Résumé de la recherche

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Résumé de la recherche – Éthique
L’équipe de la thématique Éthique du projet VP-Net devait élaborer un cadre
multidisciplinaire permettant de mieux saisir le contexte éthique des soins de fin de vie,
d’après les personnes ayant des déficiences de longue durée, des maladies chroniques et
d’après les personnes âgées qui sont confrontées à des obstacles pour accéder aux
services, aux informations et aux soutiens communautaires. Ces travaux ont été axés sur
les secteurs suivants : les questions d’éthiques dans la prise de décision préalable et la
nomination de mandataires; l’impact de l’enseignement médical et de la socialisation
informelle sur l’approche adoptée par les étudiants en médecine en ce qui a trait aux
décisions de fin de vie visant les des personnes avec des déficiences; l’impact des
obstacles contrecarrant l’accès des membres des diverses communautés aux soins
palliatifs; et la valeur des forums publics inclusifs et sécuritaires comme tribunes
d’analyse des politiques et cadres décisionnels contestés dans l’éthique en fin de vie.
Directives préalables pour les soins de santé et nomination de mandataire
Des décisions positives et négatives peuvent être faites en fin de vie en ce qui concerne
les traitements médicaux. On peut demander la cessation des traitements (décisions
négatives) ou leur maintien (décisions positives), mais les médecins ne sont légalement
pas obligés de poursuivre des traitements qu’ils jugent inutiles. Le pouvoir décisionnel
quant aux traitements que choisira une personne pour la fin de sa vie est également limité
par le fait que les mourants n’ont pas le temps, ni les ressources ni la capacité
fonctionnelle de participer activement aux décisions visant la prescription, le maintien ou
l’interruption des traitements de survie. Selon notre recherche, les limites des cadres
judiciaires actuels servant à préciser les choix personnels pour les traitements de fin de
vie et la sous-utilisation connue des nominations de mandataires ont suscité une très
grande insatisfaction.
Les directives préalables ne doivent pas être seulement perçues comme des contrats
légaux, ayant force obligatoire pour les parties, car les choix prévisionnels d’une
personne risquent d’être interprétés par les fournisseurs de soins, les membres de la
famille et les mandataires légalement nommés. Les directives préalables incluant des
gabarits détaillés permettant aux particuliers de préciser les traitements spécifiques qu’ils
désirent recevoir, peuvent ne pas répondre aux besoins réels des mourants. Ces types de
traitements sont souvent limités et peuvent ne pas intégrer la possibilité d’anticiper les
besoins futurs dans des situations impliquant des développements incertains en soins
intensifs ou palliatifs.
D’autre part, des directives préalables plus généralisées risquent d’être moins spécifiques
quant aux préférences de traitements et peuvent donc être mal interprétées par les
membres de la famille et les fournisseurs de soins de santé. Elles peuvent aussi être
contestées quand l’évaluation de l’efficacité de traitement de survie éventuelle (comme la
ventilation artificielle ou la dialyse rénale), faite par le patient, diffère de l’évaluation du
mandataire et/ou du médecin traitant, quant à l’efficacité ou l’inutilité du traitement
préalablement sélectionné par le patient. Les gens ne sont pas souvent informés sur le
contenu des directives préalables qu’ils approuvent en signant ces documents.
Des problèmes d’interprétation et des conflits encore plus apparents sur la faisabilité,
l’efficacité et le contexte éthique peuvent surgir quand les médecins et les membres de la
famille disconviennent de la signification des déclarations du patient quant aux
traitements préférés. L’ambigüité et les conflits peuvent aussi surgir lorsque dans ses
directives préalables plus généralisées, le patient a lié la prestation ou la poursuite du
traitement à une possible récupération d’un niveau spécifique de fonctionnement ou de
qualité de vie. Les directives préalables n’obligent pas les fournisseurs de soins de santé à
administrer un traitement spécifique ou un type quelconque de soins de soutien. Ces
professionnels de la santé appliqueront vraisemblablement les modalités de ces directives
si le patient ou son mandataire a préalablement communiqué ses valeurs et ses
préférences quant aux traitements à administrer.
En général, les gens n’actualisent pas leurs directives préalables, ce qui amène les
membres de la famille à penser que ces instructions désuètes ne traduisent pas vraiment la
pensée actuelle du patient. Il arrive aussi que le personnel soignant ignore carrément
l’existence de telles directives, ce qui altère son efficacité.
La prise de décision par les mandataires peut également s’avérer complexe parce que les
personnes handicapées ont souvent été séparées de leur famille d’origine ou vivent dans
des établissements de soins prolongés. N’ayant qu’une connaissance limitée des valeurs
ou de la vie de la personne dont ils vont devoir s’occuper et au nom de laquelle ils
devront prendre des décisions en tant que mandataires, les membres de la famille se
heurteront à des difficultés décisionnelles d’options de traitements de fin de vie. Devant
cette absence de clarté quant au rôle des membres de la famille/cercle de soutien ainsi
que devant le manque de clarté ou de capacité quant à leur rôle en tant que défenseur ou
mandataire, il faudra sans doute se tourner vers les soignants non professionnels pour
décider de l’abstention ou de l’interruption du traitement de survie.
L’équipe de recherche de la thématique Éthique s’est principalement concentrée sur
l’établissement d’un cadre permettant aux patients de préciser, à l’avance, leurs
préférences quant aux traitements, ou non traitement, de fin de vie. Ce cadre a été révisé
au cours du projet afin de favoriser la discussion sur les préférences de soins de courte
durée dans des cas de soins actifs et la discussion avec les soignants dans les cas de soins
de fin de vie. Des alternatives et des formats plus habilitants de directives préalables et
de relations avec les mandataires s’en sont dégagés, incluant des outils décisionnels
permettant entre autres, afin d’interpréter des directives préalables conventionnelles,
d’enregistrer et de communiquer les témoignages des patients. Les résultats de nos
recherchent soutiennent, sans controverse aucune, la nomination de mandataires
médicaux légaux chargés de représenter les personnes incapables de prendre des
décisions quant à leurs soins de santé. (Wiebe 2005).
Impact de l’enseignement médical sur les considérations déontologiques des médecins
et des étudiants en médecine dans le processus décisionnel en phase terminale.
Les considérations déontologiques appliquées par les médecins dans le processus
décisionnel de fin de vie influenceront certainement les traitements administrés aux
personnes handicapées. Selon nos recherches, les médecins doivent acquérir une plus
grande compréhension des déficiences dans un contexte social et politiques des obstacles
structurels et tenir compte de l’impact des politiques professionnelles et juridiques sur
les options offertes. (Kaufert et al, 2010)
Notre analyse documente le besoin d’inclure, dans les études sur la condition des
personnes handicapées, une formation en bioéthique intégrant le modèle social du
handicap et les préceptes du paradigme de vie autonome. Notre recherche a confirmé la
présence continue « d’un programme caché » dans l’enseignement médical, qui en
renforçant l’importance de l’approche pragmatique aux solutions cliniques et
« empiriques » pour les déficiences et maladies chroniques, et en occultant quelque peu
le contexte social et politique des déficiences socialement construites, encouragent la
médicalisation en fin de vie.
Nos recherches confirment l’impact de l’enseignement médical sur la connaissance des
déficiences et sur considérations éthiques appliquées dans les prises de décision. Selon
les données, cette orientation peut influer sur les relations médecins-personnes
handicapées et façonner la capacité des docteurs de comprendre la vie et les valeurs de
ces personnes de manière à faciliter la coparticipation aux décisions médicales, incluant
les soins en fin de vie.
Surmonter les obstacles aux soins palliatifs auxquels sont confrontés les membres des
diverses communautés
L’accès aux soins palliatifs et aux hospices s’est accru au cours des trois dernières
décennies, mais pas pour les membres de toutes les collectivités. Dans ses recherches,
l’équipe de la thématique Éthique du projet VP-Net a visé les obstacles qu’affrontaient
les personnes handicapées et les membres des autres collectivités interconnectées,
définies selon leur ethnicité, leur identité indigène ou leur situation éloignée, également
défavorisés au niveau sociétal à cause d’une inégalité d’accès aux soins palliatifs.
Au Canada, les autochtones forment le groupe ayant le moins d’accès aux soins palliatifs
(Comité permanent des affaires sociales, des sciences et de la technologie, 2000). Les
résultats des recherches ont dégagé l’impact des obstacles sur le contrôle approprié de la
douleur, les limitations dans l’accès aux réseaux de soutien familial et communautaire et
la capacité restreinte de fournir des soins culturels et spirituels appropriés (du Boulay,
2007).
Parmi les principaux thèmes précisant les pré-requis pour des soins favorisant la « dignité
de la mort », relevons :
« Une belle mort dans le contexte traditionnel est un voyage spirituel nous amenant à
« rentrer chez soi », retrouver ses origines et son peuple. Ce qui implique que
l’environnement médical du mourant offre un espace physique et émotionnel sécuritaire
pour la famille élargie et les pratiques spirituelles. » (Kaufert et al, 2011 :4)
« Ces défis sont beaucoup plus intenses dans les collectivités nordiques et chez les
Premières Nations où l’absence de possibilité de gestion de la douleur et des soins
personnels exige de quitter la communauté pour se retrouver dans un environnement
urbain n’offrant que peu de soutiens au mourant » (Kaufert et al, 2011 :18)
Espace éthique sécuritaire : utilisation des forums publics inclusifs pour
comprendre les politiques contestées et les cadres décisionnels en ce qui a trait à
l’éthique en fin de vie.
La composante « Espace éthique sécuritaire » de la collaboration thématique transversale
a été axée sur l’envergure déontologique du processus décisionnel et sur les expériences
des personnes handicapées, des fournisseurs de soins de santé, des membres de la famille
et d’autres intervenants facilitant la prise de décisions. Elle a culminé, aux fins de
dialogue, en un forum d’une journée réunissant l’équipe de recherche, des personnes
handicapées, des professionnels de la santé et des décideurs.
Pendant la recherche, le Collège des médecins et chirurgiens du Manitoba a publié un
Énoncé politique (2008) confirmant le pouvoir du médecin dans les cas de décisions
conflictuelles sur l’abstention ou l’interruption du traitement de survie. Cet Énoncé, jugé
problématique par de nombreux défenseurs des personnes handicapées, a servi de creuset
aux travaux déontologiques subséquents.
Les cadres éthiques et les politiques contestées sur les décisions d’abstention ou
d’interruption de traitement de survie peuvent influer sur les perspectives des soignants et
des patients transférés dans des établissements de soins palliatifs. Actuellement au
Canada, la Loi établit clairement le droit du patient de refuser ou d’interrompre le
traitement médical, nonobstant l’opinion du médecin à cet égard. (Rodriguez, 1993).
Mais la loi est beaucoup moins précise quand il s’agit de savoir si un médecin a
unilatéralement de droit de s’opposer à la volonté du patient ou de sa famille et de
refuser d’administrer un traitement.
Cette initiative avait essentiellement pour but d’élaborer un processus unique
d’application des connaissances et d’en évaluer l’impact, par le biais d’un forum
communautaire où toutes les collectivités intervenantes pourraient, dans un espace
accessible et sécuritaire, débattre de l’éthique en fin de vie et des champs contestés
politiques professionnelles. Le concept de « l’Espace éthique sécuritaire », établi par le
bioéthicien Cree, le professeur Willie Ermine (2007), a été appliqué au cours de cet
événement.
L’importance de bien voir l’application des connaissances et l’espace éthique comme des
procédures démocratiques, non contradictoires, facilitant la discussion entre les
professionnels de la santé et les membres de la collectivité, est cruciale pour la poursuite
du projet. L’intérêt suscité avant, pendant et après la conférence, a clairement établi le
besoin de débats sur l’éthique et les décisions en fin de vie entre et parmi les
universitaires, les fournisseurs de soins de santé et les personnes vulnérables. (Kaufert et
al, sous presse).
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