Stabilité, variabilité des génomes et évolution I- La reproduction et le brassage génétique A- La reproduction sexuée et la conservation du caryotype de l’espèce 1- Une alternance de générations : les cycles biologiques a- Chez les organismes diploïdes Chez les mammifères comme l’Homme, les cellules somatiques sont diploïdes (2n chromosomes) à la différence des cellules germinales, les gamètes, qui sont haploïdes (n chromosomes). Les gonades fabriquent des cellules haploïdes grâce au mécanisme de la méiose. La rencontre de deux cellules reproductrices permet de former un nouvel individu. La méiose précède de très peu la fécondation. La phase haploïde, réduite dans le temps et l’espace, est dominée par la phase diploïde. b- Chez les organismes haploïdes Chez les Champignons comme Sordaria, chaque mycélium est une suite de cellules haploïdes. La reproduction sexuée fait intervenir non pas des gamètes mais deux filaments différents. Deux cellules s’unissent pour donner une cellule unique à deux noyaux haploïdes qui se multiplie pour donner un organe en forme de coupe, le périthèce. Certaines cellules de celui-ci ont leurs noyaux qui fusionnent pour donner des cellules-œufs diploïdes. Chaque cellule-œuf entre alors en méiose suivie d’une mitose. On obtient 8 cellules haploïdes ou ascospores enfermés dans un asque. Après sa libération, une ascospore donne par mitoses un nouveau mycélium à cellules haploïdes. La méiose suit donc immédiatement la fécondation. La phase diploïde est alors réduite à la cellule-œuf (zygote). 2- La méiose et la fécondation sont complémentaires a- Le mécanisme de la méiose La méiose est une division cellulaire qui ne concerne que les cellules germinales (gamètes et cellules souches). Elle aboutit à la naissance de quatre cellules (gamètes à n chromosomes). Il s’agit d’une succession de deux divisions : la division réductionnelle et la division équationnelle. - Individualisation des chromosomes. - Disparition de l’enveloppe nucléaire. - Appariement de chromosomes homologues (2n) avec formation de chiasmas et possibilité de crossing-over. Rangement des paires de chromosomes homologues de part et d’autre du plan équatorial. Séparation des chromosomes homologues qui migrent aux pôles opposés de la cellule (ascension polaire). Première division cytoplasmique pour donner deux cellules filles haploïdes avec un exemplaire de chaque chromosome possédant 2 chromatides (n2q). Deuxième division cytoplasmique qui permet l’obtention de 4 cellules filles haploïdes dont les chromosomes n’ont plus qu’une chromatide (nq). b- La fécondation rétablit la diploïdie La fécondation permet le rétablissement de l’état diploïde. C’est lors de celle-ci que les gamètes subissent une duplication (leurs chromosomes, formés d’une seule chromatide, reconstituent à partir de cette dernière la chromatide manquante : on est donc à n2q). Une fois leur matériel génétique dupliqué, il y a fusion des noyaux (caryogamie) et l’on obtient une cellule à 2n2q. B- La reproduction sexuée est à l’origine d’un brassage génétique 1- Chez les organismes haploïdes Le brassage du matériel chromosomique chez un champignon comme Sordaria est révélé par la disposition des spores jaunes et noires dans les asques. Les crossing-over et les positionnements aléatoires des chromosomes et des chromatides expliquent les différents regroupements observés. Formation d’asques de type 4/4 : Formation d’asques de type 2/4/2 ou 2/2/2/2 : 2- Chez les organismes diploïdes a- Le brassage intrachromosomique Le crossing-over, qui s’effectue en prophase I, est responsable du brassage intrachromosomique. Il est à l’origine des cellules haploïdes de type recombiné, c’est-à-dire qu’elles représentent de nouvelles associations alléliques. S’il n’y a pas eu de recombinaison, les gamètes obtenus sont dits de type parental. Suite à leur appariement lors de la prophase I, les chromosomes homologues se séparent, sauf au niveau de contacts particuliers, les chiasmas. Les chiasmas correspondent à des zones où se produisent des échanges entre deux chromatides de chromosomes homologues. Le brassage intrachromosomique : b- Le brassage interchromosomique Les paires de chromosomes homologues ont un comportement indépendant lors de leur séparation en anaphase I. La répartition au hasard des chromosomes de part et d’autre du plan équatorial assure un brassage interchromosomique lors de la première division de méiose. Les chromosomes subissant ce brassage ont pu déjà être remaniés par des crossing-over. Dans ce cas, il y a également brassage interchromosomique lors de l’anaphase II. Il y a donc une multiplication des effets des deux types de brassages, augmentant ainsi la diversité génétique obtenue chez les nombreux gamètes. Le brassage interchromosomique : c- Le rôle de la fécondation Au cours de la fécondation, la rencontre d’un gamète mâle et d’un gamète femelle se fait au hasard. Chaque gamète obtenu par méiose est donc susceptible de s’unir. Par conséquent, la fécondation amplifie les deux types de brassage de la méiose. Chez un organisme diploïde, les brassages génétiques associés à la fécondation conduisent à l’unicité génétique des individus. II- Innovations génétiques et évolution A- L’origine du polymorphisme 1- La notion de polymorphisme Tous les individus d’une espèce possèdent les mêmes gènes. Toutefois, il existe des variations individuelles des gènes, les allèles. Ces versions du gène sont localisées au même endroit sur les chromosomes (locus). L’ensemble des différents allèles d’un même gène au sein d’une population correspond au polyallélisme. Au sein d’une espèce, la fréquence des allèles est variable. On dit qu’un gène est polymorphe lorsqu’il possède au moins deux de ses allèles en fréquence supérieure ou égale à 1%. Le polymorphisme génique est donc une source de variabilité des individus qui, tout en ayant les mêmes gènes, ont une combinaison allélique unique. 2- L’origine du pollyallélisme : les mutations Une mutation est un changement dans la séquence nucléotidique de l’ADN. Il existe trois types de mutations : - La substitution qui correspond au remplacement ponctuel d’une base azotée par une autre. - L’addition qui résulte de l’insertion d’un ou de plusieurs nucléotides dans la séquence du gène. - La délétion ou perte d’un ou plusieurs nucléotides dans la séquence d’ADN. Une substitution d’une base azotée peut être silencieuse du fait de la redondance du code génétique c’est-à-dire qu’à un acide aminé peuvent correspondre plusieurs codons. Dans le cas d’un nouvel acide aminé obtenu, la mutation est dite faux-sens. Si il y a obtention d’un codon stop, la mutation est alors dite non-sens. Une délétion ou une addition peuvent engendrer un décalage du cadre de lecture des nucléotides qui se lisent par trois. La protéine verra alors un changement important des acides aminés la constituant. Les trois types de mutations peuvent changer la structure et/ou le fonctionnement de la protéine. Leur transmission à la descendance, ne s’effectuera que si les mutations sont faites au sein des cellules germinales. B- La création de nouveaux gènes L’étude de différents gènes similaires a permis d’établir que certains gènes ont été obtenus par duplication d’un gène sur le même chromosome ou sur deux chromosomes différents (transposition). Il en résulte la création d’un nouveau gène puisque leur localisation est différente. Pour un individu donné, il existe donc des familles multigéniques, ensemble de gènes obtenus à partir d’un gène ancestral. Les deux gènes évoluent alors indépendamment l’un de l’autre. Ils peuvent subir au cours de leur existence des mutations différentes ce qui engendre des divergences d’expression. La duplication (avec ou sans transposition) et les mutations sont source d’innovations génétiques aux conséquences phénotypiques variées. Celles-ci s’observent aussi bien au cours de l’évolution d’une espèce que pour la création d’espèces nouvelles. C- Mutations et avantage sélectif La sélection naturelle opère sur des individus différents et sur des allèles différents. La fréquence allélique des individus sélectionnés augmente, alors que celle des individus éliminés diminue. Finalement, c’est la population qui évolue par des variations de fréquences alléliques. La sélection naturelle, par le jeu de facteurs du milieu, trie les individus les plus aptes ; elle privilégie donc la conservation des allèles ou associations d’allèles favorables aux conditions du moment. Certaines mutations se font sans avantage sélectif : il s’agit de mutations neutres (ex. les hémoglobines des mammifères). D- Mutations des gènes du développement et évolution 1- Création d’innovations morphologiques Les gènes du développement sont des gènes qui s’expriment durant des périodes bien délimitées et dans des territoires bien déterminés de l’embryon. De leur expression dépend la construction d’un organisme conforme au phénotype de l’espèce. Certains d’entre eux, les gènes homéotiques, sont des gènes maîtres, architectes, qui déclenchent la mise en route de processus régissant l’organisation antéro-postérieure de l’organisme. La commande des gènes homéotiques suit des règles : un gène homéotique contrôle l’expression d’un gène positionné antérieurement. Il existe une parfaite concordance entre l’emplacement du gène homéotique et l’emplacement de l’organe pour lequel il code. Les mutations touchant ces gènes, en modifiant la durée de leur expression et les territoires où ils s’expriment, entraînent des changements radicaux dans la morphologie de l’animal. On peut même parler de changement du plan d’organisation. 2- Evolution de la lignée humaine ? Le trou occipital est en position avancée chez le jeune Chimpanzé (en relation avec une bipédie relativement fréquente), puis se déplace progressivement vers l’arrière, imposant la quadrupédie de l’adulte. Les caractères typiquement simiens se développent pendant cette période : bourrelets susorbitaires, canines en crocs, mâchoire projetée vers l’avant… Chez l’Homme, cette phase est plus lente, de telle sorte que le développement est tronqué, ce qui maintient une morphologie crânienne juvénile. L’importante capacité crânienne de l’Homme serait due à une phase embryonnaire beaucoup plus développée que chez le singe (8 semaines contre 2 semaines), permettant la mise en place de beaucoup plus de neurones. On parle d’hétérochronie (modification de la durée ou de la vitesse du développement au cours de l’évolution). Ces périodes de développement semblent être codées par des gènes de développement.