DEVOIR SURVEILLE N°4 Date : 14 novembre 2015 Classe : TES
(4 heures)
DISSERTATION S’APPUYANT SUR UN DOSSIER DOCUMENTAIRE
Il est demandé au candidat :
- de répondre à la question posée par le sujet ;
- de construire une argumentation à partir d’une problématique qu’il devra élaborer ;
- de mobiliser des connaissances et des informations pertinentes pour traiter le sujet, notamment celles
figurant dans le dossier ;
- de rédiger, en utilisant le vocabulaire économique et social spécifique et approprié à la question, en
organisant le développement sous la forme d’un plan cohérent qui ménage l’équilibre des parties. Il sera
tenu compte, dans la notation de la clarté de l’expression et du soin apporté à la présentation.
La croissance économique est-elle durable ?
Document 1 : Consommation d’énergie des pays de l’Union européenne
1.a Les sources d’énergie consommée au sein de l’UE (à 27) en 2008
Répartition des sources d’énergie (en %)
Pétrole
36,5
Gaz
24,5
Charbon et lignite
17
Nucléaire
13,4
Renouvelables
8,4
Autres
0,2
Agence européenne de l’environnement, août 2011.
1.b Intensité énergétique de la production de richesses
Consommation intérieure brute d’énergie
1995
2009
Baisse en %
Allemagne
183
151
- 17,8
Danemark
134
107
- 20,7
Finlande
283
222
- 21,5
France
192
164
- 14,5
Irlande
166
109
- 34,0
Italie
150
140
- 6,8
Pays-Bas
214
174
- 18,7
Portugal
200
187
- 6,7
Royaume-Uni
164
114
- 30,7
Suède
223
148
- 33,7
UE (15 pays)
182
149
- 18,1
UE (27 pays)
209
165
- 20,9
Unités : en kg équivalent pétrole pour 1 000 euros de PIB.
Lecture : En 1995, la quantité d’énergie nécessaire pour produire 1 000 euros de PIB, était de 192 kg équivalent
pétrole en France.
Eurostat, novembre 2011.
Document 2 : Empreinte écologique et Indice de développement humain par pays ou
ensembles de pays
Remarques :
- L’ « empreinte écologique » est une mesure de la consommation humaine de ressources naturelles. On la
mesure en hectares globaux (hag) par personne. (Ici en hectares par personnes)
- La biocapacité moyenne mondiale (capacité à produire une offre continue en ressources renouvelables et à en
absorber les déchets) est de 1,8 hag par personne.
- IDH des pays classés par le PNUD dans « développement humain très élevé » : 0,882.
- IDH des pays classés par le PNUD dans « développement humain élevé » : 0,728.
Document 3 :
Dans les brunes hivernales, le premier port européen semble avaler Rotterdam. Long d’une soixantaine de
kilomètres, il accueille les grandes enseignes de la chimie, du pétrole, du gaz, avec des raffineries par dizaines,
soit 30 O00 à 40 000 emplois directs.
Au siège de Deltalinqs, organisation qui regroupe quelque 600 entreprises du port, Ger Van Tongeren,
responsable du programme « Energy Forum », voué au développement durable, évalue le chemin parcouru.
« Dans les années 1960, l'activité industrielle croissait et les émissions de CO2 explosaient. Aujourd'hui, nous sommes
probablement le premier port vert d'Europe ».
Deltalinqs veut faire des contraintes de l’activité industrielle très polluante de Rotterdam un moteur de la
croissance verte. L’un des projets phares, symboles de l’ « économie circulaire1 » prônée par les autorités, est le
pipeline qui permettra la récupération de la vapeur émise par plusieurs entreprises, son transport et son
utilisation pour chauffer tout un quartier de la ville. « Beaucoup d'installations rejettent de la vapeur dans
l’atmosphère, d'autres en ont besoin et la fabriquent en brûlant du gaz et en émettant du CO2 », explique Hans Van
Vliet, consultant de Deltalinqs.
Pour autant, ce qui paraît de bon sens est complexe à réaliser. Les températures de rejet et de consommation ne
sont pas les mêmes et la construction dun pipeline central de grande section nécessite de gros investissements.
Pim de Vries, directeur d'AVR, la société exploitant linstallation, résume la situation : « Nous allons commencer la
construction du pipeline sur quelques kilomètres avec trois sociétés connectées seulement. En 2013, au bout des 26
km de pipeline, 50 000 foyers seront chauffés, dont un hôpital, et nous espérons que les autres entreprises, situées
sur son trajet entreront dans le dispositif ››.
1. L” économie circulaire - ou écologie circulaire - entend réparer les dégâts environnementaux de la croissance industrielle en cherchant à
recycler les sous-produits ou les déchets industriels.
mi Barroux, « Rotterdam, port d’attache de l'économie circulaire ››,
Le Monde, 10 mars 2012.
T.S.V.P.
Document 4 :
Consommer des produits près de chez soi, c’est non seulement encourager l’emploi local, mais aussi sinscrire
dans une démarche vertueuse sur le plan écologique. Est-il en effet bien raisonnable de trouver de l’eau minérale
française en Asie, de la bière mexicaine à Paris et de manger des haricots verts de contresaison livrés par avion-
cargo ?
Pour autant, l’idée que la relocalisation de l’économie constitue une solution aux défis écologiques doit être
discutée. En pratique, l’essentiel de nos consommations énergétiques est lié au chauffage et aux transports par la
route des personnes et des marchandises à l’intérieur de lespace national. Le transport maritime représente une
faible dépense dénergie par tonne transportée, ce qui en fait un moyen de transport très efficace sur le plan
énergétique (à la différence de l’avion ou du camion).
L’enjeu, sur le plan écologique n’est pas tant de produire « tout près de chez soi » que de modifier nos modes de
production, de consommation, de déplacement, d’habitat pour rendre léconomie soutenable. Il faut aussi
imposer aux fabricants de produire des biens entièrement recyclables, et développer une économie de
fonctionnalité1 la vente de l’usage du bien se substitue à la vente du bien lui-même.
Le reste est aussi affaire de culture et choix démocratique. Nous vivons désormais dans un monde fini. Il nous
faut apprendre à vivre plus sobrement. S’il est urgent de rétablir la cohésion sociale dans nos pays, cela ne plaide
pas pour autant en faveur d’un repli des sociétés sur un espace restreint. Une part non négligeable du commerce
mondial porte sur des biens non substituables auxquels il n’est pas sûr que nous souhaitions renoncer, banane,
café ou chocolat. De multiples biens d'équipement nécessaires à la production efficace de biens qui nous sont
indispensables, sont produits par quelques fabricants souvent localisés à l’autre bout du monde.
1. L’économie de fonctionnalité - ou l’économie de l’usage - consiste à remplacer la vente de biens par la vente de leur usage, c’est-à-dire une
location. Les services de vélo en libre-service, comme Velo’v à Lyon ou Vélib’ à Paris, illustrent cette logique.
Philippe Frémeaux, « Relocalisation, la panacée anticrise ? »,
in Alternatives Internationales, hors-série n° 10, janvier 20 l 2.
CORRECTION DE LA DISSERTATION du DS n°4 du 14 novembre 2015
Introduction
Accroche : Lorsqu'en octobre 2009, Mohamed Nasheed, président des Maldives jusqu'en février 2012, organise
un conseil des ministres sous l'eau, il obtient l'attention des médias internationaux : face à la montée des eaux, la
population de l'archipel est déjà contrainte de se déplacer d'une île à l'autre.
Définitions et Problématique : La croissance continue de la production mondiale de richesses accentue les
émissions de gaz à effet de serre et menace les équilibres naturels dans des proportions qui risquent de s'avérer
insupportables. Cette externalité négative pose la question de sa soutenabilité.
La satisfaction du bien-être des générations présentes peut menacer celui des générations futures si les
modalités actuelles de la production mondiale empêchent la transmission d'un stock de capitaux, naturel, social
ou humain, au moins équivalent.
À quelles conditions économiques, environnementales et sociales la croissance économique mondiale pourrait-
elle demeurer supportable pour l'humanité ?
Annonce du plan : Une croissance productiviste à la fois périlleuse, destructrice et énergivore est devenue
impossible (I). Mais d'autres formes de croissance dont le contenu reste encore à battre peuvent être
considérées comme soutenables (ll).
I- La croissance économique actuelle est soumise à un verrou écologique
Annonce des sous-parties : Les changements climatiques en cours et à venir (A) et les gaspillages de ressources
naturelles (B) constituent des barrières environnementales qui interdisent une hausse illimitée de la production
de richesses.
A) Une croissance économique qui provoque des changements climatiques n'est pas soutenable (Doc
1)
- La hausse de la température moyenne à la surface de la Terre provoque déjà des déplacements de population
dans les Maldives et la fonte des glaciers himalayens menace à terme l'accès à l'eau et la sécurité alimentaire du
Bhoutan, du Bangladesh ou du Népal. La production d'énergie par combustion de pétrole, de gaz naturel ou de
charbon est fortement émettrice de CO2. Or ces trois sources d'énergie satisfont encore en 2008 respectivement
36,5 %, 24,5 % et 17 % de la consommation énergétique au sein de l'Union européenne à 27 (doc. 1a). Limiter la
hausse des émissions de CO2 suppose à la fois de consommer moins d'énergie par euro produit et moins de
combustibles fossiles par euro d'énergie produit. Les pays européens ont déjà réussi à améliorer leur efficience
énergétique : baisse de 20,9 % entre 1995 et 2009. En Suède, la quantité d'énergie nécessaire pour produire
1000 euros de PIB est passée de 223 kg équivalent pétrole à 148, soit une baisse de 33% (doc. 1b).
- Mais la réduction des émissions totales de GES est soumise à l'existence d'un effet rebond : la hausse de la
production mondiale, liée à la croissance démographique et au développement industriel des pays émergents,
vient contrecarrer la baisse des émissions de GES obtenue grâce à une production moins gourmande en énergie.
La croissance économique mondiale, encore trop énergivore, est donc bien limitée par le risque climatique.
B) Une croissance qui épuise les ressources naturelle n’est pas soutenable (CP et doc 2)
- Le réchauffement climatique n'est pas la seule contrainte qui pèse sur la croissance économique. Le pétrole
s'épuise et la production mondiale atteint le pic à partir duquel son exploitation va commencer à décroître et le
coût de production commencer à augmenter. L’épuisement des gisements conventionnels oblige les producteurs
à se tourner vers un pétrole non conventionnel ou plus difficile d'accès (sous-marin…).
- Un développement humain fondé notamment sur une croissance économique peu sobre en consommation de
capital naturel, même renouvelable, n'est pas non plus soutenable. Tous les pays qui affichent un indice de
développement humain (IDH) élevé ou très élevé, soit au-delà de 0,728 selon les derniers seuils fixés par le
PNUD, ont une empreinte écologique au-dessus de 1,8 hag par personne (doc. 2). Or la demande exercée par un
pays sur les ressources renouvelables -terres cultivables ou constructibles, poissons, forêts, surfaces de pâturage
- ne peut être supportable qu'en dessous de la biocapacité moyenne mondiale, soit 1,8 hag par personne. La
généralisation du développement humain, dans les conditions actuelles de la croissance économique, est donc
impossible.
Transition : Une croissance économique fondée sur la seule hausse durable du PlB et les gains de productivité ne dit
donc rien sur la nécessité de sauvegarder les ressources naturelles et sur le bien-être des générations futures.
II- Pour être soutenable, la croissance économique est à redéfinir
Annonce des sous-parties : Une croissance « verte ›› (A) répond à un modèle de faible soutenabilité. Refusant
toute destruction de capital naturel, une transformation radicale du paradigme de croissance, restant à définir,
(B) répond, elle, à un modèle de forte soutenabilité.
A) Une croissance « verte ›› est faiblement soutenable (docs 2 et 3)
- La croissance dite « verte ›› est fondée sur la substitution entre les différents types de capitaux, une approche
théorique d'inspiration néoclassique. Il s'agit de remplacer du capital naturel par du capital artificiel, des
menaces climatiques par des connaissances scientifiques (capital humain), bref de parier sur le progrès
technique pour surmonter le verrou écologique.
- Au début du développement d'un pays, la croissance économique provoque une pollution importante, mais la
poursuite de cette croissance permet de dégager des ressources financières suffisantes pour engager des travaux
de recherche ou investir dans des processus de production moins désastreux. Ainsi le port de Rotterdam s'est
engagé dans l'économie circulaire (doc. 3). La construction du pipeline qui permettra d'ici à 2013 de recycler
pour le chauffage urbain la vapeur d'eau rejetée par les activités industrielles mobilise d'importants moyens
techniques et financiers.
- Toutefois, l'existence d'une telle relation entre la croissance et l'environnement ne peut être généralisée à
l'ensemble des externalités environnementales. Plus le PIB par habitant et l'IDH d'un pays sont élevés plus
l'empreinte écologique est forte. La France, dont I'IDH est de 0,88 en 2007, dispose d'une empreinte écologique
de 5 hag par habitant, soit près de trois fois la biocapacité moyenne de la planète (doc. 2).
B) Une transformation radicale des modalités de la croissance est fortement soutenable (CP et doc 4)
- Pour les « objecteurs de croissance qui défendent un nouveau paradigme de croissance, la destruction de
capital naturel est insupportable car irréversible. Par exemple, remplacer la pêche en mer par l'aquaculture n'est
pas viable à long terme car les poissons d'élevage consomment aussi une grande quantité d'anchois, de merlans
ou de harengs, déjà menacés d'extinction. La substitution entre les différents types de capitaux n'est donc pas
envisageable. L’entreprise prélève sur ses profits les ressources nécessaires ou amortissements qui permettront
de renouveler le capital fixe obsolète. Or le capital naturel est à envisager comme n'importe quel autre bien de
production. Chaque cycle de production doit donc inclure les conditions, notamment financières, de son
renouvellement.
- Les partisans d'une soutenabilité forte ne croient pas en la réconciliation entre l'environnement et la croissance
illimitée de la quantité de biens et de services produits. Ils refusent donc le paradigme de croissance « verte » et
préfèrent parier sur une croissance plus qualitative : l'agriculture biologique et de proximité contre l'agriculture
intensive, l'économie de fonctionnalité contre la croissance « verte ». La réorientation de la consommation vers
les fournisseurs locaux est envisageable pour un grand nombre de produits comme l'eau en bouteille ou les
haricots verts. Dans une économie de fonctionnalité, les consommateurs ne s'approprient pas les biens mais les
partagent : « Autolib » à Paris ou « Vélo'v » à Lyon (doc. 4). Dans ce cas, les entreprises produisent moins de
biens mais plus de services. Il n'y a ni baisse de la croissance ni baisse des emplois. L’accroissement des
«richesses ›› est lié à l'amélioration de la qualité des biens et des services produits et non à la hausse des
quantités. Les emplois créés répondent à la nécessaire amélioration de la qualité des services ou se déversent
vers les nouveaux secteurs de l'économie de fonctionnalité.
Conclusion
Bilan : La croissance économique quantitative ignorant les contraintes imposées par la nature est limitée par des
barrières environnementales. Une croissance fondée sur la recherche et développement autoriserait une
certaine destruction de capital naturel à condition que le progrès technique fournisse des solutions à son
remplacement. Refuser cette destruction du capital naturel suppose un nouveau paradigme : troquer la logique
quantitative de la croissance par une logique centrée sur la progression de la qualité et de la durabilité des biens
et services produits.
Ouverture possible : La compatibilité entre la croissance économique, indispensable au maintien d'un certain
niveau de vie, et la préservation de l'environnement pose une question presque inédite à la science économique.
Quelles concessions les générations actuelles sont-elles prêtes à faire pour sauvegarder le bien-être des
générations futures ? La réponse constitue un nouvel enjeu de société et repose sur des choix politiques
contradictoires.
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