Statut des fonctionnaires : les premières pistes du projet

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Gerard CLEMENT
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CENTRE RHONE –ALPES D’INGENERIE SOCIALE SOLIDAIRE & TERRITORIALE
REVUE DE PRESSE
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Droit du travail : vous avez dit simplification ?
Les crises du 1% logement
Pourquoi les protestations de rue ne marchent pas
Quand les entreprises logent leurs salariés : historique et enjeux
Alliances et désalliances dans la famille mutualiste de la fonction
publique
CE : mettre en conformité sa comptabilité
La fonction publique souffre d'un manque d'attractivité
L’intéressement impacte négativement la rémunération fixe
La faim dans le monde recule, mais 805 millions de personnes souffrent
encore de sous-alimentation chronique
Les Français acceptent-ils l'impôt ?
L'État islamique, quelle géographie ?
LE TRIBUNAL DE COMMERCE DE LYON SCELLE DÉFINITIVEMENT LA FIN
DE L'AVENTURE ERAI
BON SIGNE : L'EMPLOI INTÉRIMAIRE RETROUVE DES COULEURS EN
RHÔNE-ALPES
Travail : le numérique met-il fin au salariat ?
Le Cercle des économistes propose douze mesures pour réhabiliter le
travail
Contrat de travail : remplacement en cascade et CDD sans terme précis
Le gouvernement veut précariser davantage la fonction publique
hospitalière
Après la réforme, la formation n'est plus continue (1ère partie)
Crises, Europe et katastroïka
Logement et sécurisation des mobilités géographiques
Surprise! Pour le FMI le seul scénario viable est d’annuler une partie de
la dette grecque
LETTRE OUVERTE de la CES
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Droit du travail : vous avez dit simplification ?
par Claude Emmanuel Triomphe - 22 Juin 2015
La déclaration des droits du travail cosignée par Robert Badinter, ancien ministre et figure emblématique de la
gauche française, et par Antoine Lyon-Caen, grand juriste spécialiste du droit du travail, n'a pas fini de faire parler
d'elle. Dès sa sortie, la voilà regardée avec intérêt par une partie du patronat, mais aussi des forces politiques de
droite - et de la droite de la gauche ! - mais aussi pourfendue par une grande partie de la gauche qui y voit une
trahison, une de plus ! Le débat français sera-t-il en cette matière différent de celui qui agite l'Union Européenne
et sa régulation toujours plus « smart » et toujours plus « fit » ? Rien n'est moins sûr, hélas...
Issue du petit opuscule « Le travail et la loi » publiée par les deux compères, cet appel à la simplification ne peut
nous laisser indifférent. La première raison est presque anecdotique. Il y a près de 25 ans, l'auteur de cet édito
publiait dans Libération une tribune intitulée « Pour un Code du travail en 100 articles » qui lui valut des
remarques critiques et acerbes, notamment d'un certain Antoine Lyon-Caen... A l'époque cette simplification lui
paraissait aller à contre-courant de l'histoire d'un monde complexe, et donc d'un droit lui aussi de plus en plus
complexe. Qu'est-ce qui a donc pu le faire changer d'avis ?
Les deux auteurs mettent en avant deux séries d'arguments : d'une part le chômage de masse qualifié de « grave
maladie sociale », qui est devenu à la fois angoisse familiale et névrose collective. Et de l'autre la complexité des
règles, notamment pour les PME, dont « l'intelligibilité est médiocre et l'utilité, incertaine ». Si le second argument
est difficilement contestable - et ce dans bien des domaines du droit - le premier l'est. Les règles de droit social
expliquent-elles la désindustrialisation française ? Le bas niveau des dépenses de R&D ? Le retard en matière de
nouvelles technologies mais aussi en matière de management ? La faiblesse, comparée à l‘Allemagne des
entreprises de taille intermédiaire ? Le gonflement du secteur public ? Difficile d'y voir un lien et aucune étude n'a
pu avancer ici le moindre argument sérieux, ni établir ,comme le disent les Anglo Saxons, une évidence. Il y a ici
de la part de nos deux signataires une pensée peu étayée, pour ne pas dire un poncif, quelque peu navrante. La
Belgique, l'Allemagne ou encore l'Autriche sont des pays à droit social dense et complexe qui s'en tirent plutôt bien
côté chômage.
Venons-en donc à l'intelligibilité des règles. Et ce, en particulier pour ce qui a trait au contrat de travail puisque
celui-ci représente la base de tout ou presque, Badinter et Lyon-Caen excluant du périmètre de leurs propos ce qui
a trait aux relations collectives ou à la santé au travail. Et de décliner alors 50 principes fondamentaux, à charge
pour les pouvoirs publics et les partenaires sociaux de les décliner par tout moyen utile. Pourtant à leur lecture
une certaine gêne s'installe. C'est moins la rédaction de tel ou tel article qui dérange que ce à quoi renvoie
l'ensemble. Alors que la troisième révolution industrielle bat son plein, que les univers productifs sont en pleine
évolution, que de nouvelles relations de travail - souvent hors contrat de travail - apparaissent, que les périmètres
des entreprises sont de plus en plus instables, que la production est liée aux chaînes globales de valeur et non
plus à des maillons pris isolément, ces principes fondamentaux n'en soufflent mot et renvoient à des univers
stables et aux frontières nettes. La gestion des transitions et des mobilités professionnelles est quasiment hors
champ de l'énonciation des auteurs. Sur ce point comme sur d'autres, ceux-ci raisonnent à droit constant et c'est
bien regrettable. Au passage, la Charte Sociale européenne, comprend elle aussi des principes fondamentaux et de
portée moins limitée.
Enfin, l'ambition d'une intelligibilité des règles est-elle vraiment au rendez-vous ? Dégager des principes est
nécessaire mais quid de leurs déclinaisons ? Les accords collectifs, pour ne rien dire des décrets, n'ont rien à
envier à la loi en termes de complexité. S'il s'agit de chasser par la porte ce qui peut aisément revenir par la
fenêtre, le progrès est mince.
On le comprendra : la déclaration des droits du travail nous laisse une impression mitigée. Certes, elle contribue,
dans un contexte où l'on déconstruit bien plus que l'on ne construit et sur des bases discutables, à un débat
salutaire. Il n'en reste pas moins que les causalités auxquelles elle souscrit, comme les transformations de
l'environnement qu'elle oublie, handicapent son ambition. Et qu'elle survient à un moment où le risque de
détournement et d'instrumentalisation à des fins peu ragoûtantes n'ont jamais été aussi forts. N'y a-t-il pas
d'autre alternative pour le droit du travail du 21ème siècle ?
Les crises du 1% logement
par Pierre Maréchal - 29 Juin 2015
Le dispositif dit « 1% logement » est une participation des entreprises, aussi appelée « Participation des employeurs à
l'effort de construction » (PEEC). Elle représente 0.45% de la masse salariale de l'année précédente. Aujourd'hui, l'heure
est au bilan. Quels résultats ? Quelles mutations ? Quels enjeux ? Pierre Maréchal s'est entretenu avec Jules Mathieu
Meunier, docteur en urbanisme et auteur d'une thèse sur le 1% logement.
- Le 1% logement, qui permettait de financer la construction de logements destinés aux salariés est une institution
paritaire. Est-ce que le paritarisme a fonctionné ? Est-ce que les syndicats se sont réellement impliqués ? Ne peut-on dire
que cela a principalement favorisé les salariés qualifiés des grandes entreprises et peu les salariés des petites
entreprises, précaires...
Quand on s'intéresse à l'histoire du 1 % logement, on se rend compte que le paritarisme n'a jamais véritablement fonctionné
comme prévu. Le dispositif semble remplir son office pendant les années 1953-1973, période marquée par une convergence de
l'Etat, du patronat et des syndicats de salariés autour d'une même approche productiviste s'incarnant dans l'accroissement de
l'offre de logements HLM et la construction des « grands ensembles ». Mais cette convergence est alors l'expression d'un
consensus par défaut. Elle masque les limites qui caractérisent très tôt l'action des organisations syndicales et patronales à la tête
du 1 % logement. Ces limites, qui se manifesteront à partir des années 1970-1980, tiennent aux divisions qui traversent la sphère
interprofessionnelle sur un certain nombre de sujets et se traduisent par un déficit de portage politique du dispositif par les acteurs
paritaires.
Les syndicats représentant les salariés ont une part de responsabilité certaine dans ce défaut de la gestion paritaire. Leur
intervention témoigne de la difficulté que représente pour eux le fait de mener de front action revendicative et présence dans des
institutions telles que le 1 % logement. Cette difficulté tient aux faiblesses symptomatiques du syndicalisme français : morcellement
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du paysage syndical qui pousse les organisations à se faire concurrence entre elles, permanence dans certaines organisations
d'une culture révolutionnaire peu disposée à jouer le jeu du paritarisme ou à prendre en charge la question du logement,
propension des syndicats à méconnaître les aspirations de certaines catégories de salariés. Mais cette difficulté résulte également
de facteurs exogènes aux syndicats de salariés.
Parmi ceux-ci, on peut mentionner le conservatisme d'un patronat français majoritairement peu enclin à associer pleinement les
représentants des salariés à la gestion des comités interprofessionnels du logement (CIL). L'architecture institutionnelle du
paritarisme joue également un rôle décisif, l'inscription des acteurs paritaires dans la sphère interprofessionnelle ayant tendance à
les couper de l'expression des besoins en logements émanant des individus dans les entreprises.
Les limites du paritarisme du 1 % logement sont à l'origine d'une série de dysfonctionnements qui entameront progressivement la
légitimité de l'institution à partir des années 1980. L'existence d'inégalités dans l'accès des salariés aux aides délivrées par les CIL
constitue l'un d'eux. En effet, il apparaît progressivement que les modalités de gestion de la Participation des employeurs à l'effort
de construction (PEEC) conduisent à traiter prioritairement les besoins en logements des salariés des grandes entreprises au
détriment d'autres catégories (les salariés des PME, les ouvriers peu qualifiés et les travailleurs migrants notamment), quand elles
n'excluent pas purement et simplement certaines composantes du salariat du champ des bénéficiaires - les jeunes en insertion
professionnelle et les demandeurs d'emploi.
Plusieurs autres aspects de l'intervention du 1 % logement sont pointés par les critiques. Elles ciblent en particulier l'inertie à
l'œuvre dans l'offre de prestations délivrée par le 1 % logement - en complet décalage avec la transformation des besoins en
logement qui s'opère au même moment. Elles pointent également le déficit démocratique qui caractérise le fonctionnement des
instances politiques du 1 % logement, conséquence des difficultés rencontrées par les représentants des salariés pour peser sur
des processus de prise de décision contrôlés par les représentants des employeurs et surtout la technostructure des CIL.
- Depuis 2009, le 1% a subi (et continue à subir) de grandes mutations. Lesquelles et pourquoi ?
Le 1 % logement est engagé depuis plusieurs décennies dans un processus de transformation qui se nourrit à la fois d'une perte
de légitimité de l'institution et de l'émergence au sein de l'Etat d'une tentation de reprise en main du dispositif. Cette tentation
connaît périodiquement des traductions en actes à partir du milieu des années 1980. Dans les faits, la reprise en main du 1 %
logement procède de trois dynamiques interdépendantes : la concentration du pouvoir de décision en matière d'orientation des
fonds au profit des acteurs nationaux de l'institution, le transfert d'une partie du coût de la politique du logement vers la PEEC et le
renforcement du rôle de l'Etat dans la définition des emplois du 1 % logement.
Les mutations survenues depuis 2009 peuvent s'interpréter au regard du rapport qu'elles entretiennent avec chacune de ces
dynamiques. Une caractéristique notable concernant les réformes récentes provient du fait qu'elles ne se situent pas
nécessairement dans le prolongement des épisodes précédents. C'est le cas en particulier de la réforme insérée dans la loi du 24
mars 2014 pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (ALUR) qui modifie la répartition du pouvoir de décision en matière
d'affectation des fonds issus de la PEEC entre l'Etat et les acteurs paritaires. En réinscrivant la définition des emplois du 1 %
logement dans un espace de négociation entre l'Etat et les partenaires sociaux, cette réforme tranche en effet avec la loi de
mobilisation pour le logement et la lutte contre l'exclusion (MOLLE) du 25 mars 2009 qui avait transféré au pouvoir législatif et
réglementaire la responsabilité d'élaborer la politique nationale d'emploi des fonds du 1 % logement.
Cette inflexion s'explique alors en partie par la volonté de l'exécutif issu de l'alternance politique de 2012 de se démarque r du
précédent gouvernement au niveau de l'exercice du pouvoir. Alors que le volontarisme politique du pouvoir sarkozyste et l'amb ition
affichée de lutter contre « l'impuissance publique » pouvaient conduire ce dernier à court-circuiter les corps intermédiaires, le
gouvernement socialiste a très tôt fondé une partie de sa légitimité sur sa propension à renforcer le dialogue social et à associer
pleinement les partenaires sociaux à la production de l'action publique dans les domaines les concernant.
À cette exception près - qui n'a cependant rien de négligeable -, les transformations récentes à l'échelle d'Action Logement
s'inscrivent dans un rapport de continuité évident avec les dynamiques à l'œuvre depuis plusieurs décennies. C'est le cas par
exemple des réformes portant sur l'utilisation des fonds issus de la PEEC. Sur ce point, il est en effet manifeste que la contrainte
budgétaire pèse sur les choix de l'exécutif quelles que soient les majorités se succédant à la tête de l'Etat. L'instauration en 2012
d'une contribution d'Action Logement au Fond national d'aide au logement (FNAL) et les débats actuels sur la délimitation des
publics bénéficiaires du futur dispositif de sécurisation des risques locatifs témoignent que la position de l'Etat reste largement
guidée par la tentation de transférer sur Action Logement une part substantielle du financement de la politique du logement.
Une forme de continuité comparable se manifeste sur la question de la répartition des responsabilités en matière de gestion et
d'affectation des fonds entre acteurs locaux et acteurs nationaux d'Action Logement. À l'instar de la réforme de 1996 portant
création de l'Union des Entreprises et des Salariés pour le Logement UESL, ou de celle de 2014 qui visait à conférer à cette même
UESL les moyens d'une autorité renforcée sur les CIL, la réforme de structure amorcée par les partenaires sociaux en avril 2015
participe clairement d'une logique de transfert du pouvoir de décision vers les échelons centraux de l'institution. Cette réforme est
actuellement en cours d'élaboration mais on sait déjà qu'elle modifiera en profondeur l'architecture d'Action Logement.
L'organisation actuelle, conçue autour d'une tête de réseau (l'UESL) et d'une vingtaine d'organismes territoriaux chargés de la
collecte et de l'utilisation des fonds (les CIL), sera supprimée. À la place sera créée une organisation structurée autour de trois
entités nationales - une structure faîtière pilotant l'ensemble du groupe, un pôle unique de services chargé de la collecte et de la
distribution des aides aux entreprises et un pôle immobilier chargé de mettre en œuvre la politique immobilière du groupe - et de
délégations régionales ayant vocation à garantir la déclinaison des politiques nationales au niveau des territoires. Cette réforme,
qui a été décidée au nom de la nécessaire harmonisation des interventions d'Action Logement et de la volonté de juguler les
dysfonctionnements de l'institution, marque donc une nouvelle étape dans la concentration du dispositif et la réduction de
l'autonomie des acteurs paritaires territoriaux.
- Quels sont les enjeux ?
L'avenir d'Action Logement dépend étroitement de la capacité des acteurs paritaires de réformer ce dispositif dans le sens d'une
efficacité accrue de ses interventions. Faute de quoi la perte de légitimité d'Action Logement aura pour effet de maintenir cette
institution sous la menace d'une budgétisation des fonds issus de la PEEC - menace qui semble aujourd'hui devoir être prise au
sérieux compte tenu de la vigueur de la contrainte budgétaire.
L'intervention des partenaires sociaux est attendue en particulier sur deux enjeux centraux. Le premier concerne le positionn ement
d'Action Logement vis-à-vis des territoires. La légitimité d'Action Logement repose notamment sur sa propension à articuler ses
interventions avec les politiques mises en œuvre par les collectivités territoriales en matière d'habitat. Cet impératif a été accentué
par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales qui, en ouvrant la possibilité de déléguer aux collectivités la
définition de la programmation neuve d'HLM, a sensiblement renforcé leurs prérogatives dans ce domaine de l'action publique.
L'enjeu n'est pas mince pour Action Logement, dans la mesure où ses membres ont toujours manifesté pour la plupart une
réticence à amorcer des logiques partenariales avec les élus locaux, ceci par peur de perdre la maîtrise de l'orientation des fonds
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issus de la PEEC. Il n'est pas certain que la réforme en cours d'élaboration apporte une réponse probante sur ce point. Elle a en
tout cas indéniablement tendance à créer un facteur d'incertitude quant à la capacité de la future organisation centralisée d'Action
Logement de préserver l'ancrage territorial de l'institution et de cultiver un lien de proximité étroit avec ses partenaires locaux que
sont les entreprises et les collectivités.
Le second enjeu engageant l'avenir d'Action Logement concerne l'emploi des fonds issus de la PEEC. Pour la plupart des
observateurs, la perte de légitimité de l'institution tient largement au fait que les acteurs paritaires se montrent incapables depuis
plusieurs décennies de faire évoluer l'utilisation des fonds en relation avec la transformation des besoins en logement. Tout porte à
croire aujourd'hui que le renforcement de la légitimité d'Action Logement passe par la réactualisation de l'offre de prestations au
regard des risques sociaux qui apparaissent depuis une quinzaine d'années au croisement de l'emploi et du logement. Sur ce point
également, les implications de la réforme amorcée il y a trois mois sont relativement difficiles à apprécier. Les artisans de cette
réforme mettent en avant sa propension présumée à apporter des réponses à quelques-uns des dysfonctionnements majeurs de
l'institution (développement de pratiques concurrentielles autour de la collecte de la PEEC, tendance à engendrer des inégalités
entre les salariés dans l'accès aux aides).
Au-delà des discours de justification, il est cependant malaisé d'identifier une orientation attestant que la réforme est l'expression
d'un projet politique fort émanant des partenaires sociaux. Ainsi, plusieurs dispositions interrogent quant au sens des objectifs
poursuivis. On est par exemple en droit de se demander en quoi la constitution d'un pôle immobilier unique à l'échelle d'Action
Logement est de nature à produire une plus-value en direction du logement des salariés. Or, on peut estimer que la manifestation
d'une capacité des partenaires sociaux à bâtir un projet politique clair autour du lien entre emploi et logement est essentielle à la
légitimation de leur présence à la tête de l'institution. À défaut, la réforme actuelle pourrait se révéler à double tranchant, la
concentration des instruments de pilotage du dispositif à l'échelle nationale étant par essence de nature à favoriser la mise en
œuvre opérationnelle d'un éventuel projet de budgétisation de la ressource financière.
Pourquoi les protestations de rue ne marchent pas
par The Atlantic, Lina Boutaleb - 22 Juin 2015
Les protestations de rue sont au rendez-vous. De Bangkok à Caracas, de Madrid à Moscou, pas une
semaine ne s'achève sans qu'une foule massive prenne le contrôle d'un espace public dans l'une des
plus grandes villes du monde. Les motifs des protestations concernent des causes diverses : transports
publics trop coûteux, mauvaise politique de l'éducation, destruction d'un espace vert, abus policiers...
Les photos aériennes des marches anti-gouvernementales présentent régulièrement une foule
intimidante réclamant le changement avec fureur. Mais, il est surprenant que ces mouvements
n'aboutissent qu'à si peu. La fervente énergie politique mobilisée par les foules est extrêmement
disproportionnée par rapport aux résultats de ces manifestations. Metis reprend, en le traduisant, un
article publié par le site américain The Atlantic.
Certaines exceptions notables sortent du lot : En Egypte, en Tunisie, et en Ukraine, les protestations de rue ont
grandement contribué au renversement du gouvernement. Néanmoins, la majorité de ces mobilisations massives
échoue à créer des changements significatifs en politique ou en politiques publiques. Occupy Wall Street en est un
bon exemple. Né à l'été 2011, pas à Wall Street mais à Kuala Lumpur, le mouvement Occupy a vite pris de
l'ampleur, et était déjà présent dans les places centrales de près de 2600 villes dans le monde. Le problème se
situe à l'après-marche.
Les groupes participants n'avaient ni affiliation formelle l'un avec l'autre, ni hiérarchie claire, ni leader désigné.
Mais les réseaux sociaux ont permis au mouvement de répliquer les méthodes de camping, de protestation, de
levée de fonds, et de communication avec les médias, si bien que l'on retrouvait ces méthodes d'une place à une
autre. On scandait le même message partout : il est inacceptable que la richesse mondiale soit concentrée entre
les mains d'une élite d'un pourcent de la population, tandis que les 99 autres se démènent tant bien que mal.
Un tel mouvement, massif, et d'apparence très organisé, aurait du avoir plus d'impact. Mais non. Dans les faits,
les réponses du gouvernement consistent plus en une rhétorique apaisante qu'en des réformes politiques
majeures. La réaction du Premier Ministre turc Recep Tayyip Erdogan aux manifestations en Turquie fut agressive,
puisqu'il accusait l'opposition et les protestataires de comploter une conspiration contre lui. Il a donc essayé de
bloquer Twitter et Youtube. Un mois avant, Erdogan remportait une grande victoire aux élections locales (mais il a
depuis connu des déceptions aux élections nationales, NDLR).
Pourquoi? Comment autant de personnes motivées peuvent-elles réaliser si peu ? Une réponse se trouverait dans
les résultats d'une expérimentation conduite par Anders ColdingJorgensen de l'Université de Copenhague. En
2009, il a crée un groupe Facebook pour protester contre la démolition d'une fontaine historique, StorkFountain.
10 000 personnes ont rejoint le groupe la première semaine ; après deux semaines, le groupe comptait 27 000
membres. En fait, il n'y avait jamais eu de plan de démolition de la fontaine. Jorgensen voulait simplement
montrer à quel point il était facile de constituer un groupe majeur en utilisant un réseau social.
Dans le monde d'aujourd'hui, protester sur Twitter, Facebook, ou autres, attire sans aucun doute une foule
importante, spécialement si c'est pour manifester contre quelque chose qui porte atteinte à des personnes, des
lieux, ou des objets. Le problème se situe à l'après-marche. Il arrive que ces mobilisations aboutissent à des
confrontations violentes avec la police, mais, plus fréquemment, il ne se passe rien. Derrière les massives
protestations de rue, il n'y a que très rarement une organisation permanente capable de pérenniser le mouvement
pour permettre le changement. C'est ce qu'a relevé Zeynep Yufekci, membre du Center for Information
Technology Policy à Princeton University : « Avant Internet, le travail technique d'organisation de ce qui a trait à la
mobilisation aidait à construire une infrastructure pour la prise de décision, et à élaborer des stratégies pour
maintenir le mouvement. Aujourd'hui, les mouvements se constituent de manière autonome, souvent à leur
détriment. »
Il y a une ingénierie politique puissante dans les rues de nombreuses villes mondiales. Cette ingénierie est en
mouvement et produit une énergie politique tout aussi puissante. Mais, elle n'est pas connectée à d'autres engins,
ce qui ne permet pas au mouvement de prendre vie. Le mouvement nécessite une organisation capable de
transformer ces mobilisations en force de changement au niveau politique. Ainsi, il y a un besoin en réformes
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politiques majeures qui puissent donner de l'énergie autant aux idéalistes qui se sentent politiquement exclus,
qu'aux professionnels dévoués au travail journalier de construction d'une organisation politique qui sait comment
convertir une énergie politique en politiques publiques.
Comme nombre d'entre nous l'avons souligné, les réseaux sociaux peuvent aussi bien faciliter que miner la
formation de mobilisations politiques effectives. Nous sommes conscients de la force des réseaux sociaux en
matière d'identification, de recrutement, de mobilisation, de coordination des sponsors, et de levée de fonds. Mais
nous savons aussi l'ampleur du click-civisme, et du slack-civisme, qui créent une illusion de bien-être et
d'engagement par un simple click ou « like » sur une page Facebook, ou par un tweet incendiaire depuis le confort
de son ordinateur ou de son téléphone portable.
Ce que l'on a observé ces dernières années relève d'une popularisation des marches de rue, démunies d'un plan
pour ce qui se passe en aval de celles-ci, et pour maintenir les protestataires engagés et intégrés dans le
processus politique. C'est la plus récente illustration de l'illusion dangereuse qui consiste à croire qu'il est possible
d'obtenir une démocratie sans partis politiques, et que les protestations de rue basées sur les réseaux sociaux
constituent le moyen de changer la société, plus que le serait une organisation politique soutenue.
Quand les entreprises logent leurs salariés : historique et enjeux
par Pierre Maréchal - 29 Juin 2015
Depuis toujours, des employeurs ont dû s'impliquer dans le logement de leurs salariés mais les modalités de cette
implication ont fortement évolué. Les crises du logement successives ont permis de trouver des solutions nouvelles dans
lesquelles des entreprises ont pu prendre leur part. Le dispositif mis en place en France dans les années 50 notamment
par les partenaires sociaux est unique en Europe : il permet de combiner logement social et logement des salariés. Face
aux crises du logement, à la crise de l'Etat de plus en plus impécunieux, ce dispositif est aujourd'hui remis en cause.
Pierre Maréchal livre pour Metis son analyse.
Dans la représentation commune, le logement apparaît comme un bien que chaque famille se procure soit en le louant soit en
l'achetant. Les familles à faible revenu reçoivent une aide (allocation logement) de l'État et/ou elles peuvent bénéficier d'un
logement social. Apparemment aujourd'hui, le rôle des entreprises n'apparaît pas directement : pourtant il existe.
Rappel historique
Certaines formes de logements procurés par les employeurs ont quasiment disparu ou sont devenues très marginales.
Au XIXe siècle, l'ouvrier agricole était logé à la ferme, la bonne avait une chambre de bonne etc.
A la suite des révolutions industrielles, des grandes entreprises se sont implantées près des ressources naturelles, loin des villes.
Ces concentrations de main-d'œuvre ont obligé des industries à loger une partie de leur personnel dans différents types de
logement : de grandes maisons pour les cadres, maisons avec jardin pour les ouvriers qualifiés et les contremaîtres, des
baraquements pour les célibataires moins qualifiés, souvent de provenance étrangère. Quelques réalisations exemplaires ont été
réalisées comme les cités ouvrières créées par les industriels du textile de Mulhouse ou encore la cité Menier de Noisiel.
Dans les villes où la main-d'œuvre était abondante, les ouvriers s'entassaient dans des logements médiocres, surpeuplés et
souvent insalubres. La question du logement et la question urbaine devenaient politiques. Les enquêteurs dénonçaient des
conditions ignobles, les hygiénistes promouvaient de nouvelles normes d'habitation, des sociétés philanthropiques se donnèrent
pour but de construire des opérations modèle. Mais bâtir des cités dédiées aux ouvriers était présenté comme une idée
révolutionnaire et dangereuse : on craignait ces concentrations de populations soit-disant prêtes à se révolter. Ceci a bien été
décrit par Louis Chevalier dans « Classes laborieuses et classes dangereuses »(1958).
La deuxième moitié du XIXe siècle voit alors se développer des initiatives pour imposer progressivement des immeubles
d'habitation ouvrière répondant à des normes d'hygiène, avec l'eau courante pour commencer. Les résultats furent néanmoins
faibles en terme de nombre de logements construits car il manquait des moyens financiers, des opérateurs pour construire
suffisamment de logements de qualité.
La première loi, la loi Siegfried de 1894, permit d'aider les constructeurs à financer leurs investissements en habitations à bon
marché en apportant des prêts à taux réduit et des immunités fiscales. Une succession de lois furent ensuite votées pour tenter,
chaque fois, d'améliorer le financement des opérations qui ne se développaient pas à la hauteur des besoins.
L'idée d'impliquer les entreprises dans le financement du logement des salariés a mûri entre les deux guerres
Pendant la 1ère guerre, 450 000 logements avaient été détruits. Le résultat de trente ans (1894- 1925) d'incitations pour construire
des logements fut maigre : seulement un peu plus de 60 000 logements H BM bâtis . Pour rattraper le retard, il fallait désormais
construire 50 000 par an sur 10 ans. Mais toutes les initiatives butaient sur le problème du financement.
On a pris alors conscience que, dans les faits, certaines entreprises étaient impliquées dans le logement de leurs salariés : une
enquête de 1930 auprès des établissements commerciaux et industriels de plus de 200 salariés a montré que ces entreprises
possédaient en propre près de 350 000 logements. Pourquoi toutes les entreprises ne feraient-elles pas de même ? C'est une
question qui s'imposa dans le débat entre deux voies possibles :
• une voie « sociale » privilégiant le développement d'un parc locatif à loyer modeste pour les salariés, avec des normes modernes
d'hygiène et de confort, financé par une taxe sur les salaires. Les adeptes de cette voie prévoyaient également un système de prêt
facilitant l'accession à la propriété des salariés,
• une voie patronale, libérale, c'est-à-dire fondée sur le volontariat et la liberté d'agir, privilégiant un accès au logement locatif
comme élément du contrat de travail, avec des normes de construction minimisant les coûts. L'idée d'une taxation était vivement
rejetée.
La situation était ainsi bloquée mais plusieurs éléments ont pavé la voie d'un compromis.
La crise sociale du logement devenait un problème politique et l'attitude de blocage insoutenable. La solution mise en œuvre par
certaines entreprises consistant à financer intégralement le logement conduisait à une mobilisation de fonds propres trop
importante.
De plus une partie du patronat s'engageait localement pour inventer des réponses collectives. Ainsi dans les années trente, 35
industriels se sont réunis pour fonder la Société des Cités jardins de la région parisienne. On trouve des initiatives de ce genre
dans d'autres villes, fondées sur l'adhésion volontaire du patronat.
Le compromis de l'après-guerre
Il s'est construit (pour simplifier) en deux étapes :
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• La création du comité interprofessionnel du logement (CIL) en 1942 à Roubaix-Tourcoing qui adopte en 1943 le principe d'une
cotisation égale 1 % des salaires. Dès la fin 1944, 97 % des employeurs du bassin d'emploi de Roubaix-Tourcoing y adhèrent.
Ce modèle se diffuse rapidement dans toute la France et, en 1952, on compte 132 CIL en France
• La loi du 11 juillet 1953 qui impose à toutes les entreprises non pas une taxe de 1 % mais l'obligation de consacrer au moins 1 %
de leur masse salariale au logement de leurs salariés. C'est un compromis entre la logique libérale et la logique sociale : il
conjugue liberté d'action et solidarité, mutualisation. Il ne s'agit pas d'un impôt, il ne s'agit pas de faire du logement un élément du
contrat de travail. C'est la fin du logement patronal.
Un bon dispositif ?
Ce dispositif présente de nombreux avantages pour les entreprises.
• En mettant tout le monde à contribution, il évite les distorsions de concurrence,
• La mobilisation des logements pour les salariés est moins coûteuse puisqu'elle utilise un effet de levier : les sommes investies par
les entreprises se combinent avec les prêts avantageux de la Caisse des Dépôts et Consignation et avec des subventions de l'État
(aide à la pierre quand elles existaient).
Dans ce schéma les entreprises peuvent, par l'intermédiaire des CIL, « acheter » des réservations de logements pour lesquelles
elles ont la possibilité de proposer des salariés (ceci fait souvent l'objet d'une consultation dans les comités d'entreprise).
Ainsi dans la région Île-de-France, il y a aujourd'hui environ 1 million de logements sociaux dont environ 40 % « appartiennent »
aux entreprises dans la mesure où ce sont des salariés des entreprises cotisantes qui peuvent les occuper.
Plusieurs vertus de ce dispositif méritent d'être signalées. Tout d'abord c'est un système paritaire. Les CIL sont gérés par des
représentants patronaux et syndicaux et , dans les entreprises, les comités d'entreprise sont impliqués dans les décisions : dans
les grandes , il y a des commissions-logement. L'article de Jules Meunier fait justement le point sur le rôle joué par le paritarisme et
sur la crise du 1%.
Ce dispositif permet en outre de donner aux salariés une priorité d'accès à une partie des logements sociaux , priorité que les élus
locaux n'auraient pas toujours accordée en privilégiant leur mandants.
La diminution des aides à la pierre voulue par la réforme de 1977 de Raymond Barre a fragilisé le système. Aujourd'hui, il es t
fortement menacé et il n'est pas impossible que ce dispositif (unique au monde ?) disparaisse à terme.
Pour en savoir plus
- Quel avenir pour le 1% Logement ? Jules-Mathieu Meunier
- Hélène Frouard, Du coron au HLM. Patronat et logement social (1894-1953). Rennes, PUR, 2008, 187 pages. « Arts & Société ».
- Le Livre Blanc : Du 1% à Action Logement
Alliances et désalliances dans la famille mutualiste de la fonction publique
JUIN302015
Thème: %1
Les évolutions du paysage mutualiste engagées ces dernières années et qui se sont accélérées, tant au plan
général que dans le secteur de la fonction publique, ne sont certainement pas terminées et peuvent toujours
réserver
quelques
surprises...
Pour preuve les derniers « rebondissements » sur de l'annonce du rapprochement envisagé entre la MGEN et
Harmonie Mutuelle et sur lequel les acteurs concernés travaillent en y associant d'ailleurs les mutuelles de l'UMG
Istya qui le souhaitent (parmi lesquelles la MGEFI, mutuelle des finances, qui en a fait valider le principe lors de
son
assemblée
générale
la
semaine
dernière)
Parallèlement, l'assemblée générale de la MGET qui se tenait également la semaine dernière a confirmé et validé
sa décision de fusion/absorbtion par la MGEN annoncée il y a quelques mois. Reste à l'assemblée générale de la
MGEN du 9 juillet à valider cette décision avant d'obtenir l'autorisation de l'autorité de contôle (ACPR).
Pour autant, dans ce contexte, la MCDÉF (Mutuelle civile de la Défense), qui avait également travaillé sur l'idée
d'une fusion avec la MGEN, semble désormais « rétive » et serait en recherche d'autres partenariats. La MCDÉF,
qui tient son assemblée générale cette semaine, devrait en débattre.
Notons aussi que l'assemblée générale de la MNH (hospitaliers) qui se tenait le 21 juin a confirmé son départ de la
Mutualité Fonction publique (MFP), tout en demeurant (en l'état actuel des choses) membre de la FNMF (dont elle
soutient les initiatives ouvertes) mais en restant aussi membre de MFP services et de MFP as (action sociale).
À l'occasion de cette assemblée générale, la MNH qui est désormais l'actionnaire majoritaire de la Banque
Française Mutualiste BFM) a également voté le principe de son adhésion à une UMG (*) avec Pasteur Mutualité et
créé avec celle-ci une société de courtage : Orsane.
Pour clore provisoirement ce tour d'horizon « familial » dans le monde de la mutualité de la fonction publique, les
délégués d'Intériale (mutuelle du ministère de l'Intérieur et référencée pour la fonction publique territoriale) ont
donné leur feu vert au projet de substitution LMDE annoncé il y a quelques semaines. Dossier qui devrait être
examiné par l'ACPR dans quelques jours avant de revenir en assemblée générale extraordinaire de la LMDE le 6
juillet prochain.
Il est précisé qu'Intériale dégagerait une avance de trésorerie de 10 millions d'euros pour la LMDE qui devrait
adhérer à l'UMG Intériale. Là aussi à suivre, au regard de la question des dettes de la LMDE vis-à-vis de la MGEN
et de la Matmut entre autres...
C'est dire si, même dans le monde de la fonction publique, on a parfois du mal à y voir clair dans tous ces jeux
d'alliances et de « désalliances » à géométrie variable.
Pas simple, la vie de famille !
(*) Pour mémoire, la MNH est toujours en discussion avec l'ACPC sur les modalités financières de sortie de l'UMG
Istya décidée il y a quelques mois..
CE : mettre en conformité sa comptabilité
JUIN302015
Thème: %1
Par arrêté du 2 juin 2015, viennent enfin d’être officialisés les modèles de présentation des comptes du CE. Enfin, car la loi datait
du 5 mars 2014. Enfin car on l’avait imaginé en même temps que les décrets du 27 mars 2015 rendant opérationnelles les
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dispositions sur la comptabilité des CE. Enfin car votre comptabilité devra s'y conformer depuis le 1 er janvier 2015 ! Il est donc
urgent de s’en occuper avant de partir en vacances ou de le noter dans son agenda de rentrée, en ajoutant la mise à jour de votre
règlement intérieur de CE par l’insertion de nouvelles clauses comptables obligatoires.
La comptabilité normée et différenciée par taille de CE
Pour chaque type de CE, l’Autorité des normes comptables (ANC) fixe les prescriptions comptables à suivre ainsi que les modèles
de présentation des comptes.
Seules les conditions d’établissement et de présentation des comptes varient selon la taille des CE : nombre de salariés,
ressources annuelles et total du bilan.
Les « petits » CE pourront adopter une « comptabilité ultra-simplifiée » mais cependant conforme aux prescriptions de l’ANC. Les
CE sont pour la plupart concernés puisque ce sont ceux dont les ressources annuelles sont inférieures ou égales à 153.000 €.
Même si il n’est pas obligatoire de les faire établir par un expert-comptable, nous vous recommandons vivement de vous assurer
auprès d’un spécialiste que votre présentation est bien conforme.
Les « moyens » CE, qui ne dépassent pas au moins 2 des 3 critères suivants, à savoir : 50 salariés au CE, 3,1 millions d'euros de
ressources annuelles et/ou 1,55 million d'euros de total du bilan adopteront une « comptabilité dite simplifiée ». Pour rappel, ils
doivent confier la mission de présentation des comptes à un expert-comptable.
Les « grands » CE, qui dépassent 2 des 3 critères ci-dessus, présente des comptes annuels. En outre, à compter du 1 er janvier
2016, ils devront faire certifier leurs comptes par un commissaire aux comptes. Ce dernier pourra enclencher une procédure
d’alerte en cas de faits de nature à compromettre la continuité de l’exploitation du CE. Enfin, dans ces CE, une commission des
marchés sera obligatoire pour tout marché dont le montant est supérieur à 30 000 euros (article D. 2325-4-2 du code du travail). Si
vous êtes dans ce cas de figure, n’hésitez pas à revenir vers votre expert-comptable ou votre conseil pour plus de précisions.
L'intégration des règles dans le réglement intérieur de CE (RICE)
Le contenu du RICE étant jusqu’à présent libre, certains CE en avaient conclu, à tort, qu’il était facultatif. Les règles de la
comptabilité des CE imposent d’y insérer des clauses comptables et donc d’en avoir un.
En effet, le RICE doit fixer les règles selon lesquelles sont arrêtés et approuvés les comptes par des membres élus du CE en
précisant dans quels délais. Le RICE prévoit également les règles de consultation de ces comptes par les salariés, d’établissement
du rapport de gestion, de fonctionnement la commission des marchés qui devra être créée au sein des plus gros CE (composition,
désignation et durée du mandat).
Autre nouveauté, le comité central d'entreprise (CCE) devra lui aussi se doter d'un règlement intérieur sur ces questions
comptables (article L. 2327-12-1).
La fonction publique souffre d'un manque d'attractivité
JUIN262015
Sources
o Prefon
Le dernier baromètre Préfon, réalisé par Ellipsa du 10 février au 3 avril 2015 auprès de 322 fonctionnaires en
activité, montre que 68 % des sondés estiment la fonction publique moins attractive qu’avant. Malgré une baisse
de 2 points par rapport au précédent baromètre, 80 % des hospitaliers pensent que la fonction publique est moins
attractive, suivis par les agents d’État à 67 % et des agents territoriaux à 66 %.
Pour autant, 62 % des fonctionnaires interrogés conseilleraient à leur entourage d’entrer dans la fonction publique.
Une nouvelle fois, c’est au sein de la « territoriale » que figurent le plus de prosélytes (68 %). Les agents de 3650 ans (64 %), de catégorie A (69 %) et ceux ayant moins de 15 ans d’ancienneté comptent aussi parmi les
meilleurs promoteurs du public. Enfin, si 68 % des agents sondés estiment que le secteur public est devenu moins
attractif, ils étaient 70 % à le penser dans le baromètre précédent.
Lanterne rouge : la rémunération
Une majorité (52 %) de fonctionnaires trouve qu’ils gagnent moins que les salariés du privé. C’est chez les agents
de 50 ans et plus que l’on dénombre le plus de mécontents (56 %, contre 53 % chez les moins de 35 ans et 46 %
des 35-49 ans). Sans surprise, la grogne est plus importante chez les agents de catégorie C (60 %) que chez les
agents de catégorie B (51 %) et les agents de catégorie A (50 %). Les fonctionnaires expérimentés (à partir de 15
ans d’ancienneté) sont plus nombreux à s’estimer moins bien payés (53 %) comparés aux nouveaux agents (49
%).
Les femmes moins reconnues
D’une manière générale, les hommes se sentent mieux reconnus que les femmes (57 % contre 46 %). Le
sentiment de reconnaissance professionnelle est le plus partagé dans la fonction publique territoriale (56 %),
devant la fonction publique d’État (53 %) et surtout la fonction publique hospitalière (36 %). En toute logique,
plus l’agent grimpe dans la hiérarchie et plus il se sent reconnu. Ainsi, si seulement 45 % des fonctionnaires de
catégorie C (ouvriers) s’estiment reconnus, le pourcentage passe à 49 % chez les fonctionnaires de catégorie B
(employés) et s’élève à 58 % chez les fonctionnaires de catégorie A (cadres).
Des jeunes satisfaits
Plus étonnant : les jeunes agents se montrent particulièrement satisfaits : 65 % des fonctionnaires de moins de
35 ans jugent que leurs compétences professionnelles sont reconnues, contre 47 % des 35-49 ans et 53 % des 50
ans et plus. Le résultat est d’autant plus surprenant que, dans le précédent baromètre, les agents de moins de 35
ans se disaient à 65 % peu ou pas reconnus. Pour expliquer ce retournement complet de situation, Ellipsa évoque
le faible échantillon de jeunes interrogé (5 % pour le baromètre de février 2015 et 4 % pour le baromètre de
novembre 2014). Il n’empêche, 58 % des agents justifiant de moins de 15 ans d’ancienneté s’estiment reconnus
alors que le ratio tombe à 55 % chez ceux disposant de plus de 30 ans d’ancienneté et 44 % pour les 15-30 ans
d’expérience.
L’intéressement impacte négativement la rémunération fixe
mercredi 1er juillet 2015
Peu d’études évoquent les effets de l’intéressement sur la rémunération des salariés. On est souvent tentés de penser
implicitement que la rémunération fixe augmente moins vite dans les entreprises qui ont mis en œuvre des systèmes
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d’intéressement. Le travail réalisé par deux chercheurs, Noelie Delahaie (IRES) et Ricgard Duhautois (CEE), se penche
justement sur cette question.
La revue de la littérature montre que les études ont pu être biaisées : il est en effet important de bien prendre en compte que les
entreprises mettant en œuvre des pratiques d’intéressement peuvent être plus performantes que les autres, ou appartenir à des
segments particuliers (grandes entreprises avec un part importante d’encadrement). Aussi il n’est pas surprenant que la
rémunération globale y soit plus élevée, faisant croire ainsi à un effet positif de l’intéressement sur la rémunération. Une étude
française des années 80 montre ainsi que la rémunération totale est de 4,3% supérieure dans les entreprises distribuant de
l’intéressement. D’autres études au Canada montrent un effet de 15% sur la rémunération liée à l’introduction de systèmes de
partage du profit.
Afin d’aller plus loin, l’étude des deux chercheurs de l’IRES et du CEE a ainsi utilisé un modèle économétrique pour
mesurer l’effet de l’intéressement sur la rémunération et l’entreprise en France entre 2000 et 2007. Plusieurs résultats
sont intéressants :
 ce ne sont pas les entreprises les plus profitables qui mettent en place l’intéressement : celui-ci est davantage mis en
œuvre dans les entreprises qui souhaitent améliorer leur rentabilité. Les entreprises qui distribuent déjà de la participation
obligatoire sont moins enclines à payer des bonus en plus comme de l’intéressement, suggèrent les auteurs.
 les entreprises de plus de 500 salariés sont davantage concernées par l’intéressement que les plus petites entreprises, ce
que confirment d’autres observations statistiques.
 les entreprises mettant en place l’intéressement comprennent davantage de cadres (managers) et moins de femmes que
la moyenne des entreprises.
 l’introduction de l’intéressement augmente la rémunération de 6,9% par rapport aux entreprises ne mettant pas en œuvre
d’intéressement. Néanmoins, après correction des facteurs observés plus haut (profitabilité, part des managers et des
femmes, taille des entreprises), l’effet de l’intéressement disparaît. On n’observe pas d’impact négatif de l’intéressement
sur la rémunération fixe juste après l’introduction de l’intéressement.
 en régime de croisière, à moyen terme, les entreprises avec intéressement continuent de mieux rémunérer globalement
leurs salariés de 4,2% sans effet sur la rémunération fixe.
 mais après retraitement des caractéristiques des entreprises (profitabilité, part des managers et des femmes, taille des
entreprises), le résultat s’inverse : l’intéressement a peu d’effet sur la rémunération globale (+0,1%) mais on observe bien
des salaires fixes inférieurs de 4% aux entreprises sans intéressement.
Les auteurs suggèrent que les entreprises et les salariés se mettent d’accord pour passer de la rémunération fixe vers
l’intéressement à moyen terme afin de moins payer de taxes ; l’intéressement n’est pas soumis à des cotisations sociales
standards mais à un forfait social et peut être exonéré d’impôts sur le revenu s’il est placé pendant un certain temps.
Cette conclusion est quelque peu surprenante : pour justifier des exonérations de cotisations sociales et d’impôts, de nombreux
observateurs et certaines organisations syndicales souhaitent que l’intéressement et la participation soient bien bloqués plusieurs
années et constituent ainsi une épargne salariale. Celle-ci sert alors à former une épargne de précaution pour le salarié qui
participe en plus au financement de l’économie, et est souvent socialement responsable ou solidaire. Mais elle ne doit en effet pas
mener à une diminution de la progression du salaire fixe, élément sur lequel l’étude attire notre attention, ni être soumise à des
déblocages anticipés comme le font régulièrement les gouvernements, entraînant une confusion sur le rôle de l’épargne salariale.
Source (en anglais) :
Profit-Sharing and Wages : An Empirical Analysis Using French Data Between 2000 and 2007 / Partage des profits et salaires :
une analyse empirique à partir de données françaises portant sur la période 2000 à 2007
La faim dans le monde recule, mais 805 millions de personnes souffrent encore de sous-alimentation
chronique
mercredi 1er juillet 2015
La FAO (organisation des Nations-Unies pour l’alimentation et l’agriculture) vient de présenter
l’édition 2014 de L’état de l’insécurité alimentaire dans le monde. Ses dernières estimations montrent
que l’on continue de progresser dans la lutte contre la faim. Depuis plusieurs années, la FAO œuvre
pour une meilleure articulation des politiques de développement et de protection sociale.
Le rapport sur L’état de l’insécurité alimentaire décrit les progrès accomplis en vue de la réalisation des cibles de
lutte contre la faim fixées dans les « Objectifs du Millénaire pour le développement » (OMD) de l’ONU et lors du
Sommet mondial de l’alimentation.
Un engagement politique soutenu au plus haut niveau est indispensable pour parvenir à l’éradication de la faim. Le
rapport de cette année examine tout particulièrement l’environnement favorable à la sécurité alimentaire et à la
nutrition, qui reflète l’engagement et les capacités des États dans quatre dimensions : les politiques, les
programmes et les cadres juridiques ; la mobilisation des ressources humaines et financières ; les mécanismes de
coordination et les partenariats ; et la prise de décisions fondées sur des données probantes.
Les principaux enseignements de l’enquête
 Les dernières estimations de la FAO montrent que l’on continue de progresser dans la lutte contre la faim
dans le monde : on estime qu’environ 805 millions de personnes étaient en situation de sous-alimentation
chronique en 2012-2014, soit une diminution de plus de 100 millions de personnes sur la dernière
décennie et 209 millions de personnes de moins qu’en 1990-1992.
 Depuis 1990-1992, 63 pays ont atteint la cible de l’OMD 1 concernant la faim. Parmi ces 63 pays en
développement, 11 pays affichaient déjà un taux de sous-alimentation inférieur à 5 pour cent (limite
méthodologique garantissant la pertinence des résultats différents de zéro) en 1990-1992 et ils ont réussi
à se maintenir dans cet intervalle.
 Les chiffres montrent que le premier objectif du Millénaire pour le développement (OMD 1) – à savoir
réduire de moitié la proportion de la population qui souffre de sous-alimentation dans les pays en
développement d’ici à 2015 – est à notre portée.
 Même si, globalement, la situation s’est améliorée, des écarts importants persistent entre les régions.
Globalement, c’est la région de l’Amérique latine et des Caraïbes qui a le plus progressé en matière de
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sécurité alimentaire ; l’Afrique subsaharienne et l’Asie de l’ouest, touchées par des catastrophes naturelles
et des conflits, ont obtenu des résultats plus modestes.
 La réduction de la faim appelle une approche intégrée, qui comprend les éléments suivants : des
investissements publics et privés propres à améliorer la productivité agricole ; un meilleur accès aux
intrants, aux terres, aux services, aux technologies et aux marchés ; des mesures favorables au
développement rural ; des mesures de protection sociale pour les personnes les plus vulnérables,
notamment le renforcement de la résistance de ces personnes face aux conflits et aux catastrophes
naturelles ; des programmes de nutrition spécifiques destinés à pallier les carences en micronutriments
chez les mères et les enfants de moins de cinq ans.
La FAO et la protection sociale
Pour la FAO, les systèmes de protection sociale ne doivent pas être considérés comme des « poids morts » pour
les budgets. Les interventions effectuées dans le domaine de la protection sociale, lorsqu’elles sont bien conçues,
sont utiles pour la croissance. En empêchant la dégradation des ressources et en réduisant, chez les pauvres, le
risque personnel que comporte l’investissement, la protection sociale peut être une stratégie au service des
pauvres et de la croissance où chacun est gagnant.
La FAO définit la protection sociale comme un ensemble de mécanismes institutionnels visant à lutter contre la
pauvreté et la vulnérabilité grâce à l’assistance sociale, l’assurance sociale et l’intégration sociale. La mise en
œuvre des politiques et programmes de protection sociale suivant une approche fondée sur les droits est non
seulement juste sur le plan moral et juridique, mais aussi de nature à améliorer les résultats en matière de
sécurité alimentaire.
Pour en savoir plus
 Le rapport sur l’insécurité alimentaire 2014
 Le rapport sur la protection sociale
Les Français acceptent-ils l'impôt ?
Renaud Chartoire
On a beaucoup glosé, dans certains milieux politiques et journalistiques, sur un supposé « ras-le-bol fiscal » des Français. Qu’en
est-il vraiment ? Que pensons-nous du niveau des impôts, et surtout de leur adéquation avec nos idéaux de justice sociale ? Une
récente analyse de l’OFCE, qui s’appuie sur un sondage de la Sofres, tente d’objectiver ces questions.
Par civisme, non par contrainte
Tout d’abord, il semble que les Français pensent bel et bien qu’il y a trop d’impôts et de charges : ils sont 84 % à être tout à fait et
plutôt d’accord avec cela. Cette opinion est partagée par toutes les tranches de la société, mais pas de manière identique. Ainsi,
les jeunes, les cadres, les personnes habitant les zones urbaines et les personnes diplômées sont relativement moins enclins à le
penser que les autres. Paradoxalement, ce sont les moins concernés par l’impôt, et plus particulièrement ceux qui déclarent
connaître des fins de mois difficiles, qui sont les plus nombreux à trouver le niveau des prélèvements trop élevés, alors même que
le « ras le bol fiscal » semblait surtout concerner les hauts revenus et les classes moyennes. Pourquoi ? Cette étude nous montre
que le degré d’acceptabilité de l’impôt est étroitement lié au sentiment d’en recueillir les fruits, notamment en termes d’accès aux
services publics. Et ce sont avant tout les habitants des zones rurales ou de la périphérie des zones urbaines qui se sentent
concernés.
Enfin, la majorité des Français pense que c’est par civisme et non par contrainte qu’ils payent leurs impôts. Les catégories les plus
favorisées sont même relativement plus nombreuses à le déclarer, ce qui vient apporter un éclairage nouveau sur notre perception
collective de l’impôt.
Michel Forsé et Maxime Parodi, « Les Français et la justice sociale », Revue de l’OFCE, n° 137, mars 2015
L'État islamique, quelle géographie ?
Vincent Capdepuy
En juin 2014, l’opinion internationale a brutalement fait la connaissance d’un groupe armé appelé « État islamique
en Irak et au Cham » (al-daoula al-islāmiya fi al-‘irāq wa al-chām) : Daesh. La notion arabe de « Chām », souvent
traduit, à tort, par « Syrie » ou « Levant », révèle une des dimensions du combat mené par cette organisation :
son anti-impérialisme. Le rejet des frontières héritées de l’époque des mandats français et britannique a fait l’objet
d’une propagande assez forte via les réseaux sociaux en juillet-août 2014 autour du slogan « Casser les frontières
Sykes-Picot ». Au même moment, la création d’une province (wilāya) « de l’Euphrate », à cheval sur la Syrie et
sur l’Irak, fut un autre signe de cette volonté de transgresser les frontières et de combattre des États musulmans
considérés comme illégitimes. Entretemps, le groupe simplifia son nom en « État islamique » dans le dessein de
maximiser son extension spatiale.
De fait, si son centre se trouve à ar-Raqqa, ville du moyen Euphrate syrien, cette organisation ne se réduit pas au
simple espace syro-irakien. La proclamation du califat par al-Baghdadi a posé la prétention à rassembler
l’ensemble de la communauté musulmane mondiale (oumma) et à concurrencer al-Qaïda. L’expansion de l’État
islamique procède selon trois modalités. Des groupes prônant un islam radical, souvent par la violence, du Maroc
aux Philippines en passant par le Yémen et le Caucase, annoncent leur affiliation au calife (baya). Parmi ceux-ci,
certains, profitant de guerres civiles, sont à même de contrôler un territoire et le calife les reconnaît en créant une
nouvelle province d’un État de facto disjoint. Au-delà, des individus adhèrent à lutte menée par l’État islamique,
s’en font les propagandistes, notamment sur Internet, émigrent et partent combattre au Cham, considéré comme
une terre de prédilection pour le jihad, ou parfois passent à l’acte, sur place, comme cela a été le cas en France en
janvier ou en Tunisie en mars.
Cependant, la « haine de l’Occident », surdimensionnée dans notre propre perception, ne doit pas cacher la
violence religieuse de l’organisation État islamique. Les principales victimes sont d’abord les populations locales de
Syrie, d’Irak, d’Égypte, du Yémen, les chrétiens, mais aussi et surtout les musulmans jugés apostats, notamment
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les chiites. La faiblesse de cette organisation est là, dans sa prétention à rassembler, tout en pratiquant une
exclusion sanglante et meurtrière.
LE TRIBUNAL DE COMMERCE DE LYON SCELLE DÉFINITIVEMENT LA FIN DE L'AVENTURE ERAI
Une cinquantaine de salariés sont licenciés au siège, tandis que sur les vingt-sept bureaux à l'étranger, seuls...sept sont sauvés.
La Région va débloquer près d'un million d'euros pour réglerr les dettes d'un certain nombre de bureaux, avant leur fermeture pour
que leurs salariés ne subissent pas les foudres des législations locales.
Clap de fin définitif pour Erai, la structure créée par Alain Mérieux qui constituait depuis des lustres, le bras armé de la Région à
l'international.
Les dégâts sont cuisants. Mardi 30 juin, le tribunal de grande instance de Lyon a annoncé la liquidation de l'association, en
présence, notamment de Daniel Gouffé et des représentants du personnel, effondrés.
La liquidation entraîne de facto lle licenciement d' une cinquantaine de salariés attachés au siège lyonnais d'Erai, dans le quartier
Confluence.
Le TGI a réussi à sauver ce qui pouvait encore l'être, c'est-à-dire les bureaux censés être économiquement viables.
Les antennes de Chine (Shanghai), du Maroc et des Emirats arabes unis (Dubai) ont pu ainsi être repris par la société lyonnaise
Salveo.
Elles s'ajoutent à cette déjà sauvées début juin: les antennes d’Allemagne, du Vietnam, de Russie et de Turquie, soit seulement
sept antennes sauvées sur les vingt-sept que Daniel Gouffé, le président d'Erai avait disséminé à travers la planète.
Les antennes qui sont déjà de facto fermées doivent l'être dans des conditions économiques acceptables selon les critères
juridiques locaux. C'est la raison pour laquelle le Conseil régional a décidé de débloquer 0,9 million d’euros pour éponger une
partie des frais et arriérés existant sur un certain nombre de ces filiales, avant leur fermeture définitive.
Reste un énorme point d'interrogation qui plane sur cette liquidation : que vont devenir les 350 entreprises rhônalpines clientes des
antennes dans le monde.
« Quid des contrats en cours, des acomptes, des projets lancés, des démarches entreprises, des collaborateurs sur place ? »,
s'interroge notre confrère de la « Lettre internationale » (Classe Export) ?
Outre le drame vécu par les salariés au chômage, cette disparition d'Erai est donc en passe de provoquer d'importants dégâts
collatéraux.
Publiée le 02 juil. 2015 par LARGERON Dominique.
BON SIGNE : L'EMPLOI INTÉRIMAIRE RETROUVE DES COULEURS EN RHÔNE-ALPES
L'emploi intérimaire retrouve des couleurs en Rhône-Alpes.
En mai 2015, comparé à mai 2014, les effectifs intérimaires ont augmenté de 2,8 %.
Tel est l'un des points ressortant du dernier baromètre Prism'emploi, qui révèle également une tendance à la
hausse au niveau national sur cette même période : +6 %.
La situation est contrastée selon les départements, l'Ardèche apparaît comme le département connaissant la plus
forte hausse d'effectifs intérimaires : +14 % en mai.
Ce département est suivi par la Savoie (+11 %), l'Isère (+4,5 %), l'Ain (+4,1 %), La Loire (+3,1 %), le Rhône
(+1,2 %), la Drôme (+0,3 %).
En revanche, la Haute-Savoie voie ses effectifs intérimaires reculer de 4,1 %.
A noter que toutes les qualifications sont en hausse selon le baromètre, l'emploi intérimaire régional progressant
en mai de 9,4 % chez les employés, de 4,5 % chez les ouvriers non qualifiés ou de 4,3 % chez les cadres et
professions intermédiaires.
Une diminution est cependant constatée chez les ouvriers qualifiés (-2 %).
Ce sont d'abord les transports qui tirent les emplois intérimaires (+16,9%) ; suivis du commerce (+13,9 %).
En revanche, le BTP est toujours en berne (-4 ,9 %) et l'industrie stagne (- 0.6 %).
Publiée le 06 juil. 2015 par LARGERON Dominique.
Travail : le numérique met-il fin au salariat ?
Gerard CLEMENT
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LA TRIBUNE Ivan Best | 05/07/2015,
Jusqu'où la révolution numérique met-elle fin au travail tel qu'on le connaissait? Économistes et patrons en ont débattu ce weekend à Aix en Provence
Et si le travail était la solution ? Tel était cette année le thème choisi par le Cercle des économistes pour ses rencontres d'Aix, ce
week-end. A entendre les économistes chargés d'en débattre, l'idée s'impose finalement que le travail est plutôt le problème. Louis
Gallois, ex commissaire à l'investissement, évoque un double choc sur le travail, la mondialisation et la révolution numérique. Mais
c'est cette dernière qui a dominé les débats.
Destructions mais aussi créations d'emplois?
Quelles seront les conséquences de cette révolution ? L'approche optimiste s'appuie sur les expériences passées. Les premières
révolutions industrielles ont évidemment détruit beaucoup d'emplois, provoquant l'inquiétude et la révolte de certaines catégories
de travailleurs, mais d'autres « jobs » sont toujours apparus par ailleurs, en nombre plus grand. Sommes nous dans cette
configuration
?
Pour Andrew McAfee, du MIT, bien sûr, il y a de bonnes raisons de considérer que la destruction d'emplois dans certaines activités
sera accompagnée de créations dans d'autres. C'est la théorie du « déversement », que l'économiste Ricardo avait émise dès le
début de XIXème siècle. « Voilà 200 ans que les gens s'inquiètent de la destruction des emplois liée à l'arrivée des machines , cela
fait 200 ans qu'ils finissent toujours par avoir tort, car des emplois en nombre supérieur sont créés par ailleurs», relève Andrew
McAfee. Pas de quoi s'inquiéter, donc ?
Cette fois, c'est différent
Si, répond l'économiste. « Cette fois, c'est différent ». Pourquoi ? S'appuyant sur des données américaines, mais la tendance est
identique partout dans les pays développés, le professeur au MIT souligne les éléments nouveaux qui font douter du
fonctionnement, aujourd'hui, de la théorie du déversement. Le pouvoir d'achat moyen stagne depuis plus de 20 ans, la classe
moyenne est en voie d'érosion, la part des salaires dans la valeur ajoutée diminue... « On n'a jamais vu ça » insiste-t-il. Tous ces
facteurs sont porteurs d'une atonie de la demande, qui pourrait empêcher certains nouveaux secteurs d'émerger.
Surtout, l'accélération technologique est sans fin. « Jusqu'à maintenant, les ordinateurs permettaient de supprimer les tâches
répétitives, mais désormais, ils vont beaucoup plus loin, ils peuvent prendre en charge des travaux de conception, ordinairement
confiés à des salariés très qualifiés. Bientôt, des robots pourront bâtir des maisons ! ». Sans parler des voitures qui se conduiront
toutes seules. Le PDG de Renault-Nissan, le confirme : « dans 10 à 20 ans, la profession de taxi aura totalement disparu, puisque
les voitures seront autonomes, à moins que la règlementation les interdise ». Le travail humain devient donc de moins en moins
nécessaire. Anthony Giddens, économiste à London School of Economics, avance un chiffre: "47% des emplois sur le marché du
travail américain sont menacés de destruction dans les 20 ans à venir".
Des besoins immenses
Les plus optimistes, que l'on trouve du côté des patrons, estiment que l'homme fera toujours appel à ses semblables pour obtenir
des services. Pour Augustin de Romanet, PDG d'Aéroports de Paris, "la crainte de la stagnation séculaire est infondée" car "la
révolution robot-numérique qui arrive ne va pas empêcher la création d'emplois". "Des besoins immenses restent à couvrir" dans
des secteurs comme l'éducation, la santé, le tourisme, insiste-t-il. « Les robots, qui vont s'imposer dans nos économies, ne
pourront jamais rivaliser avec les humains dans trois domaines: la créativité, la dextérité et l'empathie", ajoute-t-il, en résumant
d'une formule: "plus nous aurons de robots, plus nous aurons besoin d'humains".
"Les robots il y en aura. Tant mieux, ils sont utiles. Mais il n'en n'y aura pas partout", relativise le patron de Carrefour Georges
Plassat. "Les nouvelles technologies n'amènent pas nécessairement le progrès social". Mais elles révolutionnent effectivement le
travail. En tous cas,
Des services de moins en moins qualifiés
Mais ces services seront de moins en moins qualifiés. «Nous assistons à une déqualification importante de nombre de professions
de service » souligne Nicolas Colin, ex haut fonctionnaire, co-auteur d'un rapport sur la fiscalité du numérique et co-fondateur de
The Family, une société d'investissement dans le numérique.
Un exemple ? « Jusqu'à récemment, un chauffeur de taxi avait besoin de connaissances, d'un véritable savoir et savoir-faire,
relève Nicolas Colin. « Il avait besoin d'une connaissance précise de sa ville, pour guider ses clients, et pour trouver ceux-ci....
Mais avec le numérique, ce savoir n'est plus d'aucune utilité, aujourd'hui. Désormais, c'est le GPS qui guide le chauffeur, et c'est
l'application qui lui dit où se trouvent les clients... ».
Pour Nicolas Colin, tous les secteurs sont bien sûr impactés, bouleversés par la révolution numérique. Le travail va s'en trouver
transformé bien au delà de ce qui est peut être imaginé : Nicolas Colin anticipe rien moins que la fin du salariat. Celui -ci était
largement lié au mode traditionnel d'organisation de la firme, qui préférait s'attacher des salariés plutôt que d'acheter du travail au
cas par cas, pratique à l'origine de coûts de transaction élevés. Avec le numérique et ces plateformes, ces coûts tombent, et le
recours au contrat de travail n'est plus forcément nécessaire.
L'approche traditionnelle des industriels
Les industriels sont peut-être un peu plus dubitatifs, sur l'ampleur des changements à venir. Leur test approche est plus
traditionnelle.
« On n'échappe pas à la question de la compétitivité » souligne ainsi Louis Gallois. « Il faut s'en sortir par le haut, par l'innovation et
l'investissement ». Et de plaider, sur un mode plus habituel, pour des baisses de charges sociales ciblées sur l'industrie. « La
question n'est pas celle de la baisse de l'ensemble du coût du travail » affirme-t-il, alors que, missionné à l'été 2012 par le
gouvernement, il avait préconisé des baisses de charges qui ont abouti à la création du Crédit Investissement Compétitivité Emploi
(CICE). « Si j'ai demandé cela, ce n'est pas dans l'objectif d'une baisse du coût du travail, mais pour donner un ballon d'oxygène à
l'industrie » dit-il aujourd'hui.
Et de préconiser que le CICE soit reciblé, lorsqu'il sera transformé en allègement direct de cotisations sociales, sur les salaires
entre 1,6 fois et 3,5 fois le smic, plutôt que de profiter d'abord aux très bas salaires. « Quand on cible ainsi l'industrie, on crée in
fine autant voire plus d'emplois de niveau inférieur » affirme-t-il.
Une transition "longue et pénible"?
Optimistes et pessimistes ne peuvent qu'approuver l'économiste française Esther Duflo, professeur au MIT, qui adopte une ligne
médiane: "on va remplacer une certaine partie des travaux", mais en même temps "on va inventer des besoins qui n'existaient pas
avant". La vraie question, est celle de la transition, que tout le monde prévoit difficile."Il y aura une transition", mais cette transition
"peut être longue et extrêmement pénible", observe l'économiste.
"Aujourd'hui, les jeunes sont formés à l'économie d'aujourd'hui ou à l'économie d'hier", mais "si ces jobs disparaissent parce que
les machines peuvent faire mieux, qu'advient-il de leur compétences?", s'interroge-t-elle.
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"Est-ce que ce manque d'adéquation, potentiellement temporaire, va créer des problèmes de transition suffisamment sévères pour
que le problème de nature technologique se transforme en problème de nature politique. C'est la grande question".
Le Cercle des économistes propose douze mesures pour réhabiliter le travail
Le Cercle des économistes | 05/07/2015
Au terme de trois jours de débats aux Rencontres économiques d'Aix-en-Provence sur le thème de l'avenir du
travail, le Cercle des économistes a formulé douze propositions pour sortir du chômage de masse. Dont certaines
iconoclastes, voire politiquement incorrectes.
Et si le travail était la solution ?
À l'heure où, dans le monde, sur 5 milliards de personnes en âge de travailler, à peine 3 milliards disposent d'une
activité salariée ou indépendante, l'absence d'emploi est la première des inégalités, et il peut sembler provocateur
de vanter les mérites du travail. Pourtant, nous sommes convaincus que, s'il met à profit les gains de productivité
et les perspectives qu'ils ouvrent, le travail est essentiel pour surmonter les tensions politiques, identitaires et
sociales. Dans une période de chocs technologiques, de mutations démographiques et environnementales, le
travail devra connaître des évolutions profondes. Mais, loin de vérifier les prédictions d'Habermas sur « la fin
prévisible de la société fondée sur le travail», ou de s'effacer devant la sophistication croissante des machines,
nous affirmons qu'il sera au cœur de l'émergence de nouveaux modèles sociaux. À condition d'être exercé dans
des conditions décentes et durables, le travail réinventé restera facteur de progrès matériel, d'épanouissement
individuel, de construction du lien social.
Avant tout, un état des lieux s'impose. Le marché du travail, déjà à la recherche d'un équilibre, doit absorber
chaque année 40 millions de nouveaux entrants. Un milliard de travailleurs pauvres vivent avec moins de 2 dollars
par jour. De plus, d'ici deux décennies, il faudra satisfaire, malgré la raréfaction des ressources, les besoins
élémentaires d'une population qui atteindra 9 milliards d'individus, et tirer parti des migrations économiques,
politiques ou liées au changement climatique, aujourd'hui trop souvent perçues comme des dangers. Pour créer
les emplois durables de demain, il faut bâtir, en mobilisant totalement l'épargne mondiale, notamment en Afrique,
les infrastructures cruciales du développement. On ne peut imaginer un avenir satisfaisant sans que soient résolus
l'accès à l'eau, à l'énergie, et à la formation.
Transformation de la nature du travail
Les bouleversements conjoints de la robotisation, du big data et de l'économie collaborative transforment la nature
du travail, et déstructurent les formes traditionnelles du salariat, notamment industriel, en polarisant les emplois.
Les mieux insérés, ultra-qualifiés, voient leur productivité s'accroître grâce aux nouvelles technologies, mais les
emplois intermédiaires sont peu à peu remis en cause par l'automatisation, et, à l'autre bout de l'échelle, se créent
massivement des emplois de services faiblement qualifiés. Pourtant, nous considérons que, si ces technologies
bouleversent souvent notre rapport au travail, l'Europe et la France doivent apprendre à les percevoir comme des
développements bienvenus, facteurs de richesses et de nouvelles opportunités d'emplois. À l'attitude craintive qui
prévaut trop souvent, en Europe et en France, nous préférons un optimisme sans naïveté, et un choix commun de
tirer le meilleur parti du progrès technique qui se déploie.
En Europe, le récent rapport des 5 Présidents a souligné, avec raison, que l'emploi doit être mis au cœur de notre
projet politique, pour lutter contre l'exclusion, la lassitude et le scepticisme qui gagnent trop d'Européens. Cela fait
trop longtemps que ne sont évoquées que les dimensions financière et budgétaire de la convergence européenne.
Après les marchés uniques des biens et des capitaux, la prochaine étape est un marché européen du travail unifié,
qui donne sa chance à chacun, notamment aux moins qualifiés. L'ambition doit être de construire une protection
sociale européenne, adaptée à l'ère du numérique et des mobilités. Promouvoir les emplois vacants dans toute
l'Union, et mutualiser partiellement l'assurance-chômage rapprocheraient des citoyens une Europe souvent
technique et éloignée du quotidien. Ceci suppose une transformation des esprits, pour que chaque citoyen soit
pleinement accueilli sur le marché du travail d'un autre pays.
Remette à plat les dispositifs en faveur de l'emploi
D'autre part, le drame de plus de 3,5 millions de chômeurs en France doit nous forcer à remettre à plat, en
urgence, tous les dispositifs qui peuvent contribuer à créer des emplois. Cela n'a aucun sens, par exemple, de
refuser par dogmatisme l'analyse approfondie du contrat de travail, ou de son coût, quelles qu'en soient les
conclusions.
La polarisation technologique peut être limitée, mais elle fera partie de notre futur, et nous nous devons de
valoriser tous les métiers, et toutes les formations qui y mènent.
Mais, pour ne pas sceller les destins, nous devons entrer dans le paradigme de la seconde chance, qui va bien audelà de l'apprentissage ou de la formation professionnelle, et intègre tous les aspects de la vie. Face à
l'obsolescence accélérée des compétences, nul ne doit sortir du collège sans un socle de savoirs fondamentaux,
pour gagner la « course de vitesse » entre formation et technologie.
Car ce n'est qu'en valorisant tous les parcours, que nous aborderons sereinement la question du coût du travail ou
de la flexi-sécurité. Peut-être doit-on également poser, avec prudence et rigueur, la question d'une simplification
de notre code du travail, notamment sur le contrôle juridique du licenciement. Pour favoriser la mobilité,
notamment des jeunes, les leviers sont nombreux, de la portabilité des droits à la levée des blocages du
logement, ou
à
la
simplification
des
seuils
sociaux.
Enfin, l'épanouissement dans le travail passera par des relations plus sereines au sein de l'entreprise. Le temps est
aux entrepreneurs d'eux-mêmes et de leur capital humain. Pour accompagner cette évolution, il faut encourager
l'initiative individuelle par des statuts d'auto-entrepreneurs plus ouverts, mais limités dans le temps, pour
encourager l'accès des jeunes entreprises à une taille critique. Pour améliorer les relations dans l'entreprise, nous
souhaitons une meilleure représentation des salariés et des non-salariés. Mettons à profit les reconfigurations du
temps de travail et l'allongement de la vie active, pour repenser des statuts figés, bouleverser financement et
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contenu de la protection sociale, et ouvrir, en particulier aux seniors et aux jeunes, des passerelles vers
l'entrepreneuriat.
Sur ces sujets, nous proposons 12 mesures. Mais pour faire face à l'urgence, dès aujourd'hui, de la reprise de la
création d'emplois, il faut une politique volontariste et efficace. L'amélioration des conditions d'offre ne
produira ses effets qu'à la condition d'une véritable relance de la demande, menée à l'échelle européenne.
Deux exemples de mesures dont les effets peuvent être très rapides sont les suivantes. D'abord, un vrai contrat
de confiance avec les PME, par le relèvement des seuils sociaux et la réforme des délais de paiement; ensuite,
l'exploitation du potentiel considérable du secteur du bâtiment, en levant les obstacles à la construction, et en
tirant parti des impératifs environnementaux dont la COP21 va rappeler l'importance.
12 mesures pour réhabiliter le travail en Europe et en France
En Europe
Encourager la mobilité du travail intra-européenne
Pour unifier le marché du travail en Europe, il faut lutter vigoureusement contre toutes les initiatives qui tendent à
restreindre la mobilité intra-européenne, comme celles venues récemment du Royaume-Uni. La reconnaissance
mutuelle des qualifications, mais aussi l'aide à la mobilité pour les travailleurs intermédiaires, sont ainsi des
priorités. Afin de pourvoir à des emplois trop souvent vacants dans toute l'Europe, les Agences nationales pour
l'emploi doivent en assurer la publicité, et mieux se coordonner, via l'usage des méthodes nouvelles d'appariement
(big data, matching). Il est souhaitable de mieux intégrer les travailleurs mobiles en Europe, notamment via
l'apprentissage de la langue du pays d'accueil. Toutefois, il faut veiller à l'application de la directive sur les
travailleurs détachés, pour éviter le dumping social, en excluant par exemple les agences d'intérim du bénéfice de
cette directive.
2. Assurer la portabilité des droits dans l'Union, et créer une assurance-chômage commune.
Chacun s'en rend désormais compte, la prochaine étape de la construction européenne doit être une convergence
progressive des règles fiscales et sociales. La portabilité de la protection sociale doit être étendue à tous,
notamment les non-salariés. Dans une Europe qui compte 23 millions de chômeurs, il nous semble important de
débuter un processus d'harmonisation de l'indemnisation du chômage (plafonds de durée et de taux de
remplacement). À terme, le véritable projet doit être la mutualisation partielle du risque économique, via une
assurance-chômage commune en zone euro, qui viendrait compléter les dispositifs nationaux, par exemple en
prenant en charge uniquement le chômage de courte-durée, ou en venant compléter l'indemnisation nationale
dans les périodes de chômage élevé, afin de lisser les chocs asymétriques.
3. Faire de l'apprentissage pour les moins éduqués un grand projet européen
Quand près de 15 millions d'Européens de 15 à 29 ans ne sont ni en emploi, ni en formation ni en études, il nous
faut valoriser toutes les qualifications et tous les métiers, en développant massivement l'apprentissage. Nous
soutenons le projet Erasmus Pro, qui, pour un coût de 5 milliards d'euros, montant dérisoire au vu de l'enjeu,
permettra d'atteindre dans toute l'Europe les taux d'apprentissage élevés obtenus dans certains pays, en ciblant
les élèves les moins formés. L'objectif d'un million de participants d'ici 2020, dans une voie d'excellence
européenne, est atteignable. En associant étroitement les entreprises au contenu des programmes, il faciliterait
l'insertion des primo-entrants. Il nécessite de favoriser l'acquisition des compétences non cognitives, par la
scolarisation maternelle précoce des moins favorisés, et d'imaginer pour les adolescents des dispositifs de
préapprentissage.
4. Construire le marché unique du numérique, pour une Europe technologique pionnière
Dans les bouleversements technologiques récents, l'Europe est trop longtemps restée à l'arrière-garde. Nous
n'avons pas encore su construire un véritable marché unique du numérique, et faire émerger un écosystème
européen de l'innovation, par exemple via des échanges de start-ups entre incubateurs des villes européennes.
Pour mieux tirer parti des économies d'échelle et de réseau à l'échelle du continent, il faut militer pour une
harmonisation urgente des règles sur la protection des données personnelles. Plus généralement, nous souhaitons
un processus de convergence des conditions d'exercice des entreprises du numérique. Les activités de réseaux
sont régulées à une échelle nationale, de moins en moins pertinente, qui contribue à la fragmentation extrême du
marché, et empêche la naissance de géants européens capables de rivaliser avec les GAFA. Une autorité
européenne de régulation des télécoms nous semble ainsi un objectif à atteindre.
5. Coordonner les politiques migratoires en Europe
La situation tragique des personnes migrantes qui traversent la Méditerranée requiert une approche humanitaire
commune en Europe. Toutefois, les flux migratoires sont dans leur grande majorité économiques. La France, en
particulier, a une des politiques d'immigration les plus restrictives d'Europe. Nous ne devons pas considérer
l'immigration comme un coût, et il faut se rappeler que les flux demeurent faibles relativement à notre dynamique
démographique. Les Etats-membres doivent se doter d'une politique migratoire cohérente et coordonnée pour
attirer les plus qualifiés, par exemple via l'instauration de titres de séjour, assortis de visas Schengen, pour les
étrangers créateurs d'entreprise, ou la pérennisation des parcours des étudiants. Pour les travailleurs moins
qualifiés, tout en rendant moins arbitraires les conditions d'accueil, l'essentiel est d'abord de faciliter leur
intégration, en œuvrant notamment sur le logement.
En France
6. Concentrer les allègements de charges sur les bas salaires pour relancer l'emploi peu qualifié
Si l'on ne crée pas massivement des emplois, d'ici 2020, plus de 2 millions de personnes peu diplômées ne
trouveront pas de travail. Il faut pour cela réduire le coût du travail des bas salaires, avec une efficacité maximale
en termes d'emploi. Nous proposons de reprofiler les allègements de charge du Pacte de Responsabilité, qui
couvrent des revenus relativement élevés (jusqu'à 3.5 SMIC) et sont souvent captés par des augmentations de
salaires. L'objectif est une suppression des cotisations patronales restantes au niveau du SMIC (chômage et
retraite), de façon dégressive jusqu'à 1.6 SMIC, pour un coût d'environ 6 à 7 milliards d'euros, qui ne peut être
entièrement financé par la seule réallocation du Pacte. L'évaluation du CICE, encore en cours, devra donc estimer
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s'il est envisageable de mieux le cibler, lors de sa transformation en baisse de charges. S'agissant des plus
qualifiés, les allègements de charges ne sont pas l'instrument approprié. Il est nécessaire de revoir le mode de
détermination des salaires, en favorisant des accords d'entreprise qui tiennent compte de façon fine de
l'environnement économique, notamment la faiblesse de l'inflation et des gains de productivité.
7. Garantir pouvoir d'achat et incitations à l'emploi par un revenu-socle repensé
Pour garantir une incitation claire au retour à l'emploi, la future « prime d'activité » (RSA-activité et PPE) est un
pas dans la bonne direction, mais encore insuffisant. Nous affirmons qu'il faut remettre à plat les mécanismes de
soutien au pouvoir d'achat des bas revenus, en fusionnant les Aides Personnelles au Logement (18 milliards
d'euros), le RSA-socle et la prime d'activité, pour créer un filet de sécurité conservé en majeure partie en cas de
retour à l'emploi, et qui nous semble un meilleur
instrument de redistribution que le salaire minimum. En contrepartie de ce revenu-socle, sanctuarisé sur le plan
budgétaire, et revalorisé chaque année, le SMIC serait désindexé, jusqu'à ce que le chômage soit redescendu en
dessous d'un seuil acceptable.
8. Créer un contrat de travail progressif et protecteur, pour lutter contre la dualité du marché
Aujourd'hui en France, le débat sur le contrat de travail est tabou. C'est absurde, alors que l'on voit se multiplier,
notamment pour les jeunes, les CDD à répétition. Il faut trouver un meilleur équilibre entre facilité d'insertion sur
le marché du travail, et prévisibilité du contrat, notamment pour accéder au logement et au crédit. La réponse que
nous privilégions est un contrat progressif, aux indemnités de licenciements et aux droits croissants avec
l'ancienneté, pour réduire la dualité du marché du travail. Il faut également cantonner le contrôle juridique du
licenciement économique à la réalité de la réorganisation, sans préjuger de son opportunité. Cette mesure
sécuriserait les ruptures, sans remettre en cause les directives européennes sur les droits des travailleurs, ni la
convention 158 de l'OIT ratifiée par la France, comme par d'autres pays : en Suède, par exemple, le juge ne
contrôle pas l'opportunité du licenciement économique. En contrepartie, les entreprises doivent assumer le coût
social du licenciement, via un bonus-malus de cotisations. Elles financeraient l'assurance-chômage selon leur
impact net sur les comptes sociaux.
9. Libéraliser les marchés de biens et services capables de créer rapidement de l'emploi
Nous pouvons créer massivement des emplois, en ouvrant largement des professions rendues accessibles par le
développement de la technologie. Il faut donc poursuivre la réforme des professions réglementées engagée par la
loi « Croissance et activité ». En parallèle, il est indispensable de simplifier les réglementations de nombreux
marchés. Généraliser le contrat de projet, flexibiliser les horaires d'ouverture, ou faciliter le recours au temps
partiel, mieux adapté, notamment, aux contraintes des seniors, sont des pistes à envisager. En particulier, un plan
massif en faveur de la construction de logements doit favoriser l'insertion des jeunes sur le marché du travail et la
mobilité géographique. Il est urgent de donner à l'Etat ou aux communautés d'agglomération la maîtrise des
permis de construire, baisser les droits de mutation, et réformer le marché locatif.
10. Structurer le marché de la formation professionnelle: un droit pour chacun à une 2e chance
Il faut faire de la formation professionnelle une véritable fabrique de la deuxième chance, en individualisant le
choix de formation et en assurant la portabilité des droits, car nous devons sortir d'une conception administrée,
que symbolisent les contributions obligatoires des entreprises, et leur utilisation par les organismes gestionnaires.
Un dispositif comme le Compte Personnel de Formation, abondé de façon inversement proportionnelle au diplôme
initial, pourrait être utilisé directement et simplement par les bénéficiaires, auprès de prestataires certifiés de
façon indépendante, y compris pour financer le conseil en évolution professionnelle. Les dépenses seraient mieux
ciblées sur les moins qualifiés, plus transparentes pour les utilisateurs, et plus efficaces pour les employeurs.
11. Donner un rôle central à l'accord collectif en assurant la représentativité du dialogue social
Chacun s'accorde à reconnaître que la frontière entre norme législative et négociation collective est à revoir. Nous
souhaitons que la loi se limite à fixer les normes fondamentales du droit du travail. Des accords majoritaires
négociés dans l'entreprise (ou au niveau des branches, drastiquement réduites en nombre, pour les TPE et PME)
moduleraient les règles pour les adapter au contexte de l'entreprise, tout en portant sur des sujets plus larges que
la seule négociation salariale. Un tel changement suppose évidemment un rôle accru des représentants du
personnel. C'est la raison pour laquelle, afin d'améliorer la diversité de la représentation, chaque employé, sans
condition d'appartenance à un syndicat, pourrait se présenter aux élections professionnelles. Il est aussi
nécessaire de donner aux organisations syndicales des incitations, y compris financières, à défendre les intérêts
des actifs les moins employables que sont les jeunes et les moins qualifiés.
12. Construire la protection sociale des nouvelles formes d'emploi à l'ère du numérique
Les nouvelles technologies et l'économie collaborative impliquent des carrières plus fragmentées, auxquelles il est
nécessaire de s'adapter. Susciter l'initiative entrepreneuriale, notamment chez les étudiants et seniors (en
favorisant le cumul avec les études ou la retraite), passe par la simplification administrative. Nous souhaitons
doubler le seuil de chiffre d'affaires de l'auto-entrepreneur, mais, en même temps, pour éviter le salariat
dissimulé, limiter la durée du statut pour les auto-entrepreneurs ne travaillant que pour un seul commanditaire.
Notre contrat social doit évoluer, pour s'adapter à la croissance prévisible du statut d'indépendant au détriment du
salariat traditionnel. Il faut refonder un régime de sécurité sociale des indépendants, finançant de façon distincte
une sécurité sociale de base, et obéissant à des règles de recouvrement strictes.
Contrat de travail : remplacement en cascade et CDD sans terme précis
JUIL072015 Thème: %1 Ressources Sources FO
Parmi les motifs de recours au CDD figure le remplacement d’un salarié absent (art. L 1242-2 du code du travail).
La pratique du remplacement en cascade est depuis longtemps admise (par ex. Cass. soc., 25 mars 1997, n° 94-40515).
Le remplacement en cascade consiste à demander à un salarié permanent de l’entreprise (salarié B) d’occuper provisoirement le
poste du salarié absent (salarié A) et à affecter le salarié sous CDD (salarié C) au poste laissé vacant (poste occupé par le salarié
B).
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Un CDD qui a pour objet un remplacement en cascade peut être conclu avec un terme précis (en fixant une date de fin de contrat)
ou alors sans terme précis (art. L 1242-7 du code du travail).
Un CDD à terme imprécis ne fixe pas, comme son nom l’indique, de date précise pour son échéance. Il doit comprendre
uniquement une durée minimale librement fixée par les parties (art. L 1242-7 du code du travail) durant laquelle le contrat ne
pourra pas être rompu sauf à justifier d’un cas de rupture anticipée (art. L 1243-1 et L 1243-2 du code du travail).
Le CDD à terme imprécis prend fin au retour du salarié absent ou à la réalisation de l’objet pour lequel il a été conclu.
Mais quelle est la date de fin d’un CDD à terme imprécis conclu dans le cadre d’un remplacement en cascade ?
L’employeur peut-il rompre le CDD lorsque le salarié B est contraint de retourner sur son poste d’origine et ce alors que le
salarié A est toujours absent ?
C’est à cette épineuse question que la Cour de cassation a répondu dans un arrêt en date du 24 juin 2015 (n° 14-12610).
Dans cette affaire, un salarié embauché en qualité de cuisinier (salarié A) était absent pour maladie.
Un collègue du salarié absent, agent de service intérieur (salarié B), l'a remplacé à son poste. Celui-ci a à son tour été remplacé
par un salarié embauché en CDD (salarié C).
Le salarié permanent, affecté sur le poste du salarié en arrêt de travail pour maladie (salarié B), a été déclaré inapte au poste de
cuisinier et a réintégré son poste d’origine.
L’employeur a rompu le CDD (du salarié C), estimant qu’il était arrivé à terme.
Le salarié embauché en CDD a saisi le juge afin d’obtenir des dommages et intérêts pour rupture anticipée du contrat.
Cette demande a été rejetée par la Cour d’appel. Selon elle, l’événement constitutif du terme du CDD sans terme précis était le
retour du salarié permanent (salarié B) temporairement affecté au poste du salarié absent (salarié A).
La Cour de cassation a censuré cette analyse dans les termes suivants : « qu’en statuant ainsi, alors qu’elle [la Cour d’appel]
constatait que le contrat à durée déterminée ne comportait pas de terme précis, de sorte qu’il ne pouvait prendre fin qu’au retour du
salarié dont l’absence avait constitué le motif de recours à un tel contrat, peu important le remplacement par glissement effectué
par l’employeur ».
Ainsi, le terme du CDD correspond au retour du salarié absent pour arrêt de travail (salarié A). L’employeur a donc, en l’espèce,
rompu le CDD de manière anticipée.
Le salarié dont le CDD est rompu de manière anticipée a droit à des dommages et intérêts. Pour les CDD à terme précis, le salarié
aura droit au minimum au paiement des salaires jusqu’au terme initialement fixé dans le contrat.
Mais comment fixer ce montant en présence d’un CDD à terme imprécis ?
L’indemnisation du salarié dépendra de la durée prévisible du contrat (Cass. soc., 13 décembre 2006, n° 05-41232).
Le gouvernement veut précariser davantage la fonction publique hospitalière
JUIL072015 Thèmes: Vie économique, Santé & conditions de travail, Emplois & compétences Ressources Sources
Blog FO Santé
C’est à peine croyable. En signant un protocole national d’accord pour titulariser les contractuels de la fonction
publique, FO pensait amorcer la pompe du bon sens pour que le statut des fonctionnaires soit respecté, c'est-àdire que tous les emplois permanents soient pourvus par des titulaires.
Trahison ? Mensonge ? Inconséquence ?
Cette semaine, le ministère de la Santé propose aux syndicats du personnel hospitalier de créer un statut de
contractuel permanent par décret.
Les 200 000 contractuels de l’hôpital vont ainsi perdre toute espérance d’être un jour titularisés et donc de pouvoir
travailler sereinement dans un emploi permanent, stable et non soumis aux aléas financiers d’un hôpital.
Quand nous constatons que sur ces 200 000 contractuels, 119 958 sont des agents de catégorie C (donc ASHQ,
AS, AP, AMP), qui pourraient être stagiairisés sans aucune difficulté réglementaire, il faudrait pour cela avoir une
véritable volonté politique de rompre avec la précarité accrue que nous observons aujourd’hui dans nos
établissements.
Aujourd’hui, la fonction publique hospitalière est hors-la-loi et plutôt que d’encourager le respect de la loi, le
gouvernement préfère changer celle-ci.
On nous répond aujourd’hui qu’il faut ce texte pour sécuriser le parcours professionnel des agents non titulaires.
Pour nous, la meilleure sécurisation qu’on peut leur proposer s’appelle la titularisation.
En refusant cela, le gouvernement choisit d’aggraver encore les conditions de travail du personnel, déjà très
difficiles.
C’est pourquoi les fédérations FO, CGT, SUD et UNSA exigent le retrait de ce texte de l’ordre du jour du conseil
supérieur convoqué ce 8 juillet.
Si tel n’était pas le cas, les fédérations syndicales pourraient en tirer toutes les conséquences sur les suites à
donner à la volonté de dialogue social médiatiquement affiché par le gouvernement.
Après la réforme, la formation n'est plus continue (1ère partie)
JUIL062015 Thèmes: Emplois & compétences, Formation Ressources Sources AFTLV
La différence entre un amateur et un apprenti est parfois ténue. Malheureusement, en matière de réforme de la formation les
pouvoirs publics nous ont offert le pire depuis la décision irréfléchie de détruire le droit à la formation (DIF) en 2013 pour le
remplacer par un impensé compteur formation.
Oubliant la célèbre devise d’Hippocrate (« surtout ne pas nuire »), ils ont joué à la roulette russe la formation d'un vieux pays qui
tentait (progressivement) depuis 2004, de faire entrer le monde du travail dans la société de la connaissance.
Les résultats de la réforme improvisée de la formation de 2014 ne se sont pas fait attendre : en cette mi-2015 la formation est à
terre, précipitant les travailleurs dans la déqualification et les entreprises dans l’attentisme et la déresponsabilisation économique et
sociale.
Pourquoi et comment ces intentions réformatrices (l'enfer est pavé de bonnes intentions) se sont-elles transformées en cet
embrouillamini organisationnel et paritaire nous précipitant dans cette bérézina éducative massive et généralisée ?
1) L'aveuglement idéologique : la formation, selon ces amateurs du travail et du social, aurait été vérolée par des organismes de
formation se servant indûment des 32 milliards d'euros que la collectivité mettait à la disposition des travailleurs. Il fallait donc
privilégier le secteur public de la formation (et tenter de sauver l’AFPA), supposés seuls garants de la qualité et de l’équité en
formation.
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Il s’agissait d’une première manipulation (doublée d’une seconde manipulation sur les prétendus 32 milliards d’euros) et un rapport
publié par la DARES (daté de janvier 2015, resté dans les tiroirs durant 19 mois) expliquait que les cas de formations DIF sectaires
ou farfelues étaient extrêmement minoritaires, ne nécessitant certainement pas de détruire le droit à la formation des salariés
(surtout pour en faire cet indigeste et inutile CPF).
2) L’incapacité et l’impuissance organisationnelles de l’État : quand les partenaires sociaux (pas tous, il est vrai) ont lancé
l’idée d’un compte personnel de formation pour remplacer le DIF, ils ont peut-être cru (naïvement) que l’État avait les capacités
conceptuelles et logistiques de lancer un complexe système d’informations.
Il n’en était rien. La bérézina de ce système d’information étatique était prévisible (on a construit sans même rédiger un cahier des
charges) car inscrite dans la longue liste (litanie) des fiascos informationnels menés par l’État depuis 15 ans et qui ont pour nom :
o Louvois (logiciel de paie des armées qui aura coûté 500 millions avant d’être remplacé en catastrophe l’an dernier) ;
o le dossier médical personnalisé (DMP), encore 210 millions de dépensés selon la Cour des Comptes, pour finalement ne
concerner que 400 000 assurés sociaux ;
o le développement professionnel continu, censé gérer la formation des professionnels de santé et dont l’IGAS se
demandait en 2014 comment il pourra être sauvé tant la situation est devenue impossible à redresser ;
o le RSI : un naufrage selon les déclarations même du Premier Ministre en 2015 ;
o Écomouv qui va coûter aux Français plus d’un milliard d’euros (alors qu’une augmentation de quelques centimes du gasoil
était la solution logique que les technocrates se sont bien gardés d’adopter dans un premier temps ;
o ou encore le CICE qui, au lieu de généraliser la baisse des charges des entreprises, a inauguré une nouvelle et illisible
usine à gaz.
En fait, il serait plus pertinent de se demander quel chantier de qualité l’État a réussi à mener depuis dix ou quinze années et s’il
peut encore se prévaloir de l’intérêt général face à un tel échec couteux et répétés.
L’idée même de la réforme menée par l’État doit sans doute être interrogée.
Mieux vaudrait désormais garder à l’esprit la célèbre maxime d’Hippocrate «primum nil nocere », être utile ou au moins ne pas
nuire.
Crises, Europe et katastroïka
par Claude Emmanuel Triomphe - 06 Juillet 2015
Le OXI des Grecs nous touche. Il en émeut certains, en irrite d'autres mais, quoique nous en pensions,
il va influencer en profondeur la trajectoire de l'Union Européenne. Et ce, plus que le triple non
français, néerlandais et irlandais en leur temps. Car ce non hellène a des implications de toutes
natures : économiques, monétaires, financières, mais aussi voire surtout politiques, géopolitiques ou
institutionnelles. Ukraine, migrations et désormais Grèce : en quelques mois, l'UE en est à son
troisième échec en termes de capacité à faire face à des crises majeures. Son destin est-il désormais
tracé ?
On peut penser ce que l'on veut de Tsipras , de ses provocations et de ses actes. Mais si l'on veut bien faire
abstraction de ses slogans populistes, il a simplement donné à entendre ce que nombre d'économistes de tous
bords s'échinaient à démontrer depuis le début: la dette grecque est insoutenable. Elle ne peut être remboursée
en l'état et le régime d'austérité administré par la Troïka a plus affaibli qu'assaini le pays. Nul ne songe pourtant à
contester l'immense besoin de réformes structurelles et la plupart des Grecs en conviennent aisément. En 1998,
nous discutions avec des collègues hellènes sur un projet de session européenne autour des restructurations
d'entreprises : ils nous disaient que ce sujet n'avait pas de pertinence chez eux et que le seul qui pouvait en avoir
serait celui de la restructuration du pays tout entier... 17 ans après, nous y sommes ! Force est de constater que
les deals noués en la matière par la (Katas)Troïka ont jusque là échoué, avec ou sans Tsipras. Le document mis en
ligne par la Commission Européenne - et dont plusieurs dispositions violent ouvertement les droits sociaux
fondamentaux - montre à quel point nous sommes dans une impasse. Et l'on peut d'ailleurs se demander si de
telles méthodes ont vraiment réussi ailleurs : Irlande, Espagne, Portugal ou Italie. On ne réforme pas un pays, la
Grèce pas plus que la France ou les autres, par décret : beaucoup ici devraient s'en souvenir !
La crise systémique de 2008 représentait une formidable opportunité pour revoir nos modèles économiques ou
sociaux. Il n'en a rien été, ou presque. Le champ de l'orthodoxie néolibérale s'est même renforcé, et ce, largement
du fait d'une social-démocratie qui a cessé de penser le monde, l'économique et le social. A partir du moment où
la crise a été qualifiée de financière, la messe était dite. Il ne fut plus question que de replâtrage. Nous en
percevons aujourd'hui les conséquences. Avec des tentations centrifuges qui n'ont jamais été aussi puissantes.
L'idée européenne a pris beaucoup de plomb dans l'aile : elle s'enferme dans la défensive et ne veut plus
conquérir quoi que ce soit. Et, comme toute idée et toute institution, elle est mortelle. La manière dont nous
répondrons au non grec va donc être déterminante. Au-delà de l'appartenance à l'euro, elle indiquera la capacité ou non - de l'Europe à s'imaginer un avenir, à se donner un projet. Metis était la déesse qui personnifiait la
sagesse et de l'intelligence rusée. Puisse-t-elle revenir inspirer peuples et dirigeants. Puisse-t-elle stimuler nos
intelligences collectives et nos capacités à imaginer des solutions nouvelles. Les crises (encore un mot grec) furent
maintes fois une occasion pour l'Europe de rebondir. Errare humanum est ... Mais perseverare diabolicum !
Logement et sécurisation des mobilités géographiques
par Thomas Sigaud - 06 Juillet 2015
Alors que le taux de chômage ne cesse de battre des records et que la France semble ne pas se remettre de la crise sans
précédent de la fin des années 2000, une succession de rapports officiels appellent à une plus grande mobilité des actifs
pour améliorer le fonctionnement du marché du travail et la compétitivité du pays. La thématique largement reprise dans
le monde politique des « emplois vacants » vient appuyer ce diagnostic : il y aurait en France des centaines de milliers
d'emplois vacants prêts à être pourvus si les salariés acceptaient de se montrer plus mobiles. Thomas Sigaud, chercheur
en sociologie, analyse pour Metis les enjeux de la mobilité géographique des salariés en France.
La mobilité est devenue un mot d'ordre des politiques publiques de l'emploi, et ce mot d'ordre peut séduire : elle bénéficierait aux
salariés, en élargissant leurs opportunités d'emploi et de carrière, aux entreprises qui pourraient optimiser l'allocation de la main
d'œuvre et les recrutements, et aux territoires soucieux de leur attractivité et de leur développement économique. Mais cette
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promotion de la mobilité pose un problème de taille. Elle est essentiellement formulée en des termes uniquement professionnel s et
laisse de côté une dimension essentielle des mobilités : la dimension géographique.
Ramenée à un seul arbitrage professionnel, la promotion de la mobilité se traduit par un diagnostic erroné et stérile : il serait de la
responsabilité des salariés de prendre en main leur propre « employabilité » en acceptant de « bouger pour l'emploi ». La mobilité
géographique est ainsi transformée en une boîte noire sur laquelle il serait impossible d'agir, et ramenée aux « dispositions » ou à
la « culture de la mobilité » des salariés.
Des mobilités sous tension
La mobilité résidentielle est bien plus élevée qu'on veut bien le dire en France. Entre 2011 et 2012, ce sont ainsi 11,9% des 15-59
ans qui ont changé de logement, soit 4,3 millions de mobiles parmi lesquels on compte 1,2 millions d'individus qui ont changé de
département. Ces chiffres placent la France dans le peloton de tête des pays développés, loin derrière les Etats-Unis mais devant
la Grande-Bretagne, l'Allemagne, l'Italie ou encore l'Espagne. Mais les mobilités résidentielles sont sous tension en France.
Soumis à la double peine des fortes tensions sur le marché du logement et de la dégradation de l'emploi, les actifs sont moins
mobiles qu'ils l'étaient au début des années 2000 et les mobilités résidentielles se concentrent de plus en plus autour de mobilités
courtes, au sein du même département.
Dans le détail, on constate aussi que le lien entre mobilité résidentielle et emploi a beaucoup évolué depuis quarante ans. Plus de
8% des individus ayant changé de département en 2012 ont perdu leur emploi concomitamment à cette mobilité, alors qu'ils
n'étaient que 2,3% en 1972. Dans le même temps, ils étaient près de 4% à trouver un emploi à l'occasion de leur mobilité, soi t une
proportion trois fois plus élevée qu'en 1972. Au final, le lien entre mobilité résidentielle et emploi est ambivalent, une mobilité
augmentant autant la probabilité de trouver un emploi que de le perdre.
La mobilité dans l'entreprise : très présente mais mal intégrée aux pratiques
Le discours managérial donne aujourd'hui une place importante à la mobilité des travailleurs. Supposée permettre une allocation
plus souple de la main d'œuvre, le développement et la circulation des compétences ou encore une gestion plus dynamique des
carrières, la mobilité est présentée comme un atout pour les entreprises comme pour les salariés. Mais à étudier les pratiques
concrètes de gestion des ressources humaines, on constate que là aussi la mobilité n'est pensée que dans sa dimension
professionnelle et que la dimension géographique est reléguée au second plan voire, parfois, complètement occultée.
Cette mise à distance de la mobilité géographique ne peut pas être interprétée comme le seul effet d'une « doxa managériale » qui
postulerait le caractère essentiellement mobile des modes de vie des salariés. Elle révèle plutôt la difficulté qu'ont les responsables
RH à gérer les questions d'ordre privé que soulève une mobilité géographique : logement, famille, enfants, emploi du conjoint...
Pourtant contraints par la jurisprudence en matière de mobilité géographique à prendre en compte ces questions, les responsables
RH sont largement réticents à faire sortir leur relation avec les salariés du plan strictement professionnel. Il s'agit là en partie d'une
question de principe, mais aussi de formation et de compétences. Les acteurs RH et les managers sont en grande partie désarmés
face aux questions liées au logement et manquent cruellement d'outils pour les traiter.
Les mobiles et leur mobilité : les épreuves de l' "entrée en territoire"
En effet, une mobilité géographique n'est jamais neutre. Les individus construisent leurs modes de vie en composant avec le jeu de
ressources et de contraintes toujours spécifique qui caractérise chaque territoire : marché du travail, marché du logement, réseau
de transports, offre d'activités culturelles et de loisirs, proximité avec le réseau familial et amical... Toute mobilité géographique,
même sur des distances qui peuvent paraître courtes, bouleverse les équilibres entre ressources et contraintes autour desquels se
constituent les modes de vie. De nombreuses études ont ainsi pu montrer que les membres des classes populaires mobilisent
particulièrement les « ressources de la proximité » qu'offre leur territoire. L'ancrage n'est pas chez eux un simple refus de la
mobilité, mais bien une stratégie cohérente et efficace autour de laquelle ils peuvent construire leur mode de vie.
Ce bouleversement des modes de vie par la mobilité n'est pas nécessairement une mauvaise chose pour les salariés : la mobilité
peut permettre d'accéder à de nouvelles ressources ou de desserrer certaines contraintes. Tout dépend de la façon dont les
mobiles font face à l'épreuve de ce qu'on peut appeler l' « entrée en territoire », c'est-à-dire de la façon dont ils arrivent à confronter
leurs aspirations en termes de modes de vie au jeu de contraintes et de ressources spécifique que présente leur nouveau territoire.
L' « entrée en territoire » est toujours une épreuve. Elle impose aux mobiles de mettre en œuvre un ensemble de compétences
pointues et spécifiques que tous sont loin de maîtriser. Quand il s'agit de chercher un nouveau logement, notamment, les mobiles
font face à de nombreuses difficultés : il leur faut formuler des critères précis de recherche, identifier les villes ou les quartiers dans
lesquels localiser leur recherche, se confronter aux marchés résidentiels locaux, à leurs codes et à leurs spécificités... La mobilité
ne consiste jamais à substituer un territoire à un autre, mais à s'engager dans un processus difficile et coûteux de transposition des
modes de vie d'un territoire à un autre.
Les mobiles qui arrivent à tirer le meilleur d'une mobilité sont ainsi souvent ceux qui disposent d'un « capital de mobilité » très
inégalement réparti dans l'espace social. Au-delà des coûts financiers de la mobilité, il est indispensable d'aider les salariés à faire
face aux risques et aux difficultés que soulève l'épreuve de l' « entrée en territoire », et aucune politique de mobilité ne peut être
efficace si elle ne prend pas en compte cette réalité.
Accompagner les mobilités géographiques des salariés : une particularité française et ses limites
Les années 2000 ont vu se développer des dispositifs d'aide et d'accompagnement des salariés en mobilité. L'apparition et la
diffusion de « chartes de mobilité » est souvent l'occasion de faire entrer les questions de mobilité géographique dans les
entreprises, notamment autour des dispositifs d'aide mis en place par le 1% Logement (rebaptisé « Action Logement » en 2009).
À la fin des années 1990 et au début des années 2000, le 1% Logement a mis en place un service d'accompagnement des
salariés mobiles, ainsi qu'une aide financière à la mobilité. Unique en Europe, ce double dispositif a de nombreux avantages. Parce
qu'il est financé par la contribution obligatoire versée par les entreprises au 1%, il permet de mutualiser les coûts de
l'accompagnement des mobilités et d'en diffuser largement la logique. Utilisé par les « collecteurs » du 1% Logement comme un
moyen de resserrer séduire les entreprises en leur proposant un service répondant directement à leurs besoins, ce dispositif s'est
progressivement diffusé et a permis le développement d'un véritable marché de l'accompagnement des mobilités des salariés en
France. Grâce à l'aide financière mise en place par le 1%, cette activité dite de « relocation » présente la particularité en France de
ne pas se limiter à l'accompagnement de cadres supérieurs arrivant de l'étranger.
L'accompagnement des mobilités géographiques en France rencontre cependant d'importantes limites. En premier lieu, la grande
fragilisation du 1% Logement à la fin des années 2000 a mené à une réforme des dispositifs d'aide à la mobilité qui ont nui à leur
efficacité. En second lieu, l'assimilation de la relocation à une simple activité immobilière par la loi « Duflot » sur le logement risque
de faire disparaître ce métier spécifique. Enfin, il n'est pas rare que les responsables RH se servent de l'existence de cette
prestation pour externaliser le plus possible le traitement des mobilités géographiques et mettre à distance les questions qu'elle
soulève.
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Dans un contexte de chômage de masse persistant et de fortes tensions territorialisées sur le logement, la question des mobilités
géographiques des salariés mérite un traitement à la hauteur des enjeux qu'elle soulève. La mobilité trouble les frontières entre vie
professionnelle et vie privée et pose des questions que les entreprises ne peuvent plus faire mine d'ignorer. Il s'agit désormais
d'intégrer les mobilités géographiques aux réflexions sur la nécessaire sécurisation des trajectoires et des transitions
professionnelles, afin de sortir des injonctions à la mobilité et de ne pas enfermer les salariés dans un faux arbitrage entre
immobilité et emploi. L'intégration encore trop timide de la mobilité géographique à ces questions, notamment dans l'ANI du 11
janvier 2013, doit à ce titre être l'objet de toutes les attentions.
GRÈCE
Surprise! Pour le FMI le seul scénario viable est d’annuler une partie de la dette grecque
CHRISTIAN CHAVAGNEUX
06/07/2015
Le Fonds monétaire international (FMI) a rendu public juste avant le référendum, un document de travail évoquant
plusieurs scénarios pour l’avenir de la dette grecque. Pour les experts de l’institution, le seul qui tienne la route à
moyen terme passe par une annulation partielle des créances détenues par les Etats européens. Pas parce que les
Grecs sont incapables de se réformer comme le sous-entend l’institution. Mais parce que les politiques demandées
sont incompatibles avec un redressement de l’économie.
1er scénario : l’offre actuelle des créanciers. Intenable
Le FMI a fait tourner les modèles de ses économistes pour tenter de voir ce que pourrait donner l’accord que la
Grèce et ses créanciers n’étaient pas loin de signer avant qu’Alexis Tsipras décide d’organiser un référendum.
Entre octobre 2015 et la fin 2018, le besoin de financement de la Grèce s’élèvera à 52 milliards d’euros, estime le
FMI. Le gouvernement peut-il se procurer cet argent ? Telle est la question clé. Les excédents budgétaires
primaires (avant paiement des intérêts de la dette) et les recettes de privatisations attendues apporteront une
partie des ressources mais, pour le FMI, les pays de la zone euro devront mettre 36 milliards au pot d’un nouveau
plan d’aide.
Entre 2015 et la fin 2018, le besoin de financement de la Grèce s’élève à 52 milliards d’euros
Dans le cadre de ce scénario, le moindre dérapage par rapport à l’accord (un excédent primaire qui ne tient pas la
séquence prévue de 1-2-3-3,5 % du PIB sur 2015 – 2018 ou bien qui fait plonger la croissance, comme c’est
probable, sous les 1,5 % en régime de croisière) rend la dette insoutenable ou, comme le dit le FMI, « pointe la
grande vulnérabilité de la dynamique de la dette ». Les pays créanciers de la zone euro ne peuvent pas parier sur
le fait que leur plan ramènerait la Grèce dans une zone de maîtrise de sa dette, redonnant suffisamment confiance
aux investisseurs privés pour que ces derniers se substituent aux créanciers publics et prêtent de l’argent à la
Grèce à un taux raisonnable. Les pays européens vont devoir faire des efforts supplémentaires.
2ème scénario : étaler la dette dans le temps. Trop juste
Premier effort possible, un étalement dans le temps du remboursement des créances détenues par les Européens.
Le FMI demande un doublement de la période de grâce – pendant laquelle on ne rembourse rien – de 10 à 20 ans
et un doublement de la période d’amortissement – pendant laquelle on rembourse sa dette – de 20 à 40 ans.
Le FMI réclame un doublement de la période de grâce et de remboursement
Un tel scénario mettrait les besoins de financement de la Grèce sur un niveau plus raisonnable pour les trente à
quarante prochaines années. Sauf, précise le FMI, que si le surplus budgétaire primaire ne dépasse pas les 2,5 %
du PIB au lieu des 3-3,5 % prévus dans l’accord, la dette grecque redevient illico insoutenable. Or, il y a de
grandes chances que l’austérité nécessaire pour arriver à un surplus primaire aussi élevé casse encore plus la
machine économique grecque, ses recettes fiscales et sa capacité de remboursement.
3ème scénario : annuler une partie de la dette. Le seul viable
Si le plan prévu à la signature entre la Grèce et ses créanciers devait aboutir à une croissance de moyen terme de
1 % en moyenne et à un excédent primaire de 2,5 % du PIB, alors le seul moyen d’assurer des besoins de
financement soutenables pour le pays consiste à annuler une partie de la dette, Le FMI réclame ainsi aux autres
créanciers de faire un effort pendant que lui ne fait riende l’ordre de 53 milliards de dollars, selon le FMI, ce qui
correspond au montant des prêts bilatéraux des pays Européens, de l’ordre de 16 % de la dette grecque. Le FMI
réclame ainsi aux autres créanciers de faire un effort pendant que lui ne fait rien : ses créances ne sont pas
annnulées (ses statuts rendent la chose impossible, et c'est pareil pour la BCE qui ne serait pas concernée) mais
pas rééchelonnées non plus !
Il faut annuler au moins 53 milliards de dette grecque
Et pour le FMI, les trois scénarios ne sont pas alternatifs mais cumulatifs : la dette grecque n’est viable à moyen
terme que si les Européens apportent une nouvelle aide et rééchelonnent leurs créances – les étalent dans le
temps- et en annulent une partie. On est très très loin des propositions européennes actuelles, ce qui n’est pas
très rassurant pour l’avenir de la Grèce.
Et le FMI dans tout ça ?
Selon Reuters, les dirigeants de la zone euro ont tout fait pour éviter que ce document soit publié. Quand on en lit
les conclusions, on comprend pourquoi ! Comme l’explique l’économiste Ashoka Mody, non seulement il réclame
un effort de la part des créanciers européens mais il démontre que ceux-ci ont négocié de mauvaise foi ces dernier
mois en assurant que les plans qu’ils proposaient aux Grecs assuraient leur avenir.
Et le FMI lui-même n’est pas à l’abri de critiques. Même son pire scénario reste bâti sur des hypothèses qui sousestiment les effets délétères des politiques de recherche d’excédents primaires sur la croissance et les recettes
fiscales. De manière générale, les créanciers de la Grèce ont systématiquement sous-évalué les effets négatifs de
leurs recommandations, minimisant la dureté de l’austérité qu’ils veulent imposer au pays.
En 1953 les créanciers de l'Allemagne ont annulé la moitié de sa dette
La simple logique économique réclame de ne pas surajouter des doses d’austérité dans un pays en ruine. Et de
commencer par annuler et rééchelonner la dette grecque – en 1953 la Grèce a accepté d’aider l’Allemagne à se
reconstruire en participant à une conférence qui a annulé la moitié des créances sur l’Allemagne. Et sûrement bien
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plus que les 16 % proposés par le FMI. Une conférence européenne sur la dette, telle que proposée par exemple
par Thomas Piketty, est une voie possible, l’économiste enfonçant le clou en rappelant au passage que
« l’Allemagne est vraiment le meilleur exemple d’un pays qui, au cours de l’histoire, n’a jamais remboursé sa dette
extérieure, ni après la Première, ni après la Seconde Guerre mondiale.» Une histoire que tous les créanciers de la
Grèce ont malheureusement oubliée, ce qui pourrait coûter très cher à l’Europe.
CHRISTIAN CHAVAGNEUX
POUR EN SAVOIR PLUS:
http://www.imf.org/external/pubs/ft/scr/2015/cr15165.pdf
LETTRE OUVERTE de la CES
·
aux chefs d’États et de Gouvernements de l’UE,
·
à Jean-Claude Juncker, Président de la Commission européenne,
·
à Martin Schulz, Président du Parlement européen,
·
à Donald Tusk, Président du Conseil européen,
·
à Xavier Bettel, Président du Conseil de l’Union européenne,
·
à Mario Draghi, Président de la Banque centrale européenne,
·
à Jeroen Dijsselbloem, Président de l’Eurogroupe,
·
à Christine Lagarde, Directrice générale du Fonds monétaire international.
Madame, Monsieur,
Les événements qui se déroulent en Grèce ont une signification historique. Des solutions doivent être trouvées pour garder la
Grèce dans la zone Euro et dans l’Union européenne. Il faut maintenant faire preuve de leadership politique, et oublier l’approche
technocratique.
Le peuple grec a voté contre l’austérité, le chômage et la pauvreté, qui ont rendu la dette grecque insoutenable. Ils n’ont pas voté
contre l’UE ou contre l’Euro.
Nous considérons que ce référendum est un signal clair que les politiques imposées au cours des cinq dernières années sont
insupportables socialement et ont échoué économiquement. Les citoyens ne doivent pas être pénalisés pour leur vote.
Les leaders européens sont devant une responsabilité à laquelle ils ne peuvent échapper; ils doivent trouver un compromis
raisonnable. La solution ne peut être uniquement technique ou laissée à la BCE; elle doit être politique.
Nous sommes convaincus que les leaders européens doivent bien réfléchir avant de pousser la Grèce hors de la zone Euro. C’est
maintenant qu’il faut montrer ce que signifie être dans une Union européenne.
Nous vous appelons à reprendre les négociations en bonne foi, avec l’objectif de trouver un accord socialement juste et
économiquement soutenable avec le gouvernement grec.
Je vous prie d’agréer, Madame, Monsieur, l’expression de ma plus haute considération.
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