résumé de thèse - Département Sciences économiques et sociales

Résumé de Thèse Abel François
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RESUME DE THESE
ECONOMIE POLITIQUE DES RESSOURCES AFFECTEES AUX CAMPAGNES
ELECTORALES: ANALYSE THEORIQUE ET EMPIRIQUE
Abel François,
Soutenue le 10 décembre 2003, Université Paris I Panthéon-Sorbonne
Le projet scientifique de cette thèse est de procéder à une analyse économique des
campagnes électorales. Ces dernières interrogent l'économiste de deux manières : la première
concerne l'engagement de ressources monétaires durant les périodes électorales, et la seconde
concerne l'allocation de ressources en temps aux activités électorales, et plus généralement
politiques.
En premier lieu, la présence d'argent dans les campagnes soulève les questions de la
détermination de son niveau et de son efficacité. En d'autres termes, l'apport de ce travail et plus
généralement de l'économiste concernant l'argent et les élections repose sur trois éléments :
expliciter la prise de décision des candidats concernant leurs dépenses et les déterminants de ce
calcul ; expliciter et établir le lien entre les dépenses d'un candidat et les suffrages qu'il récolte ; et
enfin, expliciter et établir l'incidence des dépenses électorales sur la participation d'un électorat.
En second lieu, l'engagement des candidats durant les campagnes électorales soulève la
question du coût d'opportunité du temps consacré aux activités électorales. En effet, le fait
d'utiliser ce temps dans des activités politiques prive l'homme politique des rémunérations
associées à un usage alternatif de ce temps. L'apport de l'économiste est alors de mettre en
évidence l'arbitrage entre les activités électorales et les activités économiques, les facteurs
influençant l'allocation du temps et l'évolution de l'arbitrage dans le temps.
Tout l'enjeu et toute l'ambition de ce travail résident dans les réponses apportées à cet
ensemble de questions.
La méthode utilisée pour y parvenir est simple, elle mobilise un corpus scientifique riche
et dense depuis les travaux pionniers d'Anthony Downs. Travaux majoritairement anglo-saxons
qui se situent au croisement de plusieurs disciplines, tout en s'appuyant sur les méthodes, les
outils et les objets de la science économique. La méthode s'inscrit ainsi dans l'analyse économique
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des décisions publiques et politiques, ou économie politique, et de ce fait possède une démarche à
la fois théorique, institutionnelle et empirique. En conséquence de quoi, il s'agit d'un travail
résolument pluridisciplinaire.
La méthode s'articule en trois temps. Dans un premier temps, il s'agit de construire un
modèle théorique explicatif utilisant la microéconomie appliquée, c'est-à-dire reposant sur les
décisions individuelles et sur la rationalité des acteurs. Dans un deuxième temps, il s'agit d'inscrire
ce modèle dans le processus politique français, en prenant en compte théoriquement l'incidence
du cadre réglementaire et institutionnel sur les décisions individuelles. Enfin dans un troisième
temps, il s'agit de tester empiriquement le modèle ainsi amendé par l'utilisation circonstanciée de
l'économétrie.
La thèse comporte trois parties plus ou moins indépendantes, qui chacune traite des
questions économiques soulevées par les campagnes électorales. Ainsi, la première partie s'attache
à déterminer d'une part les facteurs explicatifs de la dépense électorale pour les élections
françaises et d'autre part les effets de cette dépense en termes de suffrages. La seconde partie
s'interroge sur les effets de la dépense à un niveau plus agrégé et en termes de participation des
électeurs aux scrutins. Enfin, la troisième traite de la question du financement personnel des
hommes politiques et de leur engagement dans les activités électorales et politiques.
Partie I : Détermination et efficacité électorale des dépenses de campagne
La première partie de la thèse se compose de deux chapitres distincts : le premier
(chapitre I) soulève la question des déterminants des dépenses électorales aux élections
législatives françaises, le second (chapitre II) celle de l'efficacité de cette dépense.
L'analyse théorique pour la France des déterminants des dépenses de campagne soulève
d'emblée un problème comparativement à la littérature existante, qu'elle soit théorique ou
empirique (chapitre I). Il n'existe pas en France de marché aux contributions électorales, des
groupes d'intérêt proposent leurs financements en échange de positions qui leur sont favorables
ou en échange d'un accès au processus politique. En effet, le financement par des personnes
morales, publiques ou privées, est interdit. En contrepartie, il existe un mécanisme de
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financement public des campagnes électorales et des partis politiques. Dès lors, le financement de
la vie politique française ainsi que les activités électorales, notamment en termes de propagande,
apparaissent particulièrement réglementés.
Par conséquent, la modélisation des comportements de dépense des candidats aux
élections législatives françaises doit prendre en compte l'incidence de la réglementation et de la
politique publique en matière électorale. Le modèle repose sur un arbitrage simple entre les gains
et les coûts de la dépense électorale. Les gains sont principalement de deux sortes : des gains
personnels pour les candidats et des gains pour le parti politique. Dans les deux cas, le gain pour
un candidat est associé aux suffrages obtenus. Etant donné que les suffrages récoltés dépendent
du niveau de dépense, les hommes politiques déterminent leur dépense en fonction de leur gain
attendu en termes de suffrages.
Les coûts de la dépense semblent, en revanche, plus affectés par la réglementation. Si un
candidat dépasse ou non les 5% des suffrages exprimés, ses dépenses financées personnellement,
dans la limite de la moitié du plafond de dépense, lui seront remboursées. De même, la source du
financement influe sur son coût, puisque seules les apports personnels non remboursés sont
coûteux. Il en résulte que la maximisation du gain net du candidat est profondément influencée
d'une part par la réglementation, notamment et surtout par l'anticipation d'un remboursement
public, et d'autre part par les financements obtenus des partis politiques et des électeurs.
L'étude empirique menée sur les dépenses des 6197 candidats présents aux élections
législatives de 1997 permet de valider ces résultats théoriques. Ainsi, la dépense est simultanément
influencée par les suffrages anticipés par les candidats, les candidats importants étant plus
sensibles à cette influence que les autres, ainsi que par le coût induit par cette dépense, c'est-à-dire
par les apports personnels non remboursés. De plus, l'articulation entre les trois principales
sources de financement (les apports personnels, les apports des électeurs et les apports partisans)
est également influencée par la réglementation. Selon l'anticipation de remboursement et le
niveau des apports personnels, les deux dernières sources sont des substituts ou des compléments
à la première.
Le second chapitre s'attache à fonder théoriquement et empiriquement l'incidence de la
dépense électorale sur les résultats en termes de suffrages des candidats. Ainsi, le dépassement du
modèle déterministe du vote par l'introduction de l'incertitude pour les électeurs concernant le
positionnement des candidats soulève la question de l'information des citoyens. En présence
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d'incertitude, ces derniers appréhendent la position des candidats en termes de probabilité. La
distribution de probabilité est alors profondément influencée par le degrés d'incertitude des
électeurs. De même, la probabilité de voter pour un candidat, étant donné la perception
probabilisée de sa position, s'accroît avec la diminution de l'incertitude et l'augmentation de
l'information. Dès lors, tout candidat a intérêt à produire de l'information sur ces caractéristiques
politiques et personnelles. Ce résultat théorique explique d'une part la production d'information
par les candidats, qui est financée par leur dépense électorale, et d'autre part l'utilité pour les
électeurs de la campagne électorale.
L'information produite et diffusée au cours des campagnes électorales peut être de deux
ordres et avoir deux incidences, elle peut utiliser différents supports de diffusion, et elle peut
avoir des contenus de différentes natures.
En effet, l'information produite par les hommes politiques peut être informative, c'est-à-
dire porter sur les caractéristiques politiques du candidat, et/ou persuasive, portant sur les
caractéristiques propres du candidat. L'information ainsi produite, peut avoir des effets persuasifs
ou mobilisateurs sur l'électorat, selon que les électeurs évaluent les hommes politiques sur des
critères uniquement politiques, sur des critères uniquement personnels ou sur les deux à la fois.
De plus, l'information produite peut utiliser au moins trois vecteurs de diffusion.
Premièrement, les candidats peuvent prendre en charge eux-mêmes la production et la diffusion
aux travers d'activités de propagandes directes. Deuxièmement, la diffusion peut être assurée par
l'intermédiaire des médias au travers de leur couverture des campagnes électorales. Enfin, les
échanges entre les électeurs peuvent également être des supports de diffusion d'information
concernant les candidats.
Enfin, l'information peut porter sur le programme politique et les enjeux de la campagne
électorale ou sur les caractéristiques du candidat, telles que son origine géographique ou
socioprofessionnelle, ses autres mandats ou son affiliation partisane et idéologique.
Une fonction théorique peut dès lors être proposée, qui relie les suffrages obtenus (ou la
probabilité d'élection) par un candidat avec le montant de ses dépenses électorales, qui quantifie
l'engagement du candidat durant la campagne et sa production d'information. La fonction
microéconomique du vote ainsi définie connaît des rendements de la dépense constants ou
décroissants et qui peuvent éventuellement être négatifs. Par ailleurs, son niveau est affecté par
les autres déterminants des comportements électoraux. Ainsi, les facteurs explicatifs traditionnels,
comme les récurrences géographiques et historiques, les caractéristiques socioéconomiques des
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circonscriptions, et les facteurs institutionnels de mode de scrutin, influent sur le niveau de la
relation reliant les suffrages et les dépenses. De la même manière, les dépenses des autres
candidats en concurrence affectent négativement la relation.
La fonction de vote microéconomique a donné lieu à un nombre très important de tests
économétriques, principalement pour les pays anglo-saxons. La problématique réside dans le
calcul du rendement marginal de la dépense. Les premières études ont ainsi montré que la
dépense des candidats sortants avait un rendement négatif. L'explication apportée repose sur
l'idée que ces derniers dépensant plus et plus tôt, ils se trouvent sur la phase descendante de la
fonction. Ces résultats, de même que l'explication avancée, ont été remis en cause
méthodologiquement par la mise en évidence d'un biais d'endogénéité dans l'estimation de l'effet
de la variable de dépense. Les études utilisant une détermination simultanée des suffrages et du
niveau de dépense concluent alors à l'existence d'un rendement marginal positif.
La suite de l'étude se propose dès lors de tester l'existence de cette relation entre dépenses
et suffrages pour la France, et plus précisément pour les élections législatives de 1997. Trois
études économétriques sont menées. La première cherche à expliquer la probabilité d'élection de
l'ensemble des 6197 candidats présents au premier tour des élections à l'aide d'une estimation
logit. Il apparaît alors que la dépense électorale influe de manière importante sur la probabilité
d'élection. Ensuite, la population est restreinte dans un premier temps aux candidats importants
et dans un second temps aux candidats présents au second tour, dans le but de renforcer le
résultat de l'incidence de la dépense.
La seconde étude explique successivement les suffrages des représentants des cinq
principaux partis politiques français (PC, PS, UDF, RPR, FN). Ceci permet de mettre en évidence
d'une part les différences de rendement de la dépense selon l'affiliation partisane, et d'autre part
les effets croisés négatifs des dépenses des candidats. Des hiérarchies de concurrence entre les
candidats sont alors dégagées.
La dernière étude s'efforce d'estimer l'impact de la dépense des 503 candidats sortants sur
leurs suffrages. La comparaison des estimations par les moindres carrés ordinaires et par les
doubles moindres carrés, du fait de l'endogénéisation de la variable de dépense du sortant, met en
évidence la présence d'un biais d'endogénéité et confirme l'existence de rendement positif et
décroissant.
Ainsi, les deux études menées dans cette premier partie permettent de mettre en évidence
d'une part les déterminants rationnels des comportements de dépense, et notamment des
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