Compte rendu de congrès 43 ème congrès de l’American Society of clinical oncology Chicago 1er au 5 juin 2007 Yohann LORIOT Urologie Cancer du rein B. Escudier a présenté en session plénière les résultats d’une grande étude de phase III randomisée en double aveugle évaluant l’intérêt de l’association du bevacizumab (Avastin) et de l’interféron α en 1ère ligne de traitement de patients atteints d’un adénocarcinome à cellules claires métastatique (Etude AVOREN, abstract #3). Le bevacizumab était administré à la dose de 10 mg/kg toutes les deux semaines jusqu’à progression et l’interféron α à la dose de 9 millions UI trois fois par semaine pendant un an par voie sous-cutanée. Dans cet essai, 649 patients ont été inclus entre juin 2004 et octobre 2006. L’adjonction de bevacizumab a augmenté significativement la survie sans progression (10,2 mois contre 5,4 mois hasard ratio=0,62 p≤0.0001) et le taux de réponse objective (30,6% contre 12,4% p‹0,001). Au moment de l’analyse, une tendance non significative en terme de survie globale se dégageait pour l’association bevacizumab et interféron α mais le nombre d’évènements n’étaient pas encore suffisant et la durée de suivi encore trop courte. Cette efficacité de l’association a bénéficié au groupe à bon pronostic et à pronostic intermédiaire. 28% des patients inclus dans le bras interféron et bevacizumab ont arrêté le traitement pour cause de toxicité contre 12% des patients dans le bras interféron et placebo. Les effets secondaires constatés étaient cohérents avec ceux habituellement rencontrés avec le bevacizumab, à savoir épistaxis (27%), hypertension artérielle (26%) et protéinurie (18%). Une critique peut cependant être formulée concernant l’évaluation de la réponse qui n’a pas été revue par un panel d’experts indépendants. Toujours dans le domaine de l’adénocarcinome à cellules claires, Motzer RJ a présenté une actualisation des résultats de l’étude présentée en 2006 comparant le sunitinib à une immunothérapie par interféron alpha au stade avancé (abstract #5024). Celle-ci a inclus 750 patients. Le taux de réponses est très en faveur du sunitinib (44% contre 11% ; p‹0,0001) ainsi que la durée jusqu’à progression (11 mois contre 4 mois). Tous les groupes de pronostic en bénéficient y compris le groupe de mauvais pronostic. Un taux d’hémoglobine inférieur à la normale (p=0,004), un taux de calcium supérieur à 10mg/ml (p=0,001), un nombre de sites métastatiques supérieur à 1 (p=0,0064), un état général supérieur à ECOG 0 (p=0,0005) et un délai entre le diagnostic et le traitement supérieur à 1 an (p=0,0002) constituent des facteurs de mauvais pronostic des patients inclus dans le bras sunitinib. Ces thérapies moléculaires ciblées ne semblent pas toutefois bénéficier à tous les patients atteints de cancer du rein. En effet, les patients avec une tumeur du rein de type papillaire ne tirent pas bénéfice de ces traitements. En revanche les tumeurs chromophobes se comportent comme les adénocarcinomes à cellules claires (abstract #5037) Cancer de la prostate Le principal évènement fut celui rapporté par Marc Bolla concernant les résultats de l’étude EORTC 22961, une étude de phase III évaluant la durée optimale de l’hormonothérapie adjuvante après irradiation externe locale d’un cancer de la prostate (abstract #5014). Actuellement le traitement standard repose sur une radiothérapie associée à 3 ans d’hormonothérapie. Cette étude a comparé des durées de blocage androgénique complet de 6 mois et de 3 ans. L’objectif de l’étude était de montrer la non-infériorité en termes de survie globale d’un traitement hormonal adjuvant de 6 mois par rapport au traitement de 3 ans (hazard ratio ≤1.35). Les patients étaient éligibles en cas de stade T1c-T2b N1-2 ou pN1-2 ou T2c-4 N0-2 sans métastase avec un PSA inférieur à 150 ng/ml. La durée médiane de suivi était de 5,2 ans. La survie globale à 5 ans était de 85,3% pour le traitement de 3 ans contre 80,6% pour le traitement de 6 mois (hazard ratio : 1,43 IC95% :1,04-1,98) ne démontrant pas la non-infériorité. La survie sans progression qu’elle soit clinique ou biochimique était également inférieure en cas de traitement de 6 mois. En conclusion, une durée de 6 mois ne doit pas être recommandée. Une autre question actuelle, celle du traitement hormonal intermittent ou continu a trouvé des éléments de réponse. Une étude prospective allemande a comparé un traitement associant une castration chimique par goséreline avec du bicalutamide administré selon un schéma intermittent ou continu (abstract #5015). Les patients éligibles étaient ceux atteints d’un stade T1-4 ; N1-3 ; M0 ou T1-4 ; N1-3 ; M1. Les patients étaient randomisés une fois le PSA inférieur à 4 ng/ml ou après une baisse de 90% par rapport à la valeur initiale du PSA après trois mois de blocage androgénique complet. Le critère principal de l’étude était le temps à la progression(TTP) clinique et/ou biochimique malgré la suppression androgénique. Le TTP était supérieur dans le groupe traitement intermittent mais la différence n’était pas significative (16,6 mois contre 11,5 mois p=0,17). Aucune différence n’a été mise en évidence en termes de toxicité mais les patients traités par intermittence jugeaient leur état de santé et leur activité sexuelle plus favorablement que ceux traités en continu. L’autre fait marquant dans le domaine du cancer de la prostate a été la présentation des résultats attendus de l’étude SPARC évaluant l’efficacité du satraplatine en deuxième ligne de traitement des patients atteints de cancer de la prostate réfractaire à la castration (abstract #5019). Seuls 51% des 950 patients avaient reçu du docetaxel en première ligne car l’étude avait commencé avant la mise sur le marché du docetaxel dans cette indication. Cette étude comparait donc le satraplatine, un nouvel agent alkylant oral à la dose de 80mg/m 2 pendant 5 jours toutes les 5 semaines à un placebo, en association à la prednisone. L’objectif principal était la survie sans progression définie par une progression radiologique, symptomatique, un évènement osseux ou le décès. Le satraplatine était associé à une réduction de 31% du risque de progression (hazard ratio=0,69 ; IC 95% :0,60-0,80 p‹0,00001) et de 33% du risque d’aggravation de la douleur (hazard ratio= 0,67 ; IC 95% : 0,54-0,83 p‹0,00028). Le taux de réponse sur le PSA était de 25% et de 7% pour la réponse objective. Tous les patients bénéficiaient du satraplatine, y compris ceux pré-traités par docetaxel. Les résultats en termes de survie globale sont en attente. La toxicité principale du satraplatine était d’ordre hématologique : 21% de neutropénie grade 3 contre 0,6% dans le groupe placebo. Deux grandes critiques peuvent être formulées : la première concerne le bras comparateur qui aurait pu éviter la prednisone seule, la deuxième concerne les critères d’évaluation puisque la progression du PSA n’était pas un critère retenu pour définir la survie sans progression. Des résultats décevants concernant l’atrasentan ont été également présentés (abstract #5018). On rappelle qu’il s’agit d’un inhibiteur oral du récepteur de l’endotheline A, qui avait montré une activité intéressante au cours d’étude de phase II dans le cancer de la prostate réfractaire à la castration avec métastases osseuses. Il s’agissait cette fois-ci d’une étude de phase III comparant l’atrasentan administré à la dose de 10 mg/j à un placebo chez 941 patients atteints de CPRC non métastatique avec progression biologique malgré le traitement hormonal. Les critères principaux étaient le temps à la progression et la survie sans progression, la progression étant définie comme la date d’apparition des métastases. Aucune différence significative en termes de TTP n’a été observée entre les deux groupes. Cependant, un nombre important de patients ont quitté prématurément l’étude, avant même la progression, essentiellement aux Etats-Unis en raison de la prise en compte du PSA. L’analyse des patients traités en dehors des Etats-Unis montre des résultats en faveur de l’atrasentan. Une étude intéressante présentée par S. Oudard (abstract #5149) suggére que les douleurs osseuses chez les patients atteints de cancer de la prostate réfractaire à la castration ont une valeur pronostique. En effet, chez 145 patients traités soit par docetaxel, soit par mitoxantrone, la survie globale était supérieure (32 mois) pour ceux ne déclarant pas de douleur ou une douleur mineure à l’initiation de la chimiothérapie par rapport à ceux ayant des douleurs plus sévères (16 mois). Cancer de la vessie Très peu d’avancées significatives dans le domaine cette année. A signaler toutefois une étude de phase III étudiant l’intérêt du triplet cisplatine (70 mg/m2 J1), gemcitabine (1000mg/m2 J1, J8) et paclitaxel (80mg/m2 J1, J8) toutes les trois semaines, au schéma conventionnel cisplatine (70 mg/m2 J2) associé à la gemcitabine (1000 mg/m2 J1, J8, J15) tous les 28 jours (abstract #LBA5030). Cette étude a inclus 627 patients. Le taux de réponse était supérieur dans le groupe triplet (57% contre 46% p=0,02). Cependant la survie globale n’était pas significativement différente (15 mois contre 12,8 mois p=0,10). En outre, la tolérance était médiocre avec plus de neutropénies de grade 3/4, de thrombopénies et d’hémorragies dans le groupe triplet. L’association cisplatine et gemcitabine reste donc le traitement de référence. Enfin peu de communications majeures sur le cancer du testicule. Cancer du poumon Cancer bronchique à petites cellules (CBPC) Honneur au cancer du poumon à petites cellules avec la présentation en session plénière des résultats évaluant l’intérêt d’une irradiation prophylactique cérébrale (IPC) dans les formes diffuses sans localisation cérébrale (abstract #4). On rappelle que celle-ci est validée en cas de réponse complète et partielle dans les formes localisées. Cette étude comparait donc l’IPC à une surveillance chez des patients atteints de CBPC diffus traités par 4 à 6 cycles de chimiothérapie ayant répondu même partiellement. L’objectif principal était de démontrer une diminution des métastases cérébrales symptomatiques. Les patients réalisaient une imagerie cérébrale avant le début du traitement, celle-ci étant effectuée par la suite uniquement en cas de symptômes évocateurs. Cette étude a inclus 286 patients. L’IPC consistait en une irradiation de 20 Gy en 5 fractions ou 30 Gy en 10 fractions. Les résultats ont montré que l’IPC diminuait significativement l’incidence des métastases symptomatiques à 1 an (14,6% contre 40,4 %; hasard ratio : 0,27 ; IC : 0,16-0,44 ; p‹0,0001) et augmentait la survie globale à un an (27,1% contre 13,3% ; hazard ratio : 0,68 ; IC95% : 0,52-0,88 ; p‹0,003). Les effets secondaires constatés sont ceux habituellement rapportés avec l’IPC, à savoir asthénie, nausées, vomissements et céphalées. Peu de nouveautés pour le reste dans le domaine de CBPC. En effet, plusieurs études ont rapporté des résultats décevants des anti-angiogéniques dans les CBPC disséminés. Le bevacizumab n’améliore pas les résultats en termes de réponse ou de survie globale lorsqu’il est associé à une chimiothérapie par etoposide/ sels de platine ou cisplatine/irinotecan (abstract #7563 et 7564). De même, le vandetanib (ZD 6474) n’améliore pas la survie sans progression (2,7 mois contre 2,8 mois) et la survie globale (10,6 mois contre 11,9 mois) par rapport à un placebo après quatre cycles de chimiothérapie pour un CBPC diffus ou localisé. En revanche, les effets secondaires, tels que l’hypertension artérielle et la diarrhée, étaient plus fréquents dans le groupe vandetanib (abstract #7522). Cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC) Plusieurs résultats d’études évaluant la place des thérapies moléculaires ciblées en première ligne de traitement pour un CBNPC localement avancé ou métastatique ont été rapportés. La première présentée par Manegold (abstract #LBA7514) évaluait, au cours d’un essai de phase II, l’efficacité du bevacizumab en association avec la gemcitabine (1250 mg/m2 J1,J8) et le cisplatine (80mg/m2 J1). Les critères de sélection étaient très rigoureux, à savoir absence de métastases cérébrales, absence de tumeur épidermoïde, absence d’antécédent d’hémorragie ou d’évènements thrombo-emboliques. Le bevacizumab était testé à deux doses (7,5 mg/kg ou 15 mg/kg) et administré jusqu’à progression. Un maximum de six cycles de chimiothérapie conventionnelle était réalisé. Cette étude a inclus 1046 patients et le critère principal était l’amélioration de la survie sans progression. Celle-ci était significativement améliorée dans les deux bras bevacizumab (6,5 mois pour bevacizumab 15 mg/kg ; hazard ratio : 0,82 IC95% :0,68-0,98,p=0,03 ; 6,7 mois pour bevacizumab 7,5 mg/kg hazard ratio : 0,75 IC 95% : 0,62-0,90, p=0,002 et 6,1 mois pour le bras placebo). Aucune donnée de survie globale n’a été présentée. Concernant la crainte des effets secondaires, le bevacizumab n’augmentait pas le risque de thromboses contrairement à celui des hémorragies avec, en particulier 1% d’hémorragies fatales contre 0,3% dans le groupe placebo. Les résultats concernant l’efficacité du cetuximab dans cette indication n’apporteront pas cette année de réponse probante. Deux études de phase II randomisées n’ont pas montré de bénéfice en terme de survie sans progression et globale, même s’il semble que le taux de réponse partielle est majoré lorsque le cetuximab est associé à six cycles d’une chimiothérapie par gemcitabine/sels de platine (27,7% contre 18,2%) (abstract #7539 et 7545). Une des grandes questions actuelles consiste en l’intérêt d’une chimiothérapie de consolidation après une chimiothérapie d’induction en phase métastatique. Une étude de phase III a comparé l’utilisation immédiate à l’utilisation retardée (à la progression) du docetaxel (75mg/m2) après induction par carboplatine (AUC 5) / gemcitabine (1000mg/m2 J1 J8) chez 307 patients atteints d’un CBNPC avancé (abstract #LBA 7516). La survie sans progression dans le groupe consolidation immédiate était de 6,5 mois contre 2,8 mois (p‹0,0001) mais aucune différence significative en terme de survie globale n’a été observée (11,9 mois contre 9,1 mois p=0,071) Toujours en première ligne, une étude de phase III a évalué la place du pemetrexed (500 mg/m2) en association au carboplatine (AUC 5) face à une association par gemcitabine (1000 mg/m2 J1 J8)/carboplatine (AUC 5) chez 446 patients atteints de CBNPC au stade IIIB/IV. Le critère principal était la qualité de vie. Aucune différence n’a été mise en évidence entre les deux groupes sur ce critère et en termes de survie (abstract #7517). En seconde ligne, la vinflunine, un nouvel agent vinca-alcaloïde semble posséder une efficacité similaire à celle obtenue par le docétaxel (abstract #7511). En effet, une étude de phase III randomisée a démontré la non-infériorité en termes de survie sans progression de la vinflunine (320mg/m2 toutes les 3 semaines) au docetaxel (75mg/m2). La survie globale était également comparable dans les deux bras (6,7 mois pour la vinflunine contre 7,2 mois pour le docetaxel). La toxicité de la vinflunine est essentiellement hématologique et digestive. L’augmentation des doses de pemetrexed en seconde ligne n’améliore pas la survie globale dans deux études testant deux doses de pemetrexed , 500 mg/m2 et 900 mg/m2 chez 588 patients caucasiens (abstract #LBA7727) et 500 mg/m2 et 1000 mg/m2 chez 226 patients patients japonais (abstract #7590), alors que cette augmentation de dose était bien tolérée. Dans les stades localement avancés, le docétaxel, administré après un traitement associant irradiation et chimiothérapie concomitante, n’améliore pas la survie globale (21 mois contre 24 mois dans le groupe radio-chimiothérapie seule) chez 203 patients, avec, au contraire, un surcroît de toxicité dans le groupe docétaxel (5,5 % de décès) (abstract #7512).Le gefitinib administré après deux cycles d’une chimiothérapie par cisplatine/etoposide concomitante à une irradiation et trois cycles de docetaxel n’améliore pas la survie globale et au contraire semble délétère (survie médiane de 23 mois pour le bras gefitinib contre 35 mois pour le groupe placebo) selon une étude ayant inclus 243 patients (abstract #7513). Une irradiation plus précoce semble en revanche améliorer les résultats en favorisant la compliance à la chimiothérapie concomitante (abstract #7528). Le néovastat (extrait de cartilage de requin) n’améliore pas la survie (abstract #7527) tandis que le cetuximab associée à une radio-chimiothérapie concomitante augmente l’incidence des toxicités sévères, sans que l’on ait, pour l’instant, les données en terme d’efficacité (abstract #7531). Concernant les stades plus précoces, plusieurs essais évaluant l’intérêt d’une chimiothérapie néo-adjuvante ont été présentés. Un premier essai a inclus 519 patients, essentiellement au stade I (abstract #7518). Les chimiothérapies consistaient en une association de cisplatine/vinblastine/mitomycine (MVP), de (cisplatine/ifosfamide/mitomycine (MIC) ou d’associations plus récentes (cisplatin/navelbine, cisplatine/gemcitabine, carboplatine/docetaxel). Le taux de réponse complète était de 4%. Aucun gain de survie sans progression (hazard ratio : 0,98 ; IC 95% :0,77-1,23) ou de survie globale (hazard ratio : 1,04 ; IC95% : 0,811,35) n’a été constaté. La mise à jour de l’essai S9900 (seuls 354 patients sur les 600 prévus ont été inclus en raison d’un arrêt de l’étude lorsque la chimiothérapie adjuvante est devenue un standard) confirme une tendance d’un gain de survie sans progression (hazard ratio :0,79 ; IC 95% : 0,6-1,04 ; p=0,098) et de survie globale (hazard ratio : 0,83 ; IC 95% : 0,61-1,14 ; p=0,24) en faveur de la chimiothérapie sans que cela soit significatif. On rappelle que cette étude évaluait l’intérêt de l’adjonction de trois cycles de chimiothérapie par carboplatine/paclitaxel avant une chirurgie pulmonaire pour un CBNPC opérable (abstract #7520). En phase adjuvante, plusieurs études ont tenté de dégager des facteurs pronostiques dans les stades IB. Une taille supérieure à 4 ou 5 cm est associée à un pronostic moins favorable permettant de sélectionner plus finement les candidats à la chimiothérapie adjuvante (abstract # 7557 et 7558). Enfin, une actualisation de la méta-analyse de l’IGR confirme le bénéfice de la chimiothérapie adjuvante après chirurgie et irradiation avec un bénéfice de 4,7% à 5 ans (abstract #7521). Thérapies ciblées Des confirmations et plusieurs déceptions au menu de cette session. Parmi les confirmations celle du bevacizumab en première ligne métastatique du cancer du rein que nous avons abordé précédemment. Un autre résultat encourageant avec le bevacizumab concerne son efficacité potentielle dans le traitement des glioblastomes. Dans un essai de phase II ayant inclus des patients en rechute d’un glioblastome après traitement par irradiation et temozolomide, le bevacizumab était associé à l’irinotécan : le taux de réponse était de 59% parmi les 68 sujets inclus dont 2 réponses complètes, la médiane de survie sans progression de 23 semaines et la survie globale de 40 semaines pour les gliomes de grade IV. La tolérance était très bonne avec une seule hémorragie cérébrale (abstract #2003). Toujours dans le domaine des tumeurs cérébrales, un inhibiteur des intégrines avβ3 et avβ5, le cilengitide (EMD121974) administré à 500 mg ou 2000 mg IV deux fois par semaine a montré également une efficacité intéressante chez des patients en rechute de glioblastomes après radiochimiothérapie avec une survie globale médiane de 9,9 mois dans le groupe à plus haute dose (abstract #2002). L’un des grands moments de cet ASCO 2007 a été la présentation des résultats du sorafenib dans le carcinome hépatocellulaire (CHC). Le sorafenib est un inhibiteur oral ciblant VEGFR, PDGFR, c-KIT, Raf, Flt-3. Une étude internationale multicentrique de phase III dont les résultats étaient présentés en session plénière a comparé le sorafenib 400 mg deux fois par jour (299 patients) à un placebo (303 patients) chez des patients atteints de CHC avancé, non éligibles pour un traitement local, en bon état général (OMS 0-2) et avec une fonction hépatique correcte (ChildPugh A). Les critères de jugement étaient le temps jusqu’à la progression symptomatique et la survie globale. Le sorafenib a amélioré significativement la survie jusqu’à progression (5,5 mois contre 2,8 mois ; p‹0,0000007) et la survie globale (10,7 mois contre 7,9 mois ; p‹0,0006). Le sorafenib améliore donc la survie de l’ordre de 31% (hazard ratio=0,69 ; IC 95% :0,55-0,88 ; p=0,00058). La tolérance était satisfaisante avec essentiellement des diarrhées et un syndrome palmoplantaire. Le sorafenib devrait donc constituer le traitement de choix dans cette indication (abstract #1). Cependant, tout n’est pas rose pour le sorafenib. Dans une étude de phase III, le sorafenib n’améliore pas l’efficacité d’une chimiothérapie de seconde ligne par carboplatine/taxol chez des patients atteints de mélanome métastatique (abstract #8510) alors que des résultats encourageants ont été notés dans une phase II randomisée en association avec la dacarbazine, cette fois-ci en première ligne de traitement (abstract #8511). Parmi les déceptions, celles du lapatinib associé au taxol et comparé à un placebo chez 293 patientes atteintes de cancer du sein métastatique (abstract #1011). La survie sans progression et la survie globale ne sont pas améliorées alors que le taux de réponse était nettement en faveur du groupe lapatinib (35,1% contre 25,3% ; hazard ratio :1,7 ; IC 95% :1,1-2,4 : p‹0,0008). A noter qu’aucune des patientes n’avait reçu de trastuzumab avant l’essai et qu’après relecture, 19% des patientes du groupe taxol/lapatinib et 15% des patients du groupe taxol/placebo exprimaient HER 2. Dans cette sous-population, la survie jusqu’à progression est meilleure dans le groupe lapatinib (8,1 mois contre 5,8 mois, hazard ratio :0,57 IC95% :0,34-0,93). En revanche, le lapatinib semble avoir une efficacité dans les localisations cérébrales avec un taux de réponse de 6% et surtout un taux de survie sans progression à 6 mois de 22% dans une étude de phase II ayant inclus 241 patientes (abstract #1012). Autre déception, celle du bevacizumab testé face à un placebo en association avec gemcitabine/cisplatine en première ligne de traitement du mésothéliome. L’objectif principal était d’augmenter la survie sans progression de 4 à 7 mois. Cet objectif n’a pas été atteint. La survie sans progression (6 et 6,9 mois) et la survie globale (14,7 et 15,6) sont similaires dans les deux bras (abstract #7526). Plusieurs agents inhibant de nouvelles cibles ont fait l’objet de communications. Les anti-angiogéniques SU014813 : Il s’agit d’un inhibiteur oral ciblant VEGFR, PDGFR, c-KIT et Flt-3. L’administration s’effectue à la dose de 50 mg/jour quatre semaines sur cinq. La toxicité est essentiellement digestive. Parmi les 77 patients inclus, 12 ont obtenu une réponse objective, en particulier dans le cancer du rein, dans le thymome, dans les cancers bronchiques non à petites cellules et dans le cancer colorectal (abstract #3521). AMG 386 : Cet agent bloque les récepteurs des angiopoïetines impliqués dans l’angiogénèse tumorale. L’administration s’effectue par voie intraveineuse toutes les semaines à la dose de 30 mg/kg. Les effets secondaires sont essentiellement des nausées, de la fatigue et un œdème périphérique. Une stabilité tumorale a été observée chez 16 des 31 patients inclus (abstract #3522). Son association à divers régimes de chimiothérapie est bien tolérée (abstract #14033) CP-868,596 : Il s’agit d’une molécule orale bloquant PDGFR. La dose recommandée a été fixée à 100 mg deux fois par jour. Les toxicités étaient essentiellement digestives. Aucune réponse objective n’a été observée (abstract #3524) ABT869 : Cet agent oral cible VEGFR, PDGFR, c-Kit, Flt-3. La dose recommandée est de 0,25 mg/kg/jour. Les effets secondaires fréquents sont l’hypertension artérielle, la protéinurie et l’asthénie. Plusieurs réponses partielles ont été obtenues dans des cancers bronchiques non à petites cellules (abstract #3519) Pazopanib (GW786034) : Il s’agit d’un nouvel inhibiteur de tyrosine kinase bloquant VEGFR, PDGFR, KIT et FLT3, administré par voie orale à 400-800 mg/j et déjà développé dans des études de phase II. Dans les sarcomes réfractaires ou en rechute (800 mg/jour), un taux de stabilisation prolongée est constaté avec un profil de tolérance acceptable (essentiellement de la fatigue, des diarrhées et une hypertension) (abstract 10031). Dans les cancers du rein, le pazopanib permet d’obtenir un taux de réponse de 40% et un taux de stabilisation de 40% (abstract 5031). Enfin, au cours d’une petite phase II ayant inclus 15 patientes atteintes de cancers de l'ovaire, 7 réductions de CA125 ont été observées (abstract 5561). Inhibiteurs de c-met Les inhibiteurs de c-met ont fait l’objet de plusieurs présentations en session orale. On rappelle qu’il s’agit d’un récepteur impliqué dans l’angiogenèse, la migration des cellules tumorales et la résistance à l’apoptose. Son ligand est l’HGF (hepatocytegrowth-factor). La surexpression de c-met est corrélée à une moindre survie dans plusieurs tumeurs expliquant l’intérêt de développer des inhibiteurs spécifiques de cmet. ARQ 197 (abstract #3525) : 36 patients ont été inclus dans cette étude de phase 1. Cet agent est développé selon un schéma d’administration de deux fois par jour, deux semaines sur 3. Les toxicités sont essentiellement digestives (diarrhée : 21%, constipation :23%), hépatiques (élévations des transaminases) et générale (fatigue : 24%). Deux patients ont obtenu une réponse partielle et 19 une stabilité tumorale. XL880 (abstract #3526): Cet agent oral est administré soit pendant 5 jours suivis de 9 jours de repos à une dose adaptée au poids, soit en continu à dose fixe. Les effets secondaires les plus fréquents sont l’hypertension artérielle et la fatigue. Plusieurs réponses partielles et stabilisations tumorales ont été obtenues et ont justifié le développement d’essai de phase II dans le cancer gastrique et ORL. AMG102 : Il s’agit cette fois-ci d’un anticorps monoclonal dirigé contre HGF. Celui-ci est administré toutes les deux semaines par voie intraveineuse. Les effets secondaires les plus fréquents consistent en une fatigue (13%), une constipation (10%), nausée (6%). Parmi les 31 patients inclus, 39% ont obtenu une stabilité tumorale supérieure à 3 mois. Inhibiteurs de IGFR Le ciblage de l’insuline growth factor receptor (IGFR) a également fait l’objet de nombreux abstracts . IGFR est surexprimé dans de nombreux cancers et augmente la prolifération et la survie des cellules tumorales CP-751,871 (abstract #3586) : Il s’agit d’un anticorps monoclonal administré par voie veineuse une fois toutes les trois semaines. Les toxicités sont modérées et consistent surtout en fatigue, diarrhée, nausées et élévations des transaminases. Trois patients sur les 24 inclus ont obtenu une stabilisation supérieure à 6 mois. IMC-A12 (abstract 3505) : L’administration de cet anticorps monoclonal est hebdomadaire. Plusieurs stabilisations ont été observées chez des patients atteints de cancer du sein, de CHC, de vessie, de l’endomètre et de la prostate. AMG 479 (abstract 3002) : Autre anticorps monoclonal administré tous les 15 jours jusqu’à 20 mg/kg sans toxicité majeure. Parmi les 16 patients inclus, une réponse évaluée par les critères RECIST a été obtenue pour une tumeur neuro-endocrine et cinq stabilisations. Inhibiteurs de HDAC De nombreux inhibiteurs des histones désacétylases sont actuellement développés, essentiellement en association avec des agents de chimiothérapie. Plus d’une dizaine d’abstracts ont porté sur le vorinostat (SAHA). Plusieurs études de phase II rapportent des résultats modestes dans le lymphome B à grandes cellules en rechute à la dose orale de 300 mg deux fois par jour, trois jours par semaine (abstract #18511) ou en 2ème ligne de cancer bronchique non à petites cellules (400 mg par jour) (abstract #18044). En revanche, il semble avoir une activité intéressante chez les patients atteints de glioblastome avec 5 patients parmi les 22 inclus obtenant une survie sans progression supérieure à 6 mois (abstract #2004). De nombreuses études de phase I ont été réalisées en association à la doxorubicine (abstract #3502), la capécitabine (abstract #3576), au bortezomib (#3576) avec un profil de tolérance acceptable. Autre inhibiteur de HDAC : le LBH589 qui à la dose de 20mg par jour, trois fois par semaine montre une activité prometteuse dans le lymphome T cutanés (plusieurs réponses complètes), dans le mélanome et le cancer du rein au prix d’effets secondaires digestifs fréquents (abstract #3500). Inhibiteurs des protéines chaperonnes Beaucoup d’abstracts ont également été présentés concernant cette classe thérapeutique. Le premier de ces inhibiteurs de HSP-90, le 17-allylamino-17demethoxygeldanamycin (17-AAG) a été évalué au cours d’une étude de phase II incluant des patients atteints de cancer de la prostate métastatique réfractataire à la castration (abstract #15553). La dose hebdomadaire était de 300 mg/m2 par voie intraveineuse trois semaines sur quatre. Aucune réponse sur le PSA n’a été observée et la survie sans progression était de 1,8 mois. Administré de façon bihebdomadaire à la dose de 175 mg/m2 et associé au paclitaxel (80mg/m2/semaine), le 17-AAG a induit une réponse partielle d’un fibrosarcome et plusieurs stabilisations (cancer de l’œsophage). La toxicité est essentiellement neuromusculaire (abstract #14028). La dose recommandée en association avec l’irinotecan (100mg/m2/semaine) est de 300 mg/m2/semaine sans retentissement pharmacologique. Toutefois cette association ne semble pas prometteuse en termes d’activité (abstract #3533). L’autre molécule est le 17-DMAG. Le profil de toxicité est similaire avec essentiellement des myalgies, arthralgies et effets secondaires digestifs. Avec un schéma d’administration de 20 mg/m2/semaine, une réponse a été observée chez un patient atteint de cancer de la prostate réfractaire à la castration (abstract #3568), des stabilisations prolongées obtenues dans un mésothéliome et un cancer ORL avec une administration de 21mg/m2/semaine (abstract #3566). Enfin, en association avec le trastuzumab chez des patients atteints de cancer du sein en rechute et ayant reçu de nombreuses lignes de traitement préalables, le 17-DMAG a permis d’obtenir plusieurs réponses ou stabilisations prolongées (abstract #1115). Inhibiteurs de PARP Le composé oral KU-0059436 est un inhibiteur oral spécifique des cellules déficientes en BRCA 1 et 2. Dans une phase 1 ayant inclus 44 patients dont 11 avec mutations confirmées de BRCA 1 et 2 et deux autres avec une histoire familiale de mutations BRCA1 et2, quatre ont obtenu une réponse et plusieurs une stabilisation, essentiellement chez les patientes avec mutations. Les toxicités sont essentiellement digestives et neurologiques (abstract #3529). Agents pro-apoptotiques Le YM155 est un agent ciblant la survivine impliquée dans la résistance à de nombreux traitements. Le schéma d’administration n’est pas très aisé (perfusion de 168 heures toutes les trois semaines). Cette étude de phase I a inclus 34 patients. Les effets secondaires sont une fatigue et une microalbuminurie. Neuf patients ont obtenu une stabilisation et une réponse a été observée dans un cancer de la thyroïde et dans un MFH (abstract #3536). Plusieurs anticorps monoclonaux agonistes des TRAIL récepteurs ont été présentés : l’AMG 655 est bien toléré et possède une activité dans le cancer bronchique non à petites cellules (abstract #3534) et l’Apomab également bien toléré (abstract #3582). Toxicités des thérapies moléculaires ciblées Le blocage pharmacologique des différents récepteurs du VEGF induit une raréfaction des capillaires et une dysfonction endothéliale et pourrait expliquer partiellement l’hypertension artérielle induite par le bevacizumab (abstract #3557). Plusieurs études semblent confirmer que certains effets secondaires des inhibiteurs de EGFR constituent des marqueurs indirects d’efficacité. Dans une étude rétrospective sur 1414 sujets atteints de CBNPC traités par erlotinib, 60% des patients avec une éruption cutanée ont obtenu un contrôle de leur maladie contre 39% pour ceux n’ayant pas d’éruption. De même, la survie sans progression (4,2 mois contre 2,4 mois) et la survie globale (7 mois contre 2,4 mois) étaient meilleures chez ceux avec une éruption cutanée sous erlotinib (abstract #7602). Une autre étude, l’étude EVEREST, a évalué l’efficacité et la tolérance de dose croissante du cetuximab, anticorps monoclonal dirigé contre EGFR chez des patients atteints de cancer colorectal métastatique réfractaires à l’irinotécan. Les patients étaient randomisés dans trois bras : cetuximab 250 mg/m2/semaine (bras A) ; cetuximab administré à dose croissante, à savoir augmentation de 50mg/m2 toutes les 2 semaines jusqu’à 500 mg/m2 ou apparition d’une toxicité de grade 2 (bras B) ou dose standard de cetuximab (bras C). Les patients inclus dans le bras B avaient un taux de réponse plus élevé (30 % contre 16%), une meilleure survie sans progression (4,8 mois contre 3,9 mois). Une toxicité cutanée de grade 3/4 était observée chez 9% dans le bras B, 14% dans le bras C et 0% dans le bras A. Davantage de diarrhées ont été observées dans le bras avec des doses croissantes de cetuximab (abstract #4037). Pour lutter contre le rash cutané, une étude randomisée en double aveugle a évalué l’intérêt d’une prévention par des tétracyclines sur le risque d’apparition d’un rash sous inhibiteur oral d’EGFR (abstract LBA9006). Cette étude a inclus 61 patients qui recevaient soit des tétracyclines (500 mg deux fois par jour pendant 4 semaines) soit un placebo. Les patients devaient avoir commencé l’inhibiteur d’EGFR 7 jours auparavant. La fréquence d’apparition du rash n’était pas différente entre les deux groupes. Cependant, la sévérité de l’éruption cutanée était moindre sous tétracyclines avec 17% de toxicité grade 2 dans le groupe tétracyclines contre 55% dans le groupe placebo.