, d’une économie non diversifiée à faible valeur ajoutée vers
une économie diversifiée à forte valeur ajoutée. Malgré la mise en place de la zone de libre-
échange, le commerce intra-communautaire apparaît comme l’une des plus faibles au monde
et la zone CEMAC est particulièrement extravertie et dépendante des importations de toutes
sortes, y compris pour sa sécurité alimentaire. En 2010 par exemple, les échanges intra-
communautaires selon les statistiques de l’OMC (2013) ont contribué pour 2,1% des
exportations totales (y compris intra-communautaires) des pays, et 3,9% des importations.
Ces niveaux sont faibles comparés aux groupements régionaux similaires comme l'UEMOA
les échanges communautaires représentaient 11,5% des importations et 15% des
exportations en 2010. Ce faible niveau de commerce intra-communautaire s'explique en partie
par la structure des exportations (essentiellement des matières premières) et la faiblesse du
tissu industriel des pays.
L’objet de cette étude est de montrer les effets des ressources naturelles sur l’intégration
économique dans la sous région Afrique Centrale. Plus spécifiquement, il s’agit de montrer
que les ressources pétrolières réduisent le commerce intracommunautaire et favorise une
faible diversification des économies en quête d’une intégration totale.
La suite de l’étude est organisée comme suit. La section 2 met en lumière la revue de la
littérature. La section 3 dresse les effets des ressources pétrolières dans l’explication de la
faible performance de l’intégration économique en zone CEMAC. Enfin, la section 4 fait
l’objet de la conclusion et des recommandations.
II. Revue de la littérature
Cette revue de littérature analyse de plus prés la question de lintégration régionale dans le
contexte d’abondance des ressources naturelles. L’abondance des ressources naturelles peut
être à la fois un vecteur et un frein de l’intégration régional. Cette littérature reprend les
principaux points développés dans l’étude de Carrère et al.(2012).
5
En effet, peu d’études ont cherché à analyser le lien entre ressources naturelles et intégration
régionale. Les études qui se sont intéressées à ce lien sont autant théoriques qu’empiriques.
Sur le plan théorique, le rapport sur le commerce mondial (OMC, 2010) décrit la dilution de
nombreux accords régionaux entre pays en développement dans les années 1970, alors que les
chocs pétroliers accentuaient la dichotomie entre pays importateurs et exportateurs nets de
matières premières. De nombreux gouvernements de pays importateurs nets de ressources ont
été incités à freiner la libéralisation des échanges intra-régionaux pour se concentrer sur les
revenus d'exportations plus importants en dehors de la région. De leur côté, les pays
exportateurs nets en ressources, profitant alors de ces revenus providentiels, ont soudainement
abandonné les réformes politiques intérieures, ce qui fortement déstabilise le processus
d'intégration régionale.
Les ressources naturelles sont souvent perçues comme un stock de capital national et
stratégique qui devrait être à la disposition des intérêts nationaux uniquement et ne devrait pas
être librement accessible aux pays partenaires. Ainsi, comme l'ont souligné Fouquin et al.
(2006), un tel comportement peut freiner l'aboutissement d'une intégration régionale puisque
celle-ci suppose que les pays les plus dotés en ressources supportent un coût plus important,
même si cela implique d'envisager une redistribution des revenus entre membres. Les revenus
issus des ressources naturelles pourraient cependant permettre aux pays abondants de financer
une telle redistribution et de prendre plus de risques en mettant en application un agenda à
long terme d'intégration. Dans ce cas, les ressources naturelles seraient un atout important
pour former des coalitions régionales et encourageraient la participation de pays riches dans
l'intégration régionale
Une étude théorique récente de Venables (2011) suggère que, lorsque la région comprend à la
fois des pays riches et des pays pauvres en ressources naturelles, les pays riches en ressources
risquent de subir un détournement de commerce. En effet, si l'accord préférentiel intervient
entre un pays abondant en ressources et un pays pauvre en ressources mais disposant d'un
secteur manufacturier en croissance, le tarif préférentiel générera une création de commerce
pour ce dernier. Le pays pauvre bénéficiera d'un accès privilégié au marché du pays partenaire
et pourra importer plus de ressources naturelles. Il y aura peu de détournement de commerce
pour ce pays pauvre en ressources si son partenaire n'est spécialisé qu'en ressources naturelles.
En revanche, le pays riche en ressources subira un détournement de commerce puisqu'il
importera davantage de produits manufacturés du pays partenaire au détriment du reste du
monde plus efficient. Dans une même approche que Venables (2011), Carrère et al.(2012)
montrent dans le cas spécifique de la gion Moyen Orient et Afrique du Nord (MENA), que
1 / 12 100%
La catégorie de ce document est-elle correcte?
Merci pour votre participation!

Faire une suggestion

Avez-vous trouvé des erreurs dans linterface ou les textes ? Ou savez-vous comment améliorer linterface utilisateur de StudyLib ? Nhésitez pas à envoyer vos suggestions. Cest très important pour nous !