Compte rendu de congrès
43 ème congrès de l’American Society of clinical oncology Chicago
1er au 5 juin 2007
Yohann LORIOT
Urologie
Cancer du rein
B. Escudier a présenté en session plénière les résultats d’une grande étude de
phase III randomisée en double aveugle évaluant l’intérêt de l’association du
bevacizumab (Avastin) et de l’interféron α en 1ère ligne de traitement de patients
atteints d’un adénocarcinome à cellules claires métastatique (Etude AVOREN,
abstract #3). Le bevacizumab était administré à la dose de 10 mg/kg toutes les deux
semaines jusqu’à progression et l’interféron α à la dose de 9 millions UI trois fois par
semaine pendant un an par voie sous-cutanée. Dans cet essai, 649 patients ont été
inclus entre juin 2004 et octobre 2006. L’adjonction de bevacizumab a augmenté
significativement la survie sans progression (10,2 mois contre 5,4 mois hasard
ratio=0,62 p≤0.0001) et le taux de réponse objective (30,6% contre 12,4% p‹0,001).
Au moment de l’analyse, une tendance non significative en terme de survie globale
se dégageait pour l’association bevacizumab et interféron α mais le nombre
d’évènements n’étaient pas encore suffisant et la durée de suivi encore trop courte.
Cette efficacité de l’association a bénéficié au groupe à bon pronostic et à pronostic
intermédiaire. 28% des patients inclus dans le bras interféron et bevacizumab ont
arrêté le traitement pour cause de toxicité contre 12% des patients dans le bras
interféron et placebo. Les effets secondaires constatés étaient cohérents avec ceux
habituellement rencontrés avec le bevacizumab, à savoir épistaxis (27%),
hypertension artérielle (26%) et protéinurie (18%). Une critique peut cependant être
formulée concernant l’évaluation de la réponse qui n’a pas été revue par un panel
d’experts indépendants.
Toujours dans le domaine de l’adénocarcinome à cellules claires, Motzer RJ a
présenté une actualisation des résultats de l’étude présentée en 2006 comparant le
sunitinib à une immunothérapie par interféron alpha au stade avancé (abstract
#5024). Celle-ci a inclus 750 patients. Le taux de réponses est très en faveur du
sunitinib (44% contre 11% ; p‹0,0001) ainsi que la durée jusqu’à progression (11
mois contre 4 mois). Tous les groupes de pronostic en bénéficient y compris le
groupe de mauvais pronostic. Un taux d’hémoglobine inférieur à la normale
(p=0,004), un taux de calcium supérieur à 10mg/ml (p=0,001), un nombre de sites
métastatiques supérieur à 1 (p=0,0064), un état général supérieur à ECOG 0
(p=0,0005) et un délai entre le diagnostic et le traitement supérieur à 1 an (p=0,0002)
constituent des facteurs de mauvais pronostic des patients inclus dans le bras
sunitinib.
Ces thérapies moléculaires ciblées ne semblent pas toutefois bénéficier à tous les
patients atteints de cancer du rein. En effet, les patients avec une tumeur du rein de
type papillaire ne tirent pas bénéfice de ces traitements. En revanche les tumeurs
chromophobes se comportent comme les adénocarcinomes à cellules claires
(abstract #5037)
Cancer de la prostate
Le principal évènement fut celui rapporté par Marc Bolla concernant les résultats de
l’étude EORTC 22961, une étude de phase III évaluant la durée optimale de
l’hormonothérapie adjuvante après irradiation externe locale d’un cancer de la
prostate (abstract #5014). Actuellement le traitement standard repose sur une
radiothérapie associée à 3 ans d’hormonothérapie. Cette étude a comparé des
durées de blocage androgénique complet de 6 mois et de 3 ans. L’objectif de l’étude
était de montrer la non-infériorité en termes de survie globale d’un traitement
hormonal adjuvant de 6 mois par rapport au traitement de 3 ans (hazard ratio ≤1.35).
Les patients étaient éligibles en cas de stade T1c-T2b N1-2 ou pN1-2 ou T2c-4 N0-2
sans métastase avec un PSA inférieur à 150 ng/ml. La durée médiane de suivi était
de 5,2 ans. La survie globale à 5 ans était de 85,3% pour le traitement de 3 ans
contre 80,6% pour le traitement de 6 mois (hazard ratio : 1,43 IC95% :1,04-1,98) ne
démontrant pas la non-infériorité. La survie sans progression qu’elle soit clinique ou
biochimique était également inférieure en cas de traitement de 6 mois. En
conclusion, une durée de 6 mois ne doit pas être recommandée.
Une autre question actuelle, celle du traitement hormonal intermittent ou continu a
trouvé des éléments de réponse. Une étude prospective allemande a comparé un
traitement associant une castration chimique par goséreline avec du bicalutamide
administré selon un schéma intermittent ou continu (abstract #5015). Les patients
éligibles étaient ceux atteints d’un stade T1-4 ; N1-3 ; M0 ou T1-4 ; N1-3 ; M1. Les
patients étaient randomisés une fois le PSA inférieur à 4 ng/ml ou après une baisse
de 90% par rapport à la valeur initiale du PSA après trois mois de blocage
androgénique complet. Le critère principal de l’étude était le temps à la
progression(TTP) clinique et/ou biochimique malgré la suppression androgénique. Le
TTP était supérieur dans le groupe traitement intermittent mais la différence n’était
pas significative (16,6 mois contre 11,5 mois p=0,17). Aucune différence n’a été mise
en évidence en termes de toxicité mais les patients traités par intermittence jugeaient
leur état de santé et leur activité sexuelle plus favorablement que ceux traités en
continu.
L’autre fait marquant dans le domaine du cancer de la prostate a été la présentation
des résultats attendus de l’étude SPARC évaluant l’efficacité du satraplatine en
deuxième ligne de traitement des patients atteints de cancer de la prostate réfractaire
à la castration (abstract #5019). Seuls 51% des 950 patients avaient reçu du
docetaxel en première ligne car l’étude avait commencé avant la mise sur le marché
du docetaxel dans cette indication. Cette étude comparait donc le satraplatine, un
nouvel agent alkylant oral à la dose de 80mg/m2 pendant 5 jours toutes les 5
semaines à un placebo, en association à la prednisone. L’objectif principal était la
survie sans progression définie par une progression radiologique, symptomatique, un
évènement osseux ou le décès. Le satraplatine était associé à une réduction de 31%
du risque de progression (hazard ratio=0,69 ; IC 95% :0,60-0,80 p‹0,00001) et de
33% du risque d’aggravation de la douleur (hazard ratio= 0,67 ; IC 95% : 0,54-0,83
p‹0,00028). Le taux de réponse sur le PSA était de 25% et de 7% pour la réponse
objective. Tous les patients bénéficiaient du satraplatine, y compris ceux pré-traités
par docetaxel. Les résultats en termes de survie globale sont en attente. La toxicité
principale du satraplatine était d’ordre hématologique : 21% de neutropénie grade 3
contre 0,6% dans le groupe placebo. Deux grandes critiques peuvent être
formulées : la première concerne le bras comparateur qui aurait pu éviter la
prednisone seule, la deuxième concerne les critères d’évaluation puisque la
progression du PSA n’était pas un critère retenu pour définir la survie sans
progression.
Des résultats décevants concernant l’atrasentan ont été également présentés
(abstract #5018). On rappelle qu’il s’agit d’un inhibiteur oral du récepteur de
l’endotheline A, qui avait montré une activité intéressante au cours d’étude de phase
II dans le cancer de la prostate réfractaire à la castration avec métastases osseuses.
Il s’agissait cette fois-ci d’une étude de phase III comparant l’atrasentan administré à
la dose de 10 mg/j à un placebo chez 941 patients atteints de CPRC non
métastatique avec progression biologique malgré le traitement hormonal. Les critères
principaux étaient le temps à la progression et la survie sans progression, la
progression étant définie comme la date d’apparition des métastases. Aucune
différence significative en termes de TTP n’a été observée entre les deux groupes.
Cependant, un nombre important de patients ont quitté prématurément l’étude, avant
même la progression, essentiellement aux Etats-Unis en raison de la prise en
compte du PSA. L’analyse des patients traités en dehors des Etats-Unis montre des
résultats en faveur de l’atrasentan.
Une étude intéressante présentée par S. Oudard (abstract #5149) suggére que les
douleurs osseuses chez les patients atteints de cancer de la prostate réfractaire à la
castration ont une valeur pronostique. En effet, chez 145 patients traités soit par
docetaxel, soit par mitoxantrone, la survie globale était supérieure (32 mois) pour
ceux ne déclarant pas de douleur ou une douleur mineure à l’initiation de la
chimiothérapie par rapport à ceux ayant des douleurs plus sévères (16 mois).
Cancer de la vessie
Très peu d’avancées significatives dans le domaine cette année. A signaler toutefois
une étude de phase III étudiant l’intérêt du triplet cisplatine (70 mg/m2 J1),
gemcitabine (1000mg/m2 J1, J8) et paclitaxel (80mg/m2 J1, J8) toutes les trois
semaines, au schéma conventionnel cisplatine (70 mg/m2 J2) associé à la
gemcitabine (1000 mg/m2 J1, J8, J15) tous les 28 jours (abstract #LBA5030). Cette
étude a inclus 627 patients. Le taux de réponse était supérieur dans le groupe triplet
(57% contre 46% p=0,02). Cependant la survie globale n’était pas significativement
différente (15 mois contre 12,8 mois p=0,10). En outre, la tolérance était médiocre
avec plus de neutropénies de grade 3/4, de thrombopénies et d’hémorragies dans le
groupe triplet. L’association cisplatine et gemcitabine reste donc le traitement de
référence. Enfin peu de communications majeures sur le cancer du testicule.
Cancer du poumon
Cancer bronchique à petites cellules (CBPC)
Honneur au cancer du poumon à petites cellules avec la présentation en session
plénière des résultats évaluant l’intérêt d’une irradiation prophylactique cérébrale
(IPC) dans les formes diffuses sans localisation cérébrale (abstract #4). On rappelle
que celle-ci est validée en cas de réponse complète et partielle dans les formes
localisées. Cette étude comparait donc l’IPC à une surveillance chez des patients
atteints de CBPC diffus traités par 4 à 6 cycles de chimiothérapie ayant répondu
même partiellement. L’objectif principal était de démontrer une diminution des
métastases cérébrales symptomatiques. Les patients réalisaient une imagerie
cérébrale avant le début du traitement, celle-ci étant effectuée par la suite
uniquement en cas de symptômes évocateurs. Cette étude a inclus 286 patients.
L’IPC consistait en une irradiation de 20 Gy en 5 fractions ou 30 Gy en 10 fractions.
Les résultats ont montré que l’IPC diminuait significativement l’incidence des
métastases symptomatiques à 1 an (14,6% contre 40,4 %; hasard ratio : 0,27 ; IC :
0,16-0,44 ; p‹0,0001) et augmentait la survie globale à un an (27,1% contre 13,3% ;
hazard ratio : 0,68 ; IC95% : 0,52-0,88 ; p‹0,003). Les effets secondaires constatés
sont ceux habituellement rapportés avec l’IPC, à savoir asthénie, nausées,
vomissements et céphalées.
Peu de nouveautés pour le reste dans le domaine de CBPC. En effet, plusieurs
études ont rapporté des résultats décevants des anti-angiogéniques dans les CBPC
disséminés. Le bevacizumab n’améliore pas les résultats en termes de réponse ou
de survie globale lorsqu’il est associé à une chimiothérapie par etoposide/ sels de
platine ou cisplatine/irinotecan (abstract #7563 et 7564). De même, le vandetanib
(ZD 6474) n’améliore pas la survie sans progression (2,7 mois contre 2,8 mois) et la
survie globale (10,6 mois contre 11,9 mois) par rapport à un placebo après quatre
cycles de chimiothérapie pour un CBPC diffus ou localisé. En revanche, les effets
secondaires, tels que l’hypertension artérielle et la diarrhée, étaient plus fréquents
dans le groupe vandetanib (abstract #7522).
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