Les monétaristes Dans les 70, on parle « d’orthodoxie monétariste » Depuis les 60’s, la « révolution libérale » s’est développée, représentée par les « nouveaux économistes » dont l’objectif principal est de montrer l’inadaptation des politiques économiques, à travers notamment la critique de la courbe de Phillips 1. Principes de l’analyse économique monétariste Ces principes sont incompatibles avec l’analyse keynésienne, il existe 3 principes de base du monétarisme : - Les comportements économiques sont guidés par le jeu des prix. Seule la théorie des prix peut permettre de comprendre les comportements (S, I, C, …). Par exemple, un salarié alloue sa force de travail sur un marché en fonction des salaires qui lui sont proposés. L’équilibre détermine l’O et la D. - La forme d’organisation la plus efficiente est le marché concurrentiel => il n’existe pas de meilleure organisation que celle résultant des mécanismes du marché. Le marché assure l’optimisation de l’allocation des ressources rares à travers le jeu des prix. - L’Etat doit s’abstenir de toute intervention dans l’allocation des ressources, il n’est qu’un agent particulier et, par son intervention, il engendre des comportements arbitraires. S’il intervient trop, il y a fausse anticipation des agents et perturbation de l’équilibre économique. Depuis les 50’s, la pensée monétariste, dont l’un des projets est de dénoncer le keynésianisme « keynéso-classique » a, selon Karl Brunner (qui a inventé le terme monétarisme), 3 axes qui la guident : - Les impulsions monétaires sont déterminantes dans l’évolution de la production, de l’emploi et des prix. C’est par l’évolution de la masse monétaire que l’on peut comprendre le mieux les fluctuations de la P, de l’emploi et des prix - L’évolution de la masse monétaire est l’indice le plus sûr pour mesurer l’impulsion monétaire => théorie quantitative de la monnaie (Fisher) - Les autorités monétaires peuvent contrôler l’évolution de cette masse monétaire pour réguler les cycles économiques Ces axes ont été particulièrement développés par Milton Friedman. 2. L’orthodoxie monétariste Friedman = « pape du monétarisme », prix Nobel en 1976 pour sa contribution à l’analyse de la C, à l’histoire et à la théorie monétaire et pour sa démonstration de la complexité des politiques de stabilisation 3 points essentiels : Supériorité du marché sur tout autre forme de régulation Friedman reprend les postulats de l’école néoclassique Pour Friedman, - L’efficacité est établie dans le jeu offre – demande grâce aux évolutions des prix Les prix sont des signaux qui transmettent la seule information qui permet aux agents économiques d’adopter des comportements rationnels, en particulier d’éviter des gaspillages dans l’allocation des ressources - Il affirme sa fidélité aux idées de l’école autrichienne ultra-libérale (Hayek) - À l’inverse, les contrôles centralisés des prix et des salaires (W) provoquent des distorsions, sources d’inefficacité et de gaspillage de la main d’œuvre => inflation encouragée car agents économiques essayent de se rattraper sur d’autres prix faute de pouvoir accéder de la meilleure façon possible au marché officiel L’inflation est un phénomène uniquement monétaire Inflation et systèmes monétaires Friedman (collection Point) : « La cause immédiate de l’inflation est toujours et partout la même : un accroissement anormalement rapide de la quantité de monnaie par rapport au volume de la production. » Friedman s’appuie sur la théorie quantitative de la monnaie, imaginée au XVIIIe siècle déjà (Bodin), reprise par Say, retranscrite par Irving Fisher sous une forme mathématique : MV = PT, où : M = masse monétaire en circulation V = vitesse de la circulation de la monnaie P = niveau général des prix T = volume de transactions (c’est-à-dire le nombre d’échanges réalisés) Pour Friedman, si V et T sont stables à CT (par hypothèse), toute hausse de M entraîne une augmentation des prix. Selon Friedman, les agents économiques ne sont pas sensibles à l’illusion monétaire (contrairement à ce que pense Keynes). S’il y a illusion, elle ne peut être que de courte durée en raison des anticipations adaptatives des agents économiques. Dans le cas de l’inflation, il y a un effet de court terme sur la production, mais si les travailleurs s’aperçoivent que le salaire réel subit une érosion monétaire, ils se retirent du marché du travail => il existe un seuil en dessous duquel le chômage ne peut pas descendre. Friedman l’appelle taux de chômage naturel, c’est le taux de chômage qui résulte de la régulation du Marché sans aucune intervention étatique À long terme, la courbe de Phillips est verticale, c’est-à-dire rigide au taux d’inflation. L’analyse de Friedman conduit à considérer que tout réglage financier de conjoncture économique est impossible => rupture avec le courant de la synthèse (microéconomique classique et macroéconomie keynésienne) La politique monétaire doit être structurelle et non pas conjoncturelle La monnaie n’est pas neutre pour l’activité économique. Il faut donc avoir un usage extrêmement modéré de la politique monétaire car si on en abuse, on aura des effets pervers : la création de monnaie modifie la hiérarchie des prix, l’appréciation que les agents économiques peuvent avoir de l’activité économique, notamment de la productivité marginale de chaque facteur de P. Cette politique monétaire ne doit donc pas dépendre des appréciations des décideurs économiques, elle doit être pour Friedman la plus neutre possible ; cette politique doit donc être stable et stricte, de telle façon que les anticipations que feront les agents économiques ne soient pas perturbées par les modifications des prix. La règle la plus simple est que la masse monétaire croisse à un taux fixe sans variation dans le taux de croissance qui serait destiné à suivre les cycles économiques. La politique budgétaire doit rester neutre car faute d’accompagnement monétaire, elle aurait sur la P et les prix une action inefficace. Friedman est contre toutes les politiques publiques et tous les systèmes d’organisation économique trop contraignants ; il est également contre tous les systèmes de changes fixes (Bretton Woods) et préconise la mise en place d’un système de changes flexibles : « Dans un système de taux de change fluctuants, le problème de liquidité disparaît, les réserves de devises deviennent inutiles. » Avec le système des changes flexibles, la contrainte extérieure disparaît et les politiques budgétaires peuvent être orientées vers les problèmes intérieurs. Dans l’interprétation des cycles économiques, Friedman conteste l’analyse de Keynes que la C serait sensible à CT à la hausse du R. Pour lui, la C dépend du revenu permanent : la C permanente est donc peu sensible à la variation des R. Ainsi la crise de 29 est essentiellement monétaire. Ce sont les autorités monétaires qui sont responsables de cette crise car elles ont contracté la masse monétaire au moment où les effets récessionnistes se faisaient sentir. Friedman élabore une critique radicale de toutes les politiques élaborées depuis les 30’s => volonté de mise en place de systèmes de régulation beaucoup plus spontanés. 3. Historiquement, on distingue plusieurs monétarismes Monétarisme standard de Friedman qui développe des concepts clé (taux de chômage naturel, C permanente, R permanent, anticipation adaptatives) Monétarisme métalliste de J. Rueff. Pour lui, la seule façon de réduire l’inflation est de rétablir l’étalon-or pour éviter les attitudes spéculatives (rétablir un lien entre finance et économie réelle) Monétarisme budgétaire de Brunner et Meltzer Le déficit budgétaire a une influence sur la P et les prix. Il faut limiter le déficit budgétaire et la pression fiscale pour avoir une croissance saine. Monétarisme autrichien de von Hayek qui s’intéresse aux effets microéconomiques des déformations engendrées par l’inflation. Monétarisme des anticipations rationnelles de Muth, Lucas, Sargent et Wallace Il met en cause l’existence d’anticipations adaptatives en allant plus loin : dans la théorie de Friedman, il peut exister une part d’illusion monétaire, du moins à très court terme. Pour eux, les anticipations sont rationnelles, c’est-à-dire qu’elles empêchent toute autorité monétaire de tromper les agents économiques ; tout agent économique est immédiatement au fait de la réalité monétaire. Le monétarisme a eu ses heures de gloire dans les années 70 et 80 avec : - Au début des 70’s, l’éclatement du SMI et la mise en place d’un système de changes semiflexibles - L’arrivée de Paul Volker (disciple de Friedman) à la tête de la Fed en 1979 - L’influence de ses théories sur la révolution néo-libérale partout dans le monde, en particulier celle de Reagan et de Thatcher