Anthropologie sociale et culturelle Première partie : ASPECTS ET TENDANCES DE L’ANTHROPOLOGIE CONTEMPORAINE Chapitre I : Le champ de l’anthropologie Anthropologie = étude de l’homme Étude de l’espèce humaine dans sa totalité 1. L’anthropologie physique (ou anthropobiologie) S’intéresse à l’espèce humaine en tant qu’une espèce animale parmi d’autres. Cette biologie humaine s’occupe principalement de l’histoire des caractéristiques physiques de l’homme : - l’étude de l’homme en tant que résultat de l’évolution humaine (paléontologie humaine) - L’étude et l’analyse des variations de populations humaines 2. Influence de la culture sur l’évolution physique L’homme a influencé son évolution biologique inconsciente en faisant intervenir des facteurs culturels (ex : règles de mariage qui excluent certaines cultures). L’évolution physique des hommes résulte de la « culture » des sociétés. Tout le comportement humain a été à la fois génétique et culturel. L’anthropobiologie entretient d’ailleurs des rapports étroits avec les sciences sociales. Facteurs culturels Influence sur le comportement et l’évolution humaine Facteurs naturels Temps Ex : primatologie : sciences qui étudie le comportement de primates autres l’homme, l’étude comparative de ceux-ci éclaire d’un jour nouveau le comportement social et par là sans doute le comportement des groupes humains les plus anciens. Il y a donc de nombreux rapports entre les deux grands aspects de l’anthropologie, celui de l’homme en tant que membre du règne animal et celui de l’homme en tant que membre d’un groupe social. C’est sur la distinction entre aspects naturels et culturels de l’étude de l’homme que se fonde la distinction entre les deux champs principaux de l’anthropologie : - anthropologie physique - anthropologie culturelle 3. L’anthropologie culturelle C’est la branche de l’anthropologie qui étudie les aspects du comportement humain qui font partie de l’héritage culturel et qui sont donc appris (par opposition à ce qui sont hérités génétiquement). L’anthropologie culturelle s’intéresse à la culture en général, celle-ci peut être considéré comme un ensemble de connaissances acquises en tant que membre d’une société. L’anthropologie culturelle part de l’étude d’un objet pour arriver à l’étude d’une société. 1 L’anthropologie sociale étudie l’organisation sociale d’une société. Elle part des institutions pour en arriver aux objets et a le même but que l’anthropologie culturelle c'est-à-dire cerner l’homme dans sa totalité. L’anthropologie culturelle se divise elle-même en plusieurs branches : a. L’ethnographie : C’est la base de l’anthropologie culturelle. Il s’agit de la description des populations. Au départ, la connaissance des sociétés traditionnelles provenait de témoignages de voyageurs. Par la suite, les scientifiques se déplacèrent pour étudier les différentes cultures directement sur place. Ce travail de terrain au cours duquel le chercheur observe puis écrit se termine par une monographie c'est-à-dire une description d’un groupe observée par le chercheur. L’ethnographie englobe le classement, la description et l’analyse de phénomènes culturels particuliers (objets, coutumes, traditions) b. L’ethnologie : L’ethnologie est le prolongement de l’ethnographie, elle marque un premier pas vers la synthèse. C’est la science des peuples, de leur culture, de leur histoire en tant que groupe. Elle étudie les relations entre les hommes et leur culture, entre une population et son environnement et entre différentes populations et cultures. Elle s’est plus spécialement intéressée aux populations ayant une culture différente de la notre. Elle se divise en plusieurs domaines particuliers : L’anthropologie sociale qui s’intéresse aux structures, institutions et organisations sociales. L’anthropologie économique qui s’intéresse aux mécanismes économiques L’ethnoscience qui étudie les taxonomies c’est-à-dire la façon dont les peuples ont géré la classification de leur univers L’ethnoécologie qui analyse les relations concrètes entre le groupe et son milieu c. Le folklore : C’est l’étude de la culture populaire au sein des sociétés complexes modernes. 2 Le champ des études anthropologiques s’organise autour de 4 pôles : - le pôle naturel - le pôle culturel - la synchronie (étude des sociétés à un moment donné de leur histoire, généralement au présent) - la diachronie (étude des sociétés à travers le temps) CULTURE Archéologie Histoire DIACHRONIE Ethnographie Ethnologie Folklore Anthropologie culturelle SYNCHRONIE Anthropologie physique Axe du temps Paléontologie Anthropobiologie NATURE d. L’archéologie Classique ou préhistorique, l’archéologie s’intéresse aux cultures du passé ainsi qu’à leur évolution dans le temps. On peut dire que l’ethnologie commence là où l’archéologie s’arrête. Elles ont établie un système de renseignement réciproque. L’archéologie classique s’intéresse au passé des civilisations classiques qui ont connu l’écriture. e. La linguistique C’est la science qui étudie le langage par lui-même et pour lui-même. La langue est à la base de toute communication. AU départ, elle s’intéressait à l’étude des langues indo-européennes. Par la suite, en raison des enquêtes sur le terrain, il a fallu développer une notation phonétique pour les langues non- écrites. Elle se subdivise en 2 niveaux : La linguistique descriptive (Synchronie): qui décrit la grammaire, le vocabulaire etc. d’une langue à un moment donné La linguistique comparative (Diachronie) : qui compare deux langues afin d’établir des points communs tant sur le plan historique que généalogique. (reconstituer l’histoire des langues) 3 4. Rapport entre l’anthropologie et les autres sciences humaines a. L’histoire Contrairement à l’anthropologie qui admet que toute culture est le reflet du passé mais qui se positionne sur le plan de la synchronie (étude des sociétés actuelle), l’histoire travaille quant elle sur le plan de la diachronie. Au départ, l’histoire classique reconstituait uniquement le passé à partir des textes. Par après, suite aux enquêtes sur le terrain, l’ethnohistoire se constitua avec ses méthodes propres pour étudier les peuples sans écriture. b. La sociologie C’est l’étude des sociétés humaines (comme l’anthropologie). Son champ d’étude se limite aux sociétés occidentales ou à celle dont fait partie l’observateur. Elle essaye d’avoir une vue globale, non limitée mais elle garde cependant son point de vue occidental et essaye de l’élargir à d’autre groupes humains. L’anthropologie travaille sur des petits groupes humains avec lesquels il a un contact direct tandis que le sociologue étudie les groupes humains où de nombreuses interactions interviennent. Il travaille à l’aide de statistiques qu’il n’a pas lui-même récolté. c. La psychologie Elle étudie l’homme dans une optique individuelle tandis que l’anthropologie le fait dans une optique culturelle. L’anthropologue examine l’homme dans sa vie de tous les jours or la psychologie travaille par expérience dirigée et essaye de déterminer la réaction de l’homme face à une situation précise. En conclusion : L’anthropologie vise à une connaissance globale de l’homme (approche holistique). Elle s’intéresse plus particulièrement aux populations traditionnelles dont elle veut revaloriser la culture. 5. Méthodes et objets de l’anthropologie culturelle a. L’enquête sur le terrain Elle est à la base de toute recherche ethnologique et doit suivre le principe de l’observation participante c'est-à-dire que la simple observation ne suffit pas. Pour comprendre certaines pratiques, il faut y participer. L’observateur participant doit bien sure se soustraire à certaines règles afin de faciliter sa tâche. Il doit donc connaître la langue employée par la population qu’il étudie. L’utilisation d’un interprète n’est pas adéquate car il se peut que celui-ci déforme les paroles des informateurs. De plus, il se peut que certaines personnes soient gênées par la présence d’un interprète de son groupe. Il doit au moins effectuer un cycle annuel afin d’étudier les différences entre chaque saison. Il doit faire attention à la dichotomie sexuelle. Certaines pratiques sont différentes pour les hommes et pour les femmes. Il doit arriver seul car la présence d’un groupe risquerait de brusquer la population et de compromettre l’intégration. Son intégration n’est pas chose aisée car il est curieux, il pose des questions, il prend des notes… bref, il dérange. En réalité l’observation participante pose un gros problème qui est celui de la subjectivité. En effet, l’ethnie étudiée devient le centre du monde. Il a donc tendance à idéaliser la situation et à minimaliser les tensions qui pourraient exister. De plus sa présence peut provoquer des changements. 4 b. Comment définir les peuples qu’étudient les anthropologues ? Quel terme choisir ? Souvent en raison de l’éloignement géographie, on utilise les termes d’ « indigènes », « aborigènes » ou « autochtones » signifiants « habitants du pays » donc nous le sommes tous. Les termes péjoratifs tels que « barbares » ou « sauvages » sont régulièrement utilisés lorsqu’on ne veut pas reconnaitre l’autre comme pleinement humain. Certaines ethnies se surnomment elles-mêmes « les hommes » ou « les excellents » et appellent les autres « chiens » ou « œufs de poux » allant parfois jusqu’à ne pas reconnaitre leur existence. Habituellement on utilise des termes technologiques tels que « primitifs » qui a pris un sens négatif, ou « société archaïques » qui est plus ou moins synonyme. On parle de « société non civilisée » mais cela n’a aucun sens puisque toute société a une culture, une civilisation ; ou encore de « société sans machine », encore faut-il définir ce qu’est une machine ; de « société sous développée » ou « en voie de développement » où on part du fait que notre société est le sommet du développement. On parle aussi de « société sans écriture » or des pictogrammes sont utilisés par de nombreux peuples. Tous ces termes sont, à degrés divers, péjoratifs, ils mettent l’accent sur de prétendus manques par rapport à la société occidentale. En réalité, le terme de « sociétés traditionnelles » semble le plus approprié, soulignant ainsi qu’elles sont tournée vers les traditions et les usages anciens du groupe. Les critères qui distinguent les sociétés traditionnelles des nôtres : Critères sociologiques : les sociétés peuvent êtres classée selon leur complexité. C’est une théorie qui veut que l’homme passe du plus simple au plus compliqué. Critères économiques : ses critères proviennent de l’évolutionnisme. L’évolution des techniques de production d’aliment aurait été linéaire (cueilleur, chasseur, pasteur, agriculteur) mais cette évolution est à rejeter. Critères moraux : - l’homme primitif ne connaitrait pas la relation de cause à effet, or il l’a connait, seulement cet enchainement de cause à effets lui est moins évident et il lie entres elles des choses sans rapports les unes avec les autres. Nos conclusions sont mieux fondées seulement parce que la tradition de notre civilisation est devenue progressivement plus scientifique. - le critère serait axé, pour d’autres, sur l’absence de valeurs idéales mais ni eux ni nous n’avons le monopole de l’immoralité ou de la moralité. Critères de l’absence d’écriture : Un type de repère commode serait la possession d’écriture. L’écriture favorise l’évolution grâce à l’accumulation de connaissances diversifiées. L’absence d’écriture freine les sociétés dans la conservation et la transmission du savoir. C’est ainsi que les sociétés sans écriture auront tendance a constamment revivre l’expérience ancestrale car ils ne se souviennent que de ces quelques génération qui les précèdent. A propos du terme de tribu et de son (mauvais) usage : Terme souvent utilisé pour désigner les groupes humains qu’étudient les ethnologues. La tribu est un groupe homogène, politiquement autonome, uni par la langue et la culture, occupant un territoire particulier, et dont les membres ont conscience d’avoir une certaine identité qui les distinguent des groupes voisins. Cette définition est contestée car elle ne se vérifie pas sur le terrain, il est en effet rare que toutes ces dimensions coïncident. 5 Le concept de tribu est une création européenne qui remonte au 18ème siècle. Il réapparait à l’époque coloniale avec le sens de groupe homogène à administrer. Pour désigner un groupe social particulier, partageant une certaine culture, on préfère le terme d’ethnie ou de groupe ethnique. Chapitre II : La diversité humaine 1. La diversité biologique a. Le concept de race Tous les hommes appartiennent à la même espèce, appelée « Homo Sapiens ». Cependant, à l’exception de vrais jumeaux, pas deux individus ne sont semblables. Les Homo Sapiens ne peuvent se reproduire avec d’autres animaux ; nous constituons donc un système génétique fermé. Par contre, au sein d’une espèce, on peut assister à des regroupements d’individus. On parlera alors de sous-espèces ou races. Les populations qui en résultent peuvent avoir une plus grande fréquence de gènes que d’autres populations. Ces sous-espèces peuvent se reproduire entre elles, échanger des gènes, ce sont des systèmes génétiques ouverts. Il n’y a pas de coupure nette entre les différentes sous-espèces. D’ailleurs, vu le grand nombre de caractères que l’on peut prendre en considération, le regroupement en races relève toujours d’une sélection arbitraire de certains caractères. En effet, il est possible que deux personnes d’une même race soient plus différentes que deux personnes de races différentes. La différenciation en sous-espèces est arbitraire (se base souvent sur des caractères physique) Les anthropologues ont donc renoncé à la notion, très abstraite, de race. Mais une diversité est bien évidemment observée au sein de l’espèce humaine. b. Origine de cette diversité L’adaptation au milieu Dans un milieu donné, la sélection naturelle va favoriser les individus présentant des caractéristiques favorables (la pression sélective du milieu va éliminer certains gènes). Le métissage Toutes les populations, par union entre leurs membres, sont soumises à un brassage génétique. Certains gènes sont acquis par intermariage. Avec l’accroissement démographique et les mouvements de populations, ces mélanges entre populations augmentent de plus en plus et les populations sont de moins en moins isolées. La dérive génétique Dans une population nombreuse, le patrimoine génétique tend à rester stable si elle est fermée et si la sélection ne joue pas. Si la population est petite, elle est beaucoup plus sujette à des changements de son patrimoine génétique, car la disparition d’un gène particulier est d’autant plus probables qu’il y peu de porteurs de ce gène dans la population. Intervient aussi l’effet fondateur, c'est-à-dire que celui qui fonde une lignée qui s’isole provoque une plus grande fréquence de ses gènes dans sa descendance qu’elle ne l’était dans le groupe d’origine. 6 Les mutations Des modifications accidentelles de la structure biochimique peuvent se produire, entraînant l’apparition de nouvelles variantes de caractères héréditaires. Intérêt anthropo-biologique : étudier la distribution, l’évolution de certains caractères permet de faire l’histoire biologique d’une population, voire d’une migration. Influence de la culture sur la « race » L’homme peut aussi modifier certaines pressions sélectives : Ex : des conventions sociales peuvent limiter le mariage en fonction de critères particuliers. Il n’y a pas de « race » plus primitives que d’autres D’aucuns croient que certaines races seraient plus primitives car plus proches des singes. C’est absurde comme le montre une comparaison entre les « blancs », les gorilles et les « noirs ». 2. Les relations entre « race » et « culture » On constate souvent que les différentes races, ou sous-espèces humaines, non seulement se ressemblent physiquement, mais se comportent de manière similaire. C’est cette corrélation apparente entre aspect physique et comportement qui est à la base de a confusion fréquente entre la culture et la race. Des gens de type semblables ne se comportent pas de la même façon parce qu’ils ont le même héritage génétique, la même race, mais bien parce qu’ils ont été exposés au cours de leur éducation à la même culture, au même environnement. Ce ne sont pas les différences génétiques entre les sous-espèces humaines qui sont la cause des différences culturelles mais bien les évolutions culturelles. Il ne faut donc pas utiliser le terme « race » quand on parle de groupes qui ont en commun la même culture, la même langue ou la même religion. Le raciste résulte plus de la diversité culturelle que de la diversité physique, les différents aspects physiques servant de points de fixation à l’irritation provoquée par les différences de comportement culturel. Les différences d’aspect physique sont souvent utilisées pour justifier des différences sociales basées sur des rapports de force ou sur la volonté de domination. Les sociétés traditionnelles ont souvent coexisté relativement pacifiquement : Soit elles prennent le parti d’ignorer les autres, les rejetant dans la non-humanité Soit, au contraire, l’étranger était perçu comme l’occasion d’élargir ses relations sociales et culturelles 7 3. La diversité culturelle Le concept de « culture » a été créé pour caractériser certains aspects du comportement qui sont particulièrement développés dans l’espèce humaine. Alors que sur le plan physique, les Homo Sapiens sont très semblables, leur comportement montre des variations considérables. Les hommes diffèrent très fort dans leur comportement. Exemples : - habitudes alimentaires (Masaïs, Américains,…) - manières à table (baguettes, fourchettes, roter en fin de repas,…) - la façon de saluer (Esquimaux, Japonais,…) - le temps (Europe : pressés, stressés,…) -… 4. Le concept de culture a. Le rôle de l’éducation Bien que l’homme ait des comportements innés, il est extrêmement démuni à la naissance et ce n’est que par imitation et par apprentissage qu’il apprend à marcher, manger, à accomplir les gestes de la vie quotidienne. Il ne cesse jamais de faire apprentissage de la vie en société, de la vie dans la société où il est né et où il vieillit. Le concept de culture s’applique à l’ensemble des comportements qui ont une caractéristique commune d’avoir fait l’objet d’un apprentissage social. b. La dimension symbolique de la culture De très nombreux aspects d’une culture sont transmis symboliquement aux membres d’un groupe donné. La façon dont les individus d’un groupe perçoivent le monde dans lequel ils vivent est donc très profondément influencée par le système symbolique qui caractérise leur culture. c. La culture : essais de définition L’anthropologue ne fait pas de différence entre culture et civilisation. Cependant, la culture est ellemême composée de sous cultures (ex : la culture français avec la culture corse, bretonne,…). Voici quelques définitions du terme « culture » : TYLOR (1871) : « la culture est un tout complexe qui inclut les connaissances, les croyances, l’art, et toutes les dispositions et habitudes que l’homme a acquises en tant que membre d’une société » LITON (1941) : « la culture c’est la somme des connaissances, des attitudes et modèles habituels de comportements qu’ont en commun et que transmettent les membres s’une société » HERSKOVITS (1955) : « la culture est la part de l’homme sans son environnement » Cette définition oppose la culture et la nature, la culture apparait come le triomphe sur la nature. DURKHEIM : « la culture est le patrimoine social » C’est-à-dire l’inventaire de l’acquis sur le plan matériel, social et spirituel des hommes vivant en société. 8 KROEBER et KLUCKHORN (1952) : « la culture consiste en des modèles de comportement, acquis et transmis par des symboles. Ces comportements constituent l’œuvre distinctive des groupes humains, et ce y compris dans la façon dont ils s’incarnent dans les artefacts. Le noyau essentiel d’une culture réside dans ses idées traditionnelles (c'est-à-dire résultant de son histoire) et particulièrement des valeurs qui y sont attachées. Un système culturel peut être considéré d’une part comme le produit de l’action, et d’autre part comme conditionnant l’action à venir. d. La culture inconsciente Une grande partie de la culture est acquise inconsciemment, elle possède son système de modèles comportementaux. Chaque groupe humain a une façon d’agir et de réagir qui lui est propre et qui lui est reconnue socialement. e. La culture réelle et la culture idéale La culture idéale est l’ensemble des normes de groupes qui sont en général violées quand elles entrent en conflit avec l’intérêt personnel. La culture réelle est explicite, c’est ce que les gens font et pensent dans leurs activités quotidiennes. Une autre différence importante est celle à faire entre « étic » et « émic ». « Etic c’est le point de vue en principe objectif de ceux qui n’appartiennent pas à la culture concernée ; par contre le point de vue subjectif des membres du groupe concerné sera dit « émic ». Kluckhorn a relevé cinq types de comportement : Le comportement obligatoire : lorsqu’à une situation donnée, il n’y a qu’une manière d’agir. Le comportement préférentiel : lorsqu’à une situation donnée, il y a plusieurs manières de réagir mais dont une est considérée comme meilleure. Le comportement typique : lorsqu’il existe plusieurs manières de réagir, toutes aussi acceptables, mais que l’une est choisie plus que d’autres. Le comportement alternatif : lorsqu’il existe plusieurs manières de réagir mais qu’aucune ne jouit d’une préférence ou d’une fréquence plus élevée. Le comportement limité : quand un certain comportement n’est acceptable que s’il émane de certaines personnes. f. Rapports entre culture et société Une société est composée d’individus, mais il serait faux de croire qu’elle n’est que la somme de ces individus. Selon Firth, « parler de société c’est insister sur l’existence d’un ensemble d’individus et sur les liens qui les unissent ; parler d’une culture c’est parler du comportement socialement acquis ». L’école américaine a mis l’accent sur le niveau culturel ‘anthropologie culturelle) et l’école anglaise sur les relations sociales (anthropologie sociale). Actuellement cette différence s’est estompée en raison du structuralisme qui a mis en parallèle les structures de la société et celle de la pensé. Radcliffe-Brown a mis en évidence que le simple changement d’un élément du système social avait des répercussions sur tout le reste du système. 9 g. La culture et le milieu naturel Il est incontestable que le milieu a une influence considérable sur la culture. Mais lorsqu’il y a déterminisme, il n’est pas aussi radical qu’on le pense. Ainsi, des populations qui semblent très proche géographiquement peuvent différer, de même des populations éloignées peuvent se ressembler en de nombreux points de vue. La modernisation a créé un déséquilibre entre et son milieu. Certaines sociétés ont radicalement changé leur paysage. Suite à l’intérêt pour l’écologie, le matérialisme, dont Marvin Harris est le chef de file, a développé une théorie selon laquelle les facteurs biologiques sont fondamentaux pour expliquer les institutions sociales mais qui ne suffisent pas pour expliquer tous les aspects de la diversité culturelle. Le matérialisme culturel est trop simpliste dans ses raisonnements. h. Universalité et diversité culturelle Chaque culture résulte d’interactions entre ses membres et d’une évolution historique qui lui est propre. Certain comportements peuvent différer selon la culture. En réalité, au départ, chaque culture a été confrontée aux mêmes problèmes fondamentaux, ce qui fait leur universalité et leur diversité provient de la manière dont elles y ont répondus. Chaque société a deux tendances : L’une de conserver, voire d’accentuer ses particularités L’autre de multiplier les affinités avec les voisins. Les différences de cultures proviennent de leur isolement géographique et des interactions entre elles. i. Aucune culture n’est supérieure Il faut juger une culture en fonction de ses propres critères et non en fonction des critères occidentaux. L’occident est ethnocentriste et a donc tendance à se croire supérieur. Cet ethnocentrisme provient aussi du fait que beaucoup de populations se calquent aux modèles européens entraînant une série d’absurdité. Cette « supériorité » nous pousse à ne considérer comme grande civilisation que celles qui ressemblent à la notre. En réalité, chaque culture a développé certains aspects et d’autres non. Pour démontrer notre « supériorité », on a souvent fait appel à la « cruauté » des sociétés traditionnelles mais il est clair qu’en matière de cruauté, notre civilisation fait aussi bien sinon mieux. De plus, notre société avec sa déshumanisation continuelle fait bien piètre figure face à la puissante solidarité des sociétés traditionnalistes. j. Les limites du concept Une culture forme un tout extrêmement complexe très difficile à cerner dans sa globalité. Son étude pose problème car elle est tout le temps en devenir. La culture d’une population est jusqu’à un certain point une abstraction dégagée par l’anthropologue. 10 Chapitre III : L’évolution de la pensée ethnologique 1. Histoire de la discipline : les précurseurs a. L’Antiquité Le début de l’ethnologie se confond avec les débuts de l’intérêt pour les cultures étrangères. Première étape surtout descriptive. Ex : Hérodote qui aborde déjà les problèmes ethnologique tel que le déterminisme géographique, la diversité des systèmes de descendance, etc. … Les Romains, tels que César ou Pline décrivent les populations qu’ils combattent. b. Le Moyen-âge Malgré les possibilités offertes par les croisades, l’Europe se replie sur elle-même et ne s’ouvre pas aux cultures extérieures. Il fallut attendre le 13ème siècle pour que les choses changent (grands voyageurs, ex : Marco Polo qui vécu 25 ans en Asie). Cependant la première théorie du déterminisme écologique est issue du monde arabe et fut proposée par Ibn Khaldoum (relations sociales joue un rôle important dans la formation des états) c. La renaissance C’est durant l’ère des grandes découvertes que l’Europe prendra conscience de l’existence d’autres cultures. Certains auteurs vont considérer les peuples exotiques comme non humain. D’autres vont les idéaliser et parler de « bon sauvages », c'est-à-dire que l’homme nait bon et qu’il se pervertit au contact de la société qui l’oblige à tenir un rôle qui l’empêche de s’identifier à la nature (Rousseau). d. Du 18ème au 19ème siècle Les voyages d’exploration se multiplient et des expéditions scientifiques se mettent à étudier les régions scientifiques. Des sociétés de savants et des chercheurs se constituent pour étudier les différentes coutumes et entreprendre une réflexion sur la diversité humaine. Ex : - La British Association for the Advancement of Science se dote d’une section d’anthropologie (1822) - Société anthropologique de Paris (1839) C’est aussi les débuts de la science préhistorique Ex : - Boucher de Crèvecœur de Perthes recueillit des outils de pierres et des ossements d’animaux. Il publie « antiquités celtiques et antédiluviennes ». Il pose le problème de l’évolution de l’humanité (l’histoire ne commence pas avec celle des Grecs et des Romains) - 1859, Darwin publie « de l’origine des espèces pas voie de sélection naturelle » l’évolution naturelle s’applique non seulement aux animaux mais aussi aux hommes. 11 2. L’évolutionnisme Il est influencé par les travaux de Darwin de la science préhistorique qui ont révélé la profondeur de l’histoire. L’ethnologie s’est développée en même temps que l’époque coloniale. Les ethnologues étudiaient les sociétés primitives pour trouver l’origine des instituions antiques. La base de la théorie est celle d’un progrès, d’une évolution humaine. Les sociétés passent par des stades déterminés, du plus rudimentaire au plus développé. Principaux représentants de la tendance évolutionniste : a. Morgan Dans son ouvrage « Ancient Society », il distingue trois grandes phases (pour les évolutionnistes, les peuples formant l’humanité passent inévitablement par les mêmes étapes): La sauvagerie La barbarie La civilisation Divisées en trois stades : Ancien (ex : stade ancien sauvagerie = cueillette, on mange cru) Moyen (ex : stade moyen sauvagerie = cuisson dans les cendres, pierres taillés) Tardif (ex : stade tardif sauvagerie = arc, flèches, vannerie) On passe de la matrilinéarité, à la patrilinéarité et ensuite à la bilinéarité. Au niveau religieux, on parle d’animisme, ensuite de polythéisme pour arriver au monothéisme. Il est l’un des premiers à s’intéresser à la parenté. b. Tylor Il s’intéresse surtout à l’ethnologie religieuse en formulant sa théorie de l’animisme : le primitif aurait pris conscience de l’existence d’un esprit invisible qui est le double du corps visible. Tous les objets inanimés sont en fait porteurs d’une vie invisible. Cette théorie s’est développée vers le polythéisme puis vers le monothéisme (modèle évolutif des religions). Il a aussi confirmé la théorie des survivances, qui confirme l’existence de stades successifs dans l’évolution culturelle (les survivances sont les vestiges de stades culturels antérieurs que l’on rencontre dans une population alors qu’il a perdu tout son sens : folklore, superstitions). Il également contribué a l’étude le la parenté, c’est lui qui a défini la teknonymie : on nomme quelqu’un non par son nom mais d’après sa relation de parenté (A n’est pas appelé A mais père de B). c. Frazer Dans son livre « Rameau d’or », il a vulgarisé pour le grand public les théories évolutionnistes. On peut lui reprocher d’être plus littéraire que scientifique. Il a parlé des thèmes tels que : le totémisme, la magie… d. Critiques du point de vue évolutionniste Actuellement, les théories évolutionnistes sont dépassées. Il n’y a pas d’évolution linéaire identique pour tous. Les différents éléments ne sont pas toujours apparus dans l’ordre indiqué et ont parfois sauté des stades. L’histoire présente aussi des exemples de régression culturelle, de retour en arrière. L’erreur de cette théorie était de voir ce qu’elle voulait trouver et non ce qui se trouvait réellement. Cette théorie est antiraciste car tous les peuples parcourent le même itinéraire culturel. Même sil n’ont pas atteint le même niveau, ils ont les même capacités. Certains diront plutôt que cette théorie confirme la supériorité de la race banche qui a parcouru le cycle plus rapidement. 12 3. Le diffusionnisme Il se développe en contre réaction à l’évolutionnisme. Il défend la cause que les civilisations ne se seraient pas développées parallèlement mais plutôt grâce à des échanges interculturels et à des emprunts. a. L’école historico-culturelle allemande et autrichienne Les géographes allemands on établi des cartes de distribution de certains traits culturels. Avec cellesci, Frobenius partit sur le terrain et délimita des « cercles culturels » où règne une certaine homogénéité. Les théories diffusionnistes prennent leur origine dans les travaux de Graebner et Ankermann au musée de Berlin. La plupart des hypothèses diffusionniste n’ont jamais pu être prouvées. Le père Schmid a quant à lui étudié les motifs des emprunts et des refus culturels. b. L’hyperdiffusionnisme anglais (ou migrationnisme, ou héliocentrisme) Perry et Smith ont développé dans leur ouvrage « The Children of the Sun », la théorie qu’il n’y aurait qu’un seul centre culturel de diffusion qui serait l’Egypte ancienne. Mais cette théorie est vite tombée à l’eau. c. Les tendances analytiques américaines Boas, un allemand émigré aux Etats-Unis est le fondateur de l’anthropologie en Amérique. Il travaille sur le terrain, il relève les traits culturels à l’aide de statistiques. Pour lui, avant de parler de diffusion, il faut relever la preuve qu’il y ait eu contact. La preuve de l’emprunt ne peut se faire qu’en présence d’un élément complexe (institution ou objet) qui est identique dans tous les aspects dans deux régions (ex : cathédrale gothique) ou dont la transmission est historiquement prouvée. Il n’a jamais émit de conclusion à cause de son scepticisme. Cette tendances analytique américaine a mit en évidence la complexité des facteurs qui caractérisent les civilisations et la variété des explications qu’amène un phénomène. 4. Le fonctionnalisme Ils délaissent la diachronie (étude dans le temps) au profit de la synchronie (étude à un moment donné). Pour eux la culture est un tout organisé dont chaque élément renvoie à son ensemble et dont chaque élément a une fonction. a. Malinowski Polonais naturalisé anglais, c’est un des principaux représentants. L’analyse fonctionnelle a pour but d’expliquer les faits anthropologiques dans leur développement, leur fonction, leur rôle dans le système total de la culture, la manière dont ils sont reliés les uns aux autres à l’intérieur de ce système, la manière dont est relié le système au milieu physique. Il insista sur l’importance de l’enquête sur le terrain car il faut pouvoir comprendre les cultures de l’intérieur le but est la connaissance totale de la culture. b. Radcliffe Brown (Étudie les habitants des iles Andaman) Il est le véritable fondateur de l’anthropologie sociale actuelle et annonce le structuralisme. Il admet un fait culturel puisse ne pas remplir de fonction (moins rigide que Malinowski). 13 Le fonctionnalisme : - marque le développement de l’anthropologie sociale - inscrit l’anthropologie dans un tournant synchronique - insiste sur la cohérence culturelle 5. L’influence de la psychanalyse et de la psychologie Freud voyait dans les tabous, les institutions et les règles sociales, l’expression des désirs inconscients que nous refoulons Des élèves de Boas vont essayer de comprendre comment la culture est intériorisée, comment elle peut conditionner les comportements d’un individu. Ruth Benedict distingue deux types culturels : « apollonien », celui des sociétés où l’individu est fort conformiste, habitué à réfréner ses propres émotions et « dionysiaque » celui des sociétés où règne l’individualiste, où les personnes sont très émotives (deux types de patterns culturels). Margaret Mead s’intéressera à comprendre la façon dont l’individu reçoit sa culture. 6. L’influence de la sociologie (sur l’ethnologie Française) Emile Durkheim : Fondateur de la sociologie française, il pense que les civilisations primitives sont des cas privilégiés car ce sont des cas simples. Les relations entre les faits sont plus apparents ce qui permet de mieux comprendre les causes de fonctionnement de pensée et de la pratique religieuse. Arnold Van Gennep : il s’intéresse au rôle des techniques dans la société. Il étudia le folklore en France et les rituels qui marquent les étapes de la vie qu’il appela « rites de passage ». Marcel Griaule : il met en évidence l’importance des longs travaux sur le terrain car il faut beaucoup de patience pour avoir accès aux connaissances. 7. Le structuralisme C’est Lévi-Strauss qui a donné son véritable développement à cette tendance. Son œuvre abondante a eu une influence qui a dépassé largement le cadre de l’ethnologie (influence sur la psychanalyse, l’analyse politique, l’analyse artistique,…). Pour lui, le structuralisme n’est pas une philosophie, c’est une méthode scientifique. Pour fonder cette ethnologie, Lévi-Strauss va emprunter à la linguistique une partie de ses modes de raisonnement et ce surtout qu’une première étude des systèmes de parenté lui fait apercevoir que l’ethnologie peut s’intégrer dans une théorie générale de la communication. Il découvre, par exemple, que la prohibition de l’inceste, que l’on retrouve dans toutes les sociétés, s’explique par le désir d’échanger des femmes avec les membres d’autres groupes. L’analyse structurale vise à restituer au-delà du désordre apparent la logique cachée qui caractérise les créations de l’esprit humain, et qui permettent d’appréhender des catégories universelles de l’esprit humain (ex : dualisme, symétrie,…). Le structuralisme s’attache moins aux différences ou à l’analyse d’une culture particulière qu’aux relations entre les cultures et l’étude des éléments qu’elles ont en commun. On peut ainsi atteindre la structure du système considéré. Cette structure est faite de plusieurs éléments dont chacun ne peut subit de changement sans que cela n’ai de répercussion sur les autres éléments. Le structuralisme ne s’est pas intéressé à la totalité des aspects des cultures (ex : pas aux aspects matériels et économiques). 14 8. L’influence marxiste Selon le courant marxiste, il faut analyser les sociétés au point de vue économiques, c'est-à-dire analyser le mode de production car selon la théorie marxiste, l’infrastructure économique est à la base de la superstructure juridique, politique, sociale,… On retiendra principalement Claude Meillasoux et Maurice Godelier. Ce dernier tente de concilier les concepts marxistes avec ceux du structuralisme (ces deux tendances ayant en commun d’essayer de trouver la logique cachée des choses). Mais les modèles marxiste ont été élaborés pour analyser la société capitaliste et l’application de ces concepts aux sociétés traditionnalistes est souvent discutable. En effet, si dans notre société, il est facile d’isoler la sphère économique, ce n’est pas le cas dans les sociétés traditionnalistes où tout est étroitement lié. De plus, si l’influence économique est importe, il est difficile d’admettre que tout est déterminé par elle (ex : structures de parenté ou de la pensée symbolique très largement indépendantes des facteurs de production) 9. L’anthropologie appliquée Elle est désignée à gérer les bouleversements qui secouent les milieux traditionnels. L’acculturation est un processus d’acquisition des caractéristiques d’une culture, occidentale ou non, par une autre culture. Le sujet traditionnel disparait non seulement à cause de la colonisation mais aussi en raison de la politique d’assimilation des gouvernements nationaux. L’anthropologie permet d’analyser des sociétés présentes mais il est beaucoup plus difficile de prévoir les réactions locales face à un évènement futur. 10. La psychologie évolutionniste Nouveau domaine scientifique, elle examine l’influence de notre évolution génétique sur notre comportement. L’idée de base est que le cerveau humain, comme n’importe lequel de nos organes, s’est façonné en vue de perpétuer l’espèce, et donc de transmettre des gènes à la génération suivante. 15 Deuxième partie : L’ORGANISATION SOCIALE Chapitre I : La structure sociale : quelques principes de base Les enquêtes de terrain commencent presque toutes par l'étude de l’organisation sociale. En effet, les relations sociales sont la base sur laquelle se construit le système de la société. L’organisation sociale suit des institutions qui sont destinées à répondre aux nécessités de la nature humaine. Les différentes institutions d’une société forment un tout organisé qui règle les relations de ses membres. On peut distinguer deux grandes catégories : d’une part, celles auxquelles on appartient obligatoirement et automatiquement, et d’autre part, celles auxquelles on adhère librement. Chapitre II : La parenté 1. L’importance et le rôle de la parenté L’étude de la parenté occupe une place prédominante en ethnologie. De nombreux savantsphilosophes s’y intéressaient afin de mieux comprendre nos propres institutions sociales. Lévi-Strauss : les systèmes de parenté forment un ensemble ordonné dont la fonction est d’assurer la permanence du groupe social, en entrecroisant (à la façon d’un tissu) les relations consanguines et celles fondées sur l’alliance. Dans beaucoup de sociétés, tous les membres du groupe sont unis par des relations fondées sur le fait qu’ils sont du même sang (consanguinité) ou qu’ils sont unis par le mariage (par alliance). Dans ce contexte, il est évident qu’il faut comprendre les relations de parenté pour comprendre ce qui se passe dans ces sociétés. Pratiquement tous les aspects de la société sont sous-tendus pas l’organisation de la parenté. 2. Qu’est-ce que la parenté ? La parenté chez nous désigne essentiellement les liens qui unissent les enfants à leur père et mère, qui sont les parents par excellence. Ce n’est pas le cas dans toutes les sociétés, exemples (chez les Nuer) : - Mariage fantôme : quand le mari meurt, la femme reste soumise à la famille de celui-ci, c’est maintenant eux qui ont le pouvoir sur les enfants. En général, la femme se mari avec le frère de son mari mais les enfants sont toujours considérés comme ceux du premier mari. Plutôt que de se remarier, la veuve peut prendre des amants, mais dans ce cas aussi, si elle devait donner naissance à des enfants, ceux-ci seraient considérés comme les enfants du mort. - Mariage entre femmes : la femme âgée fait les échanges de valeurs matrimoniales comme si elle était un homme. La jeune femme peut alors avoir des enfants grâce à des amants. Ceuxci seront définis socialement comme ceux de la « femme-mari » qui sera donc considérée comme leur père. Dans ces exemples, il y a un écart entre la présumée paternité physique et la parenté qui est assignée par la société. Il faut donc faire la distinction entre « parenté biologique » qui englobe tous les hommes et femmes descendant en ligne directe d’un ancêtre commun et « parenté sociale » qui est l’ensemble des individus qui sont désignés sous le vocable de parents, qui sont reconnus comme tels par la société en cause. 16 3. Définitions et conventions (ou ) Indique un homme Indique une femme Aucune précision de sexe X Indique une relation de filiation entre un parent (X) et son enfant (Y) Y X Indique une relation de fraternité entre Y et Z, deux « germains » issus de mêmes parents Y Z X = Y ou X X≠Y Y Indique une relation de mariage entre X et Y Indique qu’il y a eu divorce entre X et Y Ou Indique un homme ou une femme décédée Ou Indique l’individu de référence (ego), s’il est de sexe masculin ou féminin. Parmi les parents consanguins, on distingue ceux en ligne directe, et ceux en ligne collatérale (ceux avec qui on a un ancêtre commun, ex : cousins). On peut distinguer le terme de parenté en fonction de leur champ d’application : - Terme de parenté descriptif : il ne peut désigner qu’une seule catégorie de parent (ex en français : père, mère, frère, sœur,…) - Terme de parenté classificatoire : il peut désigner différents individus n’ayant pas exactement le même lien de parenté par rapport à Ego (ex en français : oncle, tante, cousin, grand-père, petit-fils,…) - Terminologie classificatoire : dans certaine culture, on ne distingue pas la ligne directe et la ligne collatérale (ex : pères et oncles sont tous appelés pères) - Terminologie descriptive : on fait la distinction Dans beaucoup de sociétés, les ethnologues distinguent deux catégories de cousins : - Les cousins parallèles : les enfants du frère du père et de la sœur de la mère - Les cousins croisés : les enfants du frère de la mère et de la sœur du père Chapitre III : La filiation On parle d’un lien de filiation entre deux personnes quand il y en a une qui descend le l’autre ou quand elles ont un ancêtre en commun. La filiation est irrévocable, elle suit l’individu toute sa vie. On appel groupe parental ou parentèle l’ensemble des individus que Ego reconnaît comme ses parents (ce terme n’a d’existence que pour Ego et ses germains). Les systèmes de filiation sont un des procédé qui déterminent avec précision ceux qui font partie d’un groupe parentale et ceux qui en sont exclus. 17 Essentiellement deux types de filiation : 1. Filiation bilatérale ou cognatique La parenté se transmet tant par la ligne maternelle que paternelle. C’est celle qui se rapproche le plus du modèle biologique. Ego a autant de droits et de devoirs envers la famille de son père qu’envers celle de sa mère. 2. Filiation unilatérale ou unilinéaire Cette filiation ne se transmet que par l’homme ou que par la femme. La parenté unilatérale détermine l’ensemble des individus qui sont conscient de descendre d’un ancêtre commun par les hommes (système patrilinéaire) ou par les femmes (système matrilinéaire). Système matrilinéaire Système patrilinéaire Dans un système matrilinéaire, sont membre de la parenté : les fils et filles d’une femme, les enfants de ses filles, ceux de ses petites-filles,… Dans un système patrilinéaire, sont membre de la parenté : les fils et filles d’un homme, les enfants de ses fils, ceux de ses petits-fils,… On s’aperçoit que dans un système unilatéral, les cousins croisés ne font jamais partie de la parenté tandis que les cousins parallèles matrilatéraux en font partie chez les matrilinéaires, et les cousins parallèles patrilatéraux en font partie chez les patrilinéaires. 3. Fréquence des différents systèmes de filiation Il y a plus de sociétés unilinéaires (unilatérales) dans le monde que de société bilatérales. Dans les sociétés unilinéaires, la majorité sont patrilinéaires. 4. Les avantages du système unilatéral sur le bilatéral La parenté par ligne permet un groupement des individus plus structuré, tous les membres ont les mêmes intérêts, la même égalité dans les devoirs de solidarité, etc. De plus, la double appartenance entraine des conflits en cas de crise. La filiation unilinéaire facilite la propriété qui reste collective au groupe, il ne faut pas la partager au moment de l’héritage. 18 5. Les types de groupes basés sur la filiation unilinéaire a. Le lignage Un lignage regroupe les individus qui descendent unilinéairement d’un ancêtre connu (selon des liens généalogique connus). Les lignages peuvent se diviser et se subdiviser en des segments plus petits, appelés lignages segmentaires. On peut ainsi trouver des segments d’un même lignage répartis entre plusieurs villages. (Lignage maximal, secondaire, tertiaire, minimal, famille). Le lignage appartiendrait surtout à la culture idéale. b. Le clan Le clan est un groupe de parenté basé sur la filiation unilinéaire dont les membres descendent d’un ancêtre commun mythique ou légendaire. Un clan rassemble dont un certain nombre de lignages apparentés. On parle de patriclan ou matriclan selon le type de filiation (patrilinéaire ou matrilinéaire) Le clan comprend les vivants et les morts (importance du culte des ancêtres). Lorsque la démographie du clan est riche, il peut y avoir des subdivisions qui forment des sous-clans eux même pouvant regrouper plusieurs lignages. c. Les moitiés (ou dualités) Certaines sociétés sont divisées en deux groupes unilinéaires. Chaque groupe est alors appelé une moitié. Des échanges principalement de partenaires matrimoniaux mais aussi d’obligations ou de services sur une base de réciprocité sont observés entre les moitiés. Lorsqu’il n’y a que deux clans dans une société, alors clan et moitié sont synonymes. Les moitiés sont en général exogames (il faut se marier avec quelqu’un de l’autre moitié). d. Les phratries Les phratries sont des clans regroupés, apparentés. Dans un système de phratries, les différents clans gardent leur spécificité mais il y a une certaine solidarité, un sentiment d’identité entre les membres des différents clans. Il peut y avoir des obligations spéciales entre les membres mais en général, elles sont rares et leur rôle peu important (souvent pas d’influence sur les règles matrimoniales). 6. Fonctions des groupes unilinéaires Fonctions principales des groupes unilinéaires : - Offrir une base plus large et clairement définie au jeu de la solidarité familial - Permettre le contrôle et la régulation des alliances matrimoniales. a. Solidarité et sécurité Les ensembles unilinéaires forment des réseaux d’entraide. Un individu sait que les membres de son lignage ou de son clan lui resteront solidaire puisque ce groupe est responsable collectivement des actions de ses membres (si un membre commet un meurtre, l’ensemble du groupe est considéré comme coupable et la vengeance peut, en général, s’exercé sur n’importe quel membre du lignage, même s’il est innocent). 19 b. Organisations des alliances matrimoniales En général, on ne peut se marier qu’à l’extérieur du groupe, c’est alors une règle d’exogamie (il faut chercher le conjoint à l’extérieur). Si on doit se marier à l’intérieur du groupe, on parle d’endogamie. En outre, les obligations d’exogamie permettent de s’allier avec d’autres groupes, ce qui par les relations sociales ainsi créées offre une base plus large au besoin de sécurité. c. Rôle économique Ce rôle est fort visible dans les sociétés d’agriculteurs, où la terre est bien souvent la propriété collective du lignage ou du clan. C’est alors le chef du groupe qui se charge de répartir les lopins de terre entre les familles. d. Rôle politique Dans beaucoup de groupes, le roi ou le chef provenait d’un clan particulier. e. Rôle légal Les clans et lignages sont responsables collectivement des actes de leurs membres et ils représentent collectivement leurs membres dans leurs problèmes légaux. f. Rôle religieux Clans et lignages peuvent avoir leurs propres êtres ou force surnaturelles et leurs propres rituels pour contrôler ces forces. Ces rituels sont souvent liés aux ancêtres et ceux-ci sont souvent déifiés après leur mort. Le chef de clan joue le rôle de grand prêtre dans le culte qui leur est rendu, il joue aussi le rôle intermédiaire entre les descendants toujours vivants et les esprits ancestraux. 7. Problèmes particuliers en relation avec les groupes unilinéaires a. Le totémisme On a souvent observé l’existence d’une croyance en une identification symbolique entre un homme, ou un groupe social, et un animal, un phénomène naturel, une plante ou un objet, qui constitue alors le totem de ces hommes. Cette croyance au totémisme a des conséquences religieuses et symboliques qui font que les membres du groupe ont des relations particulières avec leur totem (ex : les membres du clan du lézard ne peuvent pas manger de lézard). Le totémisme existe souvent au niveau su groupe clanique lais tous les peuples traditionnels, mêmes s’ils ont souvent des clans, n’ont pas nécessairement de totem. Il y a également de très grandes variations dans ce que l’on a appelé totémisme. Dans certains cas, il ne s’agit que d’un surnom ou d’un blason. La caractéristique commune aux différentes pratiques totémiques est le besoin des hommes d’organiser de façon symbolique les rapports entre nature et culture. Le totémisme répond à un besoin fréquent mais non universel de taxonomie symbolique. Il n’y a pas de lien nécessaire entre le totem et le groupe filiation. 20 b. Rapports entre filiations et l’autorité Ce n’est pas parce qu’il y a matrilinéarité que l’on peut parler de matriarcat (terme qui veut dire que le pouvoir, que l’autorité appartient aux femmes). Aucune société ne donne l’exemple d’un véritable matriarcat total, c'est-à-dire de l’autorité totale aux mains des femmes de la société (l’inverse, le patriarcat absolu, est rare aussi). Dans la société matrilinéaire, l’autorité revient souvent aux mains des hommes du lignage et c’est l’oncle maternel qui l’exerce sur l’enfant (et non le père qui n’appartient pas au lignage). La femme y parait donc comme un chainon intermédiaire en sa qualité de porteuse de filiation, non comme la détentrice des droits qui restent l’apanage des hommes du lignage. c. La matrilinéarité est-elle antérieure à la patrilinéarité ? Les évolutionnistes ont cru pouvoir se représenter l’histoire de la famille en 4 étapes : - Promiscuité - Filiation matrilinéaire - Filiation patrilinéaire - Filiation bilatérale Mais on ne trouve aucune trace d’un stade de promiscuité. De plus on retrouve le système patrilinéaire chez des peuples à des niveaux techniques rudimentaires. Le système patrilinéaire n’est donc pas un stade d’aboutissement d’une évolution. Les évolutionnistes ont aussi voulu faire appel aux survivances (« persistance de l’inutile selon Tylor). Trois exemples de prétendues survivances : L’oncle maternel : il est un élément d’autorité dans le système matrilinéaire, mais il apparaît parfois aussi important dans les systèmes patrilinéaires. Les évolutionnistes supposaient que c’était la trace du passage de l’un des systèmes à l’autre. Mais il y a d’autres raisons possibles : - manière de souligner l’appartenance à une lignée maternelle noble - le frère reçoit les biens matrimoniaux donnés par sa sœur : il profite du mariage de sa sœur. Coutume de la couvade : la couvade consiste en une comédie de douleur d’enfantement, une réclusion obligatoire, des interdits,… que s’impose le père au moment de l’accouchement. Pour les évolutionnistes, dans un système matrilinéaire, il affirme ainsi son lien avec l’enfant. La persistance de l’usage dans une société patrilinéaire indiquerait l’antériorité de l’autre système. En fait, il y a une autre explication possible : la naissance est un moment extrêmement dangereux pour l’enfant. Il faut donc tout faire pour le protéger. Il faut donc que le père s’abstienne d’actes dangereux et se mette dans un état tel qu’il n’attire pas de forces maléfiques. Coutume de la teknonymie : cette pratique consiste à designer une personne par rapport à sa descendance (après la naissance de l’enfant, le père n’est plus appelé par son nom mais toujours « père d’un tel »). Les évolutionnistes ont voulu l’explique par la persistance d’un usage propre à la lignée matrilinéaire où le père éprouvait la nécessité d’affirmer son lien avec l’enfant. Mais pour beaucoup de société, l’homme n’est pas accompli tant qu’il n’a pas de descendant. Pour affirmer avec fierté cet état nouveau ; il se donne le non de « père de… ». En fait, il n’y a pas de réponse à la question de savoir si la matrilinéarité est antérieure à la patrilinéarité. On remarque que chez des peuples de cultures semblables les unes aux autres, un choix s’est opéré. 21 Le recul des milieux matrilinéaires et évident. Toutes les grandes civilisations sont patrilinéaires ou bilatérales. L’ethnocentrisme des colonisateurs a contribué à imposer ce système (enregistrement des naissances, carte d’identité). Dans la société patrilinéaire, on constate la présence d’un frein important au développement : les réticences à l’éducation des filles car elles vont quitter la famille lors du mariage et c’est doc un effort en pure perte de les éduquer. 8. Filiation bilinéaire On l’appelle aussi « double filiation unilinéaire » ou « filiation bilatérale inégale ». Elle fait coexister un système patrilinéaire et matrilinéaire. Ego appartient simultanément au matrilignage de sa mère et au patrilignage de son père, mais il a des devoirs et des droits différents et inégaux vis-à-vis de ces deux groupes. 9. Filiation indifférencié ou filiation non unilinéaire (aussi filiation avec option) L’individu choisit pour lui-même ou pour ses enfants les groupes de parenté auquel il appartiendra. Ce groupe s’appel le ramage. Pour pouvoir en faire partie, il faut retracer unilinéairement sa généalogie jusqu’à un membre de ce ramage. Les choix qui sont faits dépendent des avantages relatifs qui en découlent. 10. Cas particuliers Dans certaines sociétés on observe une parenté dite « en corde » : - Coté du père : passe de la fille au fils de la fille - Coté de la mère : passe du fils à la fille du fils Il y a donc une différence de statut entre le frère et la sœur, l’un suit la ligne maternelle l’autre la ligne paternelle. Ou encore dans d’autres cas, les filles héritent de la mère et les garçons de père. À partir d’un lien purement physique, la parenté biologique, chaque société a construit son système de parenté, système arbitraire présent seulement dans la conscience des hommes. 11. L’adoption C’est le processus par le quel on attribue légalement de nouveaux parents à une personne, souvent à un enfant. Elle ne signifie pas nécessairement qu’il y a une rupture avec les géniteurs. Dans certaines sociétés, l’adoption est tout à fait courante et est même institutionnalisée. 22 Chapitre IV : L’alliance matrimoniale 1. Généralités Unité familiale de base = groupe conjugal, groupe domestique, famille nucléaire a. Mariage et relations sexuelles L’origine du couple doit se chercher dans l’instinct sexuel, mais il ne faut pas perdre de vue que le mariage est une institution sociale. La culture va influencer la forme des relations sexuelles et la plus ou moins grande liberté de celles-ci. La raison d’être de ces relations avant le mariage est de tester les compatibilités entre conjoints potentiels. b. Limitation des rapports sexuels avant le mariage Dans les sociétés traditionnelles, la compatibilité sexuelle ou l’inclinaison sentimentale personnelle ont peu d’influence sur le mariage. Ces sociétés sont surtout préoccupées par la perpétuation de la culture, de la société du groupe ainsi que du renforcement social pouvant être apporté par e mariage. c. Obligation du mariage La pression au mariage est très grande, car c’est de la procréation et l’éducation des enfants issu du mariage, que dépend la perpétuation du système social. d. Le mariage : essai de définition Le mariage est une union reconnue socialement entre deux individus et par eux une alliance entre deux groupes de parents (extension de la parenté par l’alliance matrimoniale). Il est essentiellement basé sur le besoin d’assurer la pérennité du groupe. 2. Le choix du conjoint a. Prohibition de l’inceste La prohibition de l’inceste apparait come la seule règle sociale universelle. L’interdiction du mariage entre proche parents peut avoir un champ d’application variable selon la façon dont chaque groupe définit ce qu’il entend par proche parent. Cette interdiction est sanctionnée par des pénalités variables. Aspect génétique : la première explication qui viendrait à l’esprit est que des mariages entre proches parents produiraient des enfants « tarés », cependant, les unions consanguines ne sont pas toujours néfastes. Certaines populations interdisent le mariage entre cousins parallèles et autorisent celui entre cousins croisés, cela n’a pourtant aucun sens sur le plan biologique. Ce n’est donc pas pour des raisons génétiques que l’on a interdit l’inceste. Aspects instinctifs et psychologiques : les tenants de cette explication pensent que le fait de vivre longtemps ensemble diminue l’attirance que peuvent ressentit deux personnes entre elles (idée de lassitude sexuelle). Mais cette idée est difficile à prouver. L’horreur de l’inceste ne semble pas non plus instinctive (attirance sexuelle entre proches : Œdipe, filles violées par leur père,…). Aspect social : la prohibition de l’inceste peut s’étendre à un nombre considérable d’individus frappés par l’interdiction à parents biologiques. Prohibition serait une règle d’origine purement sociale. 23 Aspect familial : pour Malinowski, l’inceste est interdit en raison de dysfonctionnements qu’il risque d’introduire dans le foyer : celui-ci ne serait plus un milieu adéquat pour l’éducation. Aspect de la recherche de l’alliance : l’alliance matrimoniale permettrait d’élargir son groupe de parenté et d’augmenter l’intégration sociale. En se mariant en dehors de leur groupe, les hommes primitifs évitèrent les conflits et augmentèrent leur chance de survie (inceste en contradiction avec le système d’échanges intergroupes). Aspects démographiques : dans des petits groupes, il est difficile de maintenir l’équilibre entre les sexes. Il faut alors chercher un conjoint dans un autre groupe. De là découlerait la prohibition de l’inceste. Conclusions : il est possible que l’origine de la prohibition de l’inceste soit en partie naturelle mais elle relève surtout de la culture. b. L’exogamie et l’endogamie L’exogamie est une règle sociale qui oblige les membres d’un groupe à choisir un conjoint en dehors de celui-ci (extension de la prohibition de l’inceste). Les règles de parenté ne font pas toujours qu’interdire un cercle de parenté, parfois elles en assignent un, à l’intérieur duquel le mariage doit avoir lieu. Dans ce cas, deux possibilités : L’endogamie : obligation de se marier à l’intérieur d’un groupe défini (endogamie vrai). L’union préférentielle : obligation de choisir pour conjoint un individu qui présente avec le sujet un rapport de parenté déterminé (endogamie fonctionnelle). c. La théorie de l’échange matrimonial selon Lévi-Strauss Les règles d’exogamies visent à interdire aux hommes les femmes qui leurs sont trop proches afin qu’ils créent des réseaux d’échanges matrimoniaux. En réalité, il faut envisager l’échange des femmes comme un phénomène de communication. d. Les structures élémentaires de la parenté Systèmes qui prescrivent les mariages avec un certain type parenté ou systèmes qui tout en définissant tous les membres du groupe comme parents, distinguent ceux-ci en deux catégories : conjoints possibles et conjoints prohibés. Mariage prescriptif – mariage préférentiel Mariage prescriptif : le mariage est normalement obligatoire avec une certaine catégorie de parents. Mariage préférentiel : ce type de mariage est souhaité, encouragé mais pas obligatoire. En général la préférence va aux cousins croisés car ils ne font jamais partie de la parenté d’ego dans un système unilinéaire. L’échange restreint ou mariage symétrique L’échange restreint fait appel à un nombre pair d’unités échangiste. Cet échange est réciproque, c’est-à-dire que les hommes du groupe A épousent les femmes du groupe B et réciproquement. Le cas le plus simple est celui de deux frères qui échangent leurs sœurs, échange qui est recommencé aux générations suivantes. Ego finit par épouser une femme qui est sa cousine croisée matrilatérale et patrilatérale. On parle alors de « double cousine croisée » ou de « cousine croisée bilatérale ». Ce système implique un champ d’échange matrimonial très restreint. 24 L’échange généralisé ou mariage asymétrique Distinction entre la cousine croisée matrilatérale et la cousine croisée patrilatérale, et prescription du mariage avec l’une et pas avec l’autre. Dans ce cas, il faut au moins 3 groupes de parenté, le groupe C donnant ses femmes au groupe B qui donne les siennes au groupe A, qui donne les siennes au groupe C. La relation est donc circulaire et non réciproque. Le plus souvent on favorise le mariage avec la cousine croisée matrilatérale. (Hypergamie : mariage avec un conjoint de statut inférieur, hypogamie : mariage avec un conjoint de statut inférieur) e. Les structures complexes Les structures complexes désignent les cas où l’on se borne à prohiber certains types d’unions (ex : chez nous, prohibition de l’inceste, mais on n’indique pas un conjoint privilégié). Une des formes de mariage dans un système complexe, c’est le mariage dit par compensation. Il existe un système intermédiaire entre structures élémentaires et structures complexes. Ces systèmes se bornent à édicter des empêchements au mariage, mais les conjoints prohibés sont si nombreux que ceux qui ne le sont pas sont presque obligatoires, ces systèmes deviennent finalement un système prescriptif inconscient (systèmes crow-omaha). f. Lévirat et sororat On désigne le terme de lévirat la pratique par un homme d’épouser la veuve de son frère défunt. Cela permet au groupe du mari de garder les droits sur la femme et ses enfants. On appelle sororat le fait pour une femme célibataire d’épouser le mari de sa sœur défunte. 3. L’établissement de l’alliance a. Aspect cérémoniel En raison des changements de statut qu’il implique, le mariage doit être connu de tous. Aussi, des cérémonies en assurent-elles la publicité. Bien souvent, celles-ci prennent un caractère religieux afin d’attirer les bonnes grâces des divinités et des forces naturelles. On espère ainsi assurer le succès de l’union et la fécondité du couple. Souvent, ce sont les parents qui ont arrangé l’affaire, et il est rare qu’un des conjoints potentiels s’oppose au mariage car il risquerait d’être rejeté de la famille. b. Les formes de mariages Mariage par compensation L’importance de la femme est majeure dans la production et la reproduction d’un groupe social. Son mariage constitue donc une perte énorme. Dans les structures élémentaires, le principe de réciprocité minimise la lésion causée. Il y a solidarité entre les mariages. Dans les structures complexes, l’existence du mariage par compensation est fréquente et illustre un souci d’équilibre. Le mari et son groupe offre une série de compensations matrimoniales. On distingue : - Les services, le gendre effectue toute une série de prestations au bénéfice de sa belle-famille - Les biens, le gendre offre des objets de valeur à sa belle-famille (≠ dot où c’est la famille de la mariée qui offre des biens ou de l’argent à l’époux pour l’usage personnel du couple). Les biens permettent au père d’acquérir à son tour une femme pour son fils ou pour luimême. Les biens attestent que les deux familles sont alliées, ils servent aussi de garantie. Le prestige de la femme mariée est souvent directement influencé par la quantité de biens matrimoniaux qui ont été payés pour elle. 25 Mariage par cadeaux Il arrive que le gendre doivent offrir à se belle-famille des cadeaux de son choix, plutôt qu’une compensation bien définie. Ces présents constituent un gage de solidarité entre les deux familles. Mariage par capture (ou par rapt) Manière de se marier qui est bon marché et qui présente une dimension aventureuse et exotique. Mais les désavantages sont importants car il ne permet pas une alliance entre deux groupes. L’homme qui a capturé sa femme sera désavantagé par rapport à celui qui l’a obtenue par échange. Les enfants ne bénéficieront pas du statut que la famille de l’épouse pouvait apporter. Mariage par enlèvement consenti (fugue amoureuse) Dans certaines sociétés, le mariage par enlèvement consenti est plus ou moins accepté culturellement comme échappatoire aux rigueurs des coutumes matrimoniales et aux pressions des parents. Mariage par adoption Une famille pauvre adopte une fille pour ne pas de voir payer les biens matrimoniaux. Mariage par héritage Le lévirat et le sororat. Mariage fictif Le mariage fantôme ou celui entre femmes. 4. La rupture de l’alliance a. Le divorce Aucun peuple ne l’approuve, bien qu’il soit presque toujours permis. Sa fréquence varie selon les sociétés. Il faut faire une différence entre les motifs et les causes du divorce. Les motifs sont les raisons légitimes qui sont acceptées par les sociétés, elles sont presque toujours en rapport avec le non respect des obligations du mariage (ex : adultère, violence,…). Les causes sont les raisons personnelles qui justifient l’échec du mariage, elles sont non-acceptables ou non suffisantes (ex : plus d’amour). b. L’annulation du mariage C’est la reconnaissance légale que le mariage n’a pas eu lieu. Elle ne doit pas être confondue avec le divorce et elle n’est possible qu’en deçà d’un stade donné (chez nous, ce stade est la consommation sexuelle du mariage). c. Le décès C’est la cause la plus fréquent d’interruption de mariage, elle n’est pas ressentie comme un échec social à la différence du divorce. A la mort de son conjoint, le survivant peut être plus ou moins délié des obligations) l’égard de la famille du défunt. Exemple du lévirat ou du sororat. d. Le remariage Toutes les sociétés ont aussi des règles concernant les remariages. Par exemple, on doit attendre un certain temps avant de se remarier après un décès ou un divorce dans notre société. 26 Chapitre V : La cellule familiale 1. La famille élémentaire Cellule sociale qui résulte du mariage = famille nucléaire, famille élémentaire, famille conjugalenatale. Cette famille regroupe donc les époux et leurs enfants. Chez nous le mari est en général à la fois partenaire sexuel de la femme, père des enfants et détenteur d’autorité. Mais dans d’autres sociétés, tous ces rôles peuvent être dévolus à des hommes différents. Tous ces rôles, à l’exception du rôle de partenaire sexuel, peuvent être tenus par le frère de la mère. Le foyer peut être formé par la famille conjugale ou par la famille consanguine. La durée du temps où les enfants font partie du foyer varie aussi. 2. Le rôle de la famille élémentaire La famille élémentaire existe partout. D ans cette cellule de base on a toujours des relations entre époux, des relations parents-enfants et des relations entre enfants. La cellule familiale a un certain nombre de fonctions très importantes : a. Fonction sexuelle Elle varie selon le degré de liberté que laissent les sociétés aux conjoints pour les rapports sexuels en dehors du mariage. b. Fonction de reproduction (procréation) Le plus souvent la filiation est déterminée au sein de la cellule conjugale mais nous avons vu l’existence des filiations de caractère social conventionnel. c. Éducation des enfants. Elle est souvent assurée par elle, mais peut lui échapper assez tôt, car l’enfant quitte parfois sa famille fort tôt et le milieu social s’acquitte de l’éducation. d. Coopération économique Dans les sociétés traditionnelles, la société conjugale économique semble parfois peu affirmée. De là nait l’idée qu’il n’y a pas de coopération entre le mari et sa femme. Cependant, une coopération entre les époux s’observe au niveau des économies de subsistance. Il y a coopération pour nourrir la famille par exemple (ex : l’homme chasse, la femme cueille). La famille élémentaire, incapable de subvenir seule à ses besoins, se font souvent dans la solidarité d’un groupe plus large (ex : grandes maisons des iroquois). e. Les communautés Finalement, les maisons communautaires chez nous répondent aussi à des raisons économiques : avoir une belle maison avec un loyer que l’on divise, services en commun, achats groupés, etc. Actuellement, outre l’aspect pratique de point de vue économique, l’accent est mis sur l’établissement de relations humaines plus authentiques et moins sur le travail. Le sentiment d’isolement croissant des individus dans notre société y est pour beaucoup. 27 3. La famille étendue Les familles étendues sont basées sur une relation entre parents et enfants (ex : dans un système patrilinéaire, les familles élémentaires constituées par le fils et les filles non mariés se groupent autour d’un patriarche). Mais, actuellement, les familles élémentaires ont de plus en plus souvent l’opportunité d’être autonomes et les familles étendues ont tendance à disparaitre. Famille indivise, articulée ou multiple = famille composée de frères et sœurs et de leurs maris respectifs. 4. Les types de cellules familiales a. La monogamie La monogamie est l’union d’un homme à une seule femme. C’est le type de cellule familiale le plus fréquent, cependant la monogamie est la seule forme de mariage permise dans une minorité de sociétés de par le monde. b. La polygamie La polygynie : un homme – plusieurs femmes. Ce type de mariage multiple est le plus fréquent des trois formes polygames. La petite polygynie est l’union d’un homme avec trois ou quatre femmes habituellement. La grande polygynie est un harem (dizaines de femmes). La première femme a généralement préséance et souvent autorité sur les suivantes, et cela même si par la suite elle est remplacée comme favorite sexuelle par une autre femme. o Raisons économiques : le désir des femmes de bénéficier de l’aide d’une compagne pour assurer les charges du ménage. o Raisons de prestige et raisons politique : Les mariages multiples sont un signe de richesse. La polygynie est aussi souvent le fait d’un chef qui noue ainsi des alliances avec des groupes divers. o Raisons physiologiques : désir profond de l’homme de se perpétuer. o Le lévirat (héritage des veuves) o Surnombre de femmes : résolution de ce problème. La polyandrie : une femme – plusieurs hommes. En réalité, on ne sait pas si il y a vraiment eu mariage ou si le mari a simplement abandonné ses droit exclusifs au profit d’autres hommes (souvent ses frères). Elle a souvent lieu dans les régions ou l’infanticide des filles est fréquent. Parfois des frères épousent la même femme car ils ne peuvent réunir isolément les compensations matrimoniales nécessaires. Le mariage de groupe : plusieurs hommes et plusieurs femmes. En générale le groupe s’articule autour d’un groupe central. Quand les colons interdirent l’infanticide des filles, le nombre de celles-ci augmenta et la polyandrie se transforma en mariage de groupe. 28 Chapitre XI : La résidence Selon Murdock, les principaux systèmes de résidences sont les suivants : - virilocal : le ménage établit sa résidence dans le groupe du mari (patrilocal lorsque la résidence est avec les parents patrilinéaires du mari) - uxorilocal : le ménage s’établit dans le groupe de l’épouse (matrilocal lorsque la résidence est avec les parents matrilinéaires de la femme) - résidence unilocale : le groupe s’intègre au foyer des parents d’un époux (unilocale matrilocale ou unilocale patrilocale) - Si l’on ne précise pas : le nouveau foyer s’établit à proximité sans être confondu avec celui des parents Ambilocal ou bilocal : le couple peut choisir come résidence l’endroit où vivent les parents de l’un ou de l’autre des époux Néolocalité : la culture n’impose pas de règle et le ménage peut s’installer où il veut Résidence avunculocale : le couple va vivre chez un frère de la mère de l’époux Matri-patrilocale : un couple vit avec les parents de la femme jusqu’à la naissance du premier enfant et déménage alors chez les parents du mari. Ou, mouvement annuel de la zone d’origine du mari à celle de la femme. 1. Les sociétés patrilinéaires sont patrilocales Les sociétés patrilinéaires sont presque toujours patrilocales. Dans une société patrilinéaire et patrilocale, ce sont les hommes de même origine et groupés qui assurent la cohésion du groupe. Les femmes sont des étrangères, d’origine diverses. Lévi-Strauss appelle harmonique un régime où la règle de résidence est semblable à la règle de filiation (patrilinéaire – patrilocaux et matrilinéaire – matrilocaux) et dysharmonique un régime où elles s’opposent (patrilinéaire – matrilocaux et matrilinéaire – patrilocaux). 2. Les sociétés matrilinéaires sont tantôt matrilocales, tantôt patrilocales a. Les matrilinéaires matrilocaux Le mari s’installe dans l’habitation de la femme, ou bien, le mari reste vivre dans son propre milieu et ne rejoint son épouse et ses enfants que pour des séjours plus ou moins brefs. L’homme sera toujours étranger au milieu dans lequel vivent sa femme et ses enfants et l’autorité est exercée sur les enfants par les membres masculins du groupe de la femme. Les femmes y ont souvent plus de prestige que les hommes. b. Sociétés matrilinéaires et patrilocales Les épouses rejoignent leur mari et transmettent la filiation. Les hommes du village sont bien parents mais les enfants n’appartiennent pas à leur groupe parental mais à celui d’où les mères sont originaires. L’enfant doit quitter son père à l’âge de raison pour rejoindre son oncle maternel. Situation dysharmonique 29 c. Sociétés bilatérales La plupart du temps, les sociétés bilatérales adoptent la patrilocalité mais cette option n’est pas générale. C’est surtout parmi ces sociétés que l’on rencontre le système néolocal et de filiation indifférenciée avec option. Chapitre VII : La terminologie de la parenté Facteurs pouvant être pris en considération dans un système de terminologie : - Différence de génération - Différence entre parent en ligne directe et en ligne collatérale - Différence de sexe entre parents - Différence de sexe du locuteur - Différence du sexe de la personne par qui passe la relation de parenté - Différence entre consanguins et parents par alliance - Différence de statut ou d’état de la personne par qui passe la relation de parenté (mort/vivant, célibataire/marié) 1. Système classificatoire généalogique Le classement par génération consiste à désigner par un même nom plusieurs personnes appartenant à la même génération. a. Terminologie hawaïenne Tous les membres ayant le même sexe de chaque génération sont désignés par le même nom (ex : père = frère du père = frère de la mère ; enfants de la sœur du père et de la mère = enfants du frère du père et de la mère = frères et sœurs). b. Terminologie eskimo Cousins croisés = cousins parallèles ≠ germains ; il n’y a pas non plus de distinction entre cousins patrilatéraux et matrilatéraux (comme chez nous). c. Terminologie iroquoise Cousins croisés ≠ cousins parallèles = germains d. Terminologie soudanaise Cousins croisés ≠ cousins parallèles ≠ germains ; la distinction est aussi faite entre cousins patrilatéraux et matrilatéraux. 30 2. Système classificatoire non strictement généalogique On regroupe sous un même terme des individus appartenant à des générations différentes. a. Terminologie Crow Matrilinéaires, leur règle de résidence est virilocale. Les cousins parallèles sont assimilés aux germains. Pour les cousins croisés, les patrilatéraux sont assimilés au père ou à la sœur du père, selon le sexe : - Cousins parallèles = germains - Le fils de la sœur du père = père (pour trois génération) - La fille de la sœur du père = sœur du père - Le fils du frère de la mère = fils - La fille du frère de la mère = fille - Mère = sœur de la mère - Père = frère du père Système complexe car peu de possibilités matrimoniales, la population étant réduite et trop de restriction au mariage par l’effet de la terminologie. b. Terminologie Omaha Patrilinéaires, leur terminologie est le reflet inversé de la terminologie crow : - Cousins parallèles = germains - Le fils de la sœur du père = neveu - La fille de la sœur du père = nièce - Le fils du frère de la mère = frère de la mère - La fille du frère de la mère = mère - Sœur de la mère = mère - Frère du père = père - Fils du frère de la mère = frère de la mère - Fille du frère de la mère = mère Le système omaha consiste à maintenir des relations avec le côté maternel et à interdire le mariage avec la cousine croisée. 3. Quelle sont les fonctions des terminologies classificatoires ? Elles tendent à renforcer l’unité et la cohérence du lignage. Lorsqu’on emploie un certain terme pour certaines personnes, on souline une façon de se comporter avec cette personne. On trace en quelque sorte une image idéale de la société parentale. Elles servent aussi à préciser les interdits de mariage. 31 Chapitre VIII : Les relations de respect, d’évitement et à plaisanterie 1. Relations à évitement (respect) Les attitudes de respect et d’évitement peuvent prendre des aspects très différents. On évite de se toucher, de se frôler (entre frère et sœur), de se croiser et même parfois de converser. Pour certaines populations, ce sont des interdits graves. 2. Relations à plaisanterie ou à libre-parler Il existe des rapports sociaux tels que les intéressés ont le droit et même le devoir de se taquiner et même de s’injurier. Ces privilèges sont souvent réservés à certains membres de la famille et à certain degrés de parenté bien définis. Aussi sont-ils parfois appelés parenté à respect ou parenté à plaisanterie. Ces comportements sont obligatoires et organisés. Parfois les attitudes à respect et à plaisanterie coexistent et sont même complémentaires. La relation à plaisanterie peut être symétrique, les individus liés par une telle obligation se moquant l’un de l’autre. Cette relation peut aussi être asymétrique si seul un des individus peut plaisanter l’autre. 3. Comment expliquer ces systèmes d’attitudes ? Ces systèmes d’attitudes peuvent soit s’expliquer par : - Une différence de génération - Une différence de sexe et la prise en considération de possibilités ou de prohibitions matrimoniales - Une tension entre des groupes qui échangent des femmes Règle d’étiquette : méthode pour standardiser des relations sociales ces attitudes obligées empêchent les individus de donner libre cours à des sentiments qui résulteraient de leurs intérêts opposés ou divergents. 4. Relation à plaisanterie entre groupes ethniques distincts Parfois entre des groupes différents apparaissent des relations qu’on appelle amitié à plaisanterie et aussi amitié funéraire. Ces relations ont un rôle de sanction sociale permettant à certains de résoudre des conflits, de les prévenir ou de se faire, impunément, le porte-parole de l’opinion publique (la personne ou le groupe concerné ne pouvant pas répliquer). 32 Chapitre IX : L’organisation sociale en dehors de la parenté Des groupes peuvent s’organiser sur base de l’âge, du sexe, des expériences communes et ainsi des personnes non apparentés peuvent forger des liens très durables. Outre la fonction sociale, ces associations ont souvent un rôle éducatif et offre des occasions de s’extérioriser et d’acquérir du prestige. 1. Organisation en fonction de l’âge a. Les âges de la vie Toutes les sociétés assignent des obligations, des rites, des besoins particuliers à chaque tranche d’âge. L’âge d’une personne détermine la place qu’elle occupe dans la société. La personne, depuis sa naissance passe par des étapes que l’on appellera rites de passage. Elles peuvent se franchir individuellement ou collectivement. Le statut de la personne peut être désigné par des marques extérieures qui en assurent la publicité et qui jouent un rôle de protection magique. Selon les différentes sociétés, le passage de l’enfant à l’adulte n’est pas identique : - Soit il se transforme grâce à l’initiation - Soit par le mariage - Soit une fois la naissance de son premier enfant (dans ce cas, il arrive souvent que l’initiation du fils soit le signe de début de la retraite du père qui devient alors un ancien) b. La classification par strates généalogiques Le système le plus répandu est celui où le statut de l’individu dans la société dépend de la position dans la lignée et de la distance qui le sépare de l’ancêtre commun, plus que de con âge réel. La situation dans la famille peut donc jouer un rôle plus important que l’âge. c. Les classes d’âges Les conséquences de ces systèmes sont que chacun fait ce qu’il doit au moment où il le doit. Il n’y a pas de véritable préoccupation personnelle car les individus savent qu’à un moment donné ils exercent le pouvoir. Ces systèmes contribuent par-dessus tout à assurer la continuité et la stabilité de la société. Ils permettent efficacement : - D’assurer le classement des individus et leur hiérarchie - De transmettre les responsabilités et les traditions et, dans tout ceci, la cérémonie d’initiation n’est qu’un seuil qu’on franchit - De minimiser autant que possible les conflits entre générations successives 33 2. Organisation en fonction du sexe Dans les sociétés traditionnelles, la différence est fort marquée. Cette séparation (dichotomie) peut prendre des aspects très variés. La dichotomie sexuelle : Les hommes et les femmes ne mangent pas ensemble : il arrive que cet interdit soit observé uniquement lors des repas rituels. Le garçon mange avec sa mère jusqu’à l’âge adulte. L’utilisation de langues différentes (ex : iles caraïbes) Participation à des rituels différents Dans le domaine de l’art : parfois hommes ou femmes ont le monopole de certains moyens d’expression Dans le domaine de l’occupation de l’espace : dans beaucoup de sociétés ont trouve des maisons d’hommes dont l’accès peut être interdit aux femmes La répartition des tâches et la spécialisation des techniques (le statut de la femme varie selon les sociétés) 3. Les associations volontaires Sous ce terme, on reprend tous les groupes non basés sur le lien de parenté, d’âge ou de sexe. Une telle association rassemble un nombre limité d’individus au sein de la société globale qui se réunissent en vue d’atteindre un objectif commun. Elles peuvent être secrètes ou publiques (séculaires). 4. Les initiations Ces la révélation de certaines connaissances et l’épreuve imposée à des individus pour être à intégré à un groupe. L’initiation fait partie des rites de passages d’un statut à un autre. a. L’initiation tribale ou rite de puberté La plupart du temps, les enfants sont initiés au moment de la puberté. Pour les garçons, l’époque varie selon les sociétés. Pour les filles, le moment est plus précis, la puberté est aisément décelable (apparition de la nubilité) et la cérémonie est souvent un prélude à celle du mariage. L’initiation des garçons est souvent collective, les filles sont souvent initiées en privé dans la famille ou par groupe restreint. Sa fonction est d’introduire à la vie sociale et mystique du groupe. Elle forge une nouvelle identité. b. L’initiation des garçons L’initiation des garçons concrétise la séparation d’avec les femmes et l’intégration dans le groupe des hommes. C’est l’entrée dans le domaine de la connaissance systématisé. Le passage de l’initiation est accompagné d’épreuves portant à la fois sur le caractère, sur la vaillance et sur la force physique de l’initié. Le passage d’un statut à un autre implique un anéantissement de l’être dans l’état antérieur, et sa renaissance sous sa forme nouvelle (mort initiatique). 34 c. L’initiation de filles Les filles sont initiées au moment où elles sont nubiles. Dans les milieux matrilinéaires, l’initiation des filles est plus importante au point de vue collectif que dans les milieux patrilinéaires. On retrouve le schéma de l’initiation des garçons. La ségrégation, cette mise à l’écart est expliquée par la crainte de l’impureté mensuelle de la femme mais peut aussi être expliquée par le souci de soustraire à la vue de la société l’individu en train de se transformer. La jeune fille disparaît pour renaitre femme. L’initiation comporte aussi des éléments éducatifs. Les épreuves d’humiliation ne lui sont pas toujours épargnées. Chapitre X : La stratification sociale : classes et castes 1. Classes Grouper de personnes qui, au sein d’une société, ont un statut distinct qu’ils utilisent pour obtenir des biens et des privilèges particuliers et qui par un mode de vie commun prennent conscience de leur communauté d’intérêts par rapport aux autres classes. Une classe sociale n’existe que par rapport à d’autres classes sociales. 2. Castes Les castes représentent un système de classes figées héréditairement. Selon Lévi-Strauss, les castes sont endogames, héréditaires, hiérarchisées, généralement spécialisées du point de vue technique. 35