SYMPOSIUM REF : CYBERSPACE ET AUTOFORMATION 1
C O M M E N T C O M P R E N D R E L E S N O U V E A U X D I S P O S I T I F S D E F O R M A T I O N ?
Bernadette Charlier, inAlava (ed). Cybersepace et autoformation, Bruxelles, De Boeck, 2000
I. INTRODUCTION : A LA RECHERCHE DAXES DIRECTEURS
Quels points communs peut-il y avoir entre un dispositif d’autoformation assistée à
distance pour travailleurs adultes et un dispositif de support à l’apprentissage collaboratif pour
futurs enseignants ?
Une réponse simple mais qui cache bien des complexités serait de suggérer quatre termes
communs : dispositif, apprentissage, technologies et changement. Nous y reviendrons. Mais
tout d’abord, pourquoi se poser la question ?
Chaque dispositif n’a-t-il pas ses caractéristiques propres liées au contexte organisationnel
dans lequel il est construit, mais aussi aux acteurs qui le vivent et aux projets qu’il mobilise.
Vouloir rechercher les dimensions communes à des dispositifs aussi différents ne serait ce pas
commettre une lourde erreur : privilégier le pédagogisme (Carré 1997) en faisant abstraction
du contexte, tout comme du sujet, et en recherchant le dispositif médiatique infaillible. On
l’aura compris, nous voudrions tenter d’éviter ce piège. Notre approche du concept de
dispositif nous y aidera. Nous voudrions plutôt contribuer à une meilleure compréhension des
dispositifs qu’en tant que conceptrice ou évaluatrice nous contribuons à créer, animer ou
évaluer. L’approche adoptée est constructiviste. Elle se fonde sur l’expériences des
dispositifs par leurs acteurs. Elle inscrit ces expériences dans leurs contextes technico-
pédagogique et organisationnel. Ainsi, en analysant les deux dispositifs décrits dans cette
communication, nous avons identifié des axes communs qui peuvent contribuer à mieux
comprendre les dispositifs de formation du cyberespace.
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II. DISPOSITIF, APPRENTISSAGE, TECHNOLOGIES ET CHANGEMENT :
PREMIERS AXES COMMUNS
II.1. DISPOSITIF
Si le colloque interdisciplinaire : « Dispositifs et Médiation des Savoirs » (UCL 1998) a
mis en évidence la diversité des significations accordées au mot dispositif, il a cependant
permis d’identifier quelques traits communs partagés par plusieurs auteurs. Ainsi (Berten,
1998) considère le dispositif comme un espace intermédiaire de médiation entre un sujet
porteur d’une intention et un environnement dynamique, l’objet de cette interaction sujet-
environnement étant la construction de connaissances. Jacquinot (1998), quant à elle, propose
plusieurs significations possibles du mot, tout en reprenant notamment l’acception proposée
par Berten - le dispositif comme lieu d’interaction - elle insiste sur l’intégration de la notion
d’usager et de ses divers états possibles dont celui de co-constructeur de savoirs. Quant à
Linard (1998), elle exprime une approche du dispositif qui nous paraît intégrer les précédentes
Fondé sur la mise en système des agents et des conditions d’une action, un dispositif est une
construction cognitive fonctionnelle, pratique et incarnée. Il présuppose quelqu’un derrière
la représentation préalable de l’effet visé et une logique de type dramatique qui combine la
mise en scène des protagonistes, des rôles et des circonstances avec les règles de déroulement
de l’action. Il se situe à l’opposé de l’opération informationnelle, définie comme traitement
logico-symbolique de données abstraites hors-sujet et hors-interaction » (Linard 1998)
Ces visions du dispositif rejoignent celle que nous avons adoptée avec Evelyne Charlier
(Charlier 1998). Ainsi, nous définissons le dispositif de formation dans une perspective
constructiviste c’est-à-dire une perspective intégrant le sujet lui-même et sa propre expérience
de la formation. Dans cette perspective, l’expression formation renvoie à la partie émergée
d’un iceberg : un lieu, un espace, des objectifs, des formateurs, des apprenants. En fonction
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de variables immergées et de leurs articulations, à un moment donné, ces réalités prennent un
sens particulier pour les différents acteurs qui les vivent : formateur, apprenant, gestionnaire.
Plus particulièrement, trois ensembles de variables entrent en jeu :
* Des variables individuelles concernant des caractéristiques du sujet avant ou en
dehors de la situation d’apprentissage : le parcours professionnel, l’étape de carrière,
ses compétences méta-cognitives ;
* Des variables relationnelles construites dans l’interaction du sujet avec
l’environnement : son projet d’apprentissage, le but qu’il poursuit en venant en
formation, sa représentation de l’efficacité de la formation et de sa propre pratique ;
* Des variables de l’environnement intégrant les lieux d’apprentissage et de travail,
l’ouverture de l’environnement sur des ressources externes, les formateurs comme
gestionnaires de la formation, le projet pédagogique de l’institution de formation
mais aussi les usages du cyberespace (les niches comme dirait Peraya).
C’est la nature des articulations entre ces variables et leur intégration dans un contexte
organisationnel qui déterminent, à un moment donné, la signification accordée par chaque
acteur à la formation et - in fine - son expérience d’un dispositif de formation significatif.
Ainsi, c’est en décrivant l’exrience singulière d’une formation par ses différents acteurs que
nous tentons d’appréhender le dispositif de formation dans toute sa complexité. Cette
approche suppose également qu’un dispositif change, évolue au cours du temps. Avec
(Vizcarro 1998) nous retiendrons, pour analyser l’histoire d’un dispositif, les cinq étapes
suivantes : conditions préalables, conception du dispositif, mise en oeuvre et régulation,
évaluation des apprentissages et évaluation du dispositif.
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II.2. APPRENTISSAGE
Au cœur des dispositifs de formation, tels que nous les définissons se trouve un autre
terme commun : l’apprentissage. En continuité avec l’approche du dispositif de formation
que nous venons de suggérer et avec (Linard 1994) nous interprétons l’acte d’apprendre
comme : la quête
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individuelle d’objets particuliers, les objets de connaissances, de la part
d’acteurs-sujets en situation évolutive d’interaction polémico-contractuelle (Linard 1994)
Ainsi nous analysons l’apprentissage en adoptant le point de vue du sujet, quel sens et
quelle signification un sujet accorde-t-il dans un contexte social et technologique donné à son
apprentissage (ce que nous avons appelé les conceptions de l’apprentissage (Charlier 1998)).
Cette prise en compte du point de vue du sujet permet de tenir compte des différences
individuelles : différence dans l’histoire (variables individuelles) et différences dans les
projets et les représentations des situations particulières de formation et de pratique (variables
relationnelles).
II.3. TECHNOLOGIES
Dans ce cadre, les ressources offertes par le cyberespace sont utilisées comme supports à
l’apprentissage individuel et collectif. Leurs usages nécessitent la gestion d’outils et de
méthodes pouvant apparaître paradoxales (Bonamy 1995). En effet, ils combinent
notamment : individus et groupes ; médiatisation et médiation ; flexibilité et planification.
Ainsi, ces usages peuvent tenir compte des apprenants individuels et de leurs caractéristiques
propres (conceptions de l’apprentissage, motivation, expertise,...) mais aussi des groupes
d’apprenants (cohésion, objectifs, culture professionnelle,..).
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Cette quête peut être décrite et analysée en utilisant le modèle actanciel de Greimas (Linard 1994) et (Charlier 1998).
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Comme le rappelle D. Peraya dans cet ouvrage, ces usages supposent non seulement un
processus de médiatisation mais aussi un processus de médiation qui implique les interactions
humaines de façon par exemple à aider les apprenants à s’exprimer, à négocier ou à résoudre
des conflits socio-cognitifs (Linard 1994).
Enfin, si un planning rigoureux est rendu nécessaire par la maîtrise indispensable de
technologies de plus en plus complexes, parallèlement une flexibilité est requise pour aliser
- juste à temps - les ajustements nécessaires des usages aux besoins des usagers et des groupes
d’usagers. Il s’agit de maîtriser le processus de production et de formation dans sa globalité et
donc de mettre en place un dispositif de régulation susceptible d'ajuster les moyens, de
faciliter la modification des pratiques ou encore de modifier les objectifs.
II.4. CHANGEMENT
Dans ces dispositifs de formation, le changement se situe au moins à deux niveaux. A un
premier niveau, c’est l’organisation elle-même qui pourrait se trouver transformée. Il est
possible bien sûr que rien ne change. C’est souvent ce que l’on observe dans les
établissements d’enseignement (de l’école à l’université) dans lesquels les usages éducatifs
des TIC sont (lorsqu’ils existent) juxtaposés aux usages traditionnels (Imbert 1995) et
(Duchâteau 1996). Mais, il est également possible que tout change. Ainsi, apprenants et
formateurs peuvent être appelés à participer à la conception et à la régulation des usages. De
nouvelles fonctions (tuteurs, modérateurs, concepteurs pédagogiques,...) peuvent voir le jour
et se trouver valorisées. A un second niveau, comme le montre S. Pouts Lajus (cet ouvrage)
c’est l’organisation elle-même qui sera dynamique et apprendra collectivement.
C’est en utilisant ces quatre axes que nous décrirons les deux cas choisis pour ensuite en
rechercher des points communs. Nous décrirons chaque dispositif tel qu’il est perçu par les
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