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Redéfinition de l’ordre social et territorial :
En Colombie, la paix et la stabilité répondent à une dynamique territoriale spécifique. Pour qu’elle
soit améliorée, les accords de paix doivent en tenir compte. Les violences qui ont toujours été liées à la
société colombienne peuvent être liées à la question de la terre : contrôle des territoires riches en
ressources naturelles, expulsion des populations présentes sur ces zones…
Les acteurs armés qui s’affrontent ont des liens complexes avec la population civile. Dans le cas
des FARC, celle-ci était assujettie à leurs stratégies. Mais en plus des guérilleros, c’est tout un ensemble
d’acteurs armés qui ont participé à ce processus : la police, les forces armées, les groupes paramilitaires.
Ils ont organisé la vie sociale du pays car ils pouvaient être amenés à contrôler des Mairies, des écoles
ou des hôpitaux. Certains groupes ont même créé de nouvelles structures inhérentes à la vie sociale.
Très souvent ces forces négociaient avec les populations. Elles les protégeaient des acteurs armés
adverse mais elles les soumettaient aussi à un ordre autoritaire et brutal. Les accords de paix vont les
libérer en partie de cette emprise. En partie seulement car les groupes criminels persistent. Cependant,
ces accords peuvent aussi les déstabiliser car ils vont venir modifier un ordre établi depuis de
nombreuses années. Pour redonner confiance à la population, le gouvernement doit prendre le relais en
développant des politiques sociales dans les zones délaissées. Car si ces populations ne reçoivent pas
d’aide de sa part elles recommenceront à se tourner vers les groupes illégaux.
Ainsi, un processus plus profond doit aller au-delà de l’agenda défini entre les FARC et le
gouvernement. Les négociations ont créé les conditions permettant de trouver des solutions aux
problèmes structurels et sociétaux sous-jacents. Il faut maintenant mobiliser les moyens pour mettre en
place les stratégies qui permettront de les résoudre. Cela va prendre des années mais la dynamique est
désormais lancée.
Sur les questions agraires, les parties prenantes sont nombreuses et variées. C’est le cas par
exemple des populations autochtones et afro-colombiennes. Les négociations devraient leur permettre
de retrouver leurs terres et une économie locale. Cependant, de nombreuses personnes sont sceptiques
quant au respect de ce point des négociations. Pourtant le gouvernement de Santos aurait tout à gagner
en respectant ses engagements car il stabiliserait son pays. Il est primordial pour lui de reformer les
connexions entre chaque régions, même les zones les plus reculer. Et cela pour instaurer une paix
sociale et une relance économique. Reconnaître l’autonomie des peuples autochtones et afro-
colombienne sur leurs territoires et ressources naturelles est un premier grand pas. Parallèlement, toute
une politique agraire avec une approche territoriale, doit être repensée car le pays en est dépourvu en
ce moment. La mise en place de stratégies pour stimuler l’économie paysanne et améliorer les
infrastructures rurales devrait jouer sur la confiance de ces populations. La création d’un fonds afin de
réinstaller les populations déplacées et de favoriser l’accès des paysans à la terre apporte une certaine
légitimité au président Santos.
Cependant, bien que les négociations montrent que cela est possible, des risques de tensions
existent. Elles pourraient conduire vers une nouvelle crise si elles n’étaient pas très rapidement
maitrisées. Les FARC plaident pour une autonomie totale dans la gestion des ressources naturelles de
ces territoires autochtones. Mais ces mêmes territoires sont confrontés aux aspirations de grands
groupes industriels pour l’exploitation des minéraux et des hydrocarbures. Hors, les autochtones ont
toujours placé la protection de leur terre et de sa biodiversité au centre de leur mode de vie. Pour eux,
les dommages irréversibles faits à la nature sont des crimes au même titre que ceux contre les hommes.
Ils pourraient entrer en conflit contre ces industriels et le gouvernement colombien qui négocie ces
projets. Mais ces autochtones pourraient aussi entrer en conflit avec d’autres membres de leur propre