L`histoire et la théorie économique plaident

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L’histoire et la théorie économique plaident-elles en faveur de la
recherche d’une monnaie forte ?
© Joël Hermet 2010
Une monnaie forte est une monnaie qui s’apprécie au fil du temps sur le marché des changes.
Les principales monnaies fortes furent depuis le XIXème siècle : la livre, le dollar, le DM, le yen,
le franc suisse. Signalons que toutes les monnaies ne peuvent être fortes en même temps.
I) Thèse : l’intérêt d’un taux de change fort
1) Sur le plan économique :
- oblige le pays à s’orienter vers le haut de gamme, la R&D : cas de la RFA
- évite l’inflation importée et l’inflation en général, favorise la confiance : vision monétariste
- diminue la valeur de la dette exprimée en monnaie étrangère : important pour les PED
2) Sur le plan monétaire et financier :
- une monnaie forte aura tendance à être une monnaie clé au sens large, avec les avantages que
cela comporte : monnaie demandée à des fins de thésaurisation, pas d’attaques spéculatives, pas
de souci de baisse sur le marché des changes, secteur financier puissant, prestige
- exemples : livre au XIXème et dollar dans les premières années de Bretton Woods
3) Sur le plan international
- le pays n’est pas tenté par la dévaluation compétitive, donc pas de guerre des monnaies initiée
par le pays et plus de stabilité du SMI et moins de tentations protectionnistes ; exemple a
contrario avec les dévaluations concurrentes des années 1930
- dans un SMI à changes fixes ou encadrés, la force de la monnaie clé est un gage de stabilité de
l’ensemble du système : exemple du DM pendant le SME avec la désinflation exportée vers les
autres pays européens, exemple à contrario aves le dollar fondant dans les années 1960 et
l’éclatement de Bretton Woods
II) Antithèse : un taux de change excessif peut être pénalisant
1) Sur le plan commercial
- avoir une monnaie forte diminue la compétitivité prix des produits domestiques :
exemple du retour de la livre anglaise à l’étalon or dans la décennie 1920 pour des raisons
d’orgueil national et de ses conséquences fâcheuses en termes de production et d’emploi ;
exemple des producteurs américains et européens se plaignant du « dumping monétaire »
pratiqué aujourd’hui par la Chine
- le taux de change fort diminue l’excédent commercial, donc la demande globale et peut avoir
un effet récessif
2) Sur le plan économique
- les entreprises auront tendance à fuir les pays à monnaie forte pour se délocaliser vers les pays à
monnaie plus faible où les matières premières, les équipements, les salaires sont moins chers
- risque de crise de change quand la monnaie devient surévaluée : exemple de la crise mexicaine
en 1994, de la crise asiatique en 1997
3) Sur le plan international
- effets collatéraux de la forte hausse du dollar au début des années 1980 : explosion du prix du
pétrole en dollar et augmentation du poids de la dette pour les PED
- quand la monnaie clé est trop forte, les autres monnaies ne peuvent pas suivre, les obligeant à
des politiques de rigueur monétaire pas forcément adaptées à leur situation interne
III) Synthèse : comment trancher ?
La réponse à cette question revient à s’interroger sur 3 points particuliers.
1) Quel niveau de développement ?
Si les pays développés ont sans doute intérêt à la monnaie forte, les pays en voie de
développement ont plutôt intérêt, au moins dans les premières phases de leur industrialisation, à
avoir une monnaie faible, laquelle constitue un avantage comparatif. Ce qui est cohérent et
expliqué par la théorie des productivités relatives de Balassa-Samuelson.
2) Quel degré d’intervention de l’Etat ?
Une monnaie peut être maintenue artificiellement à un niveau élevé par les autorités, par exemple
via le contrôle des changes ou des taux d’intérêt prohibitifs, ou bien une monnaie peut être
naturellement forte, poussée par les forces du marché. Le second cas a l’avantage d’interdire les
manipulations monétaires à visées politiques. Donc une monnaie forte, oui mais si cela se fait
naturellement.
3) Quel régime de changes ?
Dans le cadre d’un régime de changes flottants, la force de la monnaie découle de la force de
l’économie, et les variations de change se font progressivement, en douceur en quelque sorte.
Dans le cadre des changes fixes, comme l’étalon or, c’est l’économie qui doit s’adapter aux
variations du stock d’or, la monnaie restant forte quoi qu’arrive. Système plus contraignant mais
dans lequel la monnaie forte est plus pérenne.
Dans le cadre des changes dits fixes avec ajustement des parités par les autorités, le risque de
voir un gouvernement affaiblir une monnaie ce qu’un précédent gouvernement avait mis des
années à renforcer.
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