UTILISATION DE LA MORPHINE EN MÉDECINE DE VILLE
Dr. François Boureau (+), Dr Natacha Regensberg-De Andreis
INTRODUCTION
Dans sa pratique quotidienne, le médecin généraliste a besoin de recommandations simples,
faciles à mettre en oeuvre pour gérer les douleurs aiguës. Il est important de se familiariser
avec un schéma thérapeutique, applicable dans de nombreuses situations de la pratique
quotidienne. La morphine reste l´opioïde de référence pour les douleurs nociceptives intenses
malgré la mise à disposition de nombreuses alternatives dans le palier III.
La stratégie de mieux en mieux connue, dite de l´OMS, préconise une approche séquentielle
des antalgiques : on propose, en première intention, un antalgique de palier I, en cas d´échec
on passe à un palier II, puis si besoin on utilise le palier III. Dans le cas d´une douleur aiguë,
pour lequel le soulagement ne doit pas attendre, il faut savoir utiliser une approche stratifiée
qui conduit devant une douleur intense à proposer d´emblée un antalgique de palier III.
Dans de nombreux cas, le traitement antalgique est entrepris avant la confirmation du
diagnostic pendant l'attente des examens paracliniques ou avant l'apparition retardée des effets
antalgiques du traitement étiologique. C´est donc l´intensité d´une douleur dont l´origine
nociceptive est certaine, ou hautement probable, qui conduit le médecin à proposer de la
morphine.
Ceci implique que le médecin soit familier avec l´évaluation de l´intensité d´une douleur.
ÉVALUATION DE LA DOULEUR
L´évaluation de l´intensité de la douleur est une étape essentielle de la prise en charge de la
douleur en médecine générale.
En fonction de l´ancienneté de sa pratique, le médecin a pris, ou non, l´habitude de recourir à
des échelles standardisées.
Le rôle du médecin généraliste est essentiel pour apprendre aux patients à « chiffrer » une
douleur. Expliquer pour la première fois le principe d´une des trois échelles classiquement
utilisées pour évaluer l´intensité d´une douleur peut prendre du temps. En outre, le moment
n´est pas optimum en cas d´accès intense de douleur. Idéalement le rôle du médecin
généraliste est d´expliquer et d´apprendre au patient le principe des échelles lors de
consultations systématiques. Une fois entraîné le patient sera mieux apte à décrire son ressenti
à l´aide d´une échelle d´auto-évaluation.
. Les échelles sont aujourd´hui bien connues
EVA : échelle visuelle analogique
(0 = absence de douleur, 10 = douleur maximale imaginable)
EN: échelle numérique (de 0 à 10)
EVS: échelle verbale simple : douleur faible, modérée, intense, extrêmement intense.
Précisons toutefois que si l´intensité de la douleur oriente le choix du palier de l´antalgique, il
est en revanche très difficile de le déterminer uniquement sur un score de douleur. Les
échelles EN, EVA et EVS, sont dites globales car elles intègrent différentes composantes de
la douleur : sensorielle et émotionnelle. La prise de décision thérapeutique se fait plus sur les
données d´une évaluation globale incluant l´entretien, l´examen, le diagnostic retenu ou
hautement probable. Un score supérieur ou égal à 6 sur une EN ou EVA ou une douleur
intense avec l´EVS doit orienter vers un palier III.
D´autres paramètres vont interférer dans la décision. Il faut,en effet,que l´entretien fasse
apparaître que l´origine « douleur » est clairement nociceptive (ou à la rigueur
neuropathique), sans participation importante de facteurs émotionnels ou cognitifs qui