Statut des fonctionnaires : les premières pistes du projet

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CENTRE RHONE –ALPES D’INGENERIE SOCIALE SOLIDAIRE & TERRITORIALE
REVUE DE PRESSE
Du 1ER AU 7 JUILLET 2015
Droit du travail : vous avez dit simplification ?
Les crises du 1% logement
Pourquoi les protestations de rue ne marchent pas
Quand les entreprises logent leurs salariés : historique et enjeux
Alliances et désalliances dans la famille mutualiste de la fonction
publique
CE : mettre en conformité sa comptabilité
La fonction publique souffre d'un manque d'attractivité
L’intéressement impacte négativement la rémunération fixe
La faim dans le monde recule, mais 805 millions de personnes souffrent
encore de sous-alimentation chronique
Les Français acceptent-ils l'impôt ?
L'État islamique, quelle géographie ?
LE TRIBUNAL DE COMMERCE DE LYON SCELLE DÉFINITIVEMENT LA FIN
DE L'AVENTURE ERAI
BON SIGNE : L'EMPLOI INTÉRIMAIRE RETROUVE DES COULEURS EN
RHÔNE-ALPES
Travail : le numérique met-il fin au salariat ?
Le Cercle des économistes propose douze mesures pour réhabiliter le
travail
Contrat de travail : remplacement en cascade et CDD sans terme précis
Le gouvernement veut précariser davantage la fonction publique
hospitalière
Après la réforme, la formation n'est plus continue (1ère partie)
Crises, Europe et katastroïka
Logement et sécurisation des mobilités géographiques
Surprise! Pour le FMI le seul scénario viable est d’annuler une partie de
la dette grecque
LETTRE OUVERTE de la CES
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Droit du travail : vous avez dit simplification ?
par Claude Emmanuel Triomphe - 22 Juin 2015
La déclaration des droits du travail cosignée par Robert Badinter, ancien ministre et figure emblématique de la
gauche française, et par Antoine Lyon-Caen, grand juriste spécialiste du droit du travail, n'a pas fini de faire parler
d'elle. s sa sortie, la voilà regardée avec intérêt par une partie du patronat, mais aussi des forces politiques de
droite - et de la droite de la gauche ! - mais aussi pourfendue par une grande partie de la gauche qui y voit une
trahison, une de plus ! Le débat français sera-t-il en cette matière différent de celui qui agite l'Union Européenne
et sa régulation toujours plus « smart » et toujours plus « fit » ? Rien n'est moins sûr, hélas...
Issue du petit opuscule « Le travail et la loi » publiée par les deux compères, cet appel à la simplification ne peut
nous laisser indifférent. La première raison est presque anecdotique. Il y a près de 25 ans, l'auteur de cet édito
publiait dans Libération une tribune intitulée « Pour un Code du travail en 100 articles » qui lui valut des
remarques critiques et acerbes, notamment d'un certain Antoine Lyon-Caen... A l'époque cette simplification lui
paraissait aller à contre-courant de l'histoire d'un monde complexe, et donc d'un droit lui aussi de plus en plus
complexe. Qu'est-ce qui a donc pu le faire changer d'avis ?
Les deux auteurs mettent en avant deux séries d'arguments : d'une part le chômage de masse qualifié de « grave
maladie sociale », qui est devenu à la fois angoisse familiale et névrose collective. Et de l'autre la complexité des
règles, notamment pour les PME, dont « l'intelligibilité est médiocre et l'utilité, incertaine ». Si le second argument
est difficilement contestable - et ce dans bien des domaines du droit - le premier l'est. Les règles de droit social
expliquent-elles la désindustrialisation française ? Le bas niveau des dépenses de R&D ? Le retard en matière de
nouvelles technologies mais aussi en matière de management ? La faiblesse, comparée à l‘Allemagne des
entreprises de taille intermédiaire ? Le gonflement du secteur public ? Difficile d'y voir un lien et aucune étude n'a
pu avancer ici le moindre argument sérieux, ni établir ,comme le disent les Anglo Saxons, une évidence. Il y a ici
de la part de nos deux signataires une pensée peu étayée, pour ne pas dire un poncif, quelque peu navrante. La
Belgique, l'Allemagne ou encore l'Autriche sont des pays à droit social dense et complexe qui s'en tirent plutôt bien
côté chômage.
Venons-en donc à l'intelligibilides règles. Et ce, en particulier pour ce qui a trait au contrat de travail puisque
celui-ci représente la base de tout ou presque, Badinter et Lyon-Caen excluant du périmètre de leurs propos ce qui
a trait aux relations collectives ou à la santé au travail. Et de décliner alors 50 principes fondamentaux, à charge
pour les pouvoirs publics et les partenaires sociaux de les décliner par tout moyen utile. Pourtant à leur lecture
une certaine gêne s'installe. C'est moins la rédaction de tel ou tel article qui dérange que ce à quoi renvoie
l'ensemble. Alors que la troisième révolution industrielle bat son plein, que les univers productifs sont en pleine
évolution, que de nouvelles relations de travail - souvent hors contrat de travail - apparaissent, que les périmètres
des entreprises sont de plus en plus instables, que la production est liée aux chaînes globales de valeur et non
plus à des maillons pris isolément, ces principes fondamentaux n'en soufflent mot et renvoient à des univers
stables et aux frontières nettes. La gestion des transitions et des mobilités professionnelles est quasiment hors
champ de l'énonciation des auteurs. Sur ce point comme sur d'autres, ceux-ci raisonnent à droit constant et c'est
bien regrettable. Au passage, la Charte Sociale européenne, comprend elle aussi des principes fondamentaux et de
portée moins limitée.
Enfin, l'ambition d'une intelligibilité des règles est-elle vraiment au rendez-vous ? Dégager des principes est
nécessaire mais quid de leurs déclinaisons ? Les accords collectifs, pour ne rien dire des décrets, n'ont rien à
envier à la loi en termes de complexité. S'il s'agit de chasser par la porte ce qui peut aisément revenir par la
fenêtre, le progrès est mince.
On le comprendra : la déclaration des droits du travail nous laisse une impression mitigée. Certes, elle contribue,
dans un contexte l'on déconstruit bien plus que l'on ne construit et sur des bases discutables, à un débat
salutaire. Il n'en reste pas moins que les causalités auxquelles elle souscrit, comme les transformations de
l'environnement qu'elle oublie, handicapent son ambition. Et qu'elle survient à un moment où le risque de
détournement et d'instrumentalisation à des fins peu ragoûtantes n'ont jamais été aussi forts. N'y a-t-il pas
d'autre alternative pour le droit du travail du 21ème siècle ?
Les crises du 1% logement
par Pierre Maréchal - 29 Juin 2015
Le dispositif dit « 1% logement » est une participation des entreprises, aussi appelée « Participation des employeurs à
l'effort de construction » (PEEC). Elle représente 0.45% de la masse salariale de l'année précédente. Aujourd'hui, l'heure
est au bilan. Quels résultats ? Quelles mutations ? Quels enjeux ? Pierre Maréchal s'est entretenu avec Jules Mathieu
Meunier, docteur en urbanisme et auteur d'une thèse sur le 1% logement.
- Le 1% logement, qui permettait de financer la construction de logements destinés aux salariés est une institution
paritaire. Est-ce que le paritarisme a fonctionné ? Est-ce que les syndicats se sont réellement impliqués ? Ne peut-on dire
que cela a principalement favorisé les salariés qualifiés des grandes entreprises et peu les salariés des petites
entreprises, précaires...
Quand on s'intéresse à l'histoire du 1 % logement, on se rend compte que le paritarisme n'a jamais véritablement fonctionné
comme prévu. Le dispositif semble remplir son office pendant les années 1953-1973, période marquée par une convergence de
l'Etat, du patronat et des syndicats de salariés autour d'une même approche productiviste s'incarnant dans l'accroissement de
l'offre de logements HLM et la construction des « grands ensembles ». Mais cette convergence est alors l'expression d'un
consensus par défaut. Elle masque les limites qui caractérisent très tôt l'action des organisations syndicales et patronales à la tête
du 1 % logement. Ces limites, qui se manifesteront à partir des années 1970-1980, tiennent aux divisions qui traversent la sphère
interprofessionnelle sur un certain nombre de sujets et se traduisent par un déficit de portage politique du dispositif par les acteurs
paritaires.
Les syndicats représentant les salariés ont une part de responsabilité certaine dans ce défaut de la gestion paritaire. Leur
intervention témoigne de la difficulté que représente pour eux le fait de mener de front action revendicative et présence dans des
institutions telles que le 1 % logement. Cette difficulté tient aux faiblesses symptomatiques du syndicalisme français : morcellement
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du paysage syndical qui pousse les organisations à se faire concurrence entre elles, permanence dans certaines organisations
d'une culture révolutionnaire peu disposée à jouer le jeu du paritarisme ou à prendre en charge la question du logement,
propension des syndicats à méconnaître les aspirations de certaines catégories de salariés. Mais cette difficulté résulte également
de facteurs exogènes aux syndicats de salariés.
Parmi ceux-ci, on peut mentionner le conservatisme d'un patronat français majoritairement peu enclin à associer pleinement les
représentants des salariés à la gestion des comités interprofessionnels du logement (CIL). L'architecture institutionnelle du
paritarisme joue également un rôle décisif, l'inscription des acteurs paritaires dans la sphère interprofessionnelle ayant tendance à
les couper de l'expression des besoins en logements émanant des individus dans les entreprises.
Les limites du paritarisme du 1 % logement sont à l'origine d'une série de dysfonctionnements qui entameront progressivement la
légitimité de l'institution à partir des années 1980. L'existence d'inégalités dans l'accès des salariés aux aides délivrées par les CIL
constitue l'un d'eux. En effet, il apparaît progressivement que les modalités de gestion de la Participation des employeurs à l'effort
de construction (PEEC) conduisent à traiter prioritairement les besoins en logements des salariés des grandes entreprises au
détriment d'autres catégories (les salariés des PME, les ouvriers peu qualifiés et les travailleurs migrants notamment), quand elles
n'excluent pas purement et simplement certaines composantes du salariat du champ des bénéficiaires - les jeunes en insertion
professionnelle et les demandeurs d'emploi.
Plusieurs autres aspects de l'intervention du 1 % logement sont pointés par les critiques. Elles ciblent en particulier l'inertie à
l'œuvre dans l'offre de prestations délivrée par le 1 % logement - en complet décalage avec la transformation des besoins en
logement qui s'opère au même moment. Elles pointent également le déficit démocratique qui caractérise le fonctionnement des
instances politiques du 1 % logement, conséquence des difficultés rencontrées par les représentants des salariés pour peser sur
des processus de prise de décision contrôlés par les représentants des employeurs et surtout la technostructure des CIL.
- Depuis 2009, le 1% a subi (et continue à subir) de grandes mutations. Lesquelles et pourquoi ?
Le 1 % logement est engagé depuis plusieurs décennies dans un processus de transformation qui se nourrit à la fois d'une perte
de légitimité de l'institution et de l'émergence au sein de l'Etat d'une tentation de reprise en main du dispositif. Cette tentation
connaît périodiquement des traductions en actes à partir du milieu des années 1980. Dans les faits, la reprise en main du 1 %
logement procède de trois dynamiques interdépendantes : la concentration du pouvoir de décision en matière d'orientation des
fonds au profit des acteurs nationaux de l'institution, le transfert d'une partie du coût de la politique du logement vers la PEEC et le
renforcement du rôle de l'Etat dans la définition des emplois du 1 % logement.
Les mutations survenues depuis 2009 peuvent s'interpréter au regard du rapport qu'elles entretiennent avec chacune de ces
dynamiques. Une caractéristique notable concernant les réformes récentes provient du fait qu'elles ne se situent pas
nécessairement dans le prolongement des épisodes précédents. C'est le cas en particulier de la réforme insérée dans la loi du 24
mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) qui modifie la répartition du pouvoir de décision en matière
d'affectation des fonds issus de la PEEC entre l'Etat et les acteurs paritaires. En réinscrivant la définition des emplois du 1 %
logement dans un espace de négociation entre l'Etat et les partenaires sociaux, cette réforme tranche en effet avec la loi de
mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (MOLLE) du 25 mars 2009 qui avait transféré au pouvoir législatif et
réglementaire la responsabilité d'élaborer la politique nationale d'emploi des fonds du 1 % logement.
Cette inflexion s'explique alors en partie par la volonté de l'exécutif issu de l'alternance politique de 2012 de se démarquer du
précédent gouvernement au niveau de l'exercice du pouvoir. Alors que le volontarisme politique du pouvoir sarkozyste et l'ambition
affichée de lutter contre « l'impuissance publique » pouvaient conduire ce dernier à court-circuiter les corps intermédiaires, le
gouvernement socialiste a très tôt fondé une partie de sa légitimité sur sa propension à renforcer le dialogue social et à associer
pleinement les partenaires sociaux à la production de l'action publique dans les domaines les concernant.
À cette exception près - qui n'a cependant rien de négligeable -, les transformations récentes à l'échelle d'Action Logement
s'inscrivent dans un rapport de continuité évident avec les dynamiques à l'œuvre depuis plusieurs décennies. C'est le cas par
exemple des réformes portant sur l'utilisation des fonds issus de la PEEC. Sur ce point, il est en effet manifeste que la contrainte
budgétaire pèse sur les choix de l'exécutif quelles que soient les majorités se succédant à la tête de l'Etat. L'instauration en 2012
d'une contribution d'Action Logement au Fond national d'aide au logement (FNAL) et les débats actuels sur la délimitation des
publics bénéficiaires du futur dispositif de sécurisation des risques locatifs témoignent que la position de l'Etat reste largement
guidée par la tentation de transférer sur Action Logement une part substantielle du financement de la politique du logement.
Une forme de continuité comparable se manifeste sur la question de la répartition des responsabilités en matière de gestion et
d'affectation des fonds entre acteurs locaux et acteurs nationaux d'Action Logement. À l'instar de la réforme de 1996 portant
création de l'Union des Entreprises et des Salariés pour le Logement UESL, ou de celle de 2014 qui visait à conférer à cette me
UESL les moyens d'une autorité renforcée sur les CIL, la réforme de structure amorcée par les partenaires sociaux en avril 2015
participe clairement d'une logique de transfert du pouvoir de décision vers les échelons centraux de l'institution. Cette réforme est
actuellement en cours d'élaboration mais on sait déjà qu'elle modifiera en profondeur l'architecture d'Action Logement.
L'organisation actuelle, conçue autour d'une te de réseau (l'UESL) et d'une vingtaine d'organismes territoriaux chargés de la
collecte et de l'utilisation des fonds (les CIL), sera supprimée. À la place sera créée une organisation structurée autour de trois
entités nationales - une structure faîtière pilotant l'ensemble du groupe, un pôle unique de services chargé de la collecte et de la
distribution des aides aux entreprises et un pôle immobilier chargé de mettre en œuvre la politique immobilière du groupe - et de
délégations régionales ayant vocation à garantir la déclinaison des politiques nationales au niveau des territoires. Cette forme,
qui a été décidée au nom de la nécessaire harmonisation des interventions d'Action Logement et de la volonté de juguler les
dysfonctionnements de l'institution, marque donc une nouvelle étape dans la concentration du dispositif et la réduction de
l'autonomie des acteurs paritaires territoriaux.
- Quels sont les enjeux ?
L'avenir d'Action Logement dépend étroitement de la capacité des acteurs paritaires de réformer ce dispositif dans le sens d'une
efficacité accrue de ses interventions. Faute de quoi la perte de légitimité d'Action Logement aura pour effet de maintenir cette
institution sous la menace d'une budgétisation des fonds issus de la PEEC - menace qui semble aujourd'hui devoir être prise au
sérieux compte tenu de la vigueur de la contrainte budgétaire.
L'intervention des partenaires sociaux est attendue en particulier sur deux enjeux centraux. Le premier concerne le positionnement
d'Action Logement vis-à-vis des territoires. La légitimité d'Action Logement repose notamment sur sa propension à articuler ses
interventions avec les politiques mises en œuvre par les collectivités territoriales en matière d'habitat. Cet impératif a été accentué
par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales qui, en ouvrant la possibilité de déléguer aux collectivités la
définition de la programmation neuve d'HLM, a sensiblement renforcé leurs prérogatives dans ce domaine de l'action publique.
L'enjeu n'est pas mince pour Action Logement, dans la mesure ses membres ont toujours manifesté pour la plupart une
réticence à amorcer des logiques partenariales avec les élus locaux, ceci par peur de perdre la maîtrise de l'orientation des fonds
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issus de la PEEC. Il n'est pas certain que la réforme en cours d'élaboration apporte une réponse probante sur ce point. Elle a en
tout cas indéniablement tendance à créer un facteur d'incertitude quant à la capacité de la future organisation centralisée d'Action
Logement de préserver l'ancrage territorial de l'institution et de cultiver un lien de proximité étroit avec ses partenaires locaux que
sont les entreprises et les collectivités.
Le second enjeu engageant l'avenir d'Action Logement concerne l'emploi des fonds issus de la PEEC. Pour la plupart des
observateurs, la perte de légitimité de l'institution tient largement au fait que les acteurs paritaires se montrent incapables depuis
plusieurs décennies de faire évoluer l'utilisation des fonds en relation avec la transformation des besoins en logement. Tout porte à
croire aujourd'hui que le renforcement de la légitimité d'Action Logement passe par la réactualisation de l'offre de prestations au
regard des risques sociaux qui apparaissent depuis une quinzaine d'années au croisement de l'emploi et du logement. Sur ce point
également, les implications de la forme amorcée il y a trois mois sont relativement difficiles à apprécier. Les artisans de cette
réforme mettent en avant sa propension présumée à apporter des réponses à quelques-uns des dysfonctionnements majeurs de
l'institution (développement de pratiques concurrentielles autour de la collecte de la PEEC, tendance à engendrer des inégalités
entre les salariés dans l'accès aux aides).
Au-delà des discours de justification, il est cependant malaid'identifier une orientation attestant que la réforme est l'expression
d'un projet politique fort émanant des partenaires sociaux. Ainsi, plusieurs dispositions interrogent quant au sens des objectifs
poursuivis. On est par exemple en droit de se demander en quoi la constitution d'un pôle immobilier unique à l'échelle d'Action
Logement est de nature à produire une plus-value en direction du logement des salariés. Or, on peut estimer que la manifestation
d'une capacité des partenaires sociaux à bâtir un projet politique clair autour du lien entre emploi et logement est essentielle à la
légitimation de leur présence à la tête de l'institution. À défaut, la réforme actuelle pourrait se révéler à double tranchant, la
concentration des instruments de pilotage du dispositif à l'échelle nationale étant par essence de nature à favoriser la mise en
œuvre opérationnelle d'un éventuel projet de budgétisation de la ressource financière.
Pourquoi les protestations de rue ne marchent pas
par The Atlantic, Lina Boutaleb - 22 Juin 2015
Les protestations de rue sont au rendez-vous. De Bangkok à Caracas, de Madrid à Moscou, pas une
semaine ne s'achève sans qu'une foule massive prenne le contrôle d'un espace public dans l'une des
plus grandes villes du monde. Les motifs des protestations concernent des causes diverses : transports
publics trop coûteux, mauvaise politique de l'éducation, destruction d'un espace vert, abus policiers...
Les photos aériennes des marches anti-gouvernementales présentent régulièrement une foule
intimidante réclamant le changement avec fureur. Mais, il est surprenant que ces mouvements
n'aboutissent qu'à si peu. La fervente énergie politique mobilisée par les foules est extrêmement
disproportionnée par rapport aux résultats de ces manifestations. Metis reprend, en le traduisant, un
article publié par le site américain The Atlantic.
Certaines exceptions notables sortent du lot : En Egypte, en Tunisie, et en Ukraine, les protestations de rue ont
grandement contribué au renversement du gouvernement. Néanmoins, la majorité de ces mobilisations massives
échoue à créer des changements significatifs en politique ou en politiques publiques. Occupy Wall Street en est un
bon exemple. à l'été 2011, pas à Wall Street mais à Kuala Lumpur, le mouvement Occupy a vite pris de
l'ampleur, et était déjà présent dans les places centrales de près de 2600 villes dans le monde. Le problème se
situe à l'après-marche.
Les groupes participants n'avaient ni affiliation formelle l'un avec l'autre, ni hiérarchie claire, ni leader désigné.
Mais les réseaux sociaux ont permis au mouvement de répliquer les méthodes de camping, de protestation, de
levée de fonds, et de communication avec les médias, si bien que l'on retrouvait ces méthodes d'une place à une
autre. On scandait le même message partout : il est inacceptable que la richesse mondiale soit concentrée entre
les mains d'une élite d'un pourcent de la population, tandis que les 99 autres se démènent tant bien que mal.
Un tel mouvement, massif, et d'apparence très organisé, aurait du avoir plus d'impact. Mais non. Dans les faits,
les réponses du gouvernement consistent plus en une rhétorique apaisante qu'en des réformes politiques
majeures. La réaction du Premier Ministre turc Recep Tayyip Erdogan aux manifestations en Turquie fut agressive,
puisqu'il accusait l'opposition et les protestataires de comploter une conspiration contre lui. Il a donc essayé de
bloquer Twitter et Youtube. Un mois avant, Erdogan remportait une grande victoire aux élections locales (mais il a
depuis connu des déceptions aux élections nationales, NDLR).
Pourquoi? Comment autant de personnes motivées peuvent-elles réaliser si peu ? Une réponse se trouverait dans
les résultats d'une expérimentation conduite par Anders ColdingJorgensen de l'Université de Copenhague. En
2009, il a crée un groupe Facebook pour protester contre la démolition d'une fontaine historique, StorkFountain.
10 000 personnes ont rejoint le groupe la première semaine ; après deux semaines, le groupe comptait 27 000
membres. En fait, il n'y avait jamais eu de plan de démolition de la fontaine. Jorgensen voulait simplement
montrer à quel point il était facile de constituer un groupe majeur en utilisant un réseau social.
Dans le monde d'aujourd'hui, protester sur Twitter, Facebook, ou autres, attire sans aucun doute une foule
importante, spécialement si c'est pour manifester contre quelque chose qui porte atteinte à des personnes, des
lieux, ou des objets. Le problème se situe à l'après-marche. Il arrive que ces mobilisations aboutissent à des
confrontations violentes avec la police, mais, plus fréquemment, il ne se passe rien. Derrière les massives
protestations de rue, il n'y a que très rarement une organisation permanente capable de pérenniser le mouvement
pour permettre le changement. C'est ce qu'a relevé Zeynep Yufekci, membre du Center for Information
Technology Policy à Princeton University : « Avant Internet, le travail technique d'organisation de ce qui a trait à la
mobilisation aidait à construire une infrastructure pour la prise de décision, et à élaborer des stratégies pour
maintenir le mouvement. Aujourd'hui, les mouvements se constituent de manière autonome, souvent à leur
détriment. »
Il y a une ingénierie politique puissante dans les rues de nombreuses villes mondiales. Cette ingénierie est en
mouvement et produit une énergie politique tout aussi puissante. Mais, elle n'est pas connectée à d'autres engins,
ce qui ne permet pas au mouvement de prendre vie. Le mouvement nécessite une organisation capable de
transformer ces mobilisations en force de changement au niveau politique. Ainsi, il y a un besoin en réformes
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politiques majeures qui puissent donner de l'énergie autant aux idéalistes qui se sentent politiquement exclus,
qu'aux professionnels dévoués au travail journalier de construction d'une organisation politique qui sait comment
convertir une énergie politique en politiques publiques.
Comme nombre d'entre nous l'avons souligné, les réseaux sociaux peuvent aussi bien faciliter que miner la
formation de mobilisations politiques effectives. Nous sommes conscients de la force des réseaux sociaux en
matière d'identification, de recrutement, de mobilisation, de coordination des sponsors, et de levée de fonds. Mais
nous savons aussi l'ampleur du click-civisme, et du slack-civisme, qui créent une illusion de bien-être et
d'engagement par un simple click ou « like » sur une page Facebook, ou par un tweet incendiaire depuis le confort
de son ordinateur ou de son téléphone portable.
Ce que l'on a observé ces dernières années relève d'une popularisation des marches de rue, démunies d'un plan
pour ce qui se passe en aval de celles-ci, et pour maintenir les protestataires engagés et intégrés dans le
processus politique. C'est la plus cente illustration de l'illusion dangereuse qui consiste à croire qu'il est possible
d'obtenir une démocratie sans partis politiques, et que les protestations de rue basées sur les réseaux sociaux
constituent le moyen de changer la société, plus que le serait une organisation politique soutenue.
Quand les entreprises logent leurs salariés : historique et enjeux
par Pierre Maréchal - 29 Juin 2015
Depuis toujours, des employeurs ont s'impliquer dans le logement de leurs salariés mais les modalités de cette
implication ont fortement évolué. Les crises du logement successives ont permis de trouver des solutions nouvelles dans
lesquelles des entreprises ont pu prendre leur part. Le dispositif mis en place en France dans les années 50 notamment
par les partenaires sociaux est unique en Europe : il permet de combiner logement social et logement des salariés. Face
aux crises du logement, à la crise de l'Etat de plus en plus impécunieux, ce dispositif est aujourd'hui remis en cause.
Pierre Maréchal livre pour Metis son analyse.
Dans la représentation commune, le logement apparaît comme un bien que chaque famille se procure soit en le louant soit en
l'achetant. Les familles à faible revenu reçoivent une aide (allocation logement) de l'État et/ou elles peuvent bénéficier d'un
logement social. Apparemment aujourd'hui, le rôle des entreprises n'apparaît pas directement : pourtant il existe.
Rappel historique
Certaines formes de logements procurés par les employeurs ont quasiment disparu ou sont devenues très marginales.
Au XIXe siècle, l'ouvrier agricole était lo à la ferme, la bonne avait une chambre de bonne etc.
A la suite des révolutions industrielles, des grandes entreprises se sont implantées près des ressources naturelles, loin des villes.
Ces concentrations de main-d'œuvre ont obligé des industries à loger une partie de leur personnel dans différents types de
logement : de grandes maisons pour les cadres, maisons avec jardin pour les ouvriers qualifiés et les contremaîtres, des
baraquements pour les célibataires moins qualifiés, souvent de provenance étrangère. Quelques réalisations exemplaires ont été
réalisées comme les cités ouvrières créées par les industriels du textile de Mulhouse ou encore la cité Menier de Noisiel.
Dans les villes la main-d'œuvre était abondante, les ouvriers s'entassaient dans des logements médiocres, surpeuplés et
souvent insalubres. La question du logement et la question urbaine devenaient politiques. Les enquêteurs dénonçaient des
conditions ignobles, les hygiénistes promouvaient de nouvelles normes d'habitation, des sociétés philanthropiques se donnèrent
pour but de construire des opérations modèle. Mais bâtir des cités dédiées aux ouvriers était présenté comme une idée
révolutionnaire et dangereuse : on craignait ces concentrations de populations soit-disant prêtes à se volter. Ceci a bien été
décrit par Louis Chevalier dans « Classes laborieuses et classes dangereuses »(1958).
La deuxième moitié du XIXe siècle voit alors se développer des initiatives pour imposer progressivement des immeubles
d'habitation ouvrière répondant à des normes d'hygiène, avec l'eau courante pour commencer. Les résultats furent néanmoins
faibles en terme de nombre de logements construits car il manquait des moyens financiers, des opérateurs pour construire
suffisamment de logements de qualité.
La première loi, la loi Siegfried de 1894, permit d'aider les constructeurs à financer leurs investissements en habitations à bon
marché en apportant des prêts à taux réduit et des immunités fiscales. Une succession de lois furent ensuite votées pour tenter,
chaque fois, d'améliorer le financement des opérations qui ne se développaient pas à la hauteur des besoins.
L'idée d'impliquer les entreprises dans le financement du logement des salariés a mûri entre les deux guerres
Pendant la 1ère guerre, 450 000 logements avaient été détruits. Le résultat de trente ans (1894- 1925) d'incitations pour construire
des logements fut maigre : seulement un peu plus de 60 000 logements H BM bâtis . Pour rattraper le retard, il fallait désormais
construire 50 000 par an sur 10 ans. Mais toutes les initiatives butaient sur le problème du financement.
On a pris alors conscience que, dans les faits, certaines entreprises étaient impliquées dans le logement de leurs salariés : une
enquête de 1930 auprès des établissements commerciaux et industriels de plus de 200 salariés a montré que ces entreprises
possédaient en propre près de 350 000 logements. Pourquoi toutes les entreprises ne feraient-elles pas de même ? C'est une
question qui s'imposa dans le débat entre deux voies possibles :
• une voie « sociale » privilégiant le développement d'un parc locatif à loyer modeste pour les salariés, avec des normes modernes
d'hygiène et de confort, financé par une taxe sur les salaires. Les adeptes de cette voie prévoyaient également un système de prêt
facilitant l'accession à la propriété des salariés,
une voie patronale, libérale, c'est-à-dire fondée sur le volontariat et la liberté d'agir, privilégiant un accès au logement locatif
comme élément du contrat de travail, avec des normes de construction minimisant les coûts. L'idée d'une taxation était vivement
rejetée.
La situation était ainsi bloquée mais plusieurs éléments ont pavé la voie d'un compromis.
La crise sociale du logement devenait un problème politique et l'attitude de blocage insoutenable. La solution mise en œuvre par
certaines entreprises consistant à financer intégralement le logement conduisait à une mobilisation de fonds propres trop
importante.
De plus une partie du patronat s'engageait localement pour inventer des réponses collectives. Ainsi dans les années trente, 35
industriels se sont réunis pour fonder la Société des Cités jardins de la région parisienne. On trouve des initiatives de ce genre
dans d'autres villes, fondées sur l'adhésion volontaire du patronat.
Le compromis de l'après-guerre
Il s'est construit (pour simplifier) en deux étapes :
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